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Divifion de ce Chapitre,

criminel contre un Eccléfiaftique accufé, & prévenu d'un cas privilégié, la requifition du renvoi de la part de l'Accusé ou la revendication du Promoteur dépouilleroit entiérement ce Juge: non-feulement il devroit renvoyer devant le Juge d'Eglife pour le délit commun, mais encore il devroit délaiffer au Lieutenant-Criminel du Bailliage ou de la Sénéchauffée la connoiffance du procès pour le cas privilégié.

Paffons maintenant à la plainte, dénonciation & accufation.

C

CHAPITRE III.

De la Plainte, Dénonciation & Accufation.

E chapitre fera divifé en trois paragraphes : le premier aura pour objet la plainte; le fecond, la dénonciation, & le troifieme l'accufation,

§ I.

Qui peut ren

cas privilégié.

De la Plainte.

1o. Il eft certain que tous ceux qui peuvent rendre plainte dre plainte d'un d'un délit commun, peuvent rendre plainte d'un cas privilégié. 2o. Il eft pareillement certain que les Juges d'Eglife peuvent recevoir la plainte en l'un comme en l'autre cas.

Les Juges d'E

glife peuvent recevoir la plainte. Formalités de la plainte.

Question fi > T'official peut ré.

3°. Enfin il eft encore certain que les formalités de la plainte en ces deux cas, font abfolument les mêmes.

Nous nous référons, fur ces trois points, à ce que nous avons dit au Chapitre I de la troifieme partie.

Refte donc à examiner fi l'Official peut répondre une plainte contenant du cas privilegié, avant d'avoir appellé le Juge Royal, & de quelle maniere il peut la répondre.

Sur la premiere queftion, plufieurs Auteurs font d'avis que pondre une plain- l'Official ne peut répondre une plainte contenant du cas privite contenant du légié, avant d'avoir appellé le Juge Royal. Le Juge d'Eglife, cas privilégié difent-ils, eft abfolument incompétent pour connoître de ces pellé leJugeRoyal. fortes de crimes, & par conféquent il n'a pas droit de rendre

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avant d'avoir ap

un jugement préparatoire qui tend à une procédure pour laquelle il n'eft pas compétent. Le Juge qui peut connoître du crime, paroît feul en droit de permettre d'en informer. L'Edit de 1678, continuent-ils, ne parle que du cas où la plainte étant rendue fur un délit commun, on découvre enfuite un cas privilégié. Mais il ne fuppofe pas une plainte rendue fur un cas privilégié: il n'a point donné plus de pouvoir au Juge d'Eglife qu'il n'en avoit.

La Combe, en fon Recueil de Jurifprudence Canonique au, mot Official-cas-privilégiés, eft de cet avis: il enfeigne que « quand » le procès eft commencé par l'Official, fi le cas privilégié eft » énoncé dans la plainte, l'Official ne peut la répondre que » conjointement avec le Juge Royal. » Le même Auteur cite au même endroit plufieurs Arrêts du Parlement de Paris des 20 Décembre 1710, 18 Décembre 1723, premier Février 1726 & 17 Janvier 1728, qui, fuivant lui, ont jugé la queftion; & il ajoute même que lors du dernier Arrêt, M. Gilbert, Avocat-Général, plaida qu'un cas privilégié porté dans la plainte empêchoit l'Official de la répondre fans appeller le Juge Royal.

D'autres Auteurs croyent que l'Official peut répondre la plainte & conféquemment permettre d'informer des faits y contenus, en ordonnant que le Juge Royal fera appellé pour procéder conjointement à l'information.

M. Jouffe, en fon Traité de la Juftice criminelle, Tom. I, pag. 324, no. 492, eft de cet avis: «il écrit que le Juge Eccléfiafti» que dans le cas où il y auroit par la plainte du cas privilégié....... » n'est obligé d'appeller le Juge Royal, que lorfqu'il eft question » d'entendre les témoins, & de fuivre l'inftruction de la procé» dure. Il peut même, fuivant cet Auteur, permettre la publica» tion des Lettres Monitoires, fans appeller le Juge Royal, » parce que les Lettres Monitoires ne font qu'une préparation » à l'inftruction de la procédure, comme eft la plainte & la » permiffion d'informer ».

