DROIT FRANÇAIS. DE L'INVIOLABILITÉ DU DOMICILE. INTRODUCTION. www L'inviolabilité du domicile est une conséquence de la liberté individuelle, qui implique, en effet, pour tout individu, le droit de demeurer dans une habitation qui lui appartient et de n'y être pas inquiété. On peut dire que le domicile est une sorte d'extension de la personnalité humaine et qu'à ce titre il doit être respecté. Si le principe de l'inviolabilité du domicile doit être reconnu par toute législation, il s'en faut qu'il l'ait été de tout temps. L'ancien droit ne protégeait pas mieux le foyer des citoyens que les citoyens eux-mêmes. Le pouvoir violait la liberté du domicile comme celle de l'individu. Les lettres de cachet de l'ancien régime en font foi. Cependant, même à cette époque, ce principe, s'il n'était pas respecté, n'était pas ignoré. Nous en avons la preuve dans les arrêts de certains parlements qui s'efforçaient de faire respecter le domicile, mais c'étaient des décisions exceptionnelles, et le principe cédait quand il gênait le pouvoir absolu. Il faut arriver à la période révolutionnaire pour trouver le principe de l'inviolabilité du domicile, formulé d'une façon positive dans les lois constitutionnelles. Aussi ne ferons-nous pas remonter plus haut l'historique de la question. Toute la législation de l'époque intermédiaire abonde en textes sur le principe de l'inviolabilité du domicile. Nous les étudierons en suivant l'ordre chronologique. Aux termes de la Constitution de 1791, «< aucun agent de «la force publique ne peut entrer dans la maison d'un ci«toyen, si ce n'est pour l'exécution des mandements de police et de justice, ou dans les cas formellement prévus « par la loi (1). » C'était la première fois que le principe de l'inviolabilité était proclamé et trouvait sa place dans un texte. Avant la Constitution de 1791, les décrets des 20 avril et 31 mai 1790 avaient déjà formulé la règle que tout citoyen qui n'est prévenu d'aucun délit, doit jouir tranquillement de sa liberté et de son état, et être en sûreté sous la sauvegarde de la loi. La déclaration des droits de l'homme, antérieure à la Constitution de 1791, n'énonçait pas expressément le prin (1) Constitution de 1791, titre IV, art. 9. cipe de l'inviolabilité du domicile; il se déduisait de la garantie des droits tenant à la liberté et à la sûreté, lesquels y étaient spécialement visés. En définitive, ce fut la Constitution de 1791 qui le formula la première. Un décret du 16 février 1791, relatif à l'organisation de la gendarmerie, décidait que la gendarmerie ne pourrait jamais arrêter un citoyen dans sa maison, si ce n'est en vertu d'un mandement de justice, et édictait en même temps des peines contre ceux qui contreviendront à cette prescription (1). Le 22 juin 1791, l'Assemblée rendit un autre décret aux termes duquel la visite des maisons particulières ne pouvait avoir lieu que sur la réquisition des officiers de police, de justice, ou sur celles des propriétaires, locataires ou fermiers de ces maisons. (( La loi sur les délits de police correctionnelle et municipale du 19 juillet 1791 est encore plus explicite : « Nul «officier municipal commissaire ou officier de police municipale, dit l'article 8, ne pourra entrer dans les maisons des citoyens, si ce n'est pour la confection des états ordonnés. « par les articles 1, 2, 3, et la vérification des registres des logeurs, pour l'exécution des lois sur les contributions << directes, ou en vertu des ordonnances, contraintes et juge«ments dont ils seraient porteurs, ou enfin sur le cri des citoyens invoquant de l'intérieur d'une maison le secours « de la force publique. » >> - Les officiers municipaux étaient (1) Décret du 16 février 1791, titre VIII, art. 5. |