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ordinaire, le fait d'un particulier qui réclame un juge. Nous examinerons successivement ces deux sortes de conflits.

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D'après la loi des 7-14

28. (Nos 578, 580-583.) octobre 1790, l'autorité chargée de régler les conflits était le roi en conseil des ministres 1. L'art. 27 de la loi du 21 fructidor an III confiait de même la décision en ces matières au Directoire, qu'il laissait libre d'en référer au législateur en cas de besoin. Cette mission passe ensuite au Conseil d'État en vertu de l'art. 11 du décret du 5 nivôse an VIII, c'est-à-dire le chef de l'État statue désormais sur les conflits en Conseil d'État. Telle est la règle que consacre encore l'ordonnance du 1er juin 1828 et qui a été appliquée en France jusqu'à la Constitution du 4 novembre 1848, art. 89, puis à compter de la Constitution de 1852 jusqu'à la loi du 24 mai 1872. En 1848 et en 1872, le Conseil d'État a été investi d'un pouvoir propre comme tribunal administratif, il n'y

que

1. Telle était déjà la règle sous l'ancien régime, le roi pouvant, sans que l'exercice de ce droit fût soumis à aucune règle, casser les arrêts des Parlements entachés d'excès de pouvoirs et évoquer les affaires devant son conseil. Voir A. des Cilleuls, Des évocations dans l'ancien droit et des conflits d'attributions dans le droit intermédiaire. A l'étranger, des juridictions analogues à notre Tribunal des conflits existent en Saxe, en Prusse et en Bavière. L'Espagne, l'Italie, l'Autriche et le Wurtemberg remettent le jugement des conflits au souverain en Conseil d'État ou au tribunal administratif supérieur. Au contraire, en Angleterre et aux États-Unis, le pouvoir judiciaire fixe souverainement les limites de sa compétence.

a plus de justice retenue au profit du chef de l'État; le Conseil d'État ne peut plus connaître des conflits d'attribution entre les autorités administrative et judiciaire. Il a donc fallu créer une autre juridiction c'est le Tribunal des conflits dont, sous l'empire de la Constitution de 1852, M. Dufour regrettait la disparition (no 583) et que la loi du 24 mars 1872 a reconstitué en en perfectionnant quelque peu l'organisation.

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Le Tribunal des conflits comprend comme membres 1o le ministre de la justice, président'; 2o trois conseillers d'État en service ordinaire nommés par leurs collègues; 3° trois conseillers à la Cour de cassation désignés aussi par leurs collègues; 4o enfin deux membres titulaires et deux suppléants élus par la majorité des juges précédemment indiqués. Les membres du Tribunal sont élus pour

1. Contre la présidence ainsi accordée au ministre de la justice on a objecté qu'il y avait là un moyen injuste de rompre, au profit de l'Administration, l'équilibre des éléments judiciaires et administratifs, que, dans tous les cas, la présence d'un ministre dans une pareille juridiction avait quelque chose d'insolite et d'inexplicable. M. Laferrière (Juridiction administrative, t. I, p. 25) répond non sans raison que, si le contentieux des conflits a un caractère gouvernemental, si le Tribunal doit régler les rapports de deux pouvoirs publics, le ministre représentant l'autorité gouvernementale y avait sa place toute marquée. Au moins, d'après la loi du 24 mars 1872, art. 25, la vice-présidence du Tribunal des conflits n'appartient plus, comme sous l'empire de la loi du 4 février 1850, au ministre de l'Instruction publique, mais à l'un des autres juges élus par ses collègues au scrutin secret et à la majorité absolue.

2. Ce dernier élément du Tribunal n'existait pas d'après la loi de 1850.

trois ans et indéfiniment rééligibles (L. 24 mai 1872, art. 25, § 1, 3). Pour toutes les autres règles relatives à l'organisation des conflits, le règlement du 28 octobre 1849 et la loi du 4 février 1850 sont remis, sauf modifications, en vigueur par l'art. 27. Ainsi les fonctions du ministère public sont confiées à deux commissaires du Gouvernement et à deux substituts nommés annuellement par décret, avant l'époque fixée pour la reprise des travaux du Tribunal. Des commissaires et des substituts, l'un est pris parmi les maîtres des requêtes au Conseil d'État, l'autre dans le parquet de la Cour de cassation (L. 4 février 1850, art. 6). Le Tribunal est complété par l'adjonction d'un secrétaire greffier nommé par le ministre de la justice (Règl. 28 octobre 1849, art. 5).

