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ment ces nouveaux apôtres du communisme qui, dans un langage plein de candeur et presque onctueux, nous assurent que leur triomphe sera l'œuvre de la persuasion, que les gentils et le peuple de Dieu, je veux dire les riches et les pauvres, seront également convertis, et à l'aspect de la Jérusalem nouvelle, de la céleste Icarie, se réuniront dans un éternel baiser de paix. Cette foi robuste, et ces sentiments évangéliques, je veux bien les croire parfaitement sincères; mais que nous importent les hommes? Quel intérêt avons-nous à savoir s'ils sont bons ou méchants, clairvoyants ou aveugles, dissimulés ou convaincus? Nous nous occupons de leurs systèmes et des effets qu'ils peuvent produire sur la société dont ils attaquent les bases. J'ajouterai, pour finir, que le communisme conséquent ne s'arrête pas à Babœuf. Babœuf voulait conserver la famille; on dit que lui-même, dans son inté rieur, en pratiquait toutes les vertus; mais la famille repose sur des sentiments et sur des devoirs plutôt que sur des relations matérielles. Elle a pour conditions, d'une part, l'autorité et le sacrifice, de l'autre, la soumission et la reconnaissance, la génération morale, c'est-à-dire, l'éducation, encore plus que la génération physique. Rien de tout cela ne peut exister dans un ordre social où le sacrifice est impossible par l'abolition de la propriété, où l'autorité paternelle et la reconnaissance filiale sont supprimées par l'éducation en commun. Le dernier mot du communisme est dans la Bible de la liberté, l'Assomption de la femme et d'autres œuvres de la même espèce.

DES SÉANCES DU MOIS DE JUILLET 1848.

SÉANCE DU 1. Comité secret.

SÉANCE DU 8. - M. Ernest Bertrand (de Troyes), juge d'instruction près le tribunal de la Seine, et M. Édouard Mercier, attaché à la bibliothèque du ministère de l'instruction publique, se font connaître, le premier, comme auteur du mémoire enregistré sous le no 5 du concours général sur lequel l'Académie a porté son jugement dans la séance du 1er juillet, et qui a obtenu une première mention honorable avec 1,000 fr. à titre de récompense et d'encouragement; et le second, comme l'auteur du mémoire no 6, du même concours, qui a obtenu une deuxième mention honorable et 500 fr. à titre de récompense et d'encouragement. M. Troplong continue la lecture de son Mémoire sur l'Esprit démocratique dans le Code civil.

SÉANCE DU 15. - M. Ch. Dupin fait hommage à l'Académie d'un exemplaire du discours qu'il a prononcé à la séance publique annuelle tenue par l'Association des fabricants et artisans pour le placement et l'instruction des jeunes orphelins. Comité secret. La séance redevient publique.-M. Blanqui continue la lecture de son Rapport sur la Situation économique et morale de l'Epagne en 1846, d'après la mission dont il fut chargé à cette époque. A la suite de cette lecture, MM. Troplong, Blanqui, Portalis présentent et ajoutent des observations. M. Troplong continue la lecture de son Mémoire sur l'Esprit démocratique dans le Code civil.

SÉANCE EXTRAORDINAIRE DU 17.- L'Académie s'est réunie sur la convocation de son président, M. Charles Dupin, qui lui a fait connaître le motif de cette séance extraordinaire. Invité, samedi

15 juillet, à se rendre le lendemain auprès du chef du pouvoir exécutif, M. le président en a reçu une communication d'un haut et patriotique intérêt. Le chef du pouvoir exécutif a demandé que l'Académie concourût à la défense des principes sociaux attaqués par des publications de tous genres. Persuadé qu'il ne suffisait pas de rétablir l'ordre matériel au moyen de la force si l'on ne rétablissait pas l'ordre moral à l'aide d'idées vraies, il regarde comme nécessaire de pacifier les esprits en les éclairant. Il a dès lors pensé que l'Académie pourrait participer à une œuvre aussi utile, et seconder les efforts du Gouvernement en mettant la science au service de la société et de la civilisation.

Le président a répondu au général Cavaignac que l'Académie, à laquelle il communiquerait ses intentions, accepterait avec empressement et remplirait avec zèle la noble tâche qu'il lui proposait; qu'elle serait reconnaissante et flattée de la confiance qu'il mettait en elle; que, persuadée comme lui des périls auxquels certaines théories exposaient l'État par le trouble qu'elles portaient dans les esprits et les sentiments qu'elles introduisaient dans les cœurs, elle avait déjà commencé à leur opposer les principes sur lesquels sont fondés les droits de la propriété, le bien-être des familles, la liberté des peuples, les progrès du monde; que chacun de ses membres se rendrait au vou qui était exprimé par le chef du pouvoir exécutif et se féliciterait, en aidant l'Académie à remplir sa mission, de servir, avec la cause éternelle de la vérité, les intérêts les plus pressants du pays.

