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et médecin du roi en ce pays, pour insinuer et persuader qu'étant enceinte, elle aurait fait faire ces remèdes pour faire dissiper sa prétendue grossesse; le P. Joseph a même surpris la religion de M. l'évêque par cette imposture criante, ce qui l'a sans doute porté à lui défendre de la recevoir au sacrement de pénitence pour satisfaire à son devoir pascal; le même Père avait donné à la dite le Boullenger, dès le 20 avril dernier, un billet contenant son refus de lui permettre d'aller à confesse ailleurs pour faire ses pâques, et ce billet est un libelle diffamatoire contre leur fille, puisqu'il porte en termes exprès que M. l'évêque ne la croit pas en sûreté de conscience en restant dans la maison où elle est... P Deux crimes bien distincts reprochés au P. Denis, dans cette requête diffamation de la fille Le Boullenger; refus de l'entendre en confession.

Le Conseil, au lieu de renvoyer de suite cette affaire devant l'officialité, la transmet à la prévôté de Québec.

Mais le chanoine Calvarin (1), « faisant les fonctions de promoteur en l'officialité, vient aussitôt faire opposition: « Qu'il plaise à la cour d'ordonner, dit-il, que les ecclésiastiques et clercs seront maintenus et gardés dans leurs privilèges; que Le Boullenger, sa femme et leur fille seront renvoyés en l'officialité pour y continuer les procédures commencées à l'encontre du P. Joseph Denis, et que défense soit faite au sieur d'Artigny (2), faisant les fonctions de lieutenant particulier en la prévôté, d'en connaître, et aux dits Le Boulenger, sa femme et leur fille de procéder ailleurs sur le fait en question, à peine de nullité des procédures, et de tous dépens, dommages et intérêts... »

Mar de Saint-Vallier intervient lui-même, et envoie au Conseil un billet signé de sa main, « par lequel il déclare qu'il garde la requête présentée à M. l'official par la damoiselle Saint-Pierre, en

de la médecine. Il repassa au Canada en 1697, en même temps que Mer de Saint-Vallier. Champigny écrivait à ce sujet au ministre le 26 août :

« Les sollicitations de M. l'évêque de Québec ont ramené ici cette année le sieur Sarrazin. Il a rendu, dans la traversée, de très grands services dans la Gironde, où il y a eu quantité de malades du pourpre, et particulièrement à M. l'évêque de Québec, qui l'a été dangereusement, et qu'il a tiré d'affaires... » (1) Un Breton, originaire de Vannes.

(2) Louis Rouer d'Artigny, fils de l'ancien doyen du Conseil, Rouer de Villeray.

original, pour l'envoyer à M. le comte de Pontchartrain avec les autres pièces du procès. »

Le Conseil, ayant égard à l'opposition formée par M. Calvarin, renvoie l'affaire Le Boullenger devant l'officialité. Mais il ordonne en même temps qu'il soit nommé par M. l'évêque un autre official et un autre promoteur,» le présent official, M. Thibout (1), ne pouvant servir, « parce qu'il a été assigné comme

(1) Encore un Normand, de la ville de Rouen. Il vint au Canada en 1710, envoyé pour le séminaire de Québec par les Missions Étrangères de Paris : L'évêque de Rosalie avait voulu l'emmener en Chine, et lui avait même déjà fait apprendre les principes de la langue chinoise, lorsque les nouvelles de la persécution le firent consentir à le céder au Canada. Il avait une fort belle voix, mais une poitrine délicate, affaiblie encore par ses mortifications. M. Tremblay, qui le connaissait bien, eut soin de recommander à M. de Maizerets de le modérer; car, dit-il, « il a pensé mourir au séminaire de Paris, en << ne voulant faire qu'un repas par jour en jeùnant. » (Hist. manuscrite du séminaire de Québec).

Dans ses difficultés avec le Chapitre, le séminaire de Québec l'envoya deux ans en France pour surveiller ses intérêts; mais il parait que le Chapitre le regardait comme son meilleur défenseur ce qui faisait dire plus tard à M. Jacrau, un autre directeur du séminaire, « qu'il était de corps du séminaire de Québec, et d'esprit du Chapitre; » et à un autre chroniqueur : « Quel homme que ce M. Thibout, que le séminaire et le Chapitre accusent des dispositions les plus opposées! »

Thomas Thibout succéda, en 1711, à M. Pocquet comme curé de Québec; et c'est à sa demande que Mar de Saint-Vallier accorda au séminaire, le 8 juillet 1717, « la permission de dire la messe à la chapelle de la Canardière ». Puis, en 1723, il fut aussi nommé supérieur du séminaire pour remplacer M. Glandelet mais il mourut le 12 avril de l'année suivante, âgé de 43 ans. « Il passe, dit l'auteur de l'Histoire manuscrite du séminaire, pour avoir été favorable au jan-énisme. M. de Latour ne dit pas un mot pour le justifier, non plus que M. de Villermaula, du séminaire de Saint-Sulpice.

