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fiebvre en chaud mal; nous n'aurions pas meilleur compte de nos juges que des ouvriers auxquels on a payé le prix faict avant main: nostre besogne s'acheveroit à leur loysir. Je ne parle pas du vin du clerc, des espingles de madame1 et autres fictions de memoire : tout cela est à deviner; mais pour de longueurs et langueurs insupportables, je prevois qu'elles ne nous sçauroient manquer. Faittes mieux: tirés du purgatoire l'ame du deffunct partisan, et espargnés à sa fille les jeusnes, les coups de discipline et autres austeritez avec lesquelles elle se resoult d'expier la coulpe de son père; effacez de la conscience de cest autre transy le remords qui le ronge jour et nuict et le faict dessecher comme un genet morfondu. Ce sont, en somme, les points les plus importans de ma très humble remonstrance, que je vous ai expliquez avec d'autant plus d'ardiesse que je les ay creu autorisés des vœux de tous les bons François. De vous aller icy deduire par le menu tous les maux qui ont aujourd'huy cours par vostre royaume et vous discourir incontinent des remèdes, je ne me sens pas les reins assez forts pour une declamation de si longue haleine; après, ce seroit oster le mestier à messieurs les deputez des estats-generaux, et vouloir faire,

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faite, et le tiers, qui en auroit eu les profits. La cour prit occasion de ces débats pour demander la surséance. On n'y revint plus, et le droit de paulette fut conservé.

1. Petit droit qui, avec les épices, constituoit les honoraires de la magistrature et de la bazoché. Les mots pot-devin et épingles sont restés comme termes de marché.

Var. vi.

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par une grande temerité et presomption, en un quart d'heure, ce qu'à peine tant de gens entendeus ensemble ont fait en cinq ou six moix. Quand il aura pleu au Ciel et à vous, Sire, de me faire jouir du fruict de ma très humble suplication, les ordonnances qui vous ont esté laissées par les rois vos predecesseurs sont si belles, si sainctes, si pleines d'equité, et celles que vous allez mouler sur les cayers des dits estats si conformes aux desirs des gens de bien, qu'après l'observance d'icelles j'estime que ce seroit impieté de souhaiter une plus certaine et parfaite reformation. Si ne puis-je que pour mon interest particulier je ne vous face encores ceste prière de donner la plus prompte expedition et congé qui se pourra à messieurs les deputez, qui ont depuis le mois d'octobre fait enrichir les chambres garnies de plus d'un tiers. Ils s'endorment sur la besongne; les bonnes gens oublient insensiblement leur pays, et pensent ou voudroient bien, par charité réformative, que les estats durassent encores quarante ou cinquante ans. J'en sçay qui ont enmené leurs femmes ; les autres ont loué maison pour un an; ceux-cy ont achepté des meubles pour garnir ung hostel entier, comme s'ils ne deussent bouger de leur vie de Paris; j'en cognoy qui espèrent de gagner les douaires de trois ou quatre filles avant s'en retourner; ung autre s'attend d'achepter à son fils ung estat de conseiller (ils seront tantost à bon marché) des deniers provenans de la deputation. J'en veis ung samedy dernier qui faisoit trotter derrière luy soixante ou quatrevingts charbonniers avec autant de charges de charbon, qu'il ne sçauroit avoir bruslé de six mois. Pre

nez quelque pitié de leur zèle et les randez à leurs femmes, qui les attendent à cuisses ouvertes, sicut terra sine aqua; à leurs enfans, qui les auront tantost mescogneus; à leur bercail, que le loup a beau infester tandis que le pasteur s'endort à l'ombre. Je vous demande ce surcroy d'obligation pour eux, et promets en tout cas en faire mon propre debte, la peine qu'ils ont prise pour moy, qui fais plus qu'il plaist à Dieu. Une partie du public merite bien ce petit tesmoignage de recognoissance, qui ne sera pas le dernier que j'espère leur rendre. Je reserve le remerciement et la louange deue à leurs sainctes intentions et à la sincère sollicitude avec laquelle ils ont cooperé au salut de la France après que je me seray dechargé envers Vostre Majesté des actions de graces qu'exige de tout vostre peuple ung si grand et si signalé benefice, et que j'auray acquitté les vous que j'ay faits avec tous vos fidelles subjects pour l'accroissement de vostre gloire et continuatiou de toute prosperité en vostre royalle maison. J'ay dict.

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Sommaire traicté du revenu et despence des finances de France, ensemble les pensions de nosseigneurs et dames de la cour, escrit par Nicolas Remond, secretaire d'estat.

M. DC. XXII1.

es finances s'appellent communement le nerf de la guerre et l'ornement de la paix. Autres tiennent que cela se doit plus

tost dire de la valeur et de la justice.

1. Tout ce qui, dans cette pièce, a rapport aux finances en général, et par conséquent la première partie tout entière, n'est, sauf quelques légères différences, que la reproduction d'une autre du même genre ayant ce titre : Traité du revenu et despense de France, de l'année 1607. Cette dernière pièce a été publiée dans la Revue rétrospective, ire série, t. 4, p. 159-186, d'après une copie manuscrite conservée à la Biblothèque impériale, collection du Puy, vol. 89, fol. 243. Le texte en est bien préférable à celui de la pièce que nous donnons. Nous en tirerons parti pour des corrections, que nous ferons toutes avec le plus grand soin, mais sans pourtant prendre la peine de les indiquer l'une après l'autre.Quoique cette pièce porte la date de 1622, c'est le budget de 1620 qui s'y trouve détaillé, comme on le verra plus

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