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di & le mufelim firent fermer tous les cafés, & publier à fon de trompe la défense du port d'armes, fous peine de punition corporelle; un émir ayant refusé de fe conformer à cet ordre fut asrêté, & conduit au château. Cet acte de fermeté a maintenu la tranquillité publique, & une grande partie des mutins eft fortie de cette ville pour fui vre les traces de l'aga Eyvas, protecteur de leurs brigandages.

RUSSIE.

PETERSBOURG ( le 24 Juillet.) Le 9 de ce mois, on célébra au château de Petershof, avec la plus grande pompe, le jour anniverfaire de l'avénement de l'impératrice au trône. Après le fervice divin, le chevalier & confeiller privé Strekalow fit à haute voix la lecture de la relation des différens avantages remportés par nos troupes fur les Ottomans; l'archevêque de Pétersbourg entonna le Te Deum, qui fut chanté au bruit du canon; y eut un diner fomptueux auquel les prélats furent admis, ainfi que les deux premieres claffes de la nobleffe. Le 10, on célébra avec une égale magnificence la fête de St. Pierre (fuivant le calendrier de l'églife grecque ), dont le grand-due porte le nom. A 7 h. du foir on ouvrit un bal mafqué, où les principaux marchands curent la permiffion d'affifter fans billets: le nombre des mafques monta à plus de 3 mille, & ils fouperent tous à différentes tables, qui furent fplendi dement fervies. Le château, les jardins, les ter raffes & les yachts de la rade furent illuminés pendant les deux foirées de ces fêtes.

L'impératrice a nommé le Sr. Meftmacher, cidevant fon chargé d'affaires à Copenhague, pour aller réfider à la cour d'Eutin en qualité de miniftre plénipotentiaire, & elle lui a affigné 4 mille roubles d'appointemens. L'amiral Knowles

eft fur fon départ, pour retourner en Angle terre avec toute fa famille; on a déjà fait la ven te de ses meubles.

L'impératrice a rendu une ordonnance en faveur des pay fans; mais tant qu'on n'abolira pas la fervitude, les loix feront peu avantageufes aux habitans de la campagne; on paroit le fentir; if faudroit faire davantage. On dit dans cette ordon-nance: «Il ne peut exifter ni métier, ni commerce dans un état où l'agriculture eft négligée. L'agriculture ne fçauroit profpérer dans un pays où le pay fan n'a rien en propre, parce qu'il n'y a perfonne qui s'intéreffe vivement à une chofe qui ne lui appartient pas, & qu'on peut lui ôter quand on veut ». Quand on raifonne ainsi, on a fait un grand pas; mais il eft bien inutile lorfqu'on ne fait pas le fecond. Ne fera-t-on donc que des maximes en faveur du bien général? Celle-ci fera-telle fans effet? Le payfan dit, donnez-nous des terres,& nous les cultiverons. Le propriétaire, qui ne tire pas de fes poffeffions le quart de ce qu'elles Jui produiroient s'il les faifoit cultiver autrement que par corvée, dit de fon côté : tu es fait pour cultiver la terre, & pour mourir de faim; moi je Juis né pour vivre, & commander à de vils efclaves qui ne font que des infedes faits pour ramper, & que je puis écrafer fous mes pieds. Tout cela eft à la lettre ; on condamne la fervitude, on la laiffe fubfifter, & le gentilhomme campagnard meurt de faim avec toute fa morgue & fa dignité.

Les fçavans qui voyageoient par ordre de l'impératrice, en différentes provinces de l'empire, viennent d'être rappellés; on fçait que ce font les profeffeurs Pallas & Gmelin, & les docteurs Lepechin & Guldenftedt, membres de l'académie imp. des fciences. Le Sr. Falck, l'un de ces fçavans, célebre profeffeur en botanique, & difciple du chevalier de Linné, fon compatriote,

s'eft tué à Cafan d'un coup de piftolet, le 31 Mars dernier à 5 h. du matin. Ce profeffeur étoit attaqué d'une hypocondrie que fes voyages n'ont pu diffiper. Il y a déjà quelque tems que l'académie, informée de fon état, l'avoit rappellé; mais il demanda la permiflion d'aller prendre les bains chauds à Kiflar fur les frontieres de Perfe, & l'on eut la fatisfaction d'apprendre qu'il avoit recouvré la fanté. Cependant, à fon retour à Cafan, il retomba dans fon premier état; fa mélancolie augmenta au point que fes domeftiques lui ôterent tous les inftrumens dangereux; mais il eut la funefte adreffe de cacher le piftolet avec lequel il vient de terminer fes jours. Les voyages littéraires de ces académiciens ont commencé en 1769, & ont duré jusqu'à ce jour, nous avons rendu compte dans le tems de quelques-unes de leurs découvertes. On apprendra à leur retour bien des détails intéreffans fur le local, le phyfique & le moral de cet empire. Le capitaine Rifchkow, qui a parcouru, pour le même objet, quel ques-unes de nos provinces méridionales, eft révenu ici depuis quelque tems; les trois mémoires en langue ruffe qu'il a préfentés à l'académie, ont été traduits en allemand. Parmi les découvertes qu'il a faites, il y a un grand nombre de ruines de villages, bourgs, & de villes plus ou moins confidérables, enterrés fous leurs propres décombres auprès de quelques-unes de ces dernieres il n'existe plus que des hameaux & de chétifs villages. Le Sr. Rifchkow n'a pu s'éclaircir des caufes de ces bouleversemens, ni découvrir de quelle nation on été les peuples qui habitoient autrefois ces vaftes contrées, & qui doivent avoir été nombreux à en juger par les reftes de plufieurs villes dont les anciens ouvrages donnent l'idée d'une nation poficée à un degré affez éminent..

