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qui condamnoit si hardiment les atteintes 1791, portées en France aux droits de la propriété, on vit les partisans de la royauté absolue se livrer à des transports de joie, lorsque Catherine fit entrer ses troupes en Pologne pour y rétablir, disoit-elle, l'ancienne constitution républicaine.

Léopold, le pape, et presque toutes les têtes couronnées, félicitèrent Stanislas-Auguste sur l'achèvement heureux d'une constitution si sage. Frédéric-Guillaume lui-même écrivit à ce prince; il loua pompeusement le choix que les Polonois avoient fait de l'infante de Saxe pour lui succéder. Et cette démarche lui fut hautement rappelée, lorsque peu de temps après, par une contradiction honteuse, refusant de secourir les Polonois contre la Russie, il écrivit au roi de Pologne une autre lettre, dans laquelle il prétendoit n'avoir jamais approuvé la conduite de la diète...

On voit, par l'adhésion des grandes puissances à la nouvelle constitution de Pologne, quel avoit été leur système au mois de mai 1791: aumois de juin leurs dispositions étoient déjà changées. La fuite et l'emprisonnement du roi de France, les déclamations des ja

1791. cobins, le fanatisme de leurs apôtres, l'ardeur non moins bouillante des émigrés, qui se rassembloient et s'armoient à Worms et dans l'électorat de Trèves, la propension Ides universités et des habitans des villes en Allemagne à favoriser l'abolition du régime féodal, avoient rempli les cours de crainte, terminé leurs querelles, et les décidoient à former une ligue contre tous ceux, sans distinction, qui formoient des vœux pour la liberté. Cette révolution politique non-seulement affoiblit, mais même éteignit tout intérêt pour les Polonois, dont on avoit jusqu'alors excité le zèle. On alloit, en attaquant la France, abandonner la Pologne au ressentiment de l'impératrice. L'acceptation de la charte constitutionnelle par Louis XVI éloigna pour quelque temps encore cet orage; et comme le monarque français, remis en liberté, consentoit à rendre l'expérience juge d'une constitution qu'il acceptoit, quoiqu'il n'y trouvât pas assez d'énergie dans les moyens d'administration pour pour assurer la prospérité d'un vaste empire, Léopold écrivit une nouvelle lettre circulaire aux puissances qu'il avoit invitées à se liguer, et leur proposa de suspendre l'effet de cette ligue ; il convint

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aussi probablement avec le roi de Prusse et 1791. l'électeur de Saxe d'ajourner leurs déterminations sur les affaires de la Pologne. Nous verrons dans le chapitre suivant l'influence de ces négociations, de ces mouvemens et de ces dispositions menaçantes sur les troubles de la France, et comment, de part et d'autre, la crainte et l'esprit de parti aveuglant tous les yeux, allumèrent la guerre générale et contribuèrent à l'impulsion d'une seconde révolution plus formidable que celle dont on vouloit arrêter le cours.

CHAPITRE I X.

Mésintelligence entre l'Assemblée Législative et le Roi. Influence de la paix de l'Orient, du Traité de Pilnitz et de l'armement des Emigrés, sur les troubles intérieurs. Embarras de la Cour, Espérances des Aristocrates. Méfiance des Patriotes. Décret contre les Prêtres et les Emigrés. Refus de sanction. Alliance entre l'Autriche et la Prusse. Négociateurs envoyés à Tréves, à Londres, à Berlin et à Vienne. Préparatifs hostiles. Division entre le parti modéré et le parti Jacobin. Narbonne, qui conservoit la majorité au Corps Législatif, est imprudemment renvoyé. Lessart est en arrestation. Dumourier lui succède. Le Roi déclare la guerre au Roi de Hongrie, François II.. Gustave III est assassiné. Régence du Duc de Sudermanie. Le Roi de Prusse marche à la tête de cinquante mille hommes. Erreurs des Puissances étrangères et des Emigrés. Puissance des Jacobins et foiblesse de la Cour. Le Palais du Roi est forcé le 20 juin. Il refuse les demandes du Peuple, mais il prend le Bonnet rouge. On dissout sa Garde. Brissac à Orléans La Fayette prend la défense du Roi. Intrigues pour faire échouer les opératious militaires. Chan

gement de Ministres. Déchéance du Roi et Accusation de la Fayette rejetée. Manifeste de Brunswick. Conjuration contre la Cour. Révolution du 10 août. La Fayette est obligé de s'expatrier. Son arrestation. Convocation d'une Convention nationale. Invasion des Etrangers. Armement universel des Français. Faute du Roi de Prusse. Prise de Longwy et de Verdun. Massacre de Septembre. Puissance de la Commune de Paris. Dénonciation de Robespierre. La République est décrétée. Négociations. Retraite imprévue de Frédéric-Guillaume. Succès de Custine. Tyrannie en France. Terreur en Europe.

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Les députés constituans s'étant déclarés inéligibles, espéroient en vain jouir paisiblement de la reconnoissance du peuple, pour les sacrifices qu'ils lui avoient faits, et pour les droits qu'ils lui avoient rendus; ils se trompoient encore plus en croyant que leurs successeurs, n'ayant plus rien à conquérir pour une sage liberté, ne s'occuperoient qu'à en assurer la jouissance, et ne feroient consister leur gloire qu'à travailler de concert avec le pouvoir exécutif à perfectionner le code civil, à encourager le commerce, et à faire fleurir l'agriculture.

L'assemblée législative, composée en grande

1791

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