délit, et que cette preuve est d'autant mieux faite quand les documents par lesquels elle se fonde, ont été trouvés en présence du prévenu auquel des explications ont pu être demandées. Si le prévenu n'était pas présent à la perquisition, il pourrait se plaindre qu'elle ait été faite irrégulièrement quand elle établirait contre lui des charges qu'il lui serait impossible d'écarter. La présence du prévenu n'est nécessaire que s'il a été arrêté. Il résulte d'ailleurs des termes mêmes de l'article 39 que le prévenu peut refuser d'être présent à la perquisition « s'il ne veut ou ne peut assister aux opérations, » dit la loi. Ces mots ont donné lieu à une controverse. Certains auteurs pensent que toutes les fois que le prévenu est arrêté, il peut être contraint à assister à la perquisition, car c'est l'intérêt de la justice qui l'exige. Les mots employés par l'article « s'il ne veut ou ne peut » s'appliqueraient alors au cas où le prévenu arrêté ne peut être transporté et à celui où il n'a pas été arrêté (1). D'autres auteurs, au contraire, et nous nous rangeons à leur avis, pensent que le prévenu, même arrêté, peut refuser d'assister aux opérations du magistrat instructeur. L'expression employée par notre texte se réfère à l'hypothèse d'une arrestation. Les mots « s'il ne peut assister, »> s'appliquent au cas où le prévenu arrêté ne peut être transporté au lieu de la perquisition; les mots « s'il ne veut » s'appliquent au cas où le prévenu refuse d'assister à la per (1) Mangin : De l'instruction écrite, t. I, p. 251. quisition. La construction grammaticale de l'article recommande cette solution. D'ailleurs si la présence du prévenu peut aider à la découverte de la vérité, elle est surtout prescrite en faveur du prévenu lui-même; il est libre d'y renoncer et ne peut être contraint d'assister aux opérations du juge (1). Il a le droit de se faire représenter par un fondé de pouvoir qu'il peut désigner sans aucune forme, même verbalement, et qui sera mentionnée dans le procès-verbal. S'il ne veut pas désigner de fondé de pouvoir ni assister en personne à la visite, l'officier de police judiciaire y procède, après avoir fait mention de son refus. Dans le cas où le prévenu n'a pas été arrêté, il peut se présenter et demander à assister à la perquisition à laquelle il a intérêt à y prendre part. Un fondé de pouvoir qui se présenterait au nom d'un prévenu contre lequel aucun mandat n'aurait été lancé, devrait aussi être admis à la perquisition (2). M. Duverger pense, au contraire, que le juge d'instruction peut accueillir ou repousser le mandataire du prévenu absent, suivant que le prévenu a ou non de justes motifs pour ne pas comparaître en personne. La loi, suivant cet auteur, n'a permis au prévenu d'assister ou de se faire représenter qu'autant qu'il est arrêté (3). La jurisprudence a décidé que l'officier de police judiciaire n'est pas tenu de procéder en présence (1) Faustin Hélie: op. cit., t. IV, no 1810; Duverger, t. I, no 147; Carnot: t. I, p. 246. (2) Carnot: op. cit., t. I, p. 245; Faustin Hélie, t. IV, no 1816. (3) Duverger op. cit., t. I, n° 147; Dalloz Instr. crim. d'un fondé de pouvoir du prévenu, lorsque celui-ci n'est pas arrêté; elle a admis que les opérations prescrites par l'article 39 peuvent avoir lieu en l'absence du prévenu et que son arrestation postérieure n'oblige pas à les recommencer (1). Toutefois, d'après le décret du 1er mars 1854, à défaut de fondé de pouvoir, le juge d'instruction doit demander l'assistance de deux témoins. Les règles que nous venons de poser pour les perquisitions faites au domicile du prévenu doivent être suivies lorsque la visite a lieu chez des tiers. Le prévenu arrêté doit y assister, car l'article 39 ne distingue pas entre les perquisitions faites à son domicile et celles faites chez les tiers. Son intérêt est le même dans les deux cas, car les preuves