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tribunal de police de Laon n'a pas violé les principes et les lois de la matière; qu'il s'est renfermé dans les bornes de sa compétence, et a fait une juste application de l'article 159 du Code d'instruction criminelle;

Attendu, d'ailleurs, la régularité de la procé dure et du jugement dans sa forme :

D'après ces motifs, la Cour rejette le pourvoi du commissaire de police de Laon.

Ces arrêts développent si parfaitement l'esprit et les conséquences de la loi du 18 novembre 1814, que les maires et les juges de paix qui prendront la peine de les lire attentivement y trouveront la solution de toutes les difficultés auxquelles cette loi peut donner lieu.

[Add.] Depuis la révolution de 1830 on a soulevé la question de savoir si la loi du 18 novembre 1814 était encore en vigueur. On a dit, pour la négative, qu'elle avait été implicitement abrogée par la Charte de 1830, laquelle, en consacrant le principe général de la liberté des cultes, a supprimé l'article 6 de la Charte de 1814 qui proclamait comme religion de l'Etat la religion catholique, apostolique et romaine. Pendant plusieurs années, la loi de 1814 n'a point été invoquée; mais, le 20 août 1836, le maire de la commune de Montastruc prit un arrêté par lequel il défendait aux cabaretiers de donner à boire le dimanche pendant le service divin.

Un cabaretier étant contrevenu à cette défense, un procès-verbal fut dressé contre lui, et il fut traduit devant le tribunal de police; ce tribunal l'acquitta par un jugement du 22 mars 1838, motivé sur ce que la loi du 18 novembre 1814 avait été abrogée virtuellement par la Charte de 1830, et qu'en conséquence un règlement de police, fait en vue de cette loi, ne pouvait être obligatoire.

Sur le pourvoi en cassation du ministère public, et malgré les conclusions de M. l'avocat général Hello, la Cour a déclaré la non-abrogation de la loi du 18 novembre 1814 par l'arrêt suivant, en date du 23 juin 1838 :

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La Cour, vu l'article 3 de la loi du 18 novembre 1814;-vu aussi l'article 3, n° 3, t. XI de la loi des 16-24 août 1790, et l'article 46, t. I de celle des 19-22 juillet 1791; l'article 1er de l'ordonnance de police du maire de la ville de Montastruc, du 20 août 1836, conforme à l'article précédent de la loi du 18 novembre 1814; l'article 471, no 15, du Code pénal, l'article 161 du Code d'instruction criminelle; - attendu que la loi du 18 novembre 1814 n'a point été expressément abrogée; - que la proposition en avait été faite à la chambre des députés, le 11 février 1832, mais qu'elle n'a été suivie d'aucun résultat ; que l'abrogation tacite de l'article 3 de ladite loi ne peut s'induire ni de la suppression de l'article 6 de la Charte de 1814, ni de l'article 5 de la Charte de 1830, portant que chacun professe sa religion avec une égale liberté, et obtient pour son culte la même protection; que ces diverses dispo

sitions n'ont rien d'incompatible et peuvent facilement se concilier; que, d'une part, l'article 3 de la loi du 18 novembre 1814 ne contient aucune prescription qui soit contraire à la liberté religieuse; que, de l'autre, la protection promise à tous les cultes légalement reconnus n'exclut pas le respect dont la loi civile est partout empreinte pour le culte professé par la majorité des Français ;- qu'ainsi, par l'article 57 de la loi du 18 germinal an x, le repos des fonctionnaires publics est fixé au dimanche; - que les articles 63, 781, 1037 du Code de procédure civile, 162 du Code de commerce, interdisent tout exploit, tout protêt, toute signification et exécution les jours de fêtes légales; - que les prohibitions portées par l'article 3 de la loi du 18 novembre 1814 ont le même caractère, et qu'il n'appartient qu'au pouvoir législatif d'en changer et d'en modifier les dispositions ;

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» Attendu que les règlements faits par l'autorité municipale dans le cercle de ses attributions, tant qu'ils n'ont pas été réformés par l'autorité administrative supérieure, sont obligatoires pour les citoyens et pour les tribunaux, et que ceux-ci ne peuvent se dispenser d'en ordonner l'exécution; attendu que l'article 3, no 3, t. XI de la loi des 16-24 août 1790 a rangé parmi les objets de police confiés à la vigilance et à l'autorité des corps municipaux, le maintien du bon ordre dans les lieux publics; que, si l'expérience a fait reconnaître que, dans certaines localités, et principalement dans les jours consacrés au repos des citoyens, la fréquenta

tion prolongée des cabarets était une cause de désordres graves, l'autorité municipale peut, sans outre-passer les limites du pouvoir dont elle est investie par la loi, marquer certains intervalles de temps pendant lesquels les cabarets et autres lieux publics seraient fermés ; qu'ainsi des considérations d'ordre public viennent s'ajouter aux motifs de décision puisés dans l'article 3 de la loi du 18 novembre 1814; - qu'en refusant de punir les contraventions à l'ordonnance de police du 20 août 1836, par le motif qu'elle avait son fondement dans une loi virtuellement abrogée, le jugement dénoncé a donc faussement appliqué les articles 5 et 70 de la Charte constitutionnelle, l'article 159 du Code d'instruction criminelle, et violé formellement, tant l'article 3 de la loi du 18 novembre 1814, que l'article 1er de ladite ordonnance, l'article 471, no 15, du Code pénal, et l'article 161 du Code d'instruction criminelle : - par ces motifs, - casse, etc.

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