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tulation avec le représentant Carra et le général Dumouriez, par laquelle il étoit expressément convenu entre les parties contractantes, que Louis XVI reprendroit toute la plénitude de ses droits, suivant la constitution française de 1791. Mais rien d'authentique ne parut à ce sujet. On fut seulement et généralement surpris de voir d'abord le roi de Prusse prendre si chaudement et en personne les intérêts de Louis XVI, préférablement à l'empereur d'Allemagne, l'allié et le plus près voisin de la France, d'ailleurs uni par les liens du sang à la famille des Bourbons, et ensuite de ne pas voir les princes français à la tête de leur parti, soutenus par un corps de troupes auxiliaires, pour reconquérir le royaume de leur frère, comme ils en avoient annoncé l'intention. De cet ordre de choses on conçut des inquiétudes sus les intentions du roi de Prusse; on pensa qu'il travailloit plutôt pour lui-même que pour tout autre ; ce qui enflamma le cœur des Français, développa le caractère national, et engendra des milliers de héros, qui brûlèrent du desir de chasser de dessus leur territoire des phalanges étrangères. On ne fut pas moins étonné de voir abandonner par le roi de Prusse ceux des habitans de Longwy et Verdun, qui

lui avoient tendu les bras lorsqu'il s'approcha de leur ville, plutôt que de les retirer dans la forteresse de Luxembourg, et de leur éviter les effets de la vengeance du parti révolutionnaire qui fit périr sur l'échafaud 33 habitans de Verdun, le 5 floréal an II.

Les Prussiens n'oublieront jamais le camp de la Lune, qu'ils levèrent le 30 septembre 1792, laissant le champ de bataille jonché de cadavres des leurs, et les hôpitaux pleins de leurs malades, dont il périt un grand nombre de la dissenterie.

Par cette retraite, le siége de Thionville fut levé le 30 septembre.

Les généraux Luckner et Rochambeau, qui avoient reçu le bâton de maréchal de France sous l'assemblée législative, perdent la confiance de la convention.

Custines, Dumouriez, Kellermann et Beurnonville sont à la tête des armées françaises. Le premier remporte des victoires sur le Rhin; Spire, Worms, Mayence et plusieurs autres places tombent en son pouvoir. Le second fait la conquête de toute la Belgique, et les deux autres soutiennent leur marche victorieuse sur les bords de la Moselle et de la Sarre jusques sous Trèves.

Le général Montesquiou s'empare de la Savoie, et fait son entrée triomphante dane Chamberry, le 24 septembre 1792.

Octobre 1792. Le 2 octobre, on voit paroître un mémoire de Dumouriez au roi de Prusse, dans lequel il lui représente qu'il est la dupe de la cour de Vienne, que son intérêt est de se détacher de la coalition, et qu'on sera obligé de reconnoître la République française. Dans une adresse à l'armée, Dumouriez se plaint que le duc de Brunswick a lancé un manifeste insolent contre les Français; il dit aux soldats : « Plus de trève, attaquons ces tyrans et faisons-les repentir d'avoir osé souiller une terre libre. » Les derniers mois de 1792 offrent une confusion de faits remarquables. Les armées françaises volent de victoires en victoires ; du Nord au Midi, des bords de la Meuse, de la Moselle et du Rhin, aux Alpes, on voit la marche triomphante des républicains.

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Le 6, les Autrichiens lèvent le siége devant Lille, après avoir perdu plus de 20000 hommes par la bravoure de la garnison et de ses bitans.

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Des listes de proscription dans l'intérieur sont faites et distribuées ; elles entraînent des dénonciations, des mutations dans les places,

des accusations et des arrestations. Les membres de la convention se dénoncent tour-àtour, se craignent réciproquement, et de cette crainte naissent plusieurs décrets de circonstance, notamment celui qui inflige la peine de mort à tout homme qui proposera de rétablir la royauté en France. ·

Le 9 octobre, on substitue aux noms de monsieur et madame ceux de citoyen et citoyenne.

Le 23, un décret bannit à perpétuité tous les émigrés français, et condamne à la peine de de mort ceux qui rentreroient en France.

Novembre 1792. Le 6 novembre, les champs de Gemmappes sont témoins de la valeur des Français. L'affaire est des plus sanglantes ; ils y font mordre la poussière à un nombre con sidérable d'Autrichi ns; ils teignent aussi de leur sang les lauriers dont ils se couvrent. Enfin ils restent maîtres du champ de bataille jonché de 10000 morts, et ce combat décide du sort de la Belgique.

Tandis que les phalanges républicaines amoncèlent les trophées, que les meneurs de l'intérieur cherchent des coupables et entassent leurs victimes; on s'occupe de juger Louis.

Décembre 1792. Le 2 décembre ( premier dimanche de l'avent), Francfort, occupé par les Français par suite de la prise de Mayence, faite par eux le ai octobre précédent, est livré aux Prussiens par un corps de Hessois, qui avoit eu l'adresse de pénétrer dans la ville, en avoit ouvert les portes aux ennemis, malgré la vigourense résistance de la garnison et de quelques habitans. On eut la preuve qu'un grand nombre d'étrangers, armés de couteaux uniformes, s'étoit rassemblé dans la ville, et que ces hommes, réunis pour commettre le crime, égorgèrent les Français qui s'y trouvaient, même dans les hôpitaux.

Le général Custines, dans une lettre datée de Mayence le 7 décembre 1792, rend compte au président de la convention de l'assassinat des Français à Francfort. « J'aime à penser, » dit-il, que le peuple a été plus aveugle que > criminel; accoutumé à se courber sous le » joug des Autrichiens, il a cru les Prussiens » des géants. » Il recommande à l'humanité de la convention les députés de Francfort, qui étoient alors près d'elle en réclamation sur June contribution de deux millions de florins, imposée sur les plus riches de la ville par luimême.

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