Dans cette diverfité d'opinions, nous nous propofons de faire voir que le fentiment des derniers Auteurs eft préférable, & en conféquence, que l'Official peut répondre une plainte quoique contenant du cas privilégié, avant même d'avoir appellé le Juge Royal.

Raifons qui éta

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D'abord il faut bien diftinguer la permiffion d'informer, de bliffent que le Ju- l'information même. Nul doute que fi un Juge d'Eglife, devant ge d'Eglife peut répondre une lequel une plainte énonçant quelque cas privilégié auroit été plainte contenant du cas privilégié, portée, avoit informé feul, & fans appeller le Juge Royal, en ordonnant que l'information & tout ce qui s'en feroit enfuivi, feroient déclarés le Juge Royal fera nuls & abufifs. C'est le vœu de l'Edit de 1678, lequel porte appelle, que» lorfque dans l'instruction des procès qui fe feront aux Eccléfiaftiques, les Officiaux connoîtront que les crimes dont » ils feront accufés & prévenus, feront de la nature de ceux pour » lefquels il écheoit de renvoyer aux Juges Royaux pour les » cas privilégiés, lefdits Officiaux feront tenus d'en avertir incef>> famment les Subftituts des Procureurs-Généraux du Roi, » dans le reffort où le crime aura été commis; à peine con» tre lefdits Officiaux, de tous dépens, dommages & intérêts, » même d'être la procédure refaite à leurs dépens : » & c'est là ce qui a été jugé expreffément par les quatre Arrêts du Parlement de Paris, rapportés par La Combe, au mot Official-casprivilégiés & ci-deffus cités.

Enfuite de ce qu'il eft conftant, que l'Official ne peut pas: procéder feul & fans l'affistance du Juge Royal à l'information, fur une plainte contenant du cas privilégié, s'enfuit-il qu'il ne peut pas non plus répondre la plainte & permettre d'informer, même en ordonnant que le Juge Royal fera appellé pour l'infor tion? Nous ne le penfons pas. Quoi qu'en dife La Combe, les quatre Arrêts dont il s'appuye, n'ont pas jugé la queftion.

1o. Il faut en retrancher deux, celui du 18 Décembre 1723, & celui du premier Février 1726, parce que dans l'efpece de ces Arrêts, le cas privilégié n'avoit pas été énoncé dans la plainte, mais l'indication en étoit feulement furvenue dans l'information par la dépofition des témoins.

2o. A l'égard des deux autres en date des 20 Décembre 1710 & 17 Janvier 1728, dans l'efpece defquels le cas privilégié avoit été, à la vérité, énoncé dans la plainte, on peut encore les écarter comme n'ayant pas jugé la queftion, parce que non-feulement l'Official avoit répondu la plainte feul, & fans appeller le Juge Royal, mais encore avoit procédé seul à l'information, circonftance décifive, & fur laquelle les deux Arrêts peuvent être fondés.

Ainfi tout ce que l'on peut conclure de ces deux Arrêts, c'eft

que l'Official qui, fur une plainte contenant du cas privilégié, procede feul à l'information & fans l'affiftance du Juge Royal, commet abus ; mais l'on n'en peut pas tirer la conféquence que l'Official commet pareillement abus s'il s'abftient de procéder feul à l'information, & qu'il fe borne feulement à répondre la plainte & à permettre d'informer.

La queftion peut donc être examinée comme étant entiere. Or, fi l'on confulte les principes & que l'on confidere ce qu'exige le bien de la justice, il femble que le Juge d'Eglife a droit de répondre la plainte même contenant du cas privilégié, fans appeller le Juge Royal.

