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crainte, d'amour on d'espérance qu'on y attache, sont dénuées de raison, et doivent être rangées dans la classe des préjugés de l'enfance, ou de l'éducation.

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On voit dans ces cartes, que tous les systêmes qui ont été en vogue, tant parmi les philosophes, que parmi les hérétiques, doivent être, recueillis dans le monde intellectuel, comme dans un ca binet d'histoire naturelle, où on réunit toutes les choses qui font l'agrément du monde physique par leur ensemble et leur variété.

Ainsi, on y voit les emblêmes de la maçonnerie dans toute son étendue, la réunion de toutes les espèces de talismans, tous les systêmes de la nécromancie, tout ce que l'astrologie a mis en vogue, sur l'influence des planètes, sur les génies, les sephirots, en un mot, tout ce que la Cabale a inventé sur les noms de Dieu, des anges, sur le nombre des cieux, sur la valeur des lettres et des nombres. Les systèmes de la physique ancienne les instrumens des arts, les principes des sciences, les symboles religieux; ces choses et beaucoup d'autres soumises à l'intelligence de l'homme et subordonnées à sa volonté, voilà le cercle dans lequel on veut circonscrire ses connoissances. On ne lui parle d'aucunes des vérités révélées, on n'exige de lui aucune des vertus sublimes enseignées par Jesus-Christ. Tout se borne à lui faire connoître le monde et ce qu'il renferme, les choses naturelles et civiles, et leurs usages.

Voilà ce qu'on appelle la théosophie, c'est-àdire la sagesse divine: voilà le but que se propo sent nos théosophes dont le nombre s'est si mul tiplié, et dont les principes sont si faux et si désolans. Si quelquefois ils font usage des termes re çus parmi nous, s'ils admettent nos histoires, nos prières; ils n'y attachent pas les mêmes idées, et ne les adoptent pas dans le sens que nous leur don nons, comme étant celui qui leur convient vérita blement. Par exemple, quand Swedemborg con

vient que l'homme a été créé pour recevoir de Dieu l'amour et la sagesse qui font l'essence divine; il n'avoue pas pour cela, que Dieu donne à l'homme l'amour et la sagesse, ni que l'homme les reçoive réellement de la main bienfaisante du souverain être. Cette manière de donner et de recevoir, n'est autre chose dans la pensée de cet auteur, que l'acte par lequel l'homme croit, qu'il s'approprie les qualités divines, et qu'il s'unit à Dieu par cette appropriation; ainsi ce n'est qu'un acte de l'imagination de l'homme, une opération de son esprit qui n'a aucune réalité au dehors.

Pour se convaincre que c'est le sens que Swedemborg donne à ces paroles, il suffit de faire at tention à ces autres paroles tirées de son livre de l'Amour et de la Sagesse. » Si par malheur, l'homme » vient à croire qu'il tient de lui-même l'amour et la sagesse; il devient mort et semblable à une » bête parlante. Pour sortir de cet état, il faut » que l'homme reconnoisse qu'il tient de Dieu l'a»mour et la sagesse."

Il s'ensuit évidemment de ces paroles, que la vie et la mort spirituelles de l'homme viennent de sa volonté, et qu'il peut quand il est mort, se ressusciter par un simple acte de désir, par un aveu et une simple reconnoissance du tort qu'il a eû; en un mot en changeant de façon de penser. Ainsi tout consiste dans les opérations de l'esprit, c'est là la source du vrai et du bien, et la clef du systême des théosophes.

C'est d'après les mêmes principes, que Swedemborg explique l'histoire de la chute d'Adam. L'arbre de vie du paradis terrestre, n'est autre chose que l'homme vivant. Si on le considère avec son fruit il signifie l'homme vivant par Dieu, c'est-à-dire, par la nature qui fait produire des fruits à tout ce qui végète.

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L'arbre de la science du bien et du mal, représente suivant Swedemborg, l'homme qui croit avoir la vie par lui-même et non par Dieu. La mandu

cation du fruit de l'arbre de vie, signifie, suivant le même auteur, la réception, l'approbation du bon et du vrai, ou de la vie éternelle; la mandu cation du fruit de l'arbre de la science du bien et du mal, signifie la réception, l'appropriation du mal et du faux, ou de la damnation.