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29. Le Tribunal n'est pas permanent, il se réunit sur la convocation du ministre de la justice et ne peut délibérer qu'au nombre de cinq membres présents au moins; les juges suppléants sont appelés, le cas échéant, pour compléter ce chiffre (L. 24 mai 1872, art. 25, § 4. Règl. 1849, art. 1er). Pour chaque affaire, un rapport écrit est dressé et un membre du ministère public donne ses conclusions. Rapporteur et commissaire du gouvernement ne peuvent être pris dans le même corps (L. 1850, art. 4, 7). Le rapporteur est désigné par le ministre de la justice aussitôt après l'enregistrement des pièces au secrétariat du Tribunal. Les avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation présentent valablement des mémoires et des observations (Règl. 1849, art. 4).

Le rapport est lu en audience publique. Sont ensuite entendues les observations orales présentées par les

avocats des parties, s'il y en a, et les conclusions. du commissaire du Gouvernement. Les art. 88 et suivants du Code de procédure civile sur la police des: audiences s'appliquent. Les décisions sont motivées et mentionnent les noms des juges y ayant concouru; elles sont signées, non par le chef de l'État, ce qui donnerait au contentieux des conflits le caractère de justice retenue, mais par le président (ou le viceprésident), le rapporteur et le secrétaire. (Règl. 1849, art. 9, 11).

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30. (N° 585.) La procédure du conflit a pour but de défendre le contentieux administratif et gouvernemental contre les empiètements du pouvoir judiciaire et d'autoriser le pouvoir exécutif à revendiquer d'autorité la connaissance d'une affaire actuelment soumise à un tribunal ordinaire 1. Il faut donc supposer un tribunal judiciaire déjà saisi. Le pouvoir exécutif élèvera le conflit, c'est-à-dire obligera, par un acte de puissance publique, les juges à sur

1. Le conflit n'existe pas au profit de l'autorité judiciaire. En cas d'empiètement de l'autorité administrative sur le domaine judiciaire, ni les particuliers ni les tribunaux n'ont qualité pour élever le conflit. Le Conseil d'État, après quelques hésitations, l'a reconnu dès longtemps (Conseil d'Etat, 3 juillet 1821, Tribunal Saint-Lô). L'art. 26 de la loi du 24 mars 1872, pas plus que l'art. 47 de la loi du 3 mars 1849, n'a fait exception à cette règle; il autorise seulement les ministres à élever le conflit devant le Conseil d'État rela

seoir sur la question tant que le Tribunal des conflits n'aura pas statué et réglé la compétence.

(No 586.) -Sans doute le ministère public près le tribunal judiciaire auquel est soumise une question administrative doit demander qu'elle soit renvoyée à l'autorité compétente. Mais cela ne constituait pas une protection suffisante pour l'Administration. Celle-ci peut en principe, soit d'office, soit sur avertissement du procureur (Arr. 13 brum. an X, art. 2), élever le conflit, alors même qu'elle n'est pas partie à l'instance ou que, partie, elle a plaidé en vain l’incompétence, alors même que des conclusions ont été déposées en ce sens par le ministère public et rejetées. Elle ne fait pas acte de plaideur opposant une exception d'incompétence; elle agit comme puissance publique.

Les règles de procédure relatives au conflit constituent des garanties sérieuses pour les particuliers. Elles ont été posées par l'arrêté du 13 brumaire an X et les ordonnances des 12 décembre 1821 et 1er juin 1828.

tivement aux affaires dont ce dernier voudrait connaître et qui relèveraient uniquement de l'autorité ministérielle. — Aucun préjudice du reste ne résulte de cette impossibilité pour les tribunaux d'élever le conflit. Ils ne pourraient en effet exercer ce droit que sur réquisition d'une partie et celle-ci n'a qu'à porter devant eux l'affaire dont, suivant elle, la jurisprudence administrative est saisie à tort pour que l'administration se trouvé dans la nécessité d'élever elle-même le conflit si le tribunal judiciaire se croit compétent.

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