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Les députés de la commune de Paris ont sans doute compté singuliérement sur l'indulgence de saint Remi, qui s'accommodant au génie de notre siecle, voudra bien laisser transférer de Reims à Paris, la fiole bénite, connue sous le nom de sainte Ampoule.

On a demandé à passer à l'ordre du jour. Alors M. Merlin a paru à la tribune pour proposer plusieurs articles sur les droits féodaux, que je remets à demain afin d'entrer tant soit peu dans la séance du soir.

Séance du soir, 26 juillet.

Je passe sous silence les débats pour donner

le décret.

Décret relatif à Montauban.

« L'assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, déclare que l'information commencée devant le juge de Montauban, relativement à l'événement arrivé dans cette ville le ro mai, demeure comme non-avenue; ordonne que son président se retirera par-devers le roi pour supplier sa najesté de donner des ordres afin que l'ancienne garde nationale Montalbanoise soit rétablie comme elle étoit avant l'ordonnance des officiers municipaux de ladite ville, en date du 6 avril dernier; laquelle ordonnance, ainsi que tout ce qui a été fait en conséquence, est déclaré comme non-avenu, sauf aux citoyens actifs qui n'étoient pas de ladite garde ancienne à s'y faire incorporer, conformément au décret du 12 juin dernier.

L'assemblée nationale décrete; 1o. qu'il sera informé devant les officiers municipaux à Toulouse, juges ordinaires en matiere criminelle,

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la diligence de la partie publique de tous les événemens arrivés à Montauban, le 10 mai, ainsi que de tous ceux qui y sont relatifs, tant antérieurs que postérieurs à ladite époque, & circonstances & dépendances, à l'effet de quoi les pieces déposées au comité des rapports se-tont incessamment adressées à ladiie partie publique; 2°. que jusqu'à ce qu'il soit statué sur ladite information les membres du corps & conseil municipal de Montauban demeureront suspendus de leurs fonctions, à l'époque de la notification qui leur en sera faite du présent décret; 3°. que les administrateurs du département du Lot, ou de son directoire, commettront, sur l'avis du directoire de district de Montauban, six personnes pour remplir dans cette ville provisoirement les fonctions municipales, dont un sera par eux indiqué pour faire les fonctions de Maire, & un autre pour remplir celles de procureur de la commune; 4°. que la notification du présent décret & de la commission qui sera nommée sera faite au même instant aux officiers qui composent la municipalité de Montauban, par les administrateurs du département ou du directoire.

L'assemblée nationale charge son président d'écrire à la troupe de Maréchaussée, à Montauban, pour lui témoigner sa satisfaction de la conduite qu'elle a tenue le 10 mai.

Le président est chargé de se retirer pardevers le roi, pour le prier d'envoyer d'autres troupes à la place du régiment de Languedoc. »

La suite à demain.

LE HODE Y.

Suite de la Séance du soir, 26 juillet 1790.

Après la lecture de plusieurs adresses, qui, presque toutes, entr'autres celle des administrateurs du département de l'Hérault rendent compte du serment solemnel prêté le 14 juillet. Le maire de Montauban, un officier municipal & le procureur-syndic de la commune, d'une part; & de l'autre, les députés de l'ancienne garde nationale de cette ville, ont été admis à la barre. Le procureur-syndic a porté la parole, au nom de la municipalité, en ces termes : Nous paroissons devant cette auguste assemblée, poursuivis par l'opinion publique. Nous ne nous en plaignons pas elle a une source trop noble & trop pure on nous a peints par tout le royaume comme les ennemis d'une constitution à laquelle nous sommes attachés autant que personne. Ceux qui se sont laissés prévenir n'ont pas entendu nos sermens, à notre installation, renouvellés le 14 juillet dernier. Nos adversaires, car nous ne donnerons jamais le nom d'ennemis à nos freres nous font de grands reproches : nous serions bien coupables, s'ils étoient fondés. Les municipaux ne se sont jamais appliqués qu'à prévenir les troubles : la source n'en est point dans le fanatisme; mais ils ne songecient pas à repousser la calomnie. La procédure s'instruit en ce moment ils en regardent l'issue comme le rempart de leur innocence. Eh! qui sont nos accusateurs ? Nous ne les connoissons point. Quel est le crime qu'on nous impute? Nous n'en savons rien où en sont les preuves ? Nous ne le Tome XIV. N°. 3.

