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conflits inévitables entre l'Assemblée et le Président élu par le suffrage universel. De là des règles tout à fait nouvelles complétées par la loi organique du 3 mars 1849.

Présidé par le vice-président de la République, le Conseil d'État est composé de membres nommés, non plus par le Chef de l'État, mais par l'Assemblée au mépris des vrais principes constitutionnels. Il n'a que trois sections et ne comporte plus de service extraordinaire; il a seulement le droit d'appeler qui il veut avec voix consultative à ses délibéra

tions.

La situation qui lui est faite au point de vue des attributions est nouvelle. 1o En matière législative il est obligatoirement consulté sur les projets de lois d'initiative gouvernementale, sauf en certains cas limitativement précisés, notamment quand le Chef de l'État déclare le projet urgent; il les rédige si le Gouvernement le lui demande. L'Assemblée nationale peut requérir son avis sur les propositions dues à l'initiative parlementaire. 2o Ses attributions administratives consistent à préparer les règlements d'administration publique et à donner son avis sur toutes les questions que lui soumettent le Président ou les ministres. Il fait même seul« ceux de ces règlements à l'égard desquels l'Assemblée lui a donné une délégation spéciale ». Les conseils électifs, conseils généraux, d'arrondissement et municipaux, ne peuvent être dissous par le Gouvernement que sur son avis conforme. - 3o Enfin il a des attributions contentieuses et, pour la première fois depuis le début du siècle, il est investi d'un pouvoir propre

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de juridiction à ce point de vue. Ses arrêts sont rendus non pas par l'Assemblée générale mais par la

Section du contentieux, sauf le droit pour le ministre de les déférer à l'Assemblée générale pour excès de pouvoir ou violation de la loi mais dans l'intérêt de la loi seulement, non dans celui des parties. La conséquence forcée de l'attribution au Conseil d'État d'un pouvoir propre de juridiction a été pour lui la perte de la faculté de juger les conflits: un tribunal spécial était créé dans ce but.

85. Second Empire.

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La Constitution de

1852 et le décret organique du 25 janvier 1852 reviennent aux traditions du premier Empire. Le Conseil d'État reprend le même caractère et la même physionomie qu'en l'an VIII, tout en profitant des améliorations réalisées sous le Gouvernement de juillet. Les innovations de 1848 sont absolument abandonnées.

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(Nos 209-214.) Tous les membres Tous les membres composant le Conseil ou y ayant entrée, président, vice-président, ministres, conseillers, maîtres des requêtes, auditeurs et secrétaire général, sont nommés et révoqués par le Chef de l'État. Les conseillers, maîtres des requêtes et auditeurs sont divisés en service ordinaire et en service extraordinaire, ce dernier service comprenant uniquement des personnes ayant cessé leurs fonctions actives au Conseil. Le titre de maître des requêtes ou d'auditeur en service extraordinaire est du reste purement honorifique (Décr. 25 novembre 1853), tandis que les conseillers d'État maintenus dans le service extraordinaire peuvent assister avec voix délibérative aux assemblées générales auxquelles

les convoque un ordre spécial du Chef de l'État. Il y a, en outre, dix-huit conseillers en service ordinaire hors sections, choisis parmi les fonctionnaires d'un ordre élevé : ils peuvent toujours siéger, avec voix délibérative, aux assemblées générales où ils représenteront l'élément pratique, mais ils n'ont jamais entrée dans les sections.

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(Nos 215-218.) La présidence du Conseil d'État en assemblée générale appartenait à l'Empereur, sinon au Président, libre aussi, quand il le jugeait utile, de présider les diverses sections administratives et l'assemblée spéciale du contentieux. On comptait six sections dont une de contentieux. Étaient seuls rétribués les membres du service ordinaire répartis dans les sections, à l'exception encore des auditeurs de deuxième classe.

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(No 219.) Le Conseil d'État, sous le deuxième Empire, remplit des fonctions en matière politique. C'est ainsi qu'il est chargé de rédiger tous les projets de lois sans exception et aussi les Senatus-Consultes quand l'Empereur le lui demande ; il envoie ensuite ses membres soutenir lesdits projets devant le Corps législatif, mais ne fait plus, comme en l'an VIII, des lois interprétatives sous forme d'avis. Il connaît en outre des affaires de haute police administrative à l'égard des fonctionnaires dont le Chef de l'État lui défère les actes. - Au point de vue purement administratif, le Conseil d'État n'a plus, comme en 1848, de pouvoir règlementaire propre, mais il donne toujours un avis obligatoire sur les règlements d'administration publique et demeure le grand conseil de l'Empereur en matière d'administration. Sa juri

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diction propre aussi a disparu, c'est, comme jusqu'en 1848, le Chef de l'État qui statue sur son avis; en revanche il reprend les conflits. D'ailleurs une innovation importante a été accomplie pour le jugement des affaires contentieuses. Elles étaient examinées naguère par le Conseil d'État en assemblée générale, mais, à mesure qu'augmentait le nombre des pourvois, apparaissait davantage l'inconvénient de déranger aussi fréquemment tout le personnel. Le remède imaginé en 1848 et consistant à confier toujours le jugement à la seule section du contentieux avait le triple inconvénient, dans les affaires importantes, d'enlever aux parties le bénéfice d'un double examen de l'affaire, de réduire beaucoup le nombre des juges, enfin de tenir les membres des sections administratives en dehors de l'étude de toute affaire contentieuse. On imagina sous l'Empire un moyen terme qui a survécu à la révolution de 1870. Désormais la section du contentieux jugera certaines affaires considérées comme moins importantes; les autres seront tranchées par l'assemblée spéciale du contentieux comprenant, outre les membres de la section du contentieux, deux membres de chacune des sections administratives.

Bien que visiblement calqué sur celui de l'an VIII, le Conseil d'État de 1852 n'a jamais eu l'influence prépondérante de son glorieux devancier. Les ministres sans portefeuille sont créés en 1860 et les ministres d'État en 1862. A partir de 1867, les ministres sont autorisés à défendre devant le Corps législatif les projets gouvernementaux. Enfin le Sénatus-Consulte du 8 septembre 1869 rend au Corps légis

DROIT ADMINISTRATIF.

SUPPLÉMENT.

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latif l'initiative des lois et le Conseil d'État n'a plus à donner qu'un simple avis sur les amendements proposés en cas de désaccord entre le Gouvernement et la commission de la Chambre. D'un mot, l'importance du Conseil d'État diminue de plus en plus à mesure que l'Empire se rapproche du régime parlementaire.

SECTION I

ORGANISATION DU CONSEIL D'ÉTAT

(Duf., t. II, nos 209-218.)

86. Suspendu de ses fonctions par le Gouvernement de la Défense nationale et remplacé par une commission provisoire chargée d'expédier les affaires urgentes, le Conseil d'État a été réorganisé par la loi du 24 mai 1872. Ce texte est toujours en vigueur quoiqu'il ait reçu d'assez nombreuses modifications des lois des 1er août 1874, 1er juillet 1875, 13 juillet 1879, 1er juillet 1887, 30 novembre 1895. Le Conseil d'État est redevenu à peu près ce qu'il était sous la monarchie constitutionnelle : un grand conseil de Gouvernement et d'administration et le tribunal administratif supérieur. A ce dernier titre il a un pouvoir propre; aussi le jugement des conflits lui a-t-il été enlevé, comme en 1848.

87. (N° 209.) Personnel. - - Font partie du Conseil d'État trente-deux conseillers d'État en service ordinaire, dix-neuf en service extraordinaire, trente maîtres des requêtes, trente-six auditeurs dont douze de première classe, un secrétaire général et un secré

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