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logne; il en faut pour tenir les Cofaques en refpect; il en faut fur les frontieres de Suede, fur celles de Sibérie, & pour veiller à la conduite des Tartares, des Kalmonks, & autres auxquels on ne fçauroit trop fe fier: cela employe la meilleure partie de la population de l'empire; on en conclut qu'il lui eft eflentiel de ne perdre que deux ou trois foldats du moindre rang, lorfque fes armes victorieufes exterminent des armées entieres. Les revenus en argent font permanens, ou sujets à changer; une bor ne partie des revenus fixes de la couronne eft absorbée par le fafte de la cour : le refle, qui eft encore confidérable, ne l'eft pas affez pour parer à tout fans des emprunts onéreux. C'est ainsi qu'on parle à Pétersbourg de l'état de l'empire; on defire que la guerre finiffe, & l'on croit qu'il n'y a que les militaires en place qui en fouhaitent la continuation.

HAMBOURG (le 13 Juillet.) Le comte de Vergennes arriva ici le 7 de ce mois, defcendit à T'hôtel du baron de la Houze, miniftre de S. M. T. C. auprès du cercle de la Baffe-Saxe, & continua, le 9, fa route vers Paris.

On affure ici que le roi d'Angleterre a reconnu la validité des prétentions de la cour de Berlin fur le port de Dantzig, & qu'en conféquence, S. M. Brit. s'eft engagée à ne prendre aucune part à cette affaire.

On fçait qu'il s'eft élevé à Warfovie une difpute entre deux grands de la république qui s'attribuent tous deux le droit de préfider à la police des fpectacles. La queftion de fçavoir auquel des deux cette prétention feroit confirmée, a été longtems agitée dans la délégation, & n'eft peutêtre pas encore entierement décidée; elle à formé auffi deux partis qui s'en occupent avec autant de feu que s'il s'agiffoit des intérêts les plus

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chers de la république. Il circule à cette occi fion un pamphlet intitulé, Mémoire pour fervir de plan aux pieces de théatre de Varfovie & de fup-plément à l'hiftoire de la démence humaine. L'auteur rappelle d'abord qu'au commencement de ce fiecle, la Ruffie éclairée voyoit avec plaifir les grands de l'empire jouer la comédie, & qu'il ne manque plus à la Pologne que de fuivre cet exemple, & de prendre des leçons de fes ma→ gnats traveftis fur le théâtre. Du tems de la princeffe ruffe Natalia, on vit, en 1716, une vafte grange changée en falle de fpectacle; cette illuftre princeffe fe donnoit la peine de traveftir elle-même la bible en drames. Il futfifoit de voir apprendre un rôle par cœur, pour repré Lenter un prophête; mais il falloit au moins être officier de l'état-major pour afpirer à l'honneur de jouer le rôle d'arlequin, qui étoit le plus beau de tous & le plus difficile, parce que le major le lieutenant-colonel, ou le général qui avoit ce département, devoit fe jetter au travers des acteurs, & les interrompre par des faillies qu'il falloit qu'il trouvât fur le champ, & qui devoient abfolument faire rire la princeffe, & ceux de fes gens qui n'avoient pas eu le knout ce jour-là. L'anonyme, auteur de ce pamphlet, après fes excurfions en Ruffie vient en Pologne ; il examine les deux prétendans qui fe difputent l'honneur de privilégier les comédiens; l'un tire fon droit de fa place, & l'autre du théâtre même dont il leur loue l'emplacement: on propofe pour les accorder de refter dans la falle de la délégation, de continuer comme on a commencé, & de fermer tous les autres fpectacles; celui qu'on y donne eft véritablement un fpectacle national; les acteurs en font excellens, & l'on s'empreffe de faire connoitre les arlequins, les fcaramouches, les pantalons, &c. de la grande

troupe. On défigne fi bien ceux auxquels on donne ces noms, qu'il eft impoffible de s'y méprendre, & c'eft ce qui rend ce pamphlet plus piquant pour les Polonois, que pour les étrangers. Ce projet, difent les plaifans, vaut bien la plûpart de ceux dont on s'occupe.

Extrait d'une lettre de Tawrow dans le duché de Rezan, le 13 Juin.

Le rebelles du gouvernement d'Orenbourg fe font avifés d'un firatagême dont on ne les auroit jamais crus capables auffi ne leur attribue-t-on pas l'idée de joindre la caufe de dieu à celle de l'état. Depuis peu, leurs chefs ent jugé à propos de publier, « qu'étant les défenfeurs de la liberté publique, & les vengeurs du peuple oppri mé, ils prenoient fait & caufe pour un grand nombre de bons fujets de l'empire ruffe, perfécutés depuis plu feurs fiecles à titre de roskolniques, ou hérétiques, & cela parcequ'ils ont du bien, qu'ils font ennemis déclarés du defpotifme, & qu'ils ont en horreur l'adminiftration vicieufe de ceux qui, fous prétexte de gouverner la nation, ne s'occupent qu'à l'affoiblir par toutes fortes de concuffions. *2

