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consacre cet état comme légitime. Les tribunaux français l'admettent, quand les fabriques peuvent prouver leur titre de propriétaire (1). Quant à la Belgique, on a l'accord presqu'unanime des tribunaux de Liége, en date du 8 avril 1845 (2), de Bruges du 17 octobre de la même année (5), d'Hasselt, du 7 juin 1848 (4), de Mons, du 30 juin 1849 (5) et de Tournay, du 9 juillet 1849 (6); les arrêts de la Cour de Liége du 2 août 1862; de la Cour de Gand, des 5 février 1840 (7) et 8 mai 1846 (8); de la Cour de Bruxelles du 14 août 1851 (9), et deux arrêts de la Cour de cassation rendus le 20 juillet 1843 (10). La Cour y reconnaît formellement l'aptitude des fabriques à posséder des cimetières. « At» tendu, y lisons-nous, que l'article 16 du décret de

(1) V. Faider, de la Propriété des cimetières, p. 28. V. aussi une lettre du 17 juillet 1854, du Ministre des cultes, à Mgr l'Evêque d'Arras, Nouveau Journal des Conseils de Fabriques, t. IV, p. 402. (2) V. Journal belge des Conseils de Fabriques, t. 1, p. 355. (3) Ibid., t. II, p. 464.

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(4) Revue catholique, t. VI, p, 327.

(5) Ibid., t. VII, p. 368.

(6) Ibid., t. VII, p. 649.

(7) V. Kersten, Journal historique et littéraire, 1. VIII, p. 350. (8) Ibid., t, XIII, p. 461.

(9) Revue catholique, t. IX, p. 548.

(10) Journal belge des Conseils de Fabriques, t. II, p. 62 et 70. Elle cassa les arrêts de la Cour de Liége, du 44 août 4841, qui s'était prononcée contre les Fabriques. Ibid., pag. 43 et 57. La Haute Cour de Hollande est du même avis que notre Cour de Cassation. Arrêt du 20 janvier 1854, Kcvue catholique, 1. XI, p. 756.

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prairial précité reconnaît que les lieux de sépul>>ture peuvent appartenir à des particuliers; que rien

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n'empêche donc la fabrique, être moral, d'en être

propriétaire, sauf à se soumettre, comme le prescrit » cet article, à l'autorité, police et surveillance de » l'administration municipale, et sauf à y avoir des D parties séparées pour les autres cultes; conformé» ment à l'art. 15 dudit décret, et à l'art. 21 de l'édit » de Joseph II du 26 juin 1784 (1). » Concluons qu'on ne peut sérieusement contester aux fabriques le droit d'acquérir ou de posséder des cimetières.

XXXIII. On pourrait nous objecter la jurisprudence du Conseil d'Etat français qui décida, le 26 octobre 1825, que, dans aucun cas, le cimetière ne doit appartenir à la Fabrique, et qu'une Fabrique ne peut jamais être autorisée à en établir. « Une pareille auto>> risation, donnée même exceptionnellement, porte un » avis du 27 septembre 1855, pourrait donner lieu à >> des résultats fâcheux, qu'il est du devoir de l'auto» rité de prévenir (2). » Si par suite d'une autorisation donnée contrairement à cette jurisprudence, un terrain avait été acquis par une Fabrique ou tout autre

(1) Journal belge des Conseils de Fabriques, t. II, p. 68 et 72. (2) Vuillefroy, Traité de l'administration du culte catholique, V. Sépulture, page 500, note.

établissement, la commune devrait s'entendre avec cet établissement, lui en rembourser le prix et en devenir propriétaire (1). Conséquent avec ces principes, le Conseil d'Etat fut d'avis, le 15 novembre 1840, qu'il n'y avait pas lieu d'autoriser la Fabrique de la Guérinière à accepter le terrain qui lui était donné pour servir de cimetière. Voici le motif sur lequel il fonde sa jurisprudence : « Considérant, en ce qui concerne » le legs et la donation d'une pièce de terre destinée à > l'usage de cimetière, que les lieux de sépulture pu>>blics doivent servir à tous les habitants d'une com» mune, sans distinction de culte, et sont soumis ex»clusivement à l'autorité, police et surveillance de » l'administration municipale; qu'il convient, dès lors, » qu'ils appartiennent aux communes, et non aux Fa>> briques (2). Quelques années plus tard, le 29 janvier 1847, semblable avis fut de nouveau délibéré et adopté (3).

