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Ce que c'est que

la prife à partic.

Cas où la prife à partie a lieu,

à

Ceux qui peuvent être pris partic.

Question; de

vant qui les prifes à partie des Juges

Cours d'Eglife; & il faut fe donner de garde de l'employer, parce que l'Eglife n'ayant point de fifc, les Cours féculieres ne permettent pas aux Juges d'Eglife de prononcer d'amende comme nous le dirons en parlant des Peines Eccléfiaftiques. La regle eft de convertir l'amende prononcée par l'Ordonnance en une aumône applicable à quelque œuvre pie.

En outre, le Juge peut demander, s'il y a lieu, réparation des faits propofés contre lui; mais, en ce cas, il ne peut demeurer Juge. Article XXX & dernier, Titre XXIV. Paffons maintenant aux Prifes à partie.

La Prife à partie eft l'intimation d'un Juge en fon propre & privé nom, à l'effet de le faire condamner aux dépens, dommages-intérêts, & quelquefois même à une plus grande

peine.

Les cas où les Juges d'Eglife peuvent être intimés en leur propre & privé nom, & pris à partie font, lorfqu'il y a de leur part, dol, fraude, concuffion, abus d'autorité, déni de Justice, & enfin contravention aux Saints Canons reçus dans le Royaume, & aux Ordonnances, Edits & Déclarations du Roi, & Arrêts & Réglemens des Cours Souveraines.

Ceux qui peuvent être pris à partie ne font pas feulement les Officiaux & Promoteurs, mais encore les Commiffaires nommés pour faire quelqu'acte que ce foit de la procédure, & même les Affeffeurs.

Ici se présente la queftion de favoir, devant qui les Juges d'Eglife peuvent être pris à partie pour raifon de malverfations d'Eglife doivent commifes dans l'exercice de leurs fonctions, ou des Juges d'Eglife fupérieurs, ou des Juges féculiers?

être portées?

Nous ne penfons pas que les Prifes à partie des Juges d'Eglife inférieurs, pour raifon de malverfations commises dans l'exercice de leurs fonctions, doivent être portées devant les Juges d'Eglife fupérieurs. En effet, fuivant l'Arrêt de Réglement du Parlement de Paris, du 4 Juin 1699, dont nous rapporterons dans un inftant les difpofitions, & fuivant l'Article XLIII de l'Edit de 1695, les Juges d'Eglife ne peuvent être pris à partie ni intimés en leur propre & privé nom, qu'après que les Cours l'ont permis expreffément en connoiffance de cause. Les Cours dont parle l'Edit font les Cours féculieres; il semble donc que les Juges d'Eglife fupérieurs ne peuvent permettre

de

de prendre à partie les Juges d'Eglife inférieurs, & qu'il est réservé aux feules Cours féculieres d'accorder cette permiffion.

Auffi dans l'usage ceux qui veulent prendre à partie un Juge d'Eglife pour malverfations commifes dans l'exercice de fes fonctions, commencent par appeller comme d'abus, & enfuite tâchent d'obtenir la permiffion d'intimer l'Official & le Promoteur ou l'Evêque qui doit prendre leur fait & cause.

Il y a plus, par Arrêt de la Tournelle du Parlement de Pa

ris, du 27 Août 1701, rapporté au Journal des Audiences, il
a été jugé qu'en cas de déni de juftice de la
part d'un Official,
il falloit fe pourvoir au Parlement par la voie de l'appel com-
me d'abus. Or, il en doit être de même en cas de dol, frau-
de, concuffion, abus d'autorité, & enfin de malverfation quel-
conque de la part d'un Official ou d'un Promoteur dans l'exer-
cice de leurs fonctions.

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partie.

