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Quant aux ouvrages qui composent le plus nouveau droit, comme ils n'ont pas même une consistance bien déterminée, l'on peut dire qu'ils ont encore moins d'autorité. Les canons des conciles ont par euxmêmes l'autorité que nous avons marquée sous les mots Bulle, Canon, Concile; les bulles renfermées dans les bullaires sont des lois qui portent avec elles leur autorité, puisqu'elles ont le souverain pontife pour auteur; il en est de même des règles de chancellerie; mais, comme nous l'avons dit, cette autorité n'excède pas les bornes du territoire soumis à la puissauce temporelle et spirituelle du pape.

c'est-à-dire, celles qui précèdent le décret où le pape réunit les deux puissances, de Gratien, n'ont plus aucune autorité temporelle et spirituelle, elles doivent être nulle part, au moins par elles-mêmes. suivies et exécutées, comine des lois émaCelles qui composent le nouveau droit sont, nées du souverain, qui a de droit le pouau contraire, reçues et suivies par-tout, voir législatif. mais non pas toutes avec le même degré d'autorité. Le décret de Gratien, par exemple, n'a reçu de son auteur aucune autorité publique, puisqu'il n'était qu'un simple particulier. Il ne l'a pas reçu de ce qu'il était enseigné dans les écoles, puisqu'on y enseiguait aussi le décret d'Yves de Chartres. Trithème a avancé que le décret avait été approuvé par Eugène III, sous le pontificat duquel Gratien vivait; mais ce témoignage est détruit par le silence des historiens à cet égard. D'autres ont dit que la bulle de Grégoire XIII confirma le décret, de ce qu'elle défendit d'y ajouter; mais cette conséquence n'est pas juste non plus, parce qu'il faudrait l'appliquer à tout le décret en entier, c'està-dire, aux raisonnemens de Gratien, comme aux canons qui y sont rapportés, ce qui serait absurde. Il faut donc conclure, avec le savant Antoine Augustin, et les autres canonistes, que ce qui est rapporté par Gratien, n'a d'autorité que celle qu'il avait auparavant dans les endroits même où Gratien a puisé : Generaliter enim decreta conciliorum, decretales et leges civiles à Gratiano, in volumine decretorum incertæ non aliam habent auctoritatem quam leges ipsæ, decreta vel decretales. (Fagnan, in cap. canonum statuta, de constit., no 38.) Cet auteur établit que les rubriques et palea du décret, ainsi que les raisonnemens de Gratien lui-même, n'ont aucune sorte d'autorité, et ne peuvent être par conséquent mis au rang des

canons.

Les extravagantes de Jean XXII et les extravagantes communes, sont deux ouvrages qui, étant anonymes et destitués de toute autorité publique, sont à peu près sur le même pied que la collection de Gratien; elles n'ont par elles-mêmes d'autre autorité que celles que peuvent avoir les constitutions qui y sont rapportées.

Mais, à l'égard des décrétales, du sexte et des clémentines composées et publiées par ordre des souverains pontifes, il n'est pas douteux que dans les pays d'obédience

Conclusion.

8. S1.IDÉE GÉNÉRALE DU DROIT CANONIQUE. Le droit canonique ou canon, est, suivant les idées vulgaires, la jurisprudence ecclésiastique; c'est le recueil des canons, des règles des conciles, des décrets des papes, et des maximes des pères. Selon la raison, selon les droits des rois et des peuples, la jurisprudence ecclésiastique n'est et ne peut être que l'exposé des priviléges accordés aux ecclésiastiques par les souverains, représentant la nation.

S'il est deux autorités suprêmes, deux administrations qui aient leurs droits séparés, l'une fera sans cesse effort contre l'autre. Il en résultera nécessairement des chocs perpétuels, des guerres civiles, l'anarchie, la tyrannie, malheurs dont l'histoire nous présente l'affreux tableau.

Si, dit Voltaire, un prêtre s'est fait souverain; si le dairi du Japon a été roi jusqu'à notre seizième siècle; si le dalailama est souverain au Thibet; si Numa fut roi et pontife; si les califes furent les chef's de l'état et de la religion; si les papes règnent dans Rome, ce sont autant de preuves de ce que nous avançons. Alors l'autorité n'est point divisée; il n'y a qu'une puissance. Les souverains de Russie et d'Angleterre, celui de France aujourd'hui, pré

sident

sident à la religion; l'unité essentielle de puissance est conservée.

Toute religion est dans l'état; tout prêtre, tout ministre de culte est dans l'autorité civile, et tous les ecclésiastiques sont au nombre des sujets du souverain chez lequel ils exercent leur ministère. Les lois de police et de sûreté (porte l'art. 3 du Code Civil) obligent tous ceux qui habitent le territoire. » S'il était une religion qui établit quelque indépendance en faveur des ecclésiastiques, en les soustrayant à l'autorité souveraine et légitime, cette religion ne saurait venir de Dieu, auteur de la société.

