sans elle; mais la masse a un moyen bien simple d'empêcher ce résultat, s'il lui est défavorable. Elle peut assurer l'exécution du bail. Si elle ne veut pas de cette exécution qui n'est pas une faveur pour le bailleur, elle n'a pas à se plaindre des résultats de son refus. C'est elle qui les a voulus. Dans ces explications, j'ai considéré la créance du bailleur comme une créance à terme, puisque j'applique l'art. 1188, dans l'hypothèse où les syndics se refusent à assurer l'exécution du bail. Je n'ignore pas que sur la nature de la créance du bailleur, des controverses très vives s'étaient élevées avant la loi de 1872. Je ne veux pas les reprendre dans leurs détails. Je me bornerai à dire en deux mots, que de ces discussions, il semble bien résulter que la créance du bailleur est une créance à terme. Je crois pour ma part, que la meilleure preuve de cette proposition est dans la définition légale du contrat de bail (1)(art. 1709): «Le louage est un contrat par lequel une des parties s'oblige à faire jouir l'autre pendant un certain temps de la chose louée, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer. ». C'est la forme de définition de tous les contrats synallagmatiques (vente, échange, etc.), rien n'indique un élément conditionnel nécessaire dans le contrat. Les termes de la loi impliquent au contraire (1) Demolombe, Obligations, II, no 661. Revue pratique, t. 23 (1867), p. 384 (Mourlon); Revue critique (1867), p. 1 et s., Desjardins; Rev. crit. 1867, Thiercelin. la naissance immédiate d'une obligation ordinaire. Un certain prix qu'il s'oblige à payer (peut-être à terme, peut-être sans terme, suivant que les loyers sont ou ne sont pas payés d'avance). Du reste la jurisprudence a toujours tenu à affirmer ce caractère de créance à terme, et nous allons voir que pour ne pas abandonner ce principe elle aboutissait même à des résultats tellement impraticables qu'une loi nouvelle devint nécessaire. C'est que la Cour de cassation, tout en admettant, comme je viens de le faire, que la créance du bailbailleur est une créance à terme, n'arrivait pas à la théorie que j'ai proposée. Elle admettait deux principes que nous avons adoptés. Elle disait bien : Le bailleur a le droit de demander ou la résiliation ou le paiement avec le pirvilège et par préférence sur le prix de tous les loyers à échoir. Mais ce droit elle l'accordait en toutes circonstances au bailleur. Elle semblait perdre de vue complétement ce grand principe que : les syndics peuvent exécuter le contrat, comme aurait pu le faire le failli lui-même sans la faillite. Quand les syndics se présentaient devant les tribunaux, venant dire « Nous voulons continuer le bail, nous avons reloué, et le contrat permettait la relocation, › ou encore le failli replacé à la tête de ses affaires continuera à occuper les lieux loués et le bailleur n'a rien à craindre puisque les meubles n'ont pas été enlevés, la Cour répondait aux syndics: « Dès la faillite, le bailleur a de par la loi le droit à la résiliation ou au paiement par privilège. Il faut ou lui laisser exercer son privilège ou résilier, et toutes les sûretés que vous pouvez offrir n'empêchent pas l'exercice de son droit qu'il tient du fait même de la faillite (1), mais là était l'erreur! Oui le bailleur a droit à la résolutiou ou au paiement par préférence mais à une condition, c'est que les syndics n'exercent pas leur droit de continuer eux-mêmes le contrat en assurant son exécution. C'est, suivant nous, ce droit que négligeaient les tribunaux, et de là venaient les conséquences déplorables de leur système. Le failli replacé à la tête de ses affaires par un concordat était dans l'impuissance de se relever parce qu'il lui fallait abandonner ses magasins, ou payer à l'avance une somme exorbitante. Les créanciers chirographaires étaient dans l'alternative ou de résilier (ce qui pouvait leur être très désavantageux, s'ils trouvaient par exemple à relouer à un bon prix) ou de subir un prélévement qui ruinait l'actif de la masse. Tous ces inconvénients n'auraient pas existé, s'il avait été bien entendu que les syndics ont toujours le droit de continuer les contrats du failli, de mettre par l'exécution complète un créancier en dehors de la faillite. (1) Cass. D. 65. 1. 201, 28 mars 1865; Cass. D. 60. 1. 35, 4 janvier 1860; Cass. D. 65. 1. 208, 28 mars 1865; Orléans, 5 août 1865, D. 1865. 2. 23; Orléans, 10 nov. 1865, D 1865. 2. 227. En résumé, avant 1872, le bailleur avait tous les droits qui sont en général ceux des créanciers synallagmatiques. L'art. 2102 venait en outre renforcer ces droits en conférant le privilège au locataire; mais abstraction faite de ce privilège, notre théorie générale aurait pu recevoir une exacte application. Malheureusement la jurisprudence s'écartait des vraies principes Elle dégageait bien nettement les droits du bailleur, mais négligeait les droits des syndics qui en sont la contre-partie. Sa doctrine erronée ne se recommandait même pas par ses résultats pratiques. Le commerce au contraire réclamait vivement contre l'état de choses établi par la Cour de cassation. Mais cette Cour se refusait absolument à changer ses décisions. Et il fallut que le législateur intervint pour corriger bien plus la jurisprudence que la loi ! En 1872, alors que les malheurs de la guerre rendaient trop pratiques les questions de faillite, l'Assemblée nationale vota une nouvelle législation qui nous régit encore, et dont nous allons aborder l'étude. Situation du bailleur depuis la loi de 1872. La loi de 1872 est très confuse dans la forme. Un auteur a pu dire que « fruit de l'initiative parlementaire, elle est une des lois qui font le moins honneur à cette institution. » Aussi nous ne nous attacherons pas à son texte, nous l'étudierons non pas d'après le plan adopté par ses rédacteurs; mais en cherchant à dégager de ses termes l'appli cation des principes que nous avons déjà étudiés. Nous avons dit qu'à nos yeux le grand inconvénient de la jurisprudence de la Cour de cassation avait été de méconnaître les droits que pouvaient avoir les syndics d'invoquer le principe de la non résolution et d'exécuter le bail. Ce droit est formellement reconnu par la loi nouvelle en deux passages différents : Art. 450.- Les syndics auront pour les baux des immeubles affectés à l'industrie ou au commerce du failli, y compris les baux dépendant de ces immeubles et servant à l'habitation du failli et de sa famille huit jours à partir de l'expiration du délai accordé par l'art. 191 du C. co., aux créanciers domiciliés en France pour la vérification de leurs créances pendant lequel ils pourront notifier au propriétaire leur intention de continuer le bail à la charge de satisfaire à toutes leurs obligations de locataire. Art. 550. Au cas de non résiliation le bailleur une fois payé de tous les loyers échus ne pourra pas exiger le paiement des loyers en cours ou à échoir si les sûretés qui lui ont été données lors du contrat sont maintenues ou si celles qui lui sont fournies depuis la faillite sont jugées suffisantes. C'est la consécration formelle des principes du droit commun, et il n'y a qu'un point particulier à noter, c'est la détermination d'un délai accordé aux syndics pour faire leur choix. Si les syndics n'assurent pas l'exécution intégrale |