« Nous n'avons rien trouvé qui coufirme ou qui contredise l'accusation portée contre M. Thibout. Nous ferons seulement une remarque :

« M. de Latour dit que « Mar de Saint-Vallier fut toujours très attaché à la <«< saine doctrine, et toujours infiniment éloigné de toutes les nouvautés pro<< fanes. » Or, est-il croyable qu'un évêque du caractère de Mar de Saint-Vallier eût souffert sans réclamation dans sa propre cathédrale un curé dont la doctrine n'eût pas été bien sûre? »>

Il est certain, cependant, que M de Saint-Vallier, écrivant un jour à la cour au sujet de M. Thibout, disait « qu'il s'acquittait de ses fonctions de curé avec assez de capacité, mais qu'il était fort haut sur la Doctrine et la conduite, et que lui (évêque) ainsi que les Jésuites avaient eu des affaires avec lui » à ce sujet. (Archives de la marine, Canada, correspondance générale, vol. 35).

témoin, ni M. Calvarin, comme promoteur, parce qu'il a enfreint les ordonnances, « en communiquant à M. l'évêque toutes les pièces du procès. ›

M. Le Picart, chanoine de la cathédrale, fut nommé vice-gérant de l'officialité, et l'affaire fut informée devant lui.

XV

L'OEUVRE PASTORALE DE MET DE SAINT-VALLIER.

Mer de Saint-Vallier ne fut pas toujours en désaccord avec M. de Vaudreuil au contraire, tous deux s'entendirent, en maintes occasions, pour assurer le succès d'œuvres importantes. C'est ainsi, par exemple, que nous les voyons, en 1720, s'occuper de concert à fixer les limites des différentes paroisses de la colonie.

:

Un travail de ce genre avait déja été fait autrefois par l'intendant de Meulles et le grand vicaire de Mar de Laval ils avaient formé une quarantaine de districts paroissiaux. Mais depuis ce temps, la colonie avait beaucoup augmenté au recensement de 1710, elle renfermait 16.355 âmes, tant Canadiens que Français, établis, non compris les officiers, les troupes et les ecclésiastiques (1); » il y en avait 30.000 en 1724 (2). Cette population, disséminée çà et là sur les deux rives du fleuve Saint-Laurent, se partageait, un peu arbitrairement, en un certain nombre de paroisses ou missions. Il fallait en créer de nouvelles; il fallait diviser les anciennes, ou en changer les limites: souvent les colons avaient des espaces immenses à parcourir pour se rendre à leur église; quelquefois même ils avaient à traverser le fleuve.

M. de Vaudreuil et l'intendant Bégon (3) députèrent M. Collet (4),

(1) Archives de la marine, Canada, correspondance générale, vol. 31, État de

la colonie au mois de novembre 1710.

(2) Ibid. vol, 46, Lettre de M. de Louvigny au ministre, 1724.

(3) « M, Bégon, nommé intendant à la place de M. Raudot, en 1710, ne passa au Canada que l'année suivante. C'était un ami de M. de Brisacier. M. Bégon avait longtemps aidé son père dans l'intendance de Rochefort, et avait pu acquérir de l'expérience.

<< Il avait un frère abbé, qui était doyen de La Rochelle et député de cette province à l'Assemblée du Clergé. Il avait été élevé chez les Sulpiciens et logeait chez eux à Paris. » (Histoire manuscrite du séminaire de Québec).

(4) Lorsque M. Collet mourut, en 1727. le gouverneur, M. de Beauharnais,

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procureur général au Conseil Supérieur, en qualité de commissaire, dans les différentes paroisses de la colonie, pour convoquer les habitants, entendre leurs demandes et leurs plaintes, et dresser des procès-verbaux de commodo et incommodo. Le commissaire, accompagné d'un greffier, mit deux mois seulement à faire sa tournée (1), et s'acquitta de sa tàche avec beaucoup d'ordre et d'attention. D'après les procès-verbaux qu'il rapporta, le gouverneur et l'intendant, conjointement avec l'évêque,» formèrent quatre-vingt-deux districts paroissiaux, et en déterminèrent les limites et l'étendue, décidant en même temps à qui les fidèles de telle localité devaient payer la dime; puis ils envoyèrent à la cour leur Règlement, daté du 20 septembre 1721, pour le faire confirmer par un arrêt du Conseil d'État, afin de prévenir les difficultés qui pourraient naître dans la suite sur son exécution (2). » Cet arrêt fut rendu le 3 mars 1722, puis enregistré au Conseil Supérieur le 5 octobre de la même année (3).

