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des pensions des religieux et religieuses qui avaient abandonné la vie commune depuis la publication du décret du 29 octobre 1789.

9. Les municipalités, dans la quinzaine de la publication du présent décret, dresseront un état en trois colonnes des religieux et religieuses qui, à cette époque, se trouveront dans les couvents.

La première colonne contiendra les noms et surnoms des individus;

La seconde, l'énonciation précise de leur âge;

La troisième, destinée à présenter les sommes des pensions de chaque religieux ou religieuse au 1er juillet dernier, sera remplie par les directoires de district, dans la seconde quinzaine au plus tard.

10. Une double minute de ces états sera envoyée au directoire du département, qui, après avoir dressé le tableau général de son arrondissement, le fera parvenir au Comité de l'extraordinaire des finances et au ministre de l'intérieur.

11. Il sera délivré par le secrétaire du district, sur papier libre, et sans frais, à chaque religieux et religieuse, un extrait en forme de l'article de ces états qui le compète, et cet extrait servira pour établir la quotité de la pension à laquelle il a droit, dans le district où il fixera son domicile, à charge, pour les religieuses seulement, de justifier leur âge lors du premier paiement, par le rapport de leur extrait de baptême.

12. Les religieuses, en se retirant, pourront disposer du mobilier de leur chambre, des effets qui étaient à leur usage personnel, et de tout ce qui a été accordé par le décret des 8-14 octobre 1790 à celles qui ont quitté la vie

commune; toutefois sans qu'aucun de ces effets puisse être enlevé avant d'en avoir prévenu la municipalité du lieu, et obtenu sa permission.

13. Il ne pourra, sous aucun prétexte, être touché à l'argenterie et livres communs, vases et ornements d'église.

Les municipalités, dans la quinzaine de la publication du présent décret, procéderont, sur la délégation, des directoires de district, à la vérification de l'existence des effets inventoriés en exécution des précédents décrets, et elles veilleront à la conservation de ce mobilier national, jusqu'à ce qu'il en ait été disposé.

L'inventaire des livres, tableaux et monuments des arts, sera dressé au Comité de l'instruction publique, conformément au décret du 2 janvier dernier.

Le décret du 8-14 décembre 1790 sera exécuté dans tout ce qui n'y est pas dérogé par le présent décret.

14. Aussitôt après la publication du présent décret, les directoires de district, en se conformant aux lois relatives à cet objet, feront convertir en monnaies toutes les cloches et l'argenterie des maisons religieuses de leur arrondissement, sous l'autorité des départements.

15. Les bâtiments nationaux et leurs dépendances, occupés par les religieux ou religieuses, seront mis en vente suivant les formes déjà décrétées, sans attendre qu'ils soient libres; mais les acquéreurs ne pourront, dans aucun cas, en prendre jouissance avant le 2 octobre prochain.

CHAPITRE SECOND

SUPPRESSION DES CONGREGATIONS SÉCULIÈRES

I

Rapport de Massieu à l'Assemblée constituante

[Ce rapport est sans date. Nous n'en connaissons l'existence que par l'imprimé d'après lequel nous le reproduisons (Bibl. nat. Le 27/10, in-8°), et qui est intitulé: Rapport et projet de décret sur les congrégations séculières d'hommes, présenté à l'Assemblée nationale, au nom du Comité ecclésiastique, par J.-B. Massieu, évêque du département de l'Oise, député de celui de Seine-et-Oise (1). A quelle occasion et à quelle époque l'Assemblée avait-elle chargé son Comité ecclésiastique de lui faire un rapport sur les congrégations séculières? Quand en entendit-elle la lecture? Ni le procès-verbal, ni les journaux, ni les papiers du Comité ecclésiastique ne répondent à ces questions. En tout cas, ce rapport

(1) C'est une de ces erreurs comme il s'en glisse souvent jusque dans les documents officiels, à cette époque où l'on n'a pas encore perdu toutes les habitudes de négligence de l'ancien régime. Aucun constituant n'était député d'un département. Massieu avait été député aux États généraux par le clergé du bailliage de Senlis. Mais il était curé de Cergy, et cette commune fit et fait partie du département de Seine-et-Oise.

ne peut être antérieur au mois de février 1790, puisque Massieu y prend le titre d'évêque et que c'est en février 1791 qu'il fut élu à ces fonctions. Il est probable que ce rapport date des derniers temps de l'Assemblée constituante, c'est-à-dire de juillet, d'août ou de septembre 1791. Le fait que l'Assemblée ne le discuta pas est une des raisons qui justifient cette hypothèse.]

Je viens, messieurs, au nom du Comité ecclésiastique, vous proposer les mesures qu'il croit convenable de prendre relativement aux Congrégations séculières.

On désigne sous cette dénomination des associations de citoyens ecclésiastiques ou laïcs, librement réunis sous un régime commun et une règle particulière. Ces citoyens, sans être astreints à des vœux solennels ou perpétuels, ont des supérieurs et des chefs auxquels ils sont soumis dans leur conduite personnelle et dans l'exercice des fonctions qui leur sont confiées des conventions ou institutions, en partie civiles et en partie religieuses, lient les membres entre eux et avec le corps, soit par des motifs de conscience, soit par des considérations de justice, d'honneur et de confiance. Toutes ces associations, excepté peut-être celles des ermites, qui vivent du travail de leurs mains dans la solitude, sont appelées par leurs statuts aux fonctions les plus intéressantes de la société, l'instruction de la jeunesse, l'enseignement de la religion, l'éducation des ministres, le soin des malades. indigents. Mais, pour remplir des fonctions aussi touchantes et aussi essentielles au bien public, est-il nécessaire de tenir à une corporation quelconque? Ne voyonsnous pas ces fonctions également bien remplies dans les gouvernements qui ne connaissent point ces sortes d'éta

blissements? Quand on est assez modéré dans ses désirs pour se contenter de la nourriture et du vêtement, en se rendant utile aux autres, a-t-on besoin de tenir à une riche société dont les biens ne sont la propriété de personne, ou deviennent quelquefois le patrimoine de quelques chefs moins sages ou moins scrupuleux? Pour enseigner la jeunesse, a-t-on besoin d'autre chose que de mœurs et de talents? Pour enseigner la religion et former ses ministres, faut-il un autre esprit que celui de l'Évangile? Pour se consacrer aux soins qui sont dus à l'humanité souffrante, faut-il d'autres motifs que ceux de la charité?

Ce n'est pas qu'en beaucoup de circonstances, et à des époques dont le souvenir n'est pas encore effacé, plusieurs congrégations n'aient dû à l'esprit de corps dont elles étaient animées une juste célébrité, que faisaient jaillir sur elles quelques hommes supérieurs, et un assez grand nombre de gens à talent qu'elles renfermaient dans leur sein. Ce n'est pas que les mœurs, la religion, les sciences, les arts et les lettres n'aient les plus grandes obligations à la plupart de ces corps estimables en plus d'un sens; mais les grands hommes qui les ont honorés n'eussent été ni moins estimables eux-mêmes, ni moins utiles à la société dans les postes isolés de fonctionnaires publics. Perfectionnons ou plutôt établissons l'éducation nationale, multiplions les occasions de se distinguer et les motifs d'émulation, et soyons sûrs que la France ne manquera jamais de talents et de vertus.

Mais si l'esprit de corps les a quelquefois fait naître parmi nous, on ne peut se dissimuler qu'il n'ait été trop souvent le germe des dissensions, des disputes, des que

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