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savons pas davantage. Ce n'est que par le bruit public , par les feuilles imprimées, enfin par des voies indirectes, que nous apprenons ce dont on nous accuse. Nous méprisons ces vils canaux de la calomnie; cependant je vais examiner les imputations qui nous sont faites. L'ordonnance de la municipalité du 29 mars, rendue sur mon réquisitoire, étoit fondée sur les décrets de l'assemblée nationale, qui subordonnent la force militaire au pouvoir civil. Vous l'avez ratifiée vousmêmes cette ordonnance, & dès-lors elle n'a pas besoin d'apologie. Par une autre ordonnance du 10 avril, la municipalité a créé huit nouvelles compagnies; mais en cela elle a accédé aux pétitions de plus de 300 citoyens actifs, dont plusieurs soldats de la garde nationale, sans y comprendre les volontaires. Cette affaire se termina avec la plus grande harmonie dans le conseil militaire, qui renvoya son assemblée au lendemain 10 mai. Me voici arrivé au jour malheureux on blâme les municipaux de n'avoir pas déployé un grand appareil; mais ne se flattet-on pas toujours de quelque espoir? On leur reproche de n'avoir pas empêché la livraison des armes; mais l'officier municipal n'a pas été le maître de s'y refuser son procès-verbal en fait foi. On leur reproche de n'avoir pas requis à tems le régiment de Languedoc; mais il fut requis peu après la maréchaussée ; & s'il n'est pas arrivé assez tốt c'est que les casernes situées de l'autre côté du pont, sont à près d'une lieue de distance de la maison commune. On leur reproche de n'avoir pas publié la loi martiale : mais qu'auroit-elle fait dans l'instant? Cependant le drapeau rouge fut déployé.

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Le complot & l'attaque désignent les coupapables. Or ouvrez le mémoire de la garde nationale. vous voyez qu'elle marcha, sans avoir reçu d'or. dres, pour s'emparer de la maison commune; qu'elle y prit poste de même sans ordre. Il se forme un attroupement dans les environs. La municipalité dit à ces gardes nationales de se retirer, ils répondent alors que leur chef leur a ordonné de rester.... Et cependant s'ils s'étoient retirés, le soleil n'eût pas éclairé la catastrophe. Ils disent, dans leur mémoire, qu'on tira dans les rues des coups de fusil sur leur commandant; où sont les preuves? où sont les témoignages? Ils disent qu'ils n'avoient point de munitions; & cependant les procès-verbaux des chirurgiens attestent qu'il y a eu plus de 18 hommes du peuple blessés de feu tirés du corps de par des coups

garde.

:

Il me reste à justifier la proclamation du lendemain II mai. Elle a été donnée dans l'effusion d'une douloureuse sensibilité. Le peuple s'étoit vu attaqué il avoit essuyé le premier feu: il avoit cédé à nos prieres: il avoit abandonné sa vengeance; falloit-il l'exciter encore par une rigueur hors de saison, plutôt que de lappaiser? La proclamation fit renaître le calme. Elle ordonnoit de ne rapporter les armes que quelques jours après; mais marquer de l'empressement pour les ravoir, n'eût-ce pas été donner à penser au peuple que le fatal événement pouvoit se répéter. Le cœur du peuple étoit ulcéré : il falloit des ménagemens, des égards pour calmer son effervescence: & lorsqu'on dit que s'il y a eu des blessés parmi le peuple, c'est l'effet des balles

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