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femme les tribunaux peuvent néanmoins lui imposer l'obligation de donner caution.

2.o La mort d'une des parties, lorsque la cause est en état, ne peut empêcher la prononciation d'un arrêt, si ce sont ses héritiers qui provoquent le sursis.

3. Un jugement qui énonce dans son texte que les parties ont conclu ou consenti à telle chose ne peut être attaqué par la voie de requête civile, par l'une d'elles qui dénie d'avoir pris cette conclusion ou donné ce consentement, et qui appuye sa dénéga-, tion sur le silence du plumitif des audiences.

4. Un désaveu, pour être valable dans la forme, doit étre nécessairement signifié à l'avoué contre lequel il est dirigé.

5. La demande en désaveu d'un consentement donné est non recevable si ce consentement est une suite du mandat général de l'avoué, bien que, par cas fortuit, il eút nui aux intérêts des cliens.

6. Un arrêt ne peut être retracté pour non valable défense d'un interdit, lorsque sa décision ne lui porte en elle-même aucun préjudice, indépendant des cas fortuits.

Ces questions ont reçu une décision affirmative par

deux arrêts rendus dans la même cause, dont l'un sur requête civile, et qui, en conséquence de l'admission des pourvois, sont maintenant soumis à la section civile de la cour de cassation.

JEAN TONGRIES, mari d'Élisabeth Hannaert, brasseur, domicilié à Louvain, fut interdit par jugement du 6 frimaire an XIII, pour cause de démence et de fureur.

La communauté conjugale était riche en argent comptant, elle avait aussi des sommes considérables à faire rentrer : le tout pouvait valoir 200,000 francs.

Tongries, dans ses premiers accès de folie, avait attenté plusieurs fois à ses jours; il était encore accablé d'une maladie grave, lors de l'interdiction : tout présageait qu'il succomberait bientôt sous le poids de ses infirmités, et que son épouse, qui jouissait d'une santé florissante, lui survivrait.

Par cet événement infiniment probable, la massé du numéraire existant et le produit des créances qui appartenaient à la communauté passaient, en vertu de la coutume de Louvain, à Élisabeth Hannaert.

Aussi, dès le premier acte des proches du mari on s'aperçut que leurs vues se dirigeaient vers l'immobilisation de ces objets.

Le 26 frimaire an XIII, le conseil de famille nomma Charles Vandenbussche, tuteur à l'interdit, et Thomas Huygens, subrogé tuteur.

L'assemblée arrêta en outre « que les capitaux « existans ou à exister seraient appliqués par le tuteur « et subrogé tuteur, concurremment avec l'épouse de « l'interdit, en biens fonds ou en rentes, et que «ces applicats auraient en tout cas, à l'égard des époux, la nature des biens immeubles. »

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Élisabeth

Élisabeth Hannaert s'était offerte à la famille assemblée pour exercer la tutèle de son mari: une tion de quarante années, qu'aucun nuage n'avait altérée, donnait la plus forte garantie de ses soins pour sa personne; quant à l'administration des biens, la communauté rendait ses intérêts inséparables de ceux de l'interdit; d'où elle concluait que le conseil de famille ne pouvait, sans injustice, lui refuser la tutèle que l'article 507 du code autorisait à lui dé

cerner.

Comme on n'avait eu aucun égard à sa demande, le tuteur et le subrogé tuteur ne tardèrent pas à requérir la main-levée des scellés; la dame Tongries s'opposa; les parties furent renvoyées au tribunal civil.

Là, les sieurs Vandenbussche et Huygens représentèrent dans une requête, tendante à faire déclarer l'urgence, que la résistance opposée par la dame Tongries à la levée des scellés ne pouvait être produite que par le dessein de retarder et d'empêcher l'im mobilisation de la masse considérable d'argent comptant qui se trouvait sous les scellés, dans l'espoir sans doute, que, venant à survivre à son époux, dont l'existence est très-précaire, tout cet argent comptant lui appartiendrait, à l'exclusion de la famille de ce dernier.

En attendant que les parties vinssent à l'audience, les mêmes tuteur et subrogé tuteur firent signifier, par exploit, qu'ils entendaient que des-à-présent, tout l'argent comptant, appartenant à la communauté conjugale, fút considéré comme immeuble et acquét réel, et QU'EN CAS DE PRÉDÉCÈS DE TONGRIES 2 Tome 11, N.o 2.

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le partage en fút fait sur ce pied, conformément à l'intention manifestée par le conseil de famille ; protestant contre tout ce qu'Elisabeth Hannaert fe

rait au contraire.

Les conclusions de la dame Tongries, devant le tribunal de Louvain, tendaient : 1. à ce que la tutèle lui fût conférée, et les nominations précédentes déclarées nulles; 2.0 subsidiairement, à être autorisée à convoquer un conseil de famille ou d'amis, composé d'autres personnes que celles de la première assemblée, afin de procéder à la nomination des tuteur et subrogé tuteur dans les formes prescrites; 3. subsidiairement encore, à ce que l'administration de la communauté et l'emploi des deniers qui y existent lui fussent confiés, comme ayant seule le droit de gérer les affaires de la communauté pendant l'interdiction de son mari.

Le tribunal civil de Louvain déclara, par jugement du 11 pluviôse an XIII, la dame Tongries non recevable dans les deux chefs de ses conclusions principales, ainsi que dans le premier chef de ses conclusions subsidiaires, et il déféra à l'épouse de l'interdit l'administration de la communauté.

Appel par les deux parties.

La dame Tongries se crut lésée en ce que la tutèle de son mari ne lui avait point été déférée : les tuteur et subrogé-tuteur se plaignirent de ce qu'avec la tutèle, on ne leur avait point laissé l'administration de la communauté; et en conséquence de leur appel incident, ils ont conclu à ce qu'il plût à la Cour, homologuant la délibération du conseil

'de famille, quant à l'emploi des capitaux présens et futurs, dire, pour droit, que l'administration de la communauté sera accordée au tuteur concurremment avec l'épouse Tongries, pendant la durée de la tutèle.

Le 13 ventôse an XIII, la dame Tongries dit à l'audience que, pour tranquilliser ses adversaires et leur montrer son désintéressement, elle consentait à ce que l'argent comptant et les dettes actives fussent tenus comme conquêts entr'elle et son mari.

Les tuteur et subrogé tuteur acceptèrent cette déclaration, qui entrait dans leurs vues; mais ni le consentement ni l'acceptation ne furent insérés au plumitif.

Les débats furent clos à la même audience; la Cour prorogea la cause au 21, puis au 27 du même mois, pour la prononciation de l'arrêt.

Par exploit du 25, la dame Tongries fit signifier qu'elle ratifiait surabondamment la déclaration faite à l'audience du 13, par son avoué.

Elle demanda aussi la permission à la Cour de faire assigner ses adversaires à l'audience, pour modifier ses conclusions, ce qu'elle obtint; et le 29 ventôse, elle se borna à réclamer l'administration de la communauté, avec offre de fournir caution, en réitérant sa déclaration sur l'immobilisation du numéraire en caisse et des crédits à rentrer.

Vandenbussche et Huygens ne contredirent pas à cette déclaration : ils annoncèrent seulement qu'ils

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