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toutes les fois qu'ils peuvent le faire sans sortir du cercle de leurs attributions. Nous disons, sans sortir du cercle de leurs attributions: en effet, chacun de ces pouvoirs a une sphère d'activité qui lui est propre ; et lorsque l'un se permet d'en franchir les limites, l'autre n'en est pas moins obligé de s'y renfermer.

De ces notions générales il résulte qu'il faut distinguer les oppositions à un règlement de police, des contraventions à ce même réglement; que les oppositions, c'est-à-dire les demandes afin qu'il soit modifié (1) ou annulé, ne peuvent être portées que devant l'administration supérieure, et que le juge de paix qui se permettrait d'en connaître violerait la défense qui lui est faite de s'immiscer dans les fonctions administratives; qu'il n'en est pas de même des contraventions; que la répression en appartient exclusivement aux juges de paix, et que le corps municipal qui s'arrogerait le droit de les punir choquerait le principe qui lui interdit l'exercice des fonctions judiciaires (2). Appliquons ces principes.

(1) V. note 1 de la pag. 231. (F.)

(2) On voit bien que je raisonne dans la double supposition que la loi qui nous est promise sur l'organisation municipale est déjà rendue, et que cette loi déclare que les articles

Un règlement de police vient d'être publié. Il est inique, bizarre, également contraire aux lois et aux intérêts de la commune. Des réclamations s'élèvent de toutes parts; les habitants les adressent au juge de paix. Peut-il les prendre en considération? a-til le droit de les juger? Non.

Sans rien entendre, sans rien examiner, il doit les renvoyer devant l'administration supérieure.

La chose serait bien différente, si, en vertu d'un procès-verbal dressé par le maire ou son adjoint, les habitants ou l'un d'eux étaient traduits au tribunal de simple police pour contravention à ce

du Code d'instruction criminelle qui autorisent les maires des communes, ceux même qui ne tiennent leur commission que des préfets, à juger certains délits de police, sont abrogés par la disposition de la Charte constitutionnelle, qui porte: Toute justice émane du Roi; elle est administrée en son nom par des juges qu'il nomme et qui sont inamovibles: disposition de laquelle il résulte que la justice ne peut être rendue que par des hommes auxquels le Roi confère le caractère de juge, et la loi le privilége de l'inamovibilité; disposition, enfin, qu'il serait bien temps d'appliquer à tous ceux qui, n'étant ni institués juges, ni compris dans l'exception de l'art. 61 de la Charte constitutionnelle, exercent néanmoins des fonctions judiciaires. H. P. (Les articles 166 et suivants du Code d'instruction criminelle n'ont été abrogés ni par la loi du 28 avril 1832 qui a revisé ce Code, ni par la loi du 18 juillet 1837 relative aux attributions municipales.) (F.)

même règlement. Le juge de paix, régulièrement saisi, serait obligé de statuer sur la plainte qui lui serait soumise ; et il ne pourrait le faire que de trois manières : la rejeter, condamner les prévenus, ou se déclarer incompétent. Comme la loi fait un devoir à tous les juges de s'abstenir toutes les fois qu'ils reconnaissent qu'une affaire n'est pas de leur compétence, la question de compétence est celle sur laquelle l'attention du juge de paix doit d'abord se porter; et si le fait ordonné ou défendu par le règlement n'est pas dans la nomenclature de ceux que la loi place nominativement dans ses attributions, il déclarera qu'attendu qu'il n'exerce qu'une juridiction extraordinaire, qu'une juridiction bornée à des objets déterminés, il renvoie les parties à se pourvoir comme elles aviseront bon

être.

Une décision ainsi motivée ne porte aucune atteinte à l'indépendance de l'administration. En effet, elle ne juge pas le règlement, elle ne juge pas qu'en le publiant le corps municipal a franchi ses limites; en un mot, ce n'est pas sur l'acte administratif, c'est sur l'étendue des pouvoirs du juge qu'elle prononce (1).

(1) Voir, sur la doctrine contenue dans ces deux alinéas, l'addition placée à la fin de ce chapitre. (F.)

J'ai déjà donné la mesure de ces pouvoirs, en réunissant dans le chapitre II les différentes lois relatives à la police municipale, notamment celles qui ont été rendues pendant le cours des années 1790 et 1791. Mais je me suis borné à transcrire le texte de ces lois : je vais en développer l'esprit ; et, pour mieux faire sentir les conséquences qui en résultent, je rappellerai les changements que des lois postérieures ont apportés dans cette partie de notre organisation judiciaire.

Et d'abord, pour mettre plus de précision dans les idées, j'observe que les juges de paix sont investis de deux sortes de police: l'une connue sous la dénomination générale de simple police, l'autre sous la dénomination particulière de police municipale ; que toutes les contraventions du ressort de la première sont signalées dans le livre IV du Code pénal et dans le Code rural; que la nomenclature de celles qui appartiennent à la seconde est consignée principalement dans la loi du 24 août 1790, et qu'il n'est ici question que de cette dernière.

Les attributions des juges de paix n'embrassaient d'abord que des affaires civiles; la répression des crimes et des délits de toute espèce appartenait aux cours d'assises, aux tribunaux ordinaires et aux municipalités.

Les officiers municipaux, investis de la plénitude de la police municipale, en exerçaient tout à la fois la partie réglementaire et la partie contentieuse, et faisaient exécuter comme juges ce qu'ils avaient ordonné comme administrateurs.

Sans doute la partie réglementaire et la partie contentieuse étaient renfermées dans les mêmes bornes. Il serait trop déraisonnable de penser que les officiers municipaux auraient eu le droit d'infliger des peines pour contraventions à des règlements qu'ils n'auraient pas eu le droit de faire.

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Ce qui était interdit à ces fonctionnaires, à peine de franchir les limites de leur compétence, constituerait nécessairement un véritable excès de voir de la part des juges de paix, puisque, dans l'exercice du contentieux de la police municipale, ils n'agissent que comme substitués à ces mêmes officiers municipaux.

Cette substitution est l'ouvrage de la constitution de l'an I. Elle partage en délits et en crimes des actions que la loi réprouve et punit. Elle laisse les crimes dans les attributions des cours d'assises; et quant aux délits, elle en fait deux classes. Elle place dans la première ceux dont la peine excède, soit une amende de plus de trois francs, soit un emprisonnement de plus de trois jours; et pour

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