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pondre donc à celles que j'ai pu prévoir, il a fallu · faire quelques additions qui ont mis mou ouvrage en l'état où le voilà. J'attendrai l'approbation du public pour en donner un autre, qui contiendra les principes absolus de ma méthode tels qu'ils doivent être enseignés aux écoliers. J'y traiterai d'une nouvelle manière de chiffrer l'accompagnement de l'orgue et du clavecin, entièrement différente de tout ce qu'a paru jusqu'ici dans ce genre, et telle qu'avec quatre signes seulement je chiffre toutes sortes de basses cotinues de manière à rendre la modulation et la basse fondamentale toujours parfaitement connues de fatcompagnateur, sans qu'il lui soit possible de sy tromper. Suivant cette méthode, on peut, sans vor la basse figurée, accompagner très - juste par les chiffres seuls, qui, au lieu d'avoir rapport à cette basse figurée, l'ont directement à la fondamentale. Mais ce n'est pas ici le lieu d'en dire davantage sur cet article.

SUR

LA MUSIQUE MODERNE.

Immu at animus ad pristina.

LUCR.

I paraît étonnant que les signes de la musique étant restés aussi long-temps dans l'état d'imperfection où nous les voyons encore aujourd'hui, la difficulté de l'apprendre n'ait pas averti le public que c'était la faute des caractères et non pas celle de l'art, ou que, s'en étant aperçu, on n'ait pas daigné y remédier. Il est vrai qu'on a donné souvent des projets en ce genre; mais, de tous ces projets, qui, sans avoir les avantages de la musique ordinaire, en avaient les inconvéniens, aucun, que je sache, n'a jusqu'ici touché le but, soit qu'une pratique trop superficielle ait fait échouer ceux qui l'ont voulu considérer théoriquement, soit que le génie étroit et borné des musiciens ordinaires les ait empêchés d'embrasser un plan ge néral et raisonné, et de sentir les vrais défauts de Jeur art, de la perfection actuelle duquel ils sont, pour l'ordinaire, très-entêtés.

La musique a eu le sort des arts qui ne se perfectionnent que successivement les inventeurs Musique!

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de ses caractères n'ont songé qu'à l'état où elle se trouvait de leur temps, sans prévoir celui où elle pouvait parvenir dans la suite. Il est arrivé de là que leur système s'est bientôt trouvé défectueur, et d'autant plus défectueux que l'art s'est plus perfectionné: à mesure qu'on avançait, on établissait des règles pour remédier aux inconvéniers présens, et pour multiplier une expression trop bornée, qui ne pouvait suffire aux nouvelles combinaisons dont on la chargeait tous les jours. En un mot, les inventeurs en ce genre, comme le dit M. Sauveur, n'ayant eu en vue que quelques propriétés des sons, et surtout la pratique du chant qui était en usage de leur temps, ils se sont contentés de faire, par rapport à cela, des systèmes de musique que d'autres ont peu à peu changes, à mesure que le goût de la musique changeait. Or, il n'est pas possible qu'un système, fût-il d'ailleurs le meilleur du monde dans son origine, ne charge à la fin d'embarras et de difficultés, par les changemens qu'on y fait et les chevilles qu'ony ajoute; et cela ne saurait jamais faire qu'un tout

fort embrouillé et fort mal assorti.

C'est le cas de la méthode que nous pratiquons aujourd'hui dans la musique, en exceptant c pendant la simplicité du principe, qui ne s'y est

jamais rencontrée : comme le fondement en est absolument mauvais, on ne l'a pas proprement gâté, on n'a fait que le rendre pire par les addi

tions qu'on a été contraint d'y faire.

se

Il n'est pas aisé de savoir précisément en quel état était la musique quand Gui d'Arezze (1) s'avisa de supprimer tous les caractères qu'on y employait, pour leur substituer les notes qui sont en usage aujourd'hui. Ce qu'il y a de vraisemblable, c'est que ces premiers caractères étaient les mêmes avec lesquels les anciens Grecs exprimaient cette musique merveilleuse, de laquelle, quoi qu'on en dise, la nôtre n'approchera jamais quant à ses effets; et ce qu'il y a de sûr, c'est que Gui rendit un fort mauvais service à la musique, et qu'il est fâcheux pour nous qu'il n'ait pas trouvé en son chemin des musiciens aussi indociles que ceux d'aujourd'hui.

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Il n'est pas douteux que les lettres de l'aphabet des Grecs ne fussent en même temps les caractères de leur musique et les chiffres de leur arithmétique de sorte qu'ils n'avaient besoin que d'une seule espèce de signe, en tout au nombre de vingt-quatre, pour exprimer toutes les variations du discours, tous les rapports des nombres, et toutes les combinaisons des sons; en quoi ils étaient bien plus sages ou plus heureux que nous, quisommes contraints de travailler notre imagination sur une multitude de signes inutilement diversifiés.

Mais, pour ne m'arrêter qu'à ce qui regarde

(1) Soit Gui d'Arezze, soit Jean de Mure, le nom de l'auteur ne fait rien au système; et je ne parle du premier que parce qu'il est plus connu.

mon sujet, comment se peut-il qu'on ne s'aper çoive point de cette foule de difficultés que l'usage des notes a introduites dans la musique; ou que, s'en apercevant, on n'ait pas le courage d'en tenter le remède, d'essayer de la ramener à sa première simplicité, et, en un mot, de faire pour st perfection ce que Gui d'Arezze a fait pour la ga ter? car, en vérité, c'est le mot, et je le dis malgré moi.

J'ai voulu chercher les raisons dont cet auteur dut se servir pour faire abolir l'ancien système en faveur du 'sien, et je n'en ai jamais pu trouver d'autres que les deux suivantes : 1. les notes sont plus apparentes que les chiffres; 2. et leur position exprime mieux à la vue la hauteur et l'abaissement des sons. Voilà donc les seuls principes sur lesquels notre Aretin bâtit un nouveau système de musique, anéantit toute celle qui était en usage depuis deux mille ans, et apprit aux hommes à

chanter difficilement.

Pour trouver si Gui raisonnait juste, même en admettant la vérité de ses deux propositions, h

doivent ycux question se réduirait à savoir si les être ménagés aux dépens de l'esprit, et si la perfection d'une méthode consiste à en rendre les st gnes plus sensibles en les rendant plus embarras sans, car c'est précisément le cas de la sience. dispensés d'entrer là-dessus

Mais nous sommes

en discussion, puisque ces deux propositions étant également fausses et ridicules, elles n'ont jam is

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