En effet, aux termes de l'Édit de Melun & de celui de 1678, il n'y a que l'inftruction feulement qui doive être faite conjointement par les Juges d'Eglife & les Juges Royaux: les jugemens foit définitifs foit interlocutoires ou préparatoires, & les décrets même doivent être rendus féparément : chaque Juge doit rendre le fien. Or, l'Ordonnance rendue fur une plainte portant permiffion d'informer, eft un jugement préparatoire. Le Juge d'Eglife peut donc répondre une plainte seul, & fans l'affiftance du Juge Royal.

Par Arrêt du Confeil d'Etat privé du Roi, rapporté par Augeard, Tom. I, pag. 450 & fuiv. il a été jugé que l'Official d'Autun avoit pu, fur une plainte contenant du cas privilégié, accorder Monitoire fans la permiffion du Juge Royal. Or, fi le Juge d'Eglife peut en ce cas accorder Monitoire, il peut conftamment répondre la plainte. C'eft donc une inconféquence de part de La Combe de dire, d'après cet Arrêt en fon Traité des matieres criminelles, Part. III, Chap. V des Monitoires, que l'Official peut fur la plainte accorder Monitoire fans être obligé d'appeller le Juge Royal, & de dire dans un autre endroit, qu'il ne peut répondre feul cette plainte, & avant d'avoir appellé le Juge Royal.

la

Il

y a plus, il eft certain, comme nous le dirons plus bas, que dans le cas où un Eccléfiaftique feroit pris en flagrant délit, l'Official peut dreffer procès-verbal, interroger l'Accufé, recevoir la déclaration des perfonnes préfentes à l'action, &. ordonner que l'Accufé fera conduit dans les prisons de l'Officialité, fauf à appeller le Juge Royal du lieu du délit, pour la continuation & l'instruction du procès. Or, fi cela eft permis

Conclufion.

Juge d'Eglife, fans l'inftance du Juge Royal, pourquoi lui contefteroit-on le pouvoir de répondre une plainte avant d'avoir appellé ce Juge?

Enfin le bon ordre & le bien de la Juftice exigent que l'Official puiffe répondre une plainte en ce cas, même fans appeller le Juge Royal. Car dans certaines occafions, il eft nécessaire de s'affurer inceffamment de la perfonne de l'Accufé, pour prévenir fon évasion. Mais fi l'Official ne pouvoit répondre feul la plainte, ni conféquemment ordonner fur le champ que l'Accufé fera arrêté, il s'enfuivroit qu'il auroit le temps & la liberté de s'évader.

Nous verrons en effet qu'aux termes de la Déclaration de 1684, l'Official ne peut faire fommer le Juge Royal de fe rendre au Siége de l'Officialité, que dans la huitaine. Or pendant l'efpace de huit jours, un Accufé ne pourroit-il pas échapper à la Juftice?

Descombes, Greffier de l'Officialité de Paris, dans fon Recueil de procédures criminelles, Part. III, Chap. I, nous apprend que la queftion que nous examinons a été décidée, conformément à ce qui vient d'être expofé.

D'après cela, nous penfons que l'Official dans l'ufage peut répondre la plainte, & permettre d'informer, quand même elle contiendroit du cas privilégié, fans avoir appellé le Juge Royal, en ordonnant qu'il fera appellé pour l'information.

De quelle ma- A l'égard de la deuxieme queftion, qui eft de favoir de quelle niere rOfficial doit répondre la maniere l'Official peut répondre une plainte contenant du cas plainte contenant privilégié, il faut diftinguer par qui la plainte eft rendue, fi c'est du cas privilégié. par le Promoteur ou par une Partie privée.

Au premier cas, l'Official doit donner acte au Promoteur de la plainte, permettre d'informer des faits y contenus, accorder Monitoire, & même décréter de prise de corps l'Accufé, fuivant l'exigence des cas, en ordonnant en même temps que le Juge Royal du lieu du délit, fera appellé pour l'information.

Au deuxieme cas, lorfque la plainte eft rendue par une Partie privée, l'Official doit d'abord ordonner que la plainte fera communiquée au Promoteur, & enfuite fur les conclufions du Promoteur, rendre fon Ordonnance comme dans le premier

cas.

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