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qu'il ne paroît pas que le Docteur de Sorbonne qui s'étoit tué lui-même ait été revendiqué par le Promoteur. Or il est bien conftant que le Lieutenant - Criminel du Châtelet a pu faire feul le procès au cadavre, parce que les Juges Royaux ne font pas tenus de renvoyer d'office. Il femble donc qu'il n'y a aucune raifon fuffifante de vouloir priver le Juge d'Eglife du droit de faire le procès aux cadavres des Eccléfiaftiques. La raison de décider le contraire fe tire de la nature du privilége Clérical: car le privilége Clérical eft moins accordé à chaque membre du Clergé en particulier qu'à tout l'Ordre Eccléfiaftique en général. Or l'Ordre Eccléfiaftique, l'honneur du Clergé & de la Religion font intéreffés dans les procès qui fe font aux Eccléfiaftiques accufés de s'être donné la mort; conféquemment le droit de faire le procès aux cadavres de ces infortunés ne doit pas être enlevé aux Juges d'Eglife.

D'après cela fi le cas arrivoit, ce feroit à l'Evêque à faire revendiquer par fon Promoteur, s'il l'eftimoit à propos: & fi le Juge Royal refufoit d'accorder le renvoi, il faudroit se pourvoir au Parlement.

Des cas où le procès peut être

A l'égard des cas où il échet de faire le procès au cadavre ou à la mémoire d'un défunt, ce font les crimes de leze-Ma- fait au cadavre. jefté divine ou humaine, le duel, l'homicide de foi-même, & la rébellion à Juftice avec force ouverte, dans la rencontre de laquelle le défunt aura été tué. Art. I, Tit. XXII de l'Ordonnance de 1670.

Il faut cependant obferver que s'il paroît par les circonftances & l'information que le défunt s'eft tué par folie, ce qu'il faut préfumer dans le doute; alors on ne doit prononcer aucune peine contre le cadavre, mais on doit ordonner qu'il fera inhumé en terre fainte.

de faire le procès au cadavre. Nomination de Curateur.

Quant à la maniere de faire le procès au cadavre ou à la De la maniere mémoire d'un défunt, le Juge doit nommer d'office un Curateur au cadavre du défunt, s'il eft encore extant, finon à fa mémoire; & le parent du défunt doit être préféré, s'il s'en offre quelqu'un pour en faire la fonction. Art. II, même Titre XXII,

2o. Aux termes de l'Art. III, mêmẹ Tit. XXII, le Curateur nommé doit favoir lire & écrire,

30. Enfin le procès doit être inftruit contre le Curateur en

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mémoire d'un dé

la forme ordinaire; fon nom doit être compris dans toute la procédure, mais la condamnation doit être rendue contre le cadavre ou la mémoire feulement.

De la procédure En fecond lieu, relativement à la procédure pour purger la pour purger la mémoire d'un défunt, dont parle le Tit. XXVII de l'Ordonnance criminelle de 1670, elle ne peut avoir lieu dans les Tribunaux Eccléfiaftiques.

funt.

Des faits jufti ficatifs.

Queftion

Car cette procédure n'a été introduite qu'en faveur de la veuve, des enfans & parens d'un condamné par jugement de contumace, décédé fans s'être repréfenté. Or les jugemens de contumace qui peuvent fe rendre dans les Tribunaux Eccléfiaftiques ne font pas dans le cas d'être attaqués par les parens des Eccléfiaftiques condamnés. Auffi les procédures, à l'effet de purger la mémoire d'un défunt, font inconnues dans les Officialités.

Sur l'abrogation des appointemens, écritures & forclufions en matiere criminelle, de même que fur les conclufions définives du Promoteur nous nous réferons à ce que nous avons dit fur ces deux objets dans les Chapitres XVII & XVIII de la troifieme Partie.

Nous terminerons le préfent Chapitre par l'examen des queftions rélatives aux faits juftificatifs.

Nous avons vu au Chap. XIX de la troifieme Partie, que l'Official pouvoit admettre en cas de délit commun l'Accufé à la preuve des faits juftificatifs par lui propofés, pourvu qu'ils puiffent fervir à fa juftification ou au moins à le rendre excufable.

