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exécuter cette réforme, et d'améliorer le sort des pauvres ministres; et lorsque le vertueux évêque de Landaff proposa, il y a quelque temps, de s'en occuper, il fut sifflé par ses confrères; la proposition ne fut pas même mise en délibération par ces orgueilleux prélats, qui se targuent tant de leurs vertus et de leurs lumières, dans leurs combats avec les dissidens.

Une autre raison à encore décidé en Amérique à exclure les prêtres de toutes fonctions législa tives, c'est que leur état devant remplir presque tous leurs momens, les assujétissoit à une résidence continuelle; c'est qu'il y avoit incompatibilité de fait avec les devoirs des législateurs où des officiers publics.

Dans le décret adopté à ce sujet par l'assemblée nationale, on n'a pas entièrement exclu les `Ecclésiastiques de toutes les fonctions civiles et politiques; on a distingué celles qui ne les écar toient pas du lieu de leur résidence. Quant à celles qui les obligeoient de s'éloigner, on leur a donné T'option.

On ne les a pas non plus exclus du conseil des municipalités, districts et départemens, parce qu'on a considéré que les assemblées de ces corps n'étoient pas toujours en activité, tandis que, pour les directoires, on les force d'opter entre leurs places et celles dans ces bureaux.

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Les prêtres peuvent être aussi, d'après ces décrets, membres des législatures. C'étoit fort bien fait, si l'on vouloit donner aux curés une preuve de reconnoissance des services qu'ils avoient rendus à la cause commune. Mais doit-on se laisser guider par la reconnoissance quand on élève une constitution? Comment n'a-t-on pas réfléchi que les évêques viendroient avec les curés aux nouvelles législatures; ces évêques, que, d'après leur déclaration du 13 avril, il faut regarder comme les plus mortels ennemis de la constitution? Comment n'a-t-on pas encore réfléchi que les évêques y viendroient, tandis que les prêtres crdinaires n'y seroient pas appellés ? car les richesses qu'on conserve aux uns pourront leur procurer des créatures, tandis que les autres seront pour la plupart exclus de l'éligibilité, par la fameuse loi du marc d'argent. On n'a donc ici obligé que le vice au lieu de la vertu, que des ennemis au lieu d'amis.

Cette séance a été terminée par le récit des scènes sanglantes qui se sont passées à Nîmes, et qu'y a occasionnées, moins le fanatisme de quelques hypocrites, que la jalousie de voir arriver aux places des protestans qu'on fouloit jadis aux pieds. Cette insurrection, la plus meurtrière de toutes celles qui ont encore eu lieu,

avoit coûté la vie à plus de 80 personnes, et on la devoit aux sentimens anti-patriotiques des officiers municipaux, tous fortement impregnés d'aristocratie, qui ne voyoient que d'un œil mécontent les progrès de la révolution, et qui croyoient pouvoir l'arrêter en causant un incendie qu'ils s'imaginoient de voir bientôt devenir général. Leur espérance a été déçue; malgré le nombre de leurs partisans armés, malgré les précautions que de longue main ils avoient prises, malgré l'avantage que donne l'attaque, leurs troupes, car ils avoient plus de 1500 hommes, ont été repoussées, forcées dans des tours et des couvens où elles s'étoient fortifiées.

Il s'agissoit de ramener le calme dans cette ville, égarée par le fanatisme et l'ambition de ses officiers municipaux ; et l'assemblée a cru devoir confier ce soin aux trois commissaires occupés de la formation des départemens, en suspendant les coupables de leurs fonctions municipales.

Séances des 22 et 23 juin 1790.

ON a vu, dans les précédentes séances, les violens combats qui se sont livrés pour disputer à la nation, et la propriété des biens ecclésiastiques, et la faculté d'en-vendre une certaine por

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tion pour remplir les assignats. qu'elle créoit, et le pouvoir d'organiser civilement le clergé. Ces combats ne touchoient pas encore à leur terme. Le point le plus difficile à décréter restoit encore. On avoit bien déterminé le sort des prêtres futurs; mais celui des prêtres actuels restoit à fixer. Or, malgré le désintéressement qu'affecte le haut clergé, et quoiqu'il prétende n'être dirigé dans sa vigoureuse et constante opposition que par l'amour de la religion, on savoit bien que dans cet amour il entroit un peu d'alliage d'amour des biens de ce monde, et que ce dernier lui fe-, roit faire les plus grands efforts pour sauver de ce qu'il appelloit le pillage, le plus qu'il pour roit, de ses anciennes dépouilles...

Cette idée s'est vérifiée, Mais portant dans ce dernier combat son habileté ordinaire, le haut clergé ne s'est pas montré lui-même sur la scène il a su engager dans son parti, même les défenseurs autrefois les plus zélés du parti populaires et cess n'est pas sans étonnement qu'on a vu à la tribune les Castellane, les Roederer, les Chapelier, demander graces pour les jouissances de,nøsseigneurs. les prélats.

L'histoire de ce combat offre une des manoeuvres les plus savantes de la tactique parlementaire ; manœuvre déjà tentée dans une autre occasion,

et dont le succès promettoit beaucoup à ceux qui la dirigeoient. Heureusement leur espoir a été déçu.

. La décision du comité avoit paru trop sévère; il avoit été impossible de vaincre l'inflexible opiniâtreté de ses membres, pour les engager à porter plus haut le maximum du revenu des évêques.

-Qu'imagine-t-on ? On fait attaquer de front et chaudement les bases et les calculs de son travail; on s'attache sur-tout à jeter des doutes sur les derniers. Les hommes qui ne craignent plus de se montrer tels qu'ils sont dans le fond de leur ame, prennent ouvertement la défense du faste-. On s'attendoit bien que leur doctrine révolteroit les amis austères du peuple, et qui le sont par conséquent de la médiocrité. On espéroit les piquer, les attirer au combat, les y forcer à jeter tout leur feu. Ce feu devoit être calmé par un de ces orateurs modérés, cachés dans le corps de réserve, qui tantôt prenant le parti du peuple et censurant les évêques, et tantôt réclamant les loix, devoit paroître incertain, et qui, pour se tirer de son incertitude, se seroit référé modestement au plan d'un homme savant, profond, que l'assemblée devoit sommer de développer ses sublimes idées. L'homme profond se seroit arrangé pour ne pas être à l'assemblée.

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