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parce qu'on avoit accumulé dans les mains des papes tant de richesses. Rappellez-vous ce Clément V, qui vendoit publiquement des bénéfices; ce Jean XXII, qui inventa, dit Villani, plus de manières d'extorquer l'argent des pauvres, que jamais les traitans n'ont inventé d'impôts; cet Alexandre XI, qui envahissoit des principautés, distribuoit des royaumes qui ne lui appartenoient pas, assassinoit les cardinaux pour avoir leurs biens; cet Alexandre VI, dont l'histoire est plus abominable que celle de Néron........ Voilà le fruit des richesses accumulées dans les mains des ecclésiastiques. On a donc raison de les réduire à la simplicité; on les forcera d'avoir des mœurs.

L'auteur de la religion, disoit M. Roberspierre, a voulu que ses disciples fussent pauvres, parce qu'ils savoient qu'ils seroient corrompus par les richesses, , parce qu'il savoit que ce ne sont pas les plus riches qui sont les plus humains. Comment ne pas se contenter de dix à douze mille livres, ajoutoit M. Chapelier? y a-t-il beaucoup de pères de famille qui jouissent d'un pareil revenu ? — On vous dit que l'augmentation qu'on propose au sort des évêques n'emportera que deux ou trois millions. Mais n'est-ce donc rien que cette somme? C'est la taxe de plusieurs villes et de trois ou quatre cent villages. Et ne peut

elle pas être employée à quelque chose de mieux, qn'à entretenir de brillans équipages et une cuisine recherchée à quelques individus ?

Ces considérations ont décidé l'assemblée nationale, et elle a décrété pour les évêques la proportion de revenus dont nous avons parlé cidessus. On décréta ensuite le paiement des vicaires des églises cathédrales. On en verra les diverses proportions au titre général,

Séance du jeudi 17 juin.

APRÈS avoir fixé le sort des évêques futurs, il s'agissoit de déterminer ce lui des curés. Dans le plan du comité, le maximum de leur traitement étoit de 6000 liv., et le minimum 1200 liv.; la population servoit à mesurer les degrés de proportion. Mille hommes étoient le dernier degré or comme il n'est pas dans les campagnes beaucoup de bourgs ou villages qui soient au-dessus de cette population, il est clair qu'on réduisoit à cette somme le sort de presque tous les curés.

A n'envisager les curés que comme des célibataires, et qui ne seront plus maintenant surchargés de secours nombreux à donner aux pauvres, ce traitement paroît suffisant; mais le co

mité ne devoit-il pas, sans trop manifester son idée, songer à un temps où le préjugé du célibat seroit vaincu, où les prêtres pourroient enfin, en se mariant, rentrer dans l'ordre de la nature? Et, dans cette idée, ne devoit-on pas porter le sort des curés à une somme plus forte?

Beaucoup de voix se sont élevées contre la proportion adoptée pour les curés. M. l'abbé Jacquemart et M. l'abbé de Marolles se sont attachés à prouver que le comité avoit eu tort de croire que les vivres étoient à meilleur marché à la campagne.— Il faut, disoient-ils, que le curé envoye chercher à la ville presque toutes ses subsistances; il lui faut un domestique nombreux; les étrangers descendent presque tous chez lui.... Ils concluoient à fixer le minimum 1500 livres.

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D'autres pensoient qu'il étoit absurde d'arrêter une proportionnelle fixe, parce que le prix des denrées varioit suivant les pays, et qu'il falloit abandonner le soin de la fixation aux départemens. Ce seroit peut-être plus sage, si l'on pouvoit compter sur la justice de tous les départemens; mais il a paru nécessaire de faire une régle générale. La proportion du comité a été préférée. On doit s'en consoler, en pensant que, dans l'ancien ordre des choses, les trois quarts des curés n'avoient pas ce traitement.

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Le traitement des vicaires a fait ensuite la matière des discussions. Dans le plan du comité, le maximum étoit de 2400 liv., et le minimum de 700 liv. M. l'abbé Grégoire a trouvé une disproportion choquante entre ces deux degrés, et il a demandé qu'on fixât le plus haut traitement des vicaires des villes à 2000 liv., et celui de tour les autres à 1400 liv. Cet amendement a échoué. Le propos d'un abbé, membre de l'assemblée, à ce sujet, a fait rire l'assemblée. Il semble, disoit-il, que plus on accorde, plus on demande : j'ai été pendant dix ans vicaire à 250 liv., et je n'en suis pas plus maigre, comme Vous voyez (1). La proportion du comité a été décrétée.

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Il n'a pas été aussi heureux dans les articles subséquens. On a écarté celui qui concernoit les séminaires. Avant de fixer leur sort, il falloit savoir comment on les constitueroient; il falloit connoître d'autres bases.

On a de même écarté l'article qui ordonnoit tous les vingt ans une revision du prix des denrées, de l'augmentation qu'elles auroient pu subir, pour augmenter le salaire des curés en pro

(1) M. Gibert est le curé le plus grand et le plus gros de l'assemblée.

portion. On a regardé que les législatures seroient naturellement autorisées à cette opération.

Enfin la dotation des curés en terres a été agitée. Le comité l'avoit fixée au quart du revenu des curés, avoit même proposé de donner des terres à ceux qui n'en avoient point. Malgré les excellentes raisons morales, politiques, civiles et physiques développées, dans des discussions précédentes, par M. l'abbé Grégoire, Gouttes, et par plusieurs autres membres, cette dotation n'a pas été accueillie. MM. d'André et Treilhard objectèrent que c'étoit laisser un fonds de 400 millions entre les mains des curés, ce qui étoit très-dangereux; que c'étoit donner le tiers des fonds ecclésiastiques; ils ajoutèrent, d'ailleurs, que c'étoit violer le principe constitutionel posé sur cette matière. Cette réflexion a déterminé contre les curés. Il avoit beaucoup d'exagération dans ces calculs; car, d'un côté, il seroit facile de prouver que les dotations en terres des curés de campagnes ne peuvent jamais s'élever à 300 millions; et de l'autre, que 400 millions ne sont pas le tiers des propriétés des ci-devant ecclésiastiques. Cependant telle est la crainte inspirée par cette corporation, que le comité représentant le lendemain un article où l'on accordoit un arpent de terre à chaque curé,

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