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MILAN (le 16 Juin.) Les vers à foie font id une partie intéreffante de commerce; on ne néglige rien pour l'encourager; on a fait plufieurs loix pour favorifer la culture de l'arbre dont la feuille nourrit cet infecte précieux; on vient d'en faire une nouvelle pour défendre l'exportation de cette même feuille. On avoit pouffé l'abus fi loin, que ceux qui élevent des vers à foie, trouvoient à peine la quantité fuffifante de feuilles pour les nourrir; quiconque fera furpris en en faifant paffer hors du duché, fera puni par la perte de la provifion, & par une amende de 25 écus.

Depuis longtems, il fe commettoit des vols dans les églifes de la campagne fans qu'on pût en découvrir l'auteur. C'étoit un moine qu'on a enfin arrêté & mis au fecret, où il vient de con feffer tous fes crimes: il s'étoit évadé de fon couvent étant fous-diacre, & avoit pris plusieurs femmes qu'il entretenoit par fes brigandages.

VENISE (le 25 Juin. ) Il est arrivé dernierement un chebec de Corfou, qui n'a mis que 6 jours dans fa traverfée, & le lendemain, on vit préparer avec promptitude trois vaiffeaux de guerre, qui font dans le port avec deux corvetes, qui font déjà prêtes à partir. Ces mouvemens femblent accréditer le bruit qui s'eft répandu ici, d'un combat qui, dit-on, a eu lieu entre deux de nos vaiffeaux de guerre & quatre ruffes, dans lequel on prétend que ces derniers ont été trèsmaltraités, & ont perdu leurs mâts & leurs agrêts; les notres ont été obligés de fe retirer à Corfou après avoir perdu beaucoup de monde, & avoir été fort endommagés. Il eft certain que les Ruffes gênent beaucoup notre commerce dans ces mers. Ön dit auffi qu'un corfaire de cette nation avoit voulu visiter dans les eaux de Morée un de nos vaiffeaux marchands, monté de 20 canons; fur le

fefus du capitaine, il fit feu; on lui répondit, & on le coula à fond. Ces faits confirment ce qu'on a appris de divers bâtimens venus de Paros à Triefte, & qui ont rapporté que les Ruffes défendent abfolument le commerce & la navigation de l'Archipel au pavillon de la république.

RAGUSE (le 26 Mai.) Le 20 du mois dernier, les comtes Cofakowski & Pulawski, maréchaux de la confédération de Bar, arriverent en cette ville, accompagnés de quinze officiers polonois. Le premier pit, le 3 de ce mois, la route de Conftantinople. Les autres ne partirent que qua tre jours après pour l'armée turque; ils pafferent par Trebigne, ville frontiere de la province de Herzegovina, voifine de cet état, où le picha de Scoppia les attendit, & leur permit, quoiqu'ils n'euffent que d'anciens firmans, de le fuivre, & de l'accompagner jufqu'au camp du grand-vifir. On attend ici le prince de Radziwill, palatin de Wilna, qui fe rendra immédiatement après, avec un nombreux cortege, à l'armée ottomane.

PARME (le 27 Juin.) L'infant voulant reconnoitre les fervices du Sr. Canuti, fon premier médecin, l'a honoré du titre de comte, ainfi que de celui de confeiller-intime, & l'a investi du fief de Belleveder, auquel eft attachée la dignité de

comte.

Le marquis de Llano & fon époufe font partis de cette cour, après avoir pris congé de l'infant & de Mme. l'infante, Cette princeffe leur a donné une nouvelle marque de bonté, en faisant un riche préfent à l'enfant dont la marquife de Llano eft accouchée il y a deux mois.

On a fait à Colorno de grands préparatifs pour la réception de l'archiduc Ferdinand & de l'archiducheffe fon époufe, qui font attendus ici aujourd'hui.

TURIN (le 24 Juin.) On a célébré le 22 de ce mois, par ordre du roi, dans l'églife métropolitaine de cette ville,un fervice folemnel pour le repos de l'ame de Louis XV, roi de France. L'archevêque a officié à la grand-meffe, qui a été chantée en musique à grande fymphonie. L'oraifon funebre a été prononcée par l'évêque d'Annecy. Le chapitre de l'églife de Turin, ainfi que plufieurs évêques, a affifté à cette cérémonie, à laquelle les miniftres étrangers ont été invités par le maitre des cérémonies. Le Sr. de Sainte-Croix, chargé des affaires de France en cette cour, pendant l'absence du baron de Choifeu!, ambaffadeur de S. M. T. Chrét., y a conduit toutes les perfonnes de fa nation qui fe trouvent actuellement en cette ville.