de sa culpabilité peuvent se rencontrer chez les tiers comme chez lui. Le tiers chez qui a lieu la visite doit également y assister. Aucun texte ne le prescrit; mais l'intérêt du propriétaire de la maison où se fait la perquisition exige qu'il y assiste, le juge d'instruction. peut avoir à lui demander des explications sur les objets trouvés chez lui. Il a, comme le prévenu, le droit de se faire. représenter par un fondé de pouvoir. Le juge d'instruction doit-il, avant d'effectuer son transport, rendre une ordonnance d'accès des lieux. Dans l'ancien droit, le juge rendait avant tout acte d'instruction une telle ordonnance (2). La loi du 16 septembre 1791 et le Code de brumaire an VI, dans son article 108, exigeaient également cette formalité. Le Code actuel est muet sur cette question; faut-il en conclure qu'il n'impose plus cette formalité au juge d'instruction? La Cour de cassation a jugé que le juge n'est pas forcé de rendre cette ordonnance (1), et c'est notre avis, dans le silence du Code. D'ailleurs, elle n'est pas nécessaire si le transport est décidé d'accord avec le procureur, et dans le cas où ce dernier n'est pas avisé de la visite que le juge d'instruction se propose de faire, un simple avis nous semble suffisant. Le juge d'instruction n'a pas besoin d'ordonner ce qu'il doit exécuter lui-même (2). La seconde règle édictée par la loi dans le cas où le juge d'instruction opère une visite domiciliaire est contenue dans l'article 62 du Code d'instruction criminelle : « Lorsque le juge se transportera sur les lieux, il sera toujours accompagné du procureur de la République et du greffier du <<< tribunal. »> Cet article 62 ne s'applique pas dans le cas de flagrant délit qui est régi par l'article 59: en pareil cas, le juge peut opérer sans le concours du procureur. Mais en principe, le juge d'instruction, lorsqu'il se transporte sur les lieux, doit nécessairement requérir l'assistance du procureur puisqu'il ne peut faire aucun acte d'instruction ou de poursuite sans lui en donner communication. Mais si le procureur, pour un motif quelconque, refuse de se rendre à la réquisition du juge d'instruction, que doit faire (1) Cass. civ., 5 flor. an XIII. (2) Legraverend: Législ. crim., t. I, p. 239. ce dernier? Les auteurs sont partagés sur cette question. MM. Carnot et Bourguignon (1) soutiennent qu'en pareil cas, le juge d'instruction doit s'adresser au substitut du procureur, et s'il n'y en a pas ou s'il refuse également, demander au tribunal de déléguer un juge pour remplir les fonctions de ministère public dans le cours de la visite domiciliaire. Toutefois, ces auteurs enseignent que si le procureur ne se transportait pas sur les lieux ou n'avait pas été suppléé à temps, le juge pourrait procéder régulièrement en son absence. « Lui refuser ce droit, dit M. Carnot, serait << peut-être suivre plus littéralement le texte de la loi; mais «< ce serait contrarier l'intention du législateur, qui n'a pu « vouloir que le défaut de présence du procureur du roi requis pût mettre obstacle aux opérations du juge d'instruc ( tion, lorsque le retard apporté aux recherches et aux pour<< suites serait irréparable et définitif. »> Le système adopté par ces auteurs est inadmissible pour plusieurs raisons. En effet, le droit qu'ils accordent au juge d'instruction de demander que le procureur soit remplacé par son substitut, droit qu'ils basent sur l'article 26 du Code d'instruction criminelle, est ouvert en cas d'empêchement du procureur; or, on ne peut assimiler le cas de refus avec celui d'empêchement. D'ailleurs, le substitut ne consentiral guère à remplacer son supérieur, car il violerait les règles de la hiérarchie; en outre, l'indivisibilité du ministère public empêche de prendre ses membres l'un après l'autre. — Un (1) Carnot op. cit., t. I, p. 298; Bourguignon: Jurispr. des Cod. crim., t. I, p. 298, 299. |