Voici les noms des différents districts paroissiaux dont les limites furent fixées par ce Règlement :

Dans le gouvernement de Québec, côté du nord, en remontant le fleuve Saint-Laurent :

Baie Saint-Paul. La Petite-Rivière. Saint-Joachim. Sainte-Anne. Le Château-Richer. L'Ange-Gardien. - SaintFrançois. Saint-Jean. Saint-Laurent. La Sainte-Famille. Beauport. Charlebourg. Québec.

Saint-Pierre.

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Sainte-Foye. La Vieille-Lorette. Demaure. Neuville. Portneuf dit le Cap-Santé. Eschambault et la Chevrotière. Les Grondines. - Sainte-Anne, près Batiscan.

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écrivit à la cour: « La colonie vient de faire une très grande perte par la mort de M. Collet, procureur général du Conseil, qui, avec sa grande capacité, avait le talent d'accommoder une infinité de procès. >>

(1) La navigation sur le fleuve était encore la voie ordinaire : « Il n'y a point de chemin établi par terre de Québec à Montréal, » écrit en 1727 l'intendant Dupuy. Ce chemin, cependant, était à la veille de s'ouvrir M. de Boisclair, grand voyer, écrit au ministre le 31 octobre 1735: « Les chemins sont présentement faits de façon que les voitures peuvent rouler d'une côte à une autre. J'ai descendu, cette année, au mois d'août dernier, en chaise, en quatre jours et demi de Montréal à Québec. ›

(2) Archives de la marine, Canada, correspondance générale, vol. 43, Lettre de MM. de Vaudreuil et Bégon au ministre, 1721.

(3) Edits et Ordonnances, t. I. p. 443.

Côté sud, en remontant le fleuve Saint-Laurent :

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Les Camouraska. La Bouteillerie, dit la Rivière-Ouelle. La Pocatière ou Grande-Anse. Les Aulnets.

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Port-Joly.

Bon-Secours. Le Cap Saint-Ignace. La Pointe à la Caille. Saint-Pierre. Bellechasse. La Durantaye. -Saint-Michel.

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Beaumont. La Pointe-de-Lévy. Saint-Nicolas.

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- Tilly.

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Dans le gouvernement des Trois-Rivières, côté du nord, en remontant le fleuve :

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Trois-Rivières. Le Fief des Pères Jésuites.

Les

Grosbois, dit les Grande et Petite-Rivière Ouamachiche. La Rivière-du-Loup, sur le lac Saint-Pierre.

Masquinongé.

Côté du sud, en remontant le fleuve :

Saint-Pierre, Gentilly, Cournoyer. - Bécancourt. - Godefroy et Tonnancourt. Nicolet, l'Isle Moras et la Baie Saint-Antoine. Saint-François sur le lac Saint-Pierre.

-

Dans le gouvernement de Montréal, côté du nord, en remontant le fleuve :

L'Isle du Pads. Berthier et Dorvilliers.

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Dautray et Lanoraie. Lavalterie. Saint-Sulpice. Les Isles Bouchard. Repentigny. La Chesnaye. Terrebonne, et le Fief des héritiers l'Angloiserie et Petit. L'Isle-Jésus. La Rivière des Praieries. La Pointe-aux-Trembles. Saint-Laurent. La Chine. La Pointe-Claire. SainteAnne-du-Bout-de-l'Isle.

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Saurel. Saint-Ours. Contrecœur. - Verchères.

Montréal.

- Varenne.

- Boucherville. Chambly. Longueuil. La Prairie-de-laMagdelaine.

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Il était impossible que le Règlement de 1722 contentât tout le monde : aussi ne faut-il pas s'étonner de trouver dans les archives un grand nombre de protestations. Nous y voyons, entre autres, une requête et liste des habitants de la côte Saint-Ange, qui réclament contre leur réunion aux paroisses de Saint-Augustin et de Sainte-Foye; une « requête des habitants de la seigneurie Saint-Pierre, réclamant contre l'annexion de cette seigneurie à la paroisse de Bécancour; » puis la plainte de Joachim Fornel (ou

TONE IX.

I. - 3.

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