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Ia mortalité fait de grands ravages parmi les chevaux & les bêtes à cornes, en différens diftras, particulierement dans les gouvernemens de Mofcou & de Novogrod. Plufieurs perfonnes y ont péri fubitement, foit pour avoir mangé de la viande des bêtes mortes de la contagion, foit par l'infection que le grand nombre de ces animaux a fait éprouver aux perfonnes employées à les écorcher. On a pris toutes les précautions néceflaires pour arrêter les progrès du fléau, & l'on a coupé toute communication avec les villages où il regne le plus. Les patlagers venant de Novogrod doivent fubir des fumigations à deux Lazarets différens, établis fur la route.

Suite du journal des opérations de l'armée de Remanzow, depuis le 25 Juin jusqu'au 20 Juillet inclufivement.

Le 25 Juin le colonel Uworow, envoyé avec un détachement par le général comte de Soltikow, battit dans le village de Kadyskuy environ 600 Turcs, & fit 4 prifonniers. Les partis qu'il avoit détachés pour obferver l'ennemi, fauverent près de 5 mille chrétiens des deux fexes, qu'il pourfulvoit. Le même jour, un parti déta ché par le général Kamenskoi du village de Beylik dans les montagnes, s'étant avancé jufques près de la riviere de Ramszu, chafla de-là Arnaut-pacha, qui y étoit pofté, & tua 4 Turcs.

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Le général comte de Soltikow affiégeant Rusczuk ( on Ruffig), l'ennemi fit une nombreufe fortie de cette pla& tomba fur le régiment d'Apferoficz, placé sur le chemin de Conftantinople, dans le deffein de l'en déloger; mais il fut repouilé dans les jardins avec perte de quelques hommes.

Le 28, le général Kamenskoi, s'avançant avec fon corps vers Jenibazar, repouffa le féraskier DagheftanAli pacha, qui avoit fondu fur fon avant-garde avec`s mille hommes de cavalerie, le pourfuivit jufques près de Szumla ou Schumla, fic quelques prifonniers, & enJeva fix drapeaux.

Le 30, le colonel Rofen, envoyé par le général Kamenskoi avec un détachement à Razgrai, fut coupé par l'ennemi de trois côtés. Pour le dégager,le Sr. Kamenskoi

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fortit de fon camp avec toute fon infanterie : l'ennemi s'en étant apperçu, le grand-vifir fortit lui-même de Szumla avec un co ps de troupes. Notre cavalerie, ayant d'abord attaqué l'ennemi, le repouffi jufques près du retranchement, fit un Bin-pacha & 17 foldats prifonniers, tua environ 150 hommes, & prit 5 drapeaux. Nous perdime's 12 tant bas officiers que folda's tués.

Le z Juillet, l'ennemi ne ceffa pendant plus de deux heures, de tirer des coups de canon de la ville de Silifirie & du camp fur les Cofaques de Zaporoff, qui fe tenoient dans des bateaux fur le Danube: en même tems un détachement de 200 cavaliers turcs, forti des jardins, harcela les Cofiques du Don; mais ayant perdu o homines tués, & ayant vu tomber entre nos mains Tufekzy Ofman pacha, Ali Seragli, & Selictar Méhémet, pacha deux queues, commandant les Arnautes, ils retournerent dans la ville.

Le même jour, le lieutenant général comte de Soltikow ayant détaché le général major Naftrzchokin, celuici battit près du village de Tuilak le Syurdzy Chason, pacha à trois qu ues, qui conduifoit à Rusczuk un renfort des mille hommes. L'ayant pourfuivi près de 9 werftes, il fic prifonnier le Bchniak, pacha à deux queues & Chalil Méhémet bey, fils, & Bayraktar de Topzi-Salil-bey, pacha à deux queues, qui fe trouve auprès du grand vir, & de plus un Czaus pacha, un chohadar de Ja fuite de Chafan pacha, & 14 foldats. On tua aux Turcs plus de 300 hommes, & on leur enleva les timbales de Chafan-pacha, une partie du camp & des tentes, des munitions, un nombre confidérable de chevaux richement caparaçonnés, & beaucoup d'effets, outre 200 Bulgares avec leur camp. Notre perte en cette occafion ne confifta qu'en un enfeigne tué, & 25 bas-officiers & foldats tant tués que bllés.

Il y eut encore le même jour une troifieme action près de Turn, où nos troupes légeres battirent un détachement de cavalerie ennemie de 500 hommes, qui en étoit forti à leur rencontre. Elles le pourfuivirent par le faubourg jufques fous la fortereffe, malgré le feu violent d'artillerie qu'on fit fur elles. On tua dans cette rencontre so Turcs, & l'on fit s prifonniers. Le butin confita en 19 chevaux avec leur attirail, & dans une gran de quantité de fufils, de fabres & de piftolets. Nous n'y eûmes qu'un Arnaute & quelques chevaux bleffés.

Le 6 , quatre mille Turcs, infanterie, fortis de Silif& ayant paffé le Danube à la faveur des batteries

trie,

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