Il est, par là même, de toute évidence que, dans une religion dont Dieu est représenté comme l'auteur, les fonctions des ministres, leurs personnes, leurs biens, leurs prétentions, la manière d'enseigner la morale, de prêcher le dogme, de célébrer les cérémonies, les peines spirituelles; que tout ce qui intéresse l'ordre civil, en un mot, doit être soumis à l'autorité du prince et à l'inspection des magistrats. Si cette jurisprudence fait une science, on en trouvera ici les élémens; c'est aux magistrats seuls d'autoriser les livres admissibles dans les écoles, selon la nature et la forme du gouvernement.

Lisez le concordat conclu entre le saint père et le gouvernement de France, le 26 messidor an 9; les articles organiques de ce concordat pour le culte catholique, du 18 germinal an 10; les articles organiques des cultes protestans, du même jour (bulletin 172, no 1344, 3e série), vous trouverez par-tout l'application exacte et rigoureuse des principes fondamentaux que nous venons de rappeler; par-tout vous verrez que la religion est dans l'état, et que tout ministre d'une religion quelconque est dans la société, et placé sous l'autorité de la loi civile, comme tout autre citoyen.

§ II. Ministère des ecclésiastiques. Les religions ne sont instituées que pour maintenir les hommes dans l'ordre, et leur faire mériter les bontés du créateur par la vertu. Tout ce qui, dans une religion, ne tend pas à ce but, doit être regardé comme étranger ou dangereux.

Tome XIII.

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La vertu suppose la liberté, comme le transport d'un fardeau suppose la force active. Dans la contrainte, point de vertu, et sans vertu point de religion. Rends-moi esclave, je n'en serai pas meilleur. Le souverain même n'a aucun droit d'employer la contrainte pour amener les hommes à la religion, qui suppose essentiellement choix ou liberté. Ma pensée n'est pas plus soumise à l'autorité que la maladie ou la santé.

Afin de démêler toutes les contradictions dont on a rempli les livres sur le droit canonique, et de fixer nos idées sur le ministère ecclésiastique, recherchons au milieu de mille équivoques, ce que c'est que l'église.

L'église est l'assemblée de tous les fidèles appelés certains jours à prier en commun, et à faire en tout temps de bonnes actions.

Les prêtres sont des personnes établies sous l'autorité du souverain, pour diriger ces prières et tout le culte religieux. Une église nombreuse ne saurait être saps ecclésiastiques; mais ces ecclésiastiques ne sont pas l'église. Il n'est pas moins évident que si les ecclésiastiques qui sont dans la société civile, avaient acquis des droits qui allassent à troubler ou à détruire la société, ces droits devraient être supprimés.

Il est encore de la plus grande évidence. que si Dieu a attaché à l'église des prérogatives ou des droits, ces droits ni ces prérogatives ne sauraient appartenir priinitivement ni au chef de l'église, ni aux ecclésiastiques, parce qu'ils ne sont pas l'église; de même que les magistrats ne

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sont pas le souverain, ni daus un état démocratique, ni daus une monarchie.

Enfin, il est très-évident que ce sont nos ames qui sont soumises aux soins du clergé, uniquement pour les choses spirituelles. Notre ame agit intérieurement; les actes intérieurs sont la pensée, les volontés, les inclinations, l'acquiescement à certaines autorités. Tous ces actes sont au-dessus de toute contrainte, et ne sont du ressort du ministère ecclésiastique qu'autant qu'il doit instruire, et sans que jamais il puisse commander.

Cet ame agit aussi extérieurement; les actions extérieures sont soumises à la loi civile. Ici la contrainte peut avoir lieu; les peines temporelles ou corporelles maintiennent la loi en punissant les violateurs. (Voyez l'article Conscience.)

La docilité à l'ordre ecclésiastique doit par conséquent toujours être libre et volontaire; il ne saurait y en avoir d'autre. La soumission au contraire à l'ordre civil peut être contrainte et forcée. Par la même raison, les peines ecclésiastiques, toujours spirituelles, n'atteignent ici bas que celui qui est intérieurement convaincu de sa faute. Les peines civiles, au contraire, accompagnées d'un mal physique, ont leurs effets physiques, soit que le coupable en reconnaisse la justice ou non.

De là il résulte manifestement que l'autorité du clergé n'est et ne peut être que spirituelle; qu'il ne saurait avoir aucun pouvoir temporel; qu'aucune force coactive ne convient à son ministère, qui en serait détruit. Il suit encore de là que le souverain, attentif à ne souffrir aucun partage de son autorité, ne doit permettre aucune entreprise qui mette les membres de la société dans une dépendance extérieure et civile d'un corps ecclésiastique.

