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CORRESPONDANCE.

Lettre ministérielle du 15 janvier relative à la réunion des Sociétés savantes les 19, 20 et 21 avril 1876, à la Sorbonne, et à la distribution des récompenses le 22 du même mois.

La compagnie délègue pour la représenter en cette circonstance, MM. Choron, Watelet, Férus et Laurent.

COMMUNICATIONS ET TRAVAUX.

M. Michaux donne communication d'une découverte qui aurait eu lieu récemment à Fère-en-Tardenois. M. Frédéric Moreau père, l'heureux inventeur des trésors archéologiques de Caranda et de la Sablonnière, n'aurait rien moins trouvé, près de cette ville, qu'un Gaulois inhumé sur son char. M. Moreau a fait dresser un plan détaillé de la sépulture, où l'on voit toutes les parties du char, tous les objets qui entouraient le squelette, vases, ustensiles, armes, etc., à l'endroit qu'ils occupaient dans le terrain fouillé, et il y a joint un procès-verbal où sont constatées les diverses phases de la découverte.

Un fait analogue aurait eu lieu, l'année dernière, à 13 kilomètres de Châlons-sur-Marne. M. Morel, à la fin d'un rapport à la Société d'agriculture, commerce, sciences et arts de cette ville annonçait qu'il y avait découvert un << Gaulois inhumé sur son char, ayant au doigt un anneau d'or, à ses côtés la longue épée nationale reposant dans un fourreau de bronze doré, un bandeau d'or et une véritable coupe étrusque à fond noir et à personnage peint. »

M. Michaux donne lecture d'une notice sur la paix de Crépy de 1544.

LA PAIX DE CREPY.

Discussion sur le lieu où a été signé cette paix.

I.

Avant d'entrer dans la discussion, établissons brièvement les faits.

Il faut se reporter en l'année 1544.

Une formidable coalition s'était formée contre la France Henri VIII, roi d'Angleterre, et l'empereur Charles-Quint avaient résolu d'envahir la France, et aussitôt sa conquête, de la partager entre eux.

Ils devaient aller droit sur Paris en évitant les villes fortes.

Déjà l'empereur, à la tête de 50,000 hommes, était entré en Champagne.

Il s'emparait de Commercy, et, le 10 juillet, assiégeait Saint-Dizier.

De son côté, Henri VIII, avec une armée de 30,000 Anglais et 25,000 Allemands, commençait ses opérations.

Les seules troupes qu'on put lui opposer étaient les faibles garnisons disséminées dans les villes du Nord. Heureusement, le monarque anglais, plein de défiance à l'endroit du rusé espagnol, au lieu de marcher sur Paris, s'arrêtait devant Boulogne.

Charles-Quint marchait toujours.

Saint-Dizier, Epernay, Château-Thierry, étaient successivement tombés en son pouvoir.

Le Dauphin de France, depuis Henri II, envoyé contre l'envahisseur avec une faible armée, n'avait pu arrêter ses progrès; il fut même refoulé jusqu'à Meaux.

Rien ne résistait à l'ennemi qui, victorieux, prenait le chemin de Paris.

La terreur devint générale.

Les habitants de Paris, épouvantés, s'enfuyaient, emportant ce qu'ils avaient de plus précieux.

Devant un tel désarroi, François Ier voyant l'insuccès de ses vaillants efforts, eut, lui aussi, un mouvement de désespoir : << Que tu me fais payer cher, ô Dieu, s'écriait-il, cette couronne royale que je croyais << avoir reçue de ta main comme un don!» (!).

Ce cri de découragement que la maladie et la marche rapide et menaçante de Charles Quint avaient fait pousser à François Ier, fait comprendre combien la situation était critique.

En effet, l'empereur arrivant à Paris, trouvait cette ville abandonnée de ses habitants et presque sans défense. Alors se réalisait le projet des ennemis : François Ier perdait sa couronne, et la France mutilée était partagée par les vainqueurs.

