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périeure à celle des millions de bras armés pour la Oct. 1791.

« défendre... »

L'avenir devait se charger de prouver que notre patrie n'était point si prochainement réservée aux bénéfices de cette liberté idéale; mais alors on les croyait possibles, on ne s'en jugeait séparé que par des orages ou des résistances de peu de portée; alors les illusions que nourrissait la Fayette étaient celles de tout le parti constitutionnel dans le pays et dans l'assemblée.

La Fayette se rendit en Auvergne, comblé des témoignages de la reconnaissance et du respect de la commune et de la garde nationale de Paris, et accompagné en même temps, dans sa retraite, par le concert des malédictions et des outrages des clubs et de la presse républicaine. Pendant que le conseil général faisait frapper en son honneur des médailles d'or, dont l'Académie des inscriptions était chargée de composer les emblèmes; tandis que l'armée parisienne lui votait une adresse et une épée; les journaux rédigés sous l'influence du jacobinisme ne trouvaient pas d'expressions assez énergiques pour reprocher au général ce qu'ils appelaient ses bassesses, ses trahisons et ses crimes. Il fut donné à cet homme d'être à la fois détesté dans l'antre des Cordeliers et dans les salons de Coblentz; et, sous d'autres noms et en des temps bien divers, sa destinée sous ce rapport ne changea jamais : ceux qui ont vécu durant ce dernier demi-siècle en rendront témoignage. Pour se conformer aux dispositions impératives de la loi, la Fayette ne fut point remplacé dans le commandement général de l'armée

Oct. 1791. parisienne: on se borna à statuer que les chefs des diverses légions exerceraient successivement, et à tour de rôle, l'autorité sur la garde nationale tout entière.

Démission de Bailly. Péthion

est élu maire.

que

Mais, dès qu'il fut question de pourvoir au remplacement de Bailly, dont la retraite devenait également définitive, le parti constitutionnel porta ses vues sur la Fayette, et le général consentit à accepter la candidature. Cependant, le résultat des élections fut loin de lui être favorable: sur 10,632 votants, il n'obtint 3,125 suffrages contre 6,708 donnés à Péthion. Ce dernier fut donc élu maire. Manuel, autre républicain exalté, fut nommé procureur de la commune et eut Danton pour substitut adjoint. Les jacobins et les cordeliers arrivèrent ainsi à se partager l'influence municipale. On se tromperait si, dans les chiffres qui précèdent, on croyait voir l'indication exacte des forces respectives des partis le général la Fayette l'eût sans doute emporté sur son concurrent, si la cour, qui le haïssait d'une haine sans intelligence, et qui redoutait de voir en lui un nouveau maire du palais, ne s'était réunie aux exaltés pour faire échouer sa candidature.

Péthion, à peine installé, se fit rendre compte de la situation des services qu'il aurait désormais à diriger. La trop facile surveillance de Bailly avait laissé introduire des abus auxquels le nouveau maire se hâta de porter remède; Péthion introduisit un ordre plus sévère dans l'administration des subsistances et dans la gestion de la police urbaine. Si les approvisionnements étaient assurés, circonstance d'un haut intérêt lorsqu'il

s'agit de pourvoir aux besoins d'une population im- Oct. 1791. mense, l'état de la police se présentait sous un aspect moins favorable: les rues de Paris étaient sales ct pleines de décombres; les vols, les assassinats et les actes de rapines ou de brigandages, s'étaient multipliés d'une manière effrayante, à la faveur des désordres publics et de l'affaiblissement de toute autorité préventive et répressive; la garde nationale faisait son service avec tiédeur et inexactitude. Péthion mit un zèle louable à diminuer ou à faire disparaître ces inconvénients, fruits d'une mauvaise police, et, sous ce rapport, il obtint des résultats d'une importance d'ailleurs restreinte, lorsqu'on les compare avec les besoins d'une société en proie à la violence et à l'anarchie, et que de médiocres remèdes ne pouvaient guérir.

examine

moyens de

contraindre

le clergé

à l'apostasie.