Tels sont les principes incontestables du véritable droit canonique, dont les régles et les décisions doivent en tout temps être jugées d'après ces vérités éternelles et immuables, fondées sur le droit naturel et l'ordre nécessaire de la société; tels sont enfin les principes consacrés par les articles organiques des cultes que nous avons cités plus haut.

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La société en général est propriétaire du territoire d'un pays, source de la richesse nationale. Une portion de ce revenu national est attribuée au souverain pour soutenir les dépenses de l'administration. Chaque particulier est possesseur de la partie du territoire et du revenu que les lois lui assurent; et aucune possession ni aucune jouissance ne peut en aucun temps être soustraite à l'autorité de la loi.

Dans l'état de société, nous ne tenons aucun bien, aucune possession de la seule nature, puisque nous avons renoncé aux droits naturels pour nous soumettre l'ordre civil qui nous garantit et nous protège; c'est donc de la loi que nous tenons toutes nos possessions.

Personne non plus ne peut rien tenir sur la terre de la religion, ni domaines, ni possessions, puisque ses biens sont tous spirituels. Les possessions du fidèle, comme véritable membre de l'église, sont dans le ciel; là est son trésor. Le royaume de JÉSUS-CHRIST, qu'il annonça toujours comme prochain, n'était et ne pouvait être de ce nonde. Aucune possession ne peut donc être de droit divin.

Les lévites, sous la loi hébraïque, avaient il est vrai, la dime, par une loi positive de Dieu; mais c'était une théocratie qui n'existe plus; et Dieu agissait comme souverain de la terre. Toutes ces lois ont cessé, et ne sauraient être aujourd'hui un titre de possession.

Si aujourd'hui quelque corps, comme celui des ecclésiastiques, prétendait posséder la dime où tout autre bien de droit divin positif, il faudrait qu'il produisît un titre enregistré dans une révélation divine, expresse et incontestable. Ce titre miraculeux ferait, il faut en convenir, exception à la loi civile, autorisée de Dieu, qui dit que << toute personne doit être soumise aux puissances supérieures, parce qu'elles sont ordonnées de Dieu; et établies en son

nom. 2

Au défaut d'un titre pareil, un corps ecclésiastique quelconque ne peut donc jouir sur la terre que du consentement du souverain, et sous l'autorité des lois civiles; ce sera le seul titre de ses possessions. Si le clergé renonçait imprudemment à ce titre, il n'en aurait plus aucun " et il pourrait être dépouillé par quiconque aurait assez de puissance pour l'entreprendre. Son intérêt essentiel est donc de dépendre de l'autorité civile, qui seule lui donne du pain.

C'est en conséquence de ces principes d'une vérité éternelle, qu'il est ainsi disposé par les articles organiques du culte catholique :

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Art. 74. « Les immeubles, autres que les édifices destinés au logement et les jardins attenans, ne pourront être affectés à des titres ecclésiastiques, ni possédés par les ministres du culte, à raison de leurs fonctions. »

Les ecclésiastiques doivent sans doute avoir de quoi vivre honorablement; mais ce n'est ni comme membres, ni comme représentans de l'église; car l'église par elle-même n'a ni règne ni possession sur cette terre. Mais s'il est de la justice que les miniştres de l'autel vivent de l'autel, il est naturel qu'ils soient entretenus par la société, tout comme les magistrats et les soldats le sont. C'est donc à la loi civile à fixer la pension proportionnelle du corps ecclésiastique.

Conformément à ces principes, le traitement des ministres des cultes est payé et réglé par le gouvernement, suivant les art. 64, 65 et 66 des articles organiques des cultes. L'art. 69 « autorise les évêques à rédiger les projets de règlement relatifs aux oblations que les ministres du culte sont autorisés à recevoir pour l'administra tion des sacremens. Mais il veut en même temps que les règlemens rédigés par les évêques ne puissent être publiés ni autre

ment mis à exécution, qu'après avoir été approuvés par le gouvernement. »

Voyez les articles Conscience et Culte.

30. DROIT DIVIN.

Ce sont les lois et les préceptes que l'on regarde comme révélés aux hommes par Dieu, et qui se trouvent renfermés dans l'Ecriture Sainte; tels sont les préceptes contenus dans le Décalogue, et autres qui se trouvent répandus dans l'Evangile.

Le droit divin est de deux sortes : l'un fondé sur quelque raison, comme le commandement d'honorer ses père et mère; l'autre, qu'on appelle droit divin positif, qui n'est fondé que sur la seule volonté de Dieu, sans que la raison en ait été révélée, telle que la loi cérémoniale des juifs. Le terme de droit divin est opposé à celui de droit humain, qui est l'ouvrage des hommes.