Nul doute que l'Official ne puiffe pareillement admettre P'Accufé à la preuve de fes faits juftificatifs en cas de délit privilégié, & après une inftruction conjointe.

D'un autre côté le Juge Royal peut auffi admettre l'Accnfé à la preuve de fes faits juftificatifs ou ne pas l'y admettre, fuivant qu'il le juge à propos.

Delà naît la queftion de favoir fi, forfque l'un des deux Juges admet l'Accufé à la preuve de fes faits juftificatifs, l'autre Juge qui n'y a pas admis, doit affifter à l'inftruction qui fe fait en conféquence. Nous ne le penfons pas car il eft conftant que le jugement qui admet l'Accufé à la preuve de fes faits juftificatifs doit être rendu féparément par chaque Juge. L'Eit de 1678, & les Déclarations du Roi de 1684 & 1711 ren

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ferment l'inftruction conjointe dans les informations procès verbaux, interrogatoires, récolemens, & confrontations: le refte de la procédure eft fait féparément par chaque Juge, ce qui comprend les décrets, fentences de provifion, réglement à l'extraordinaire; on peut y ajouter le jugement qui admet l'Accufé à la preuve de fes faits juftificatifs. Donc fi l'Official peut feul permettre à l'Accufé de faire preuve des faits juftificatifs par lui articulés, par une conféquence néceffaire, il doit pouvoir feul, & fans être tenu d'appeller le Juge Royal, procéder à l'inftruction néceffaire pour y parvenir. Ce qui eft d'autant plus certain, que le Juge Royal n'étant pas tenu d'admettre l'Accufé à la preuve de fes faits juftificatifs, peut ou le condamner ou l'abfoudre fur les preuves acquifes au procès, & par là confommer fon miniftere & fon pouvoir.

Il faut dire la même chofe, fi le Juge Royal a admis l'Accufé à la preuve de fes faits juftificatifs, tandis que l'Official a jugé définitivement. L'Official après avoir rendu fon jugement définitif, n'a plus droit de prétendre procéder conjointement avec le Juge Royal à l'enquête & autres inftructions ordonnées pour parvenir à la preuve des faits juftificatifs. Mais il en est autrement, fi les deux Juges ont admis, chacun de fon côté, l'Accufé à la preuve de les faits. juftificatifs: en ce cas, l'inf truction doit être faite conjointement par les deux Juges.

En conféquence, l'Official dans le cas où il ordonne la preu ve des faits juftificatifs propofés par l'Accufé, eft obligé avant que d'y procéder, d'attendre fi le Juge Royal l'ordonnera; car autrement la procédure du Juge d'Eglife feroit prématurée, & ne manqueroit pas d'être déclarée abufive, s'il arrivoit dans la fuite que le Juge Royal ordonnât la même preuve.

C'est ce que décide le célebre Chancelier Dagueffeau, dans une lettre qu'il écrivit au Lieutenant-Criminel de Bezançon.

Au furplus, tout ce que nous avons dit au Chapitre XIX cideffus cité, fur les faits juftificatifs dont peut faire preuve l'Accufé, la prononciation du jugement qui ordonne la preuve, la détention de la perfonne de l'Accufé pendant l'inftruction, l'affignation à donner aux témoins, & la communication de l'enquête, tout retrouve ici fa place.

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Chaque Juge rend fa fentence

féparément.

L'Official ap

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CHAPITRE X I I.

Des Sentences.

PRÈS l'inftruction conjointe, chacun des deux Juges doit rendre féparément fa fentence fur les conclufions de la Par tie_publique de fon Siége.

L'Official doit appeller à cet effet un Confeil, en présence en préfence du duquel il doit faire fubir à l'Accusé le dernier interrogatoire der

pelle un Confeil,

quel il fait fubir riere le Barreau.

à l'Accufé un der

nier interrogatoi

re.

A l'égard du lieu où l'Official doit rendre fa fentence, c'est ordinairement dans la Chambre du Confeil du Prétoire de l'Of Du lieu où l'Officialité. fieial doit rendre La fentence.

Exemple.

