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Autre exemple

cre la maxime de l'Eglife de France, fuivant laquelle il n'y a point d'exemption pour les Religieux qui ont délinqué hors le Cloître avec fcandale public.

L'autre exemple nous eft rapporté dans le Rapport d'Agence d'un Religieux de 1725. exempt, qui a dé

linqué hors le

l'Official ordinai

re,

Nous y apprenons, pag. 108 & fuiv. que le Promoteur Cloître, puni par du Diocèfe de Comminges inftruit de la conduite scandaleuse de Dom la Roque-Bouillac, Religieux de l'Ordre de Cîteaux Confeffeur des Religieufes de l'Abbaye de Salas au Diocèfe de Comminges, préfenta Requête à l'Official pour obtenir la permiffion de faire informer des excès de ce Religieux. L'Official fur la Requête du Promoteur, permit d'informer. L'information faite, Dom la Roque-Bouillac fut décrété de prise de corps. Le Décret lui fut fignifié en perfonne.

pro

Dom la Roque-Bouillac ainfi décrété présenta Requête au Parlement de Toulouse, par laquelle il conclut à ce que la cédure faite contre lui par l'Official de Comminges fut déclarée abufive, attendu l'incompétence du Juge à caufe des priviléges de l'Ordre de Citeaux, & demanda qu'il plût à la Cour ordonner par provifion que toute procédure à faire contre lui de l'autorité de l'Official de Comminges, fut furfife. Le Parlement de Toulouse ordonna feulement que le Greffier de l'Officialité de Comminges remettroit la procédure par extrait au Greffe de la Cour. La procédure ayant été remife au Greffe du Parlement de Toulouse l'affaire fut rapportée, & fans doute fur ce qu'il parût par les informations que les excès dont la Roque-Bouillac étoit accufé, & pour lefquels il étoit pourfuivi à l'Officialité de Comminges, avoient été commis extra Clauftra, il intervint le 26 Mai 1721, fur les conclufions de M. le Procureur-Général, Arrêt qui démit Dom la RoqueBouillaç du furfis par lui demandé.

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L'affaire n'ayant pas réuffi au Parlement de Toulouse, d'une maniere conforme aux prétentions du Religieux, Dom OlivierGuillaume, Prieur & Vifiteur de l'Ordre, en vertu de l'évoca tion générale dont jouit l'Ordre de Cîteaux, fe pourvut au GrandConfeil, où il crut apparemment que l'affaire auroit un fuccès plus avantageux. Il y obtint des Lettres qui lui permirent de faire affigner tant M. l'Evêque de Comminges que fon Promoteur & Dom la Roque-Bouillac, & qui ordonnerent au Greffier

de

de l'Officialité de Comminges, de remettre la procédure au Greffe du Grand-Confeil.

Tandis qu'on poursuivoit au Grand-Confeil le jugement de l'affaire, Dom Edme, Abbé-Général de Citeaux, craignant que l'affaire n'eût au Grand-Confeil le même fort qu'elle avoit eu au Parlement de Toulouse, s'imagina que la voie de s'adreffer au Roi par placet, feroit plus courte il préfenta donc un placet, dans lequel il expofa que Sa Majefté ayant confirmé les priviléges de l'Ordre de Cîteaux, l'Evêque de Comminges étoit le feul Prélat du Royaume qui'ne voulut pas les reconnoître: c'est pourquoi il fupplioit Sa Majefté de lui impofer filence. En conféquence de ce placet, M. le Duc d'Orléans pour lors Régent du Royaume, chargea M. le Marquis de la Vrilliere, Secrétaire d'Etat, d'écrire à M. l'Evêque de Comminges, & de lui demander un extrait de la procédure faite en fon Officialité contre Dom la Roque-Bouillac. M. l'Evêque de Comminges envoya cet extrait à M. le Marquis de la Vrilliere. L'affaire fut rapportée au Conseil d'Etat ; & il y fut décidé que le Roi ne vouloit point connoître de cette affaire, laquelle devoit être renvoyée au Grand-Confeil, où elle étoit pendante. Il fallut donc que l'affaire fut jugée au Grand-Confeil. L'inftruction y fut faite : les Avocats plaiderent, & fur les conclufions de M. Dolcy, Subftitut de M. le Procureur-Général, intervint le 10 Septembre 1722, Arrêt contradictoire en faveur de M. l'Evêque de Comminges, par lequel l'Abbé de Citeaux fut débouté de fon intervention, & il fut dit n'y avoir abus, & les Appellans furent condamnés en 75 livres d'amende & aux dépens.

L'on voit donc que les Religieux de l'Ordre de Citeaux, nonobstant les priviléges d'exemption dont ils font en poffeffion, ne font pas plus exempts de la Jurifdiction des Officiaux ordinaires que les Religieux des autres Ordres, lorfqu'ils délinquent hors le Cloître. L'on voit que le Parlement de Toulouse & le Grand-Confeil n'ont pas fait plus de difficulté de renvoyer à l'Official de Comminges Dom la Roque-Bouillac, Religieux de l'Ordre de Citeaux, accufé de scandale commis hors le Cloître, que le Parlement de Paris n'en avoit fait de renvoyer par fon Arrêt du 14 Juillet 1703 à l'Official de Paris, Frere Damafcene de la Nativité, Religieux Carme,

