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venir occuper celle des Cordeliers. Il est vraisemblable que ce sont eux que le préopinant a vus passer. ?

N... Les soldats que j'ai vus étaient habillés en blanc; ce n'étaient donc pas les Marseillais. ».

M. Beaumier fait de nouvelles observations sur l'utilité dont il est de conserver le roi au milieu de nous, et communique l'arrêté suivant qu'il propose à toutes les sections dans la circonstance actuelle.

› La commune de Paris, considérant que l'art. VIII de la déclaration du prince de Brunswich contient des menaces désastreuses contre la ville de Paris en particulier, etc., arrête ce qui suit :

1° Qu'il sera adressé une pétition au corps législatif pour lui demander de décréter, comme mesure de précaution et de sûreté générale, l'otage de Louis XVI et de la famille royale.

› 2o Que, vu l'urgence du péril, la commune de Paris emploiera, provisoirement et sans délai, tous les moyens qui sont en sa puissance pour empêcher l'évasion du roi et de sa famille..

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M. Antoine. Sans doute, messieurs, parmi les mesures à prendre qui vous ont été présentées, celle de vous rendre à vos sections, où chacun de vous pourra délibérer utilement, est une des plus pressantes. Je fais donc la motion de lever la séance et chacun se retire dans ses sections. ›

que

-Aussitôt cette motion faite, M. Antoine sort de l'assemblée ; il est suivi d'un très-grand nombre de membres.

M. Merlin demande que, si la société juge à propos d'interrompre sa séance, elle forme au moins un comité qui soit permanent, et auquel on pourra apporter tous les renseignemens auxquels les circonstances pourraient donner lieu.

M. Réal. Puisque le roi doit partir, je crois important de nous occuper de ce qui a trait au départ du roi. Si, comme on vous l'a dit, il y a 3,600 Suisses dans le château, il faut qu'il y ait 1,200 personnes vêtues en suisses; car, ce régiment, porté au complet, n'est que de 2,400 hommes: mais, en outre, il n'est pas au com

plet, et, d'après les renseignemens certains que je me suis procurés, en défalquant les malades, il n'y a d'effectif que douze à treize cents hommes. Le surplus de ce qui porte l'uniforme suisse sont, sans doute, les gardes du roi, qui sont toujours stationnaires à l'École militaire; il serait donc très-important, je crois, de jeter les yeux sur ces rassemblemens, et la première demande faite par les sections de Paris, c'est que le maire ou la police s'occupassent, dans la journée, du désarmement réel de l'École militaire, et la seconde, que l'assemblée nationale s'occupât du départ des Suisses hors de Paris. »

- Les fédérés marseillais, réunis à une troupe de canonniers de Paris, défilent dans la salle au milieu des acclamations de l'assemblée et des citoyens des tribunes.

N.... Rien de plus certain, messieurs, qu'il ne s'ourdisse une trame contre les patriotes. M. Petit-Bois, député de la ville de Rennes, et qui tenait un assez grand train, a renvoyé ses domestiques, vendu ses chevaux et ses malles sont faites pour partir, Beaucoup d'autres députés du même bord font les mêmes dispositions. Leur projet semble être de faire en sorte que, jeudi prochain, jour de la grande discussion, l'assemblée nationale ne se trouvant pas assez nombreuse, ne puisse pas être compétente. ›

M. Duhem. Il y a long-temps que l'assemblée nationale est instruite que les députés se disposent à partir; mais, sur cela, je pense que nous devons passer à l'ordre du jour et leur souhaiter un bon voyage, parce qu'il restera toujours un assez grand nombre de bons députés pour sauver la patrie.

D

M. Bourdon de la Crosnière reproduit la motion faite d'établir un comité permanent, et annonce que la section des Gravilliers a arrêté que cent de ses citoyens formeront une patrouille toutes les nuits autour du château, de sorte que si les autres sections en font autant, il se trouvera cerné par une armée de 4,800 hommes. Il demande que chaque citoyen communique cet arrêté à sa Section.

On applaudit à cet arrêté, et on passe à l'ordre du jour sur la motion du comité permanent.

Les citoyens qui ont signé, sur l'autel de la patrie, une pétition qu'ils se disposent à porter à l'assemblé nationale, sont admis à lire leur pétition.

M. Chabot. Depuis trop long-temps le peuple français fait la guerre au despotisme avec des armes que le despotisme détruit. Il fait la guerre par des pétitions et ce sont des coups qu'il faut porter.

› Il est un grand mot que je crois devoir vous dire : vous demandez la déchéance; eh bien! la déchéance n'est pas dans la Constitution. La Constitution veut que le roi soit censé avoir abdiqué. Or, sur ce point, ce n'est point l'assemblée nationale seule, ce sont tous les citoyens qui sont juges de la question de savoir si le roi est censé avoir abdiqué...

> Quelque forme que l'assemblée nationale emploie, elle vous donnera toujours un roi, un régent, et, de tout cela, le meilleur n'en vaut rien.

