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Tous les Français, électeurs ou habiles à le devenir, peuvent donner à qui bon leur semble le droit éminent de participer à l'exercice de la souveraineté, et il leur est interdit de concourir au choix de leurs propres agents, de ceux qui doivent régir des biens et défendre des droits dont chacun d'eux est propriétaire par indivis.

Telle est dans les électeurs la confiance de la loi qu'elle reçoit aveuglément de leurs mains les régulateurs de la grande famille, et ces mêmes électeurs ne sont pas jugés capables de nommer leurs officiers municipaux.

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Enfin, le représentant de la nation, qui, du haut de la tribune, balançait les destinées de la France, une fois rentré dans sa commune, conserve pas même le droit de se plaindre du maire que le préfet du département a jugé à propos de lui imposer; il faut qu'il en obtienne l'autorisation de ces mêmes ministres dont naguère il censurait les actes avec tant d'indépendance et d'énergie.

[Addition.] Les justes reproches adressés par M. Henrion de Pensey à la législation impériale, conservée par le gouvernement de la restauration, ne peuvent plus s'appliquer au régime actuel, qui est basé sur les principes développés dans la première partie de ce chapitre. D'après

la loi du 21 mars 1831, les conseils municipaux sont composés de membres élus pour six ans, et renouvelés par moitié tous les trois ans; le nombre des conseillers municipaux varie suivant l'importance de la commune, d'après une gradation établie par l'article 9 de la loi; le minimum est de dix, et le maximum de trente-six. Le nombre s'augmente encore lorsqu'il y a plus de trois adjoints au maire; il est nommé alors un conseiller de plus, à raison de chaque adjoint au-dessus de trois. (L. du 21 mars 1831, art. 9.)

Les électeurs municipaux se divisent en deux classes. La première comprend les plus imposés au rôle des contributions directes de la commune, dans une proportion qui varie eu égard au chiffre de la population, et qui est indiquée dans l'article 11, no 1. La seconde classe se compose de citoyens qui jouissent du droit électoral par suite de la capacité intellectuelle que font présumer en eux certains titres ou certaines fonctions. (Id. art. 11, n° 2.)

Tous les électeurs sont éligibles, sauf la différence de l'àge; 21 ans suffisent pour jouir du droit électoral, et 25 ans sont nécessaires pour devenir conseiller municipal, sauf aussi les incompatibilités résultant, soit de la parenté ou de l'alliance, soit des fonctions de préfet, sous-préfet, secrétaire général, ministre des divers cultes en exercice dans la commune, de comptable des receveurs communaux, et d'agent salarié par la commune. (Id. art. 11, 17, 18, 20; v. aussi les articles 12 et 16.) V. l'add. du chap. XVII pour les détails.

CHAPITRE VII.

Les maires des communes étant partout investis de quelques branches de l'administration publique, le roi doit concourir à leur nomination. Mais de quelle manière ?

En parlant dans le chapitre précédent du choix des officiers municipaux, nous n'avons considéré le pouvoir municipal que dans l'exercice des fonctions qui lui sont propres. Nous allons le voir se combiner avec des attributions administratives et judiciaires; et de cet amalgame sortira une modification importante aux règles que nous venons d'établir.

Telle est, en effet, la nature du pouvoir muni-cipal, que rien ne fait obstacle à ce que ceux qui l'exercent soient chargés de fonctions étrangères à celles qui leur sont propres. Il est libre au gouvernement de leur déléguer quelques branches de l'administration générale. De même la loi peut les rendre habiles à la confection de quelques-uns des actes qui appartiennent à l'autorité judiciaire. C'est ainsi que, dans notre organisation actuelle, les maires des communes sont officiers de police judiciaire et de l'état civil, et que l'administration leur confie la surveillance du recouvrement des impôts, et

l'exécution des mesures relatives à la conscription. Envisagés sous ces trois points de vue, les maires sont tout à la fois les mandataires de leur commune, les agents de la loi, et les délégués du gouverne

ment.

Mais la réunion de ces fonctions diverses ne peut s'opérer, soit par la seule volonté du gouvernement, soit par le fait seul des communes, sans mettre en opposition deux principes auxquels il est également impossible de porter la plus légère atteinte.

Et d'abord le simple bon sens dit que le maire ne peut être choisi que par les habitants; et cela par un motif qui frappe les entendements les plus communs : c'est que le mandataire et le mandant sont des corrélatifs nécessaires, et qu'il répugne aux notions les plus simples que celui qui n'a reçu aucun mandat d'une commune stipule en son nom, et s'en dise l'agent et le mandataire. D'un autre côté, la Charte constitutionnelle dispose que le roi seul nomme à tous les emplois de l'administration publique.

Ainsi la prérogative royale franchirait ses limites constitutionnelles, si elle attribuait les fonctions municipales à ceux qu'elle juge à propos de charger de quelques parties de l'administration générale. De même, et à bien plus forte raison, les habitants

d'une commune sont dans l'impuissance de conférer à celui qu'ils auraient choisi pour maire, l'exercice de la branche la plus insignifiante de cette même administration.

Cependant on ne peut pas se dissimuler que, notamment dans les circonstances actuelles, le cumul des fonctions administratives et municipales présente quelques avantages. On doit croire en effet que, voyant l'homme de leur choix honoré de la confiance du gouvernement, les habitants auront plus d'égard pour sa personne et plus de soumission aux ordres qu'il leur intimera, soit comme maire, soit en qualité d'administrateur.

L'intérêt public, l'intérêt particulier des communes, se réunissent donc pour provoquer une espèce de transaction entre les deux principes, dont l'un veut que tous les officiers municipaux et le maire lui-même soient choisis par les habitants; et l'autre, qu'aucune branche de l'administration générale ne puisse être exercée sans une délégation spéciale du roi.

Cette transaction n'est rien moins qu'impossible, et même elle peut s'effectuer de trois manières.

Le gouvernement présente trois sujets pour remplir les fonctions de maire, et les habitants choi

sissent.

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