Il y a dans ce nouveau parti, qu'on peut regarder somme un détachement de l'armée des féditieux, un certain Alexey-Petrowitz Foma, fanatique dangereux & très intrigant, qui fe dit petit fils d'un certain Foma, prêtre ruffe, qui fut brûlé à Mofcou en Janvier 1715, pour avoir prêché contre les images, & avoir, le jour de St. Alexis, hâché en pieces l'image de la Ste. Vierge en pleine églife, & déclaré publiquement en chaire, que sout bon chrétien devoit avoir horreur du culte de la prétendue religion orthodoxe russe. Ce Foma s'eft fait facrer archevêque par quelques piêtres ruffes, de ces prêtres furnuméraires, dont le nombre eft fi grand dans cet empire, & dont le gouvernement s'eft toujours fait des ennemis dangereux, lorfqu'il a voulu en diminuer le nombre. Il fait trainer après lui le portrait du roskolnique Foma, dont il fe dit le petit-fils, montre la hâche dont on lui a coupé la main, & met fur le compte du gouvernement tous les excès qu'on a commis contre cette fecte mal: heureufe, qui effectivement a été maltraitée jusqu'au pré. fent segne, qu'il a été défendu de perfécuter qui que co

foit pour caufe de religion; ce qui n'empêche pas que les Foskolniques, qui n'ont retenu que quelques cérémonies de la religion ruffe, & qui ne mangent pas même avec un Ruffe, qui ne touchent à rien de ce qu'an Ruffe a apprêté, ne vivent encore, pour la plûpart, dans les déferts & dans les bois "

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"It eft vrai qu'ils font fideles comme les quikers, & auffi fimples qu'eux; mais les émiffaires de Foma ont fçu, fous prétexte de religion, ranimer les anciennes animofités de ces fetaires, & il s'en trouve tous les jours un grand nombre qui viennent fe foumettre au prétendu archevêque. Ces forcenés courent de villages en villages, dans les fteppes, dans les bois, & dans les déferts mêmes pour y chercher les roskolniques que la févérité des loix y ont difperfés ; ils les emmenent bon gré malgré, & maffacrent tout ce qui ne fe dit pas de cette fecte. Ces fanatiques ont fait beaucoup de dégât dans les contrées du gouvernement de Twer, où ils ont pillé des églifes & des monafteres. Les environs de la petite ville de Valdey ont le plus fouffert. Le rebelle Foma dit entr'autres dans fon manifefte que c'eft une injustice de forcer le paysan à payer une contribution prefque toujours au-deffus de fes forces, lorfqu'il veut époufer une fille d'un autre village que le fien; qu'il n'y a point de loi qui puiffe le forcer à quitter fa barbe dans la campagne, parceque quand il y auroit des barbiers, les habi tans des villages, après avoir payé tout ce que le gouvernement exige d'eux, n'ont pas les moyens de fe faire rafer; que les roskolniques, profcrits de l'empire, déclarés dignes des derniers fupplices, pendant tant de regnes, pour avoir voulu maintenir la vraie religion, doivent venger par la voie des armes, leur patrie oppri mée; que dans pareil cas ils peuvent en toute confcience s'unir avec les Ruffes foi-difans orthodoxes, & faire caufe commune avec eux pour venger les torts dont fe plaint toute la nation. Il figne: Alexey-Petrowitz Foma, arche-vêque, ferviteur indigne. On ne içait encore que quelques particularités des emplois de ce fanatique ; ce font coles qu'on vient de lire. Ses gens ayant enlevé quelque part une espece de fiacre, en ont ôté l'effieu, & l'ont placé fur un autre chariot fort élevé, auquel ils en ont adapté les rones. C'eft là que Foma donne fes audiences. Il y mange à certains jours publiquement, & de-là il donne fa bénédiction à ceux qui vont & viennent. Pendant la marche, il va à cheval, étant affublé d'un grand bonnet: avec des bandelettes qui pendent aux côtés des deux

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oreilles. Il a la barbe très-longue, & porte un habit qui lui defcend ju qu au deffous de la cheville du pied. Il parle plufieurs langues, aut bien que celle du pays, & l'on a tour heu de croire que c'eft un avanturier que les ennemis de la Rubie ont aflocié à Pugatfchew, dont on ne parle que très-contufément, comme a l'ordinaire w.

BERLIN (le 20 Juillet). Le roi a conféré au Sr. Waitz, baron d'Efchen, ci-devant président de la chambre de Caffel, la place de miniftre d'étát, & l'a nommé en même tems vice- préfident du directoire des finances, guerre & domaines, ainfi qu'intendant des mines.

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Il paroit un édit du roi, en date du II Mai dernier, par lequel S. M. renouvelle & explique les édits antérieurs de la maniere la plus avantageule pour la nation angloife. Suivant le premier article, toutes les marchandifes de la GrandeBretagne, fans diftinction du plus ou moins de valeur, paffant dans les états de S. M., foit par terre, foit par eau, & allant en Saxe ne paieront que 6 bons gros par cent, au lieu de 33 qu'elles paioient ci-devant; celles qui pafferont par la Siléfie pour la Pologne, au lieu de 8 gros, n'en donneront que 4; & celles qui feront deftinées pour le même royaume, par Dantzig & la Viftule, ne paieront aucun droit de tranfit, & ne feront fujettes à d'autres impôts qu'à ceux dont elles ont été chargées jufqu'à préfent. Les marchandifes angloifes feront également affranchies de tout droit à leur paffage par les duchés de Cleves, de Gueldre, les principautés de Minden, Oft-Frife & Mœurs, les comtés de la Marck, Ravensberg, Tecklenbourg & Lingen, quand bien même les circonftances exigeroient qu'on impofât de nouveaux droits fur les marchandifes étrangeres. Par les deux autres articles, les fujets de la Grande-Bretagne feront traités, en fait de commerce, auffi favorablement que ceux de S. M.

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