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XXXIV. Quelle autorité pouvons-nous ici accorder au Conseil d'Etat lorsque nous le trouvons en opposition. avec lui-même. En effet, le 4 juillet 1832, il était d'avis qu'une Congrégation religieuse, ou tout autre établisse

(1) André, Cours de la législation civile ecclésiastique, V. Cimetières, § IX, t. 1, p. 427.

(2) Journal des Conseils de Fabriques, t, XI, pag. 342, (3) Ibid., pag. 344,

ment public, pouvait ouvrir un cimetière avec l'autorisation du gouvernement (1), et conformément à cette décision, il émettait en 1837 un avis favorable à la demande de l'hospice de Cette, et c'est sur son avis que fut rendue l'ordonnance royale du 15 décembre 1837 qui autorisa cet hospice à accepter la donation de deux pièces de terre pour servir à l'établissement de deux cimetières communaux (2). Du reste, pesons les raisons alléguées par le Conseil d'Etat. Quels résultats fàcheux pourraient résulter de la possession d'un cimetière par une Fabrique! Serait-ce, par hasard, que la liberté religieuse des catholiques y trouverait une garantie contre la profanation de leurs cimetières (5). Pour nous, c'est le premier résultat avantageux que nous y trouvons. Nous en signalerons un second, qui serait d'alléger les charges communales; car, on sait qu'en cas d'insuffisance du cimetière actuel, c'est à la commune qu'incombe le devoir d'en fournir un nouveau, obligation dont elle pourrait être libérée dans notre système

(4) Prompsault, Dictionnaire raisonné de droit et de jurisprudence civile ecclésiastique, V. Cimetières, § III, t. I, col. 876. (2) Ibid.

(3) Nous sommes tenté de croire, en voyant les divers avis du Conseil d'Etat, dont Villefroy donne la substance, loc. cit., pag. 501, note a, que le seul résultat fâcheux que craigne le Conseil d'Etat, c'est l'exacte observation des lois canoniques sur le refus de sépulture à ceux que l'Eglise déclare indignes d'être admis dans le terrain bénit. Quel péril pour l'Etat !!

Le Conseil d'Etat assure que les lieux de sépulture publics doivent servir à tous les habitants d'une commune, sans distinction de culte. Il avait probablement oublié ce jour là l'article 15 du décret du 23 prairial an XII, qui veut qu'il y ait dans les communes autant de cimetières que de cultes différents. Et si la soumission à la police, et à la surveillance de l'autorité communale suffisait pour qu'un cimetière fût nécessairement propriété communale, comment le décret du 23 prairial pourrait-il admettre des cimetières appartenant à des particuliers, et les soumettre néanmoins à l'autorité, police et surveillance des administrations municipales (1)? On voit par ce peu de mots toute la faiblesse des motifs allégués par le Conseil d'Etat pour justifier sa jurisprudence actuelle.

XXXV. Pour terminer, montrons comment de savants auteurs traitent une question aussi importante. « Serait-il permis, demandent MM. Tielemans et de Brouckère, soit à des particuliers, soit à des Fabri»ques d'églises, soit à des communautés religieuses, » d'établir des cimetières pour l'usage d'une secte, » d'un ordre, ou en général des personnes qui vou

(1) Art. 16. « Les lieux de sépulture, soit qu'ils appartiennent aux >> communes, soit qu'ils appartiennent aux particuliers, seront soumis » à l'autorité, police et surveillance des administrations municipa»les. » Bon., op. cit., n. 402, pag. 107.

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