Cependant l'assemblée nationale législative se trou- L'assemblée vait déjà en présence des difficultés que lui avait léguées les la Constituante en provoquant sur toute la surface du pays un vaste schisme religieux : au lieu de répudier ce triste héritage, elle l'accepta avec toutes ses conséquences inévitables : l'injustice, la violence, la persécution. Ce fut encore à Couthon qu'échut le rôle de soulever cette question désastreuse : sur sa proposition, l'assemblée décida qu'elle ne tarderait pas à s'occuper des mesures à prendre pour réprimer la généreuse résistance de cette portion du clergé qu'on appelait réfractaire, parce qu'elle refusait de prêter serment à la constitution civile imposée à l'Église de France, ou parce que, l'ayant prêté par entraînement, sinon par crainte, elle s'empressait de désavouer cet engagement funeste et de manifester son repentir.

Oct. 1791.

Rapport

de Gensonné

Peu de temps avant sa retraite, l'assemblée constituante avait chargé deux commissaires choisis par elle, et de Gallois. Gallois et Gensonné, d'étudier la question religieuse. dans certains départements de l'Ouest, où elle excitait des troubles, et spécialement dans ceux de la Vendée et des Deux-Sèvres. Ces commissaires vinrent déposer à la barre de l'assemblée législative' un rapport empreint de toutes les préventions philosophiques dont leur esprit était inspiré. A travers l'injuste mépris que Gallois et Gensonné se plaisaient à déverser sur ceuxqu'ils appelaient des prêtres égarés ou factieux, et sur les populations avides d'entendre leur parole et d'imiter leurs exemples, on se fera sans peine une idée des dispositions qui se manifestaient déjà dans une contrée destinée à de généreuses luttes. Sous ce point de vue, leur travail est précieux. C'est donc dans ce rapport et dans les faits qu'il signale que nous aurons à chercher l'origine des guerres alors prochaines de la Vendée; elle s'y trouve clairement indiquée dans le passage suivant : « L'époque de la prestation du serment ecclé<«<siastique a été pour le département de la Vendée la «< première époque de ses troubles; jusqu'alors le peu

ple y avait joui de la plus grande tranquillité. Éloi« gné du centre commun de toutes les actions et de <<< toutes les résistances, disposé par son caractère natu«< rel à l'amour de la paix, au sentiment de l'ordre, au << respect de la loi, il recueillait les bienfaits de la révo<«<lution sans en éprouver les orages... Sa religion, « c'est-à-dire la religion telle qu'il la conçoit, est de

Séance du 9 octobre 1791.

<«<< venue pour lui la plus forte et pour ainsi dire l'uni- Oct. 1791. « que habitude de sa vie... La constance du peuple de << ce département dans l'espèce de ses actions religieu<< ses, et la confiance illimitée dont y jouissent les prê<< tres auxquels il est habitué, sont un des principaux « éléments des troubles qui l'ont agité et qui peuvent (( l'agiter encore... »

Plus loin, le rapport mentionnait une lettre pastorale, dans laquelle étaient résumées les instructions données par l'évêque orthodoxe de Luçon à tous les curés demeurés fidèles de son diocèse. Cette lettre traçait à ces ecclésiastiques la marche qu'ils avaient à suivre en face des entreprises du clergé intrus; elle leur défendait de continuer à célébrer les saints mystères dans les églises dont les prêtres schismatiques se seraient emparés; elle leur prescrivait de chercher au plus vite un lieu où les catholiques pourraient tenir leurs pieuses assemblées : « Sans doute, y était-il dit, il sera difficile « de trouver un local convenable, de se procurer des « vases sacrés et des ornements alors une simple << grange, un autel portatif, une chasuble d'indienne <«< ou de quelque autre étoffe commune, des vases d'étain, suffiront, dans ce cas de nécessité, pour célé«<brer les saints mystères et l'office divin.

« Cette simplicité, cette pauvreté, en nous rappelant << les premiers siècles de l'Église et le berceau de notre << sainte religion, peut être un puissant moyen pour « exciter le zèle des ministres et la ferveur des fidèles. Les premiers chrétiens n'avaient d'autres temples <«< que leurs maisons; c'est là que se réunissaient les << pasteurs et le troupeau pour célébrer les saints mys

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