La vafte étendue du portail de l'églife étoit couverte d'un drap noir, traversé par des litres d'or & de velours, qu'on avoit chargées d'écufions aux armes du feu roi de France. On lifoit au milieu Tinfcription fuivante: Ludovico XV, Galliarum regi, maximo, felici, auguflo; regali Sabaudo generi multiplici cognatione ac propinquitate divindo; ob egregias animi dotes & fingularem clementiam populi deliciis; religionis tuendæ ac pacis firmanda fludio, fcientiarum tutelá, artibus propagatis, fcholis militaribus nobilium inftrucis, nepotibus ad régni decus optimè inflitutis, rerum geftarum magnitudine, immortali memoriá digniffimo; maftos inter fuorum gemitus & vota publica repentiná vi morbi è terris fublato, funerum folemnia. Des lampes funebres fufpendues à la voute de l'églife éclairoient la nef, & l'intérieur du choeur. Elles étoient d'or, ainfi que tous les ornemens de cette décoration. On avoit diftribué fur les corniches & les piliers, les armes du feu roi, couronnées de cyprès. Le catafalque étoit élevé près de l'entrée du chœur, & formoit un temple ifolé, & foutenu par qu..tre colonnes pyramidales, dont le femmet étoit terJuillet. 1774. e. quinz. C

miné par un entablement, au-deffus duquel s'élevoit la représentation couverte du manteau royal & de la couronne pofée fur une urne d'or. L'extérieur du mausolée étoit éclairé par un grand nombre de flambeaux, & la diftance qu'on avoit laiffée vuide entre les quatre pyramides qui formoient la décoration, ne cachoit point à la vue le maitreautel. Il étoit magnifiquement orné par la nombreufe quantité de chandeliers d'argent qui joignoient leur lumiere à celle des candelabres placés dans les angles du monument, au-deffus duquel on lifoit ces mots : Ludovico XV, Galliarum regi amauiffimo munera fuprema. Cette pompe funebre a été exécutée fur les deffins du Sr. Martinés, architecte du roi, éleve du fameux Don Philippe Juvara, & du comte Alfieri, connu par différentes compofitions qui font honneur à fon talent, & à fa profonde connoiffance de l'art.

LIVOURNE (le 21 Juin.) Le grand duc, notre fouverain,arriva le 13 de ce mois, en cette ville > accompagné du comte François de Collorédo. S. A. R., après avoir donné une audience publique, alla vifiter le confervatoire des écoles de Ste. Julie & fe rendit l'après-midi, à bord de la chaloupe royale, à la rade de ce port, pour y voir l'efeadre ruffe, qui la falua par une triple décharge de fon artillerie. Ce prince monta à bord du vaiffeau amiral, où on lui fervit des rafraîchiffemens. De retour au palais, il continua de donner audience, & partit le 16 pour Pife,

La découverte de la confpiration tramée dans l'ifle de Corfe, & dont les auteurs ont été conduits dans les prifons, prouve de plus en plus que le fyftême de bonté & de clémence dont on a ufé envers les rebelles, eft un moyen infructueux pour les ramener à l'obéiffance; ces brigands atroces fe font perfuadés que les François

e les ménageoient que parcequ'ils en avoient peur; & d'après cette opinion, ils fe font portés à de nouveaux excès en dévaftant les habitations & les campagnes. Leur audace s'étant accrue avec leur nombre, ils ont attaqué les troupes de S. M. T. C. dans la pieve de Niolo & à Campoloro. Le comte de Gafforio, colonel du régiment provincial de Corfe, qu'on dit avoir été bleffé dans cette occafion, les a repouffes avec perte, & contraints de regagner leurs repaires. On difperfoit dans le même tems 100 de ces bandits dans les environs d'Ajaccio, où ils fe tenoient pour intercepter les convois qu'on envoyoit à Corté. Sur la nouvelle qu'un bâtiment étranger avoit paru fur la côte, on a fait partir de Baftia pour Aleria, plufieurs mulets chargés de munitions de bouche & de guerre, & de 8 mille fufils. On compte parmi les chefs fanatiques des brigands Pace-Maria, Antoine Matra, Charles Salicetti, & Charles Guiducci. Seize de leurs adhérens font partis d'Ajaccio fur un paquebot qui les conduit à Toulon; quelques-uns font condamnés aux galeres, & les autres à être envoyés dans les colonies de l'Amérique.

ESPAG N E.

MADRID (le 9 Juin.) Le divertiffement des Parejas une forte de carroufel) a commencé hier à la cour. Les chevaliers habillés à l'ancienne maniere efpagnole, étoient divifés en 4 quadrilles. Le premier en rouge, avoit à la tête le prince des Afturies; le fecond, habillé en bleu, avoit pour chef infant don Gabriel; le troifieme, en verd, étoit conduit par l'infant don Louis. & le duc de Médina-Sidonia, grand-écuyer du roi, étoit à la tête du quatrieme, habillé en jaune. Tous les ambaffadeurs & miniftres étrangers,

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