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<< de la souveraineté du peuple, de mettre des armes << aux mains de deux millions de citoyens nommant «<leurs officiers, de rendre complète la liberté de «< la presse, et d'avoir des institutions populaires. << Il m'a donc paru utile, dans les circonstances où << nous étions, pour la paix du dedans et du dehors, << que les diverses nuances d'opinions politiques, à l'exception du parti de Charles X, se réunîssent << sur cette combinaison.

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« Mon adhésion n'a pu être l'effet d'aucune pré«vention ou affection intérieure.

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« Je dois dire aujourd'hui, qu'après quatre mois << d'intime connaissance, des sentimens de confi« fiance, d'amitié et de cause commune sont venus « se joindre à mes considérations primitives. Quant « à l'assentiment général, ce ne sont pas seulement << les Chambres et la population de Paris, 80 mille gardes nationaux et 300 mille spectateurs au << Champ-de-Mars; ce sont toutes les députations « des villes et villages de France que mes fonctions « me mettent à portée de recevoir en detail; en «< un mot, un faisceau d'adhésions non provoquées << et indubitables, qui nous confirment de plus en plus que ce que nous avons fait est conforme à « la volonté actuelle de la très-grande majorité du peuple français.

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<«< J'ai vu, dans une de vos lettres, qui toutes ont « été fidèlement remises, que vous soupçonniez le « duc d'Orléans, d'alors, d'avoir eu connaissance « d'un complot contre l'empereur à l'île d'Elbe. Il

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<< en est incapable; et, d'après ce que m'ont dit le républicain dénonciateur de ce complot et ma<< dame de Staël, restée l'amie du duc d'Orléans, « j'aurais, indépendamment même de son carac«<tère connu, la conviction qu'il a été calomnié près « de vous.

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« Un de mes premiers soins, après son élévation « au trône, fut de lui exprimer le vœu que vous, << monsieur le comte, vos enfans et leur respecta«ble mère, vous pûssiez, si cela vous convenait, << rentrer paisiblement en France. Cette pensée fut << très-cordialement accueillie par le roi; mais on « objecta des traités avec les puissances étrangères, qui, tout absurdes et insolens qu'ils sont, néces<< siteraient quelques négociations. La situation « politique a changé depuis ; l'horison diplomati« que s'est rembruni; on se précautionne des deux <«< côtés; mais il est superflu de s'arrêter à ces cir<< constances, puisque, dans aucun cas, d'après la << teneur de vos lettres, vous n'auriez voulu pren« dre ce parti. Je ne vous en parle que pour me reporter à ce que j'avais eu l'honneur de vous « dire à Burdenton.

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«C'est dans la sincérité de mon cœur que j'ai <«< voulu avoir cette explication avec vous. Je ne « vous dirai pas que tout se soit passé comme je «<l'aurais dicté. Vous savez que, dans les affaires <«< intérieures, comme dans celles du dehors, per<< sonne ne voit tout se faire à son gré. Votre in« comparable frère, avec sa puissance, son carac

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tère et son génie, l'éprouvait lui-même, et vous, << son meilleur ami, en aviez votre part; mais je « n'ai voulu rien taire de ce que j'ai fait en pleine << liberté d'esprit et de volonté, aimant mieux mé་་ riter par ma franchise la conservation de votre

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amitié, que de la détruire par une apologie moins « sincère.

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« Recevez, mon cher comte, l'hommage du respect, de la reconnaissance et de l'affection que je vous ai voués.

<< LAFAYETTE. >>

Tels sont les motifs qui tinrent Lafayette éloigné des trois systèmes, dans chacun desquels les partis essayèrent en vain de l'engager.

CHAPITRE VII.

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Lafayette prend deux grandes mesures. L'Hôtel-de-Ville et la Chambre des députés, au 2 août. — Lafayette insiste pour que tout reste provisoire. --- Ordre du jour. — Visite du duc d'Orléans à l'Hôtel-de-Ville. Opposition à la lieutenance-générale. Efforts de Lafayette pour apaiser cette opposition. - Le trône populaire et les institutions républicaines. Charles X veut se retirer dans la Vendée. Expédition de Rambouillet.

Lafayette attendait que les représentans du pays prissent, au nom du peuple, une initiative que nul n'avait le droit de prendre avant lui. Cependant, son arrivée au pouvoir fut marquée par deux grandes mesures que la France n'eût assurément obtenues ni du gouvernement, ni de la législature, si elles eussent été préalablement soumises à leurs décisions. Il se hâta de faire proclamer solennellement, et comme préliminaire obligé de toute combinaison ultérieure, le dogme de la souveraineté du peuple, que Napoléon et les Bourbons avaient rangé, depuis trente ans, au nombre des chimères politiques et même des mauvaises pensées. Il érigea en principe et mit en pratique l'armement de la nation entière, villes et campagnes, nommant elle-même ses officiers; principe qui datait de 89, mais que le despotisme des trente-deux dernières

années avait également repoussé comme la plus dangereuse des institutions, la plus incompatible avec l'ordre public et le maintien du pouvoir. L'accueil que l'énonciation de ces doctrines avait reçu à la tribune, toutes les fois que Lafayette avait osé les y professer, lui avait fait sentir la nécessité de les établir en droit et de les mettre en action, avant que personne, Chambre ou Roi, eût la parole pour les combattre ou les modifier. Et, en effet, qui peut douter aujourd'hui que si l'on eût soumis ces deux institutions capitales méthodiquement au conseil du roi, ou aux délibérations de la législature, elles n'y eussent été mutilées? N'est-il pas évident surtout, que le projet de composer la garde nationale de l'universalité des citoyens, et de l'investir du droit d'élire ses propres officiers, aurait été impitoyablement repoussé par l'ordre du jour? Cela est si vrai que Lafayette eut souvent à combattre pour la conservation du principe qu'il avait mis en vigueur, et que, dans une circonstance peu éloignée des premiers jours de la révolution, il fut obligé de démentir, par un ordre du jour, une publication du gouvernement, qui tendait à réduire l'armement des gardes nationales aux villes de trois mille ames et au-dessus.

Je reviens à ce qui se passait le 2 août à la Chambre des députés et à l'Hôtel-de-Ville.

Les membres présens à Paris avaient donc élevé le duc d'Orléans à la lieutenance-générale du royaume. Une députation de la Chambre se transporta à l'Hô

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