Cette perspective, qui aurait pu être désespérante, donna à François I, un surcroit de courage.

Il accourt en toute hâte à Paris, et, calme. le front haut, se promène à cheval au travers des rues de la grande cité, arrête les fuyards et leur dit. « Que s'il ne < peut les garder d'avoir peur, il les gardera d'avoir « mal. »

Ces fermes paroles et la noble attitude du roi rendirent l'espoir au cœur des Parisiens.

<< Tout le monde, dit Guillaume Paradin, auteur contemporain, revint à la file, avec ferme propos d'attendre l'empereur et de lui résister. »

Les corps de métiers, les écoliers, tout Paris se

leva en masse; 40,000 hommes bien armés défilèrent devant le roi. Cette population ardente et mobile avait passé en quelques heures d'une terreur panique à une confiance intrépide. (Henri MARTIN, VIII, p. 303.)

Cet élan enthousiaste de la population de Paris fit réfléchir l'empereur.

L'armée du Dauphin, campée à Meaux et à la Ferté-sous-Jouarre, pouvait en peu de temps se porter au secours de la ville.

Charles-Quint arrêta sa marche.

Les troupes espagnoles, décimées par la maladie et la fatigue plus encore que par les combats, ne pouvaient soutenir une rencontre avec des forces supé rieures.

Une bataille perdue rendait Charles-Quint prisonnier de François Ier, qui pouvait prendre alors sa revanche de Pavie.

Il n'avait aucun secours à attendre d'Henri VIII, toujours occupé devant Boulogne et Montreuil, et qui ne paraissait pas se soucier beaucoup de venir dégager son allié.

Les provisions espagnoles s'épuisaient à vue d'œil; la famine menaçait fort de venir s'abattre au milieu des impériaux.

Ce n'est pas tout encore : l'automne arrivait à grands pas avec son cortége inévitable de mauvais temps, ce qui allait lui couper la retraite ou tout ou moins la rendre très-difficile.

Une semblable situation était loin d'être brillante; aussi Charles-Quint chercha-t-il tous les moyens d'en sortir.

Non-seulement il abandonna le projet d'assiéger Paris, mais même il se repentit de s'être aventuré aussi avant dans le cœur de la France.

Dès lors, il n'eut plus qu'un but partir au plus vite.

N'ayant pas une grande confiance dans le succès des armes, il préféra employer la diplomatie.

Le 29 août, il donnait les pouvoirs nécessaires pour traiter de la paix.

En même temps, il faisait opérer à son armée un mouvement de retraite.

Le 10 septembre, il logea au château de VillersCotterêts, que François Ier venait de faire construire et qui était à peine achevé.

Le 12, il se présenta devant Soissons, ville assez importante mais dépourvue de garnison, et y entra presque sans coup férir.

Il établit son quartier-général à Saint-Jean-desVignes, abbaye qui dépendait du duché de Valois, et là attendit la réponse aux ouvertures de paix qu'il avait fait faire.

Le négociateur choisi par Charles-Quint était « un personnage sans dignité, sans nom, sans caractère (1) », un moine obscur nommé Gusman.

Ce moine diplomate sut tirer profit de la rivalité qui existait à la cour entre Anne de Pisseleu, duchesse d'Etampes, maîtresse du roi, et Diane de Poitiers, maîtresse du Dauphin.

La duchesse d'Etampes, gagnée aux intérêts de l'empereur, employa tout son crédit à faire écouter favorablement les propositions pacifiques.

Elle amena le roi à consentir à un arrangement. L'amiral d'Annebaut fut choisi par François Ier, qui, le 10 septembre, lui donna les pouvoirs de traiter. D'Annebaut se rendit à Soissons pour conférer avec l'empereur sur les préliminaires de la paix (2).

Enfin, après plusieurs conférences, et malgré l'éner

(1) Du Radier, Histoire des Reines et Régentes de France, V., p. 322. (2) DUBELLAI.

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