M. Cousin, prenant la parole, se rend l'interprète des sentiments de l'Académie, et remercie son président de ce qu'il a dit et fait, avec autant de convenance que de promptitude, dans cette grave occasion. Il trouve glorieux pour l'Académie le jour où le Gouvernement lui demande le concours de ses lumières dans l'intérêt moral du pays, et appelle la science en aide à l'autorité, il est d'avis que l'Académie doit, 1o charger son secrétaire perpétuel d'écrire en son nom au chef du pouvoir exécutif, qu'elle accepte avec gratitude l'honorable mission qu'il lui propose; 2o nommer immédiatement une commission qui recherche les moyens les plus sûrs et les plus prompts de la remplir, et qui fasse son rapport, à ce sujet, dans la séance de samedi prochain.

Plusieurs membres proposent divers moyens, lesquels sont renvoyés à la commission désignée par l'Académie, et qui se compose de MM. Cousin, de Beaumont, Troplong, Blanqui, Thiers. Cette commission, prise dans les cinq sections de l'Académie, et à laquelle se réuniront les membres du bureau, séra convoquée jeudi à onze heures, et préparera son rapport pour la séance de samedi.

Conformément à la décision de l'Académie, le secrétaire perpétuel a écrit au général Cavaignac, président du conseil des ministres et chef du pouvoir exécutif, la lettre suivante :

« Monsieur le président,

« L'Académie des sciences morales et politiques, réunie en séance extraordinaire, a reçu, par l'entremise de son président, l'honorable invitation que vous lui avez adressée. En lui demandant de seconder, par la publication d'idées saines et vraies, l'aċtion du Gouvernement et des lois, vous lui avez offert le moyen d'être encore plus immédiatement utile, et vous avez ajouté à son zèle, en même temps que vous l'avez pénétrée de reconnaissance. Aussi a-t-elle été unanime à décider qu'elle répondrait à votre appel patriotique, et qu'elle unirait les persuasions de la science aux efforts de l'autorité, pour défendre en commun la société ét la civilisation.

<< Une commission a été nommée pour rechercher sur-le-champ les meilleurs moyens d'atteindre ce noble but. Toutes les sections qui composent l'Académie s'appliqueront à soutenir, avec un empressement égal, les grands principes sociaux, en s'appuyant sur les démonstrations de la philosphie, les prescriptions de la morale, les progrès de la législation, les règles de l'économie politique et les leçons de l'histoire.

« L'Académie, qui charge son secrétaire perpétuel de vous faire connaître ses résolutions, sera heureuse si, conformément à votre pensée et à sa mission, elle peut rappeler aux esprits de salutaires vérités, et contribuer, pour sa part, à faire avancer la société vers l'ordre dans la liberté, et vers la prospérité par le travail. » MIGNET.

XIV.

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SÉANCE DU 22.

M. le président annonce à l'Académie que sa commission s'est réunie trois fois depuis sa dernière séance, pour aviser aux meilleurs moyens de remplir la tâche dont elle s'est chargée. Elle s'est occupée et des publications qui pourraient être faites, au nom de l'Académie, pour propager des idées vraies et utiles, et d'une mission à confier à M. Blanqui, dans les villes de Marseille, de Lyon, de Rouen, de Lille. Un projet relatif aux publications à entreprendre sera bientôt présenté à l'Académie, qui pourra en déterminer la forme et le mode.

Quant à la mission de M. Blanqui, la commission, voulant lui donner toute l'étendue et l'utilité qu'elle comporte, a rédigé le programme suivant, qu'elle soumet à l'Académie :

<< M. Blanqui est chargé de rechercher et d'exposer l'état moral et économique des populations ouvrières dans les villes de Lyon, de Marseille, de Rouen et de Lille, et dans les régions voisines dont ces villes peuvent être considérées comme le centre industriel. Il examinera :

« 1o Quelle est l'éducation physique et morale des enfants d'ouvriers;

« 2° Quelle est sur les mœurs et le bien-être des ouvriers l'influence de la vie de famille, de l'esprit religieux et des lectures auxquelles ils se livrent habituellement ;

« 3o Quel est l'effet des diverses professions sur la santé et le caractère des populations ouvrières;

«< 4o Quelles sont les causes économiques auxquelles on doit attribuer le malaise de ces populations, et si ces causes sont différentes pour les populations manufacturières et pour les populations agricoles;

«< 5° Quelles sont les industries les plus exposées aux chômages, et les causes habituelles de ces chômages;

«< 6o Si l'association entre ouvriers est un moyen d'améliorer leur sort, et s'il existe des exemples qu'on pourrait utilement imiter;

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