> Ainsi, plus de pétition : que les Parisiens envoient leur adresse à toutes les communes, à toutes les sociétés populaires ; qu'elle revienne couverte de signatures et, avant un mois, vous aurez le vœu unanime des Français. Alors vous direz à ceux qui sont entichés d'un roi, qu'ils passent à Coblentz et nous les combattrons

ouvertement. »

M. Merlin. Plus d'adresses, plus de pétitions! il faut que les Français s'appuient sur leurs armes, leurs canons et qu'ils fassent la loi ! »

La séance est levée.

Aspect de Paris, dimanche 5 août.

On peut déjà, d'après ce que nous avons vu, juger de l'émotion qui régnait dans les quartiers qui avoisinent les Tuileries. Le long cortége des députés des sections stationnant dans le voisinage de l'assemblée nationale, la promenade armée des canonniers et des Marseillais, tout manifestait de l'agitation dans la ville. En même temps, des réunions tumultueuses continuaient

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dans les sections. Ainsi, ce jour de fête fut un jour tout occupé de mouvemens et de travaux politiques.

L'insurrection méditée par la section Mauconseil n'eut point lieu; nous verrons bientôt, par suite de quelles démarches. Mais tout le monde néanmoins était dans l'attente, le Château comme la population.

>

Les Tuileries avaient été dans l'éveil toute la nuit : deux ministres, de Joly et Dubouchage ne les avaient pas quittées. Voulant sans doute, dans le cas d'une attaque, avoir la garantie de magistrats du peuple, ils avaient écrit à deux officiers municipaux de Passy, de venir avec leurs écharpes. Mais la lettre ne parvint pas; elle fut arrêtée aux Champs-Élysées par une patrouille, portée à la commune, et bientôt rendue publique par toutes les voies de la presse. Ce fut l'occasion de commentaires nombreux, et une preuve à l'appui du projet de fuite que l'on attribuait au roi.

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Les journaux, au reste, n'eurent aucune part à toute cette agitation; à peine même en firent-ils mention le lendemain. On comprend facilement le motif de ce silence inaccoutumé : les patriotes étaient occupés de préparatifs d'action; Brissot et ses amis se gardaient d'exciter un mouvement qui menaçait d'éclater; loin de là, ils entretenaient le public de petits succès sur les frontières, ou d'espérances du même genre. On venait, disaientils, de reprendre Bavay sur les Autrichiens; on venait de leur enlever, par surprise, un corps de chasseurs tyroliens; en un seul jour, plus de sept cents déserteurs autrichiens s'étaient rendus aux Français. Dans la grande question, la voix des clubs et celle des sectionnaires avaient remplacé la presse.

Les royalistes, au contraire, faisaient vendre dans les rues des contrefaçons du Père Duchène et de la Sentinelle. Le Journal de Paris publiait un de ses supplémens, où F. de Pange calomniait réellement, d'une manière absurde, la société des Jacobins. En voici quelques passages :

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< Tantôt vous voyez la société occupée de nommer des défen

seurs officieux à un meurtrier patriote... Ici, c'est Roberspierre qui

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s'avance, confiant à ses frères et amis combien il lui serait doux de faire assassiner M. de La Fayette.... L'un d'eux, désignant, selon l'usage de cette secte, ses adversaires, par le nom de conspirateurs, dit: La cour conspire; les généraux conspirent; les directoires conspirent; les tribunaux conspirent; TOUT CONSPIRE. Quand les tyrans craignent des conspirations, ils s'entourent de gardes. Il est donc très-naturel que les Jacobins pensent à s'en donner. Depuis long-temps cette idée paraît les avoir occupés. Robespierre avait senti cette difficulté, quand il proposait de faire une armée de tous les soldats chassés de leur corps avec des cartouches infamantes. Il aurait composé, sur ce principe, une troupe bien digne de sa destination. Il se flattait de trouver ainsi jusqu'à soixante mille hommes flétris... La société a fait bien des avances au maréchal Luckner; mais ce vieux guerrier n'y répond que par son mépris, et l'on conçoit aisément qu'il se trouve peu sensible aux marques d'une estime qu'il faudrait partager avec monsieur Jourdan, etc. ›

A la suite de cette diatribe, le Journal de Paris avait imprimé le manifeste de Brunswick.

Il fallait ignorer bien complétement le rôle du club des Jacobins, ses rapports avec les fédérés, avec les sections, pour croire de telles choses auraient la moindre influence sur la partie que agissante du peuple. La cour s'abusait aussi, mais dans un autre sens : elle se croyait encore quelque puissance; en voici la preuve :

Lettre du ministre de l'intérieur à M. Roederer, procureur-syndic du département de Paris, du 6 août.

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« On répand, monsieur, avec profusion et on crie avec affectation dans Paris, un écrit ayant pour titre : Pétition de la commune de Paris à l'assemblée nationale, suivi d'une note portant:

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Ce matin, sur les deux heures, le roi, en habit de paysan, est > sorti du château. Il s'est acheminé vers le Pont-Tournant, en suivant la grande allée des Tuileries. La stature du monarque › ne permet guère de le méconnaître, pour peu qu'on l'ait vu.

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