Enfin il faut observer que pour pouvoir prendre un Juge à De quelle ma partie, & l'intimer en fon propre & privé nom, il ne fuffit niere un Juge pas de faire prendre une Commiffion portant permiffion de faire peut être pris à affigner qui bon femblera, il faut en avoir obtenu la permiffion expreffe & fpéciale par un Arrêt de la Cour. C'eft la difpofition de l'Arrêt de Réglement du Parlement de Paris, du Juin 1699, rendu fur les conclufions de M. Dagueffeau, Avocat-Général, dont voici les termes : « La Cour, faifant » droit fur les conclufions du Procureur - Général du Roi » fait défenfes à toutes personnes de quelque état & qualité » qu'elles foient de prendre à partie aucuns Juges, ni de les » faire intimer en leur propre & privé nom fur l'appel des » jugemens par eux rendus, fans en avoir auparavant obtenu » la permiffion expreffément par Arrêt de la Cour, à peine » de nullité de la procédure, & de telle amende qu'il con» viendra ».

Cet Arrêt de Réglement s'applique aux Juges d'Eglife comme aux Juges féculiers; & d'ailleurs, l'Article XLIII de l'Edit de 1695 en tiendroit lieu par rapport aux Juges d'Eglife.

Dans l'ufage, le Parlement de Paris ne permet de prendre Obfervation, à partie un Juge accufé de prévarication, & de l'intimer en fon propre & privé nom, qu'en ftatuant fur le fonds de l'appel. Car ce n'eft qu'après la plaidoyerie ou l'inftruction

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communs

achevée, que l'on peut juger fi les accufations dont on charge le Juge, paroiffent avoir quelque fondement, & peuvent donner lieu à la prife à partie.

CHAPITRE II.

De la Compétence des Juges féculiers, en matiere criminelle, par rapport aux perfonnes Eccléfiaftiques.

Ous verrons dans la feconde Partie de cet Ouvrage, laquelle a pour objet les Délits, qu'on en diftingue deux efpeces dans les Tribunaux Eccléfiaftiques, Délits communs & Délits privilégiés.

Les délits communs font ceux qui peuvent être fuffifamment punis par les peines canoniques que le Juge d'Eglise peut infliger.

Les délits privilégiés font ceux qui, outre les peines canoniques, méritent des peines afflictives ou infamantes.

Par rapport aux délits communs on en peut diftinguer deux efpeces; les uns purement Eccléfiaftiques, & les autres civils.

Les délits communs purement Eccléfiaftiques concernent la doctrine, la difcipline & les mœurs.

Les délits communs-civils font les délits privés qui caufent du dommage ou nuifent à la réputation des particuliers; tels font les voies de fait, les rixes & les injures.

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Les Juges fécu- 1o. Il est hors de doute que les Juges féculiers même liers ne connoiffent pas des délits Royaux, ne peuvent connoître des délits communs purement pure- Eccléfiaftiques; la connoiffance en appartient exclufivement aux Juges d'Eglife. Si les Magiftrats féculiers entreprenoient d'en connoître, ils cefferoient de refpecter la diftinction des deux Puiffances fpirituelle & temporelle.

ment Eccléfiaftiques.

Les Juges fécu

liers connoiflent des délits com

Nous verrons ailleurs quels font les délits purement Eccléfiaftiques.

2o. Il n'en eft pas de même des délits communs - civils. Il eft certain que les Juges féculiers en peuvent connoître fi muns-civils. la plainte eft portée devant eux par la Partie intéreffée, fauf

3 renvoyer par-devant l'Official, dans le cas où l'Eccléfiaftique accufé vient à requérir fon renvoi, ou le Promoteur à revendiquer; ils font en poffeffion de connoître contre les Eccléfiaftiques jufqu'à la réquifition du renvoi, ou à la revendication, des plaintes pour injures, rixes & autres cas semblables, rendues par les Parties offenfées. Les exemples en font fréquents.

Le feul point à examiner à cet égard, eft de favoir quels font les Juges féculiers qui en peuvent connoître.

Queftion. Quels font les Juges féculiers qui peuvent connoître des

délits communs

civils?

En premier lieu, les Baillis & Sénéchaux Royaux ou leurs Lieutenans - Criminels & autres Juges Royaux reffortiffans nuement aux Cours de Parlement, peuvent connoître des délits communs-civils commis par les Eccléfiaftiques, jufqu'au renvoi requis par les Accufés, ou à la revendication du Promoteur. En fecond lieu, peut-on dire la même chofe des Juges Royaux Quid, des Préinférieurs, tels que Prévôts, Châtelains, Vicomtes & Viguiers Royaux ?

