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dront pas, fans doute, reconnoitre une utili té qui prétend leur donner des fers. Quant à la reconnoiffance, ils attendront vraisemblablement, pour s'en croire redevables, que l'Angleterre leur démontre que tout ce qu'elle a fait d'avantageux aux colonies, elle ne l'a pas fait pour elle-même.

-Révolutions d'Italie, traduites de l'Italien de M. Denina. Par M. l'abbé Jardin. Tome 8e. AParis, chez le Jay. 1775.

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>Es faits contenus dans ce dernier volume, plus près de nous encore, font, par conféquent,plus connus que ceux du tome précédent. Ainfi, nous nous croyons également difpenfés de les préfenter à nos lecteurs, qui n'y trouveroient rien qu'ils ne ifçachent déjà. Nous nous bornerons donc, dans l'analyse que nous en allons faire, à ce qui ea rapport à l'état politique de l'Italie, à la magnificence de les princes, aux fources diverfes de leurs richeffes, aux mœurs publiques, & à l'influence que le regne Louis XIV eut fur cette belle contrée. - L'Efpagne, qui, fous Charles-Quint, avoit afpiré à la monarchie universelle de l'Europe, s'efforçoit dumoins d'affervir l'Italie. Le duc d'Offone, vice-roi de Naples, tenta de foumettre les Vénitiens aux Caftillans. Urbain -VIII porta les premiers coups à l'exceffif

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afcendant de l'Espagne. Cette monarchie tourmentée, fecouée par Richelieu, par les Hollandois, les Portugais, les Catalans, les Siciliens, en reçut des profondes bleffures. Le choc des François & des Efpagnols en Italie, ne fit qu'affermir fa liberté. La France prépondéra en Europe depuis 1650; mais les affaires de Hollande occuperent fes forces, & l'équilibre fut confervé au-delà des Monts. Ces deux puiffancés ne contribuerent pas peu à maintenir l'intelligence & l'union entre les princes Italiens: ce que les Piémontois avoient éprouvé dans les guerres du Montferrat, étoit pour tous les autres une leçon terrible fur les dangers d'attirer chez foi ou chez autrui des armes étrangeres. Venife, malgré fes mécontentemens, étoit trop occupée de la guerre de Candie, pour ne pas vivre en paix avec Rome. Le grand duc de Tofcane, ennemi des Barberins, dont l'un occupoit le trône pontifical, pouvoit être la terreur des papes, s'il eût été ambitieux & guerrier. Mais le commun épouvantail ne le contint pas moins efficacement que fon propre penchant. La crainte des Espagnols, ajoute l'hiftorien, abforba tous les acides qui auroient pu mettre en effervefcence leRomain & le Florentin Gênes, déchue de fa fplendeur, fut humiliée, froiffée de toutes parts. Voici les raisons que l'on donne de fa décadence, & qui opé reront toujours celle des états. Elle abon

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doit en citoyens égoïftes, vendus aux Efpagnols, citoyens qui ne fçavoient calculer que les fiefs, les emplois, les honneurs qu'ils obtenoient à la cour & dans les états de ceux-ci, & comptoient pour rien ce que leer patrie & la liberté pouvoient en fouffrir. Auffi Gênes fe contenta-t-elle d'exifter languillamment & même fervilement, fous la protection de l'Espagne.

Les ducs de Savoie, occupés à maintenir l'équilibre entre les deux puiffances rivales, vécurent affez paifiblement avec les princes de Lombardie. La guerre avec le duc de Nevers, pour la fucceffion du Montferrat, fut foutenue bien plus contre l'étranger que contre les nationaux. Le différend avec Venife, au fujet du titre de roi de Chypre qu'elle difputoit aux ducs, en qualité de fouveraine de cette ifle, ne fut qu'une guerre de plume, qui n'empêcha pas les deux puiffances de travailler de concert à pourvoir, à la fûreté de l'Italie..

Dans cette époque, les princes Italiens ne fembloient jaloux de remporter les uns fur les autres, que le prix de la fomptuofités, des profufions & du luxe. L'Italie, qui n'égaloit ni l'Espagne, ni la France, ni l'Allemagne, ne laiffa pas de leur disputer la gloire de figurer fur le théâtre du monde, ou la vanité de Rome étaloit toute la pompe du fafte. D'innombrables & auguftes perfonnages y faifoient leur réfidence. Cette mo

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derne capitale du monde étoit, comme du tems de Pyrrhus, une affemblée de rois, fous les Borghefes, les Barberins, les Chigi, les Pamphiles. Les ambaffadeurs des monarques européens, les cardinaux, leurs partifans, amis ou parens, y foutenoient avec un appareil faftueux, l'honneur, la dignité, les intérêts de leur couronne. Jamais Rome n'avoit brillé d'un tel éclat, pas même dans les fiecles ténébreux, où l'autorité pontificale étoit revêtue de toutes les exagérations des théologiens & des canoniftes. Jamais les cardinaux n'avoient cu tant de raifon de s'affimiler aux princes. Le facré col·lege étoit compofé de fils, de freres de fouverains, de miniftres d'état, de gouverneurs de provinces & de royaumes, de généraux d'armées; tous ces cardinaux n'étoient guere propres à féconder la vigne évangélique, & leur vie molle & faftueufe ne fut que trop imitée par les eccléfiaftiques du fecond ordre. Cependant le même fiecle vit fleurir nombre de perfonnages doctes, zélés, & pieux. C'eft que les chefs de l'églife s'impofoient au moins l'obligation de s'intéreffer aux progrès de la piété chrétienne & de la foi'catholique, & qu'ils prirent même part à toutes les faintes entreprises qui s'exécuterent à cette époque mais d'où l'Italie, qui avoit perdu une bonne partie de fes habitans & -de fes tributaires, qui avoit vu passer son -commerce extérieur dans d'autres mains;

d'où tiroit-elle de quoi foutenir ce fafte? Suivons l'hiftorien. Il va nous découvrir les fources de les richeffes. Au commencement & jufques vers le milieu de ce fiecle, nonfeulement l'Italie tiroit peu d'articles des autres contrées, mais la plupart de cellesci tiroient d'Italie les principaux objets de luxe. L'Angleterre n'avoit rien de fini, de curieux, en fait de manufactures, qui ne vînt d'au, delà des monts, Florence & fes ouvriers en laine étoient prefque feuls, renommés; les draps d'Hollande, de France, ne commencerent à être eftimés que vers la fin de ce fiecle. Ceux d'Angleterre en forroient imparfaits, & fans être teints. Les Anglois en faifoient fi peu de cas, que Jacques I voulut interdire aux barons les draps étrangers. Depuis 1600 jusqu'en 1650, il ne fortit de chez eux que des canons de fer & des fouliers. Les toiles, les étoffes de foye n'y furent fabriquées que, fous le miniftere du comte de Stafford. Il eft douteux que les foieries de Lyon l'emportaffent alors fur cel les de Bologne & de Florence.

Les manufactures & métiers qui ont quelque affinité avec les fciences & les beauxarts, fleuriffoient en Italie, & lui apportoient beaucoup d'or. Les arts du deflin y brilloient encore du plus grand éclat. Elle n'employoit pour la fculpture, la peinture & l'architecture que fes propres artiftes; ce qui doit être compté parmi fes plus liqui

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