Du temps où la fentence de l'Offi

Si cependant l'Official avoit eftimé à propos de fe tranfpor ter au Siége de la Juftice Royale, pour y faire l'inftruction conjointe, & de laiffer l'Accufé dans les prifons Royales, en ce cas, l'Official pourroit aller rendre fa fentence dans la Chambre du Confeil du Siége Royal, en fe faisant autorifer par le Parlement du reffort, pour plus grande précaution.

C'eft ainfi que l'on voit que par Arrêt du Parlement do Rouen, du 17 Décembre 1709, vu le péril évident de l'éva fion de l'Accufé, détenu dans les prifons du Bailliage d'Evreux, s'il étoit transféré au Siége de l'Officialité, l'Official d'Evreux a été autorisé à juger le procès de l'Accufé, dans la chambre du Confeil de ce Bailliage. L'Auteur des Mémoires du Clergé, Tom. VII, col. 499, nous a tranfmis cet Arrêt.

L'Official doit rendre fa fentence le plutôt poffible, c'est la cial doit être ren- vœu de l'Ordonnance criminelle.

due.

S'il étoit refufant de le faire, on pourroit après deux sommations faites de huitaine à huitaine, appeller comme d'abus, & même le prendre à Partie, ainfi qu'il a été jugé par Ar27 Août 1701, rapporté par l'Auteur des Loix criminelles, Tom. II.

rêt du

Mais il faut obferver que le Juge Royal ne peut rendre fa fentence pour le cas privilégié, qu'après lui être apparu de celle de l'Official qu'il doit vifer dans la fienne; c'eft la difpofition

de la Déclaration du Roi de 1684, laquelle porte «< qu'après » que le procès inftruit pour le délit commun aura été jugé en » l'Officialité, l'Accufé fera ramené dans les prifons du Siége » Royal, pour y être jugé à l'égard du cas privilégié ». Cela a été ainfi jugé par plufieurs Arrêts. M. Jouffe, en fon Traité de la Juftice criminelle, Tom. I, pag. 325, no. 496, en rapporte deux du Parlement de Paris, le premier du 2 Octobre 1697, fait défenses au Juge de Mamers, de plus à l'avenir juger le cas privilégié, qu'il ne lui ait apparu de la fentence de l'Official, qui aura jugé le délit commun, laquelle il fera tenu de viser dans la fentence définitive qu'il rendra fur le cas privilégié. Le fecond eft celui du 31 Janvier 1702, auffi rapporté dans le Rapport d'Agence de 1705, lequel infirma une fentence du Châtelet de Paris, qui avoit été rendue avant que l'Official eut prononcé fur le délit commun, quoiqu'il y eut plufieurs laïcs complices dans la même affaire.

Autre Arrêt femblable de la premiere Chambre des Enquêtes du Parlement de Paris, du premier Septembre 1730, rendu contre le Lieutenant-Criminel de Chaumont.

Enfin, autre Arrêt du Confeil d'Etat du Roi, du premier Juillet 1754, imprimé dans le Rapport d'Agence de 1755, lequel a caffé & annullé un Arrêt du Parlement de Bordeaux, qui avoit jugé le cas privilégié avant que l'Official d'Acqs eut rendu fa fentence, pour le délit commun.

La fentence rendue par l'Official, doit être remise ou fignifiée er. forme à la requête du Promoteur au greffe du Bailliage.

Après que l'Official a jugé le délit commun, quand même il déchargeroit l'Accufé, il ne pourroit cependant pas le faire élar gir, s'il étoit détenu dans les prifons de l'Officialité, & qu'il eût été écroué ou recommandé à la requête du Procureur du Roi, la Déclaration de 1684, comme nous l'avons vu plus haut, veut qu'il foit ramené dans les prifons du Siége Royal, pour y être jugé à l'égard du cas privilégié.

Voyez au furplus ce que nous avons dit fur les formalités de la fentence, § I, Chap. XX de la troifiçme Partie, & fur la nature des différentes preuves, le § 2, du même Chap. XX.

rofficial doit être remise en forme

La fentence de

au Greffe du Baile liage.

Comme les deux Juges peuvent rendre des jugemens abfolument Des différent jus différens, & même contradictoires l'un à l'autre, nous avons

gemense

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