On ne doit pas confondre le droit ecclésiastique ou canonique, avec le droit divin. Le droit canonique comprend, à la vérité, le droit divin; mais il comprend aussi des lois faites par l'église, lesquelles sont un droit humain, aussi bien que les lois civiles. Les unes et les autres sont sule droit que

jettes à être changées, au lieu
divin ne change point.
Voyez Loi.

31. DROITS RÉSERVÉS.

Tome 7, page 316.

32. DROITS RÉTABLIS
Tome 7, page 317.

33. DROITS RÉUNIS. Tome 7, pag. 328.

Addition.

I. En 1759, il fut établi des droits sur les cuirs et peaux tannés, façonnés et apprêtés. Leur perception fut confiée à une administration particulière qui fut nommée d'abord régie des cuirs. On ne tarda pas à confier à cette administration la régie de plusieurs autres droits, soit de nouvelles création, soit de création ancienne

qui jusque là avaient fait partie de la ferme générale. Cette réunion fit donner le nom de régie des droits réunis à cette adminis

tration.

Par un arrêt du conseil, du 3 avril 1777, on adjoiguit à la régie des droits réunis celle des droits de greffe, des hypothèques, des droits réservés, des droits sur les cartes à jouer, de la marque d'or et d'argent, des quatre membres de Flandres, des papiers et cartons, des poudres et amidons, des inspecteurs aux boucheries, des fers, etc., etc.; et alors cette régie prit le nom de régie générale des droits réunis. Elle fut incorporée à la ferme des aides en 1780. Leur abolition commune, et la suppression de tous les droits confiés à cette administration, furent prononcées par la loi du 2-17 mars 1791.

Législation nouvelle.

2. L'expérience ayant fait connaître de nouveau que les droits sur les consommations, fixés dans de justes bornes, étaient les moins onéreux, le gouvernement a rétabli plusieurs des impôts de cette espèce qui avaient été abolis à la chûte du tròne, tels que ceux sur les tabacs, sur les boissons, sur les voitures publiques, etc. Différentes administrations avaient été chargées d'abord de la perception de ces droits; mais on a senti qu'il serait plus avantageux de les réunir en un seul corps, soumis à la même impulsion. En conséquence, il a été disposé par la loi du 5 ventose an 12 (bulletin 345, no 3612, 3e série), sur le budjet de la même année, chap. 5, sect. Ire, art. 77, « qu'il sera établi pour la perception des droits dont il vient d'être parlé, une administration particulière sous le nom de régie des droits réunis. »

Administration.

3. Art. 78. « Elle sera composée d'un directeur général, et du nombre d'administrateurs et d'employés qui sera déterminé par le gouvernement dans un règlement d'administration publique.

Art. 79. Le directeur général et les administrateurs auront un traitement fixe; les employés auront une remise progressive sur les produits, en raison de leur accrois

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Par un arrêté du gouvernement, du 5 germinal an 12, concernant l'organisation des droits réunis (bulletin 11, no 114, 4e série, page 189), il a été disposé, tit. 1er, art. 1er, que « l'organisation et la surveillance des octrois municipaux et de bienfaisance..... et les perceptions provenant

des droits réunis, seront dans les attributions du ministre des finances. » Art. 3. « Qu'en exécution de la loi du 5 ventose an 12, il y aura un directeur général de la régie des droits réunis, et cinq administrateurs. »

Suivant l'art. 4, le directeur-général dirigera et surveillera, sous les ordres du ministre des finances, toutes les opérations relatives aux droits réunis; il fera la recette.... du droit de navigation intérieure, et des droits et revenus des bacs, bateaux et canaux; il dirigera et surveillera tous les agens et préposés à ces recettes; il sera chargé, d'après les instructions du ministre des finances, de l'exécution des lois et règlemens sur les octrois municipaux et de bienfaisance. >>

L'art. 5 porte que le directeur général travaillera seul avec le ministre; l'art. 6, que le ministre des finances fera la division du travail entre les cinq administrachargé de suivre la comptabilité et le serteurs; que l'un d'eux sera uniquement vice des caisses; l'art. 7, que chaque administrateur travaillera particulièrement avec le directeur général; et l'art. 8, que les administrateurs se réuniront au conseil d'administration, toutes les fois que le directeur général en indiquera le jour; que ce conseil sera présidé par le directeur général.

L'art. 9 veut que les affaires contentieuses soient rapportées dans ce conseil, qu'elles soient décidées à la majorité des voix, qu'en cas de partage d'opinions, le directeur général les départage; qu'il puisse, lorqu'il le jugera nécessaire, suspendre l'effet d'une

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