M. Jouffe, en fon Traité de la Juftice Criminelle, tom. I, pag. 154, no. 36, écrit « que ces Juges Royaux inférieurs » peuvent auffi connoître des délits non privilégiés commis » par des perfonnes Eccléfiaftiques par prévention aux Juges » d'Eglife tant que le renvoi n'eft pas demandé par l'Accufé, » ou que la revendication n'en eft faite » fon Promoteur ».

pas

par

l'Official ou

Ce qu'enfeigne M. Jouffe combat directement la difpofition précife de l'Article V de l'Edit de Cremieu de l'an 1536, lequel a été donné pour régler la Jurifdiction respective des Baillis, Sénéchaux & autres Juges préfidiaux, & des Prévôts, Châtelains & autres Juges ordinaires inférieurs. L'Article V est ainfi conçu: « Connoîtront auffi nofdits Juges reffortiffans en »notredite Cour, fans moyen... des caufes criminelles ef» quelles les Nobles feront défendeurs, poursuivis & accu»fés, fans que nofdits Prévôts, & Châtelains & autres Ju»ges inférieurs en prennent connoiffance ». Cette difpofition de l'Edit de Cremieu n'a jamais été révoquée qu'en faveur des Juges des Seigneurs Hauts-Jufticiers, comme nous le ferons voir dans un inftant. Elle fubfifte donc par rapport aux Prévôts, Châtelains, Viguiers & autres Juges Royaux inférieurs; d'ailleurs l'interdiction faite aux Prévôts Royaux de connoître

vôts Royaux &

autres.

des crimes commis par des Gentilshommes fut encore renouvellée par l'Ordonnance Criminelle de 1670, Titre I de la Compétence des Juges, Article X.

Or, perfonne n'ignore que les Eccléfiaftiques en France font affimilés aux Nobles, & qu'ils jouiffent des prérogatives de la Nobleffe. Les Eccléfiaftiques, de même que les Gentilshommes, aux termes de l'Article XXI de la même Ordonnance Criminelle de 1670, peuvent demander à être jugés toute la Grand'Chambre du Parlement affemblée. La Déclaration du Roi de 1731 fur les cas Prévôtaux ou Préfidiaux affimile reillement, par les Articles XI & XII, les Gentilshommes aux Eccléfiaftiques.

pa

L'On peut donc conclure que les Eccléfiaftiques, en matiere criminelle, ne font point jufticiables des Juges Royaux inférieurs, & que dans la regle ces Juges devroient délaiffer aux Juges Royaux reffortiffans nuement aux Cours de Parlelement la connoiffance des actions criminelles, lorfqu'elles font intentées contre des perfonnes Eccléfiaftiques, & même lorfqu'il n'eft queftion que de délits communs-civils.

Quid, des JuEn troifieme lieu, on peut demander files Juges des Seiges des Seigneurs Hauts-Jufticiers. gneurs Hauts-Jufticiers font pareillement incompétens pour connoître des délits communs-civils commis par les Eccléfiaftiques.

Si la difpofition de l'Article V de l'Edit de Cremieu cideffus rapportée, fubfiftoit en fon enticr, il en feroit par rapport aux Juges des Seigneurs, de même que par rapport aux Juges Royaux fubalternes. Car l'Article V de l'Edit interdit la connoiffance des caufes criminelles efquelles les Nobles font défendeurs, poursuivis & accufés, non-feulement aux Prévôts & Châtelains Royaux, mais encore aux autres Juges inférieurs, ce qui comprenoit les Juges des Seigneurs. Mais par une Déclaration du Roi, du 24 Février 1537, interprétative de l'Edit de Cremieu, donnée en faveur des Seigneurs qui reclamerent leurs droits de Justice, Sa Majefté déclara que « par » l'ordre & réglement qu'elle avoit mis entre fes Juges Préf» diaux & fubalternes, elle n'avoit aucunement compris en fes » Ordonnances & Edit fes Vaffaux, ayant en leurs Terres & » Seigneuries Jurifdiction & Juftice, mais feulement entre fes » jufticiables, qui ont à fubir jugement par-devant fes Juges, » & des caufes & matieres dont la connoiffance leur a de tout

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