Ces explications, qui paroissent ridicules et dont les livres de Swedemborg sont pleins, cachent son systême, et font cependant assez connoître que eet auteur change toutes les idées spirituelles et religieuses, qu'il leur donne un sens analogue à son systême de matérialisme, qu'il spiritualise toute la nature; ensorte qu'il est très-capable d'en imposer à des hommes qui ne suivront pas pied à pied ses leçons.:

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Par le serpent qui trompa Eve, il entend le démon énivré de la science et de l'amour de luimême. Ses explications de la Genèse, de l'Exode, de l'Apocalypse, de l'Evangile, sont remplies de pareilles allégories qu'il adapte toujours à son systême et que les fidèles ne peuvent lire sans le plus grand danger. Cependant, comme ses ouvrages sont préconisés par des hommes pervertis et ardens à faire des prosélytes, on ne peut douter que les loges des francs-maçons et les autres assemblées des Swedemborgistes, dans lesquelles les ouvrages de leur chefsont lus avec enthousiasme, ne soient devenues des écoles de mensonge et d'erreur, et que beaucoup de catholiques n'aient déjà fait naufrage dans la foi; parce qu'on n'aura pas manqué de faire un grand étalage des prétendus miracles epérés par ces illuminés, dont l'exposé suffit seul pour en démontrer la fausseté. Comment, en effet Dieu accorderoit-il le don des miracles à un chef fanatique, qui se propose d'établir l'erreur sur le tombeau de la vraie religion, et qui tourne en allégories les faits les plus authentiques, les principes moraux, enseignés par Dieu même?

JETTE

CHAPITRE VIII

Des Martinistes.

Cerre secte, qui a pris son nom de M. de SaintMartin, qu'elle reconnoît pour chef, n'a été pendant long-tems connue qu'à Avignon. C'étoit dans cette ville qu'elle tenoit ses assemblées, et qu'on alloit s'y faire recevoir. Les Parisiens y alloient en foule, et après s'être fait initier dans les secrets de cette secte, il ont formé à leur tour des assemblées, premièrement hors de Paris, et ensuite dans lesein de cette capitale, où M. de Saint-Martin est venu enseigner sa doctrine. Plusieurs de ses prosélytes avoient déjà acquis une grande réputation par leurs talens, et ont beaucoup contribué à lui attirer des disciples. On distingue parmi eux, les Bert..., les d'Esp..., les év... de B...... la d.... de B. des prêtres, des religieux, des philosophes, des célibataires, des femmes de tout rang. Son ton modeste, ses explications mystiques, ses visions, ses mœurs pures à l'extérieur, lui ont donné un grand crédit aux yeux de ceux qui se laissent prendre par les apparences.

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On peut juger, par les ouvrages de M. de SaintMartin, qu'il tient aux mystiques et aux illuminés. Le premier est intitulé: Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l'homme et l'univers; à Edimbourg, 1782. Le second a pour titre : Des erreurs et de la vérité, ou les hommes rappelés aux principes universels de la science; Edimbourg, 1782.

Si on en croit cet auteur, son systême est la clef de toute la mythologie, l'explication des allé gories et des fables de tous les peuples, le modèle des lois qui régissent l'univers et qui constituent

tous les êtres; enfin, il prétend qu'il est la base de tout ce qui existe et de tout ce qui s'opère, soit dans l'homme, soit hors de l'homme; et indépendamment de la volonté.

M. de Saint-Martin prétend indiquer par son systême, la cause par laquelle, on voit parmi les hommes, une variété universelle de dogmes et de systêmes; une multitude innombrable de sectes philosophiques, politiques et religieuses, dont cha cune est aussi peu d'accord avec elle-même, qu'avec toutes les autres. Il soutient enfin, que ses principes sont les seuls fondemens de toute vérité.

On est étonné de voir tant de suffisance sous un air séduisant de modestie; mais on l'est bien d'avantage, quand on voit que ce nouvel auteur ne fait que donner un habit au systême des manichéens, en y ajoutant quelques singularités de sa façon. Par exemple, il dit que le bien est pour chaque être l'accomplissement de sa propre loi, et le mal, ce qui s'y oppose. On voit clairement qu'il assimile les actions des hommes à celles des animaux, et aux productions de la nature, puisqu'elles sont toutes l'accomplissement de la loi de chaque animal, de chaque plante, de chaque être. Dans cette hypothèse, la vertu n'est pas plus méritoire pour l'homme, que le fruit ne l'est pour l'arbre qui l'a produit. M. de Saint-Martin, dé veloppe et confirme le sens que nous donnons à ses paroles, lorsqu'il ajouté : » que la loi de tous » les hommes, tient à une loi première, celle de » la nature. » Par cette loi fondamentale de son systême, il fait dépendre tous les hommes de l'organisation de l'univers, et rentre dans les correspondances et les émanations dont parle Swedemborg.

La manière dont M. de Saint-Martin explique la moralité des actions humaines, n'est pas moins condamnable. Elle consiste selon son systême dans la volonté que l'homme a de s'approcher, ou de s'éloigner du bon principe; et cette volonté

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