D

Conclufion

accufé pareillement de fcandale commis hors le Cloître, quoique ce Religieux ait été revendiqué par fon Supérieur Régulier. Autre exemple. Enfuite à ces deux exemples rapportés ci-deffus, l'on peut en ajouter un troifieme tiré du Commentaire fur la Coutume d'Anjou, de Poquet de Livonniere, Tom. II, col. 1010. C'eft un Arrêt du Parlement de Metz, du 26 Mars 1720, rendu contre la Congrégation de Saint-Vannes & de SaintGildulphe, Ordre de S. Benoît, par lequel un Religieux de cette Congrégation accufé de fréquentations fufpectes & fcandaleufes avec des perfonnes du fexe, fut renvoyé en l'Officialité de Reims, où il a été condamné à des peines canoniques très-féveres.

mettent dans l'in

Enfin, la maxime que les Religieux même exempts font Loumis à la Jurifdiction des Officiaux ordinaires, lorfqu'ils délinquent hors du Cloître, eft fi conftante, que l'Art. XXXII de l'Edit du mois de Février 1773, concernant les Réguliers, lequel porte qu'en cas de fautes commifes hors du Cloître par les Religieux exempts, les Archevêques & Evêques Diocéfains avertiront les Supérieurs majeurs d'y pourvoir, n'a été enrégistré qu'avec la modification, que l'avertiffement qui fera donné les Archevêques & Evêques, ne pourra préjudicier aux droits des Juges ordinaires, de pourfuivre les délits commis hors du Cloître, conformément aux Loix Canoniques, & aux Ordonnances du Royaume.

par

Religieux c- Il faut dire la méme chofe des délits commis par les Rexempts, qui com- ligieux exempts, même dans l'intérieur du Cloître, lorfque térieur du Cloître les délits font graves & exigent une inftruction judiciaire condes crimes qui formément aux Ordonnances du Royaume. La raifon en eft, exigent une inftruction judiciai- que les Supérieurs ou Commiffaires des Ordres ou Congrégare, doivent être tions qui ne jouiffent que d'une exemption perfonnelle & claufpunis par l'Offcial du Diocèfe. trale, n'ont aucun caractere pour faire une inftruction crimi nelle dans les formes prefcrites par les Ordonnances du Royaume.

C'eft ce qu'enfeigne Poquet de Livonniere, en l'endroit cité de fon Commentaire fur la Coutume d'Anjou, par rapport aux cas privilégiés. «Si les Religieux même exempts (écrit cet Auteur) » commettent dans le Cloître des délits privilégiés, les Officiaux » en peuvent prendre connoiffance & inftruire le procès con» jointement avec les Juges Royaux.

Il y en a deux raifons décifives: la premiere, parce que

» les cas privilégiés étant des crimes publics, il est de l'inté» rêt de l'Etat, de la Police, de toute la fociété civile, d'en » affurer la punition & de la rendre publique & exemplaire, » afin de réparer le scandale. Renvoyer en ces rencontres les » coupables devant leurs Supérieurs Réguliers, ce feroit ou » leur procurer l'impunité, ou tenir leur châtiment fecret & » caché, ce qui ne fatisfait pas fuffifamment le public.

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» La feconde raison eft que les Juges Royaux doivent inf» truire les cas privilégiés conjointement avec les Juges Ecclé» fiaftiques, & qu'il eft contre les regles & l'ufage que les Juges » Royaux aient inftruit aucun procès criminel, avec les Supé» rieurs Réguliers.

» Le même Auteur rapporte un exemple de ce qu'il avance: » il nous apprend qu'en l'année 1714, le Pere Confeffeur de l'Ab » baye du Perray, de la ville d'Angers, ayant commis dans » ce Couvent des crimes graves, l'Official de l'Evêque d'An»gers en prit connoiffance avec le Lieutenant-Criminel de » cette Ville; & quelques efforts que l'Abbé de Cîteaux ait » fait, pour faire arrêter cette procédure par les voies juri» diques, il n'en put venir à bout ».

Obfervez feulement qu'il ne faut pas confondre les Monaf- Obfervations teres exempts purement & fimplement, avec ceux qui outrel'exemption, jouiffent d'une Jurifdiction quafi-Epifcopale & territoriale, & qui ont des Officiers, tels que Official, Promoteur & Greffier, pour la faire exercer. Car ces derniers Monafteres peuvent prétendre pour leurs Religieux, l'indépendance absolue & l'exemption de la Jurifdiction de l'Official Diocéfain dans tous les cas & pour toute forte de délits, pourvu que ces· délits aient été commis dans l'étendue de leur territoire.

Paffons maintenant aux Chevaliers de l'Ordre de Malthe. 4°. On peut demander fi les Chevaliers de l'Ordre de Malthe en leur qualité de Religieux, font foumis comme les Religieux des autres Ordres, à la Jurifdiction des Officiaux ordinaires. Cette queftion s'eft préfentée au Parlement de Paris en l'année 1694 à l'occafion de Jean-Baptifte Gorillon, Chevalier fervant de l'Ordre de Malthe, Commandeur de Laingueville, lequel étoit accufé d'avoir affaffiné le cocher du caroffe de Paris à Amiens: elle y a été amplement difcutée. D'un côté, M. l'Archevêque de Paris, qui revendiquoit le Frere Goril

Question. Si les dre de Malthe Chevaliers del'Or font foumis à la Jurifdiction des

Officiaux ordinai

res.

lon, fit valoir le droit commun. D'un autre côté, le Frere Gorillon & le Procureur - Général de l'Ordre de Malthe au grand Prieuré de France invoquerent leurs priviléges.

Il nous fuffira de tranfcrire ici le Plaidoyer de M. de Harlay, Avocat Général, inféré dans l'Arrêt du 6 Septembre 1694, rapporté dans le tom. V du Journal des Audiences, par lequel la queftion a été décidée, pour prouver que l'Ordre de Malthe n'a à cet égard aucun privilége, & que fes membres, lorfqu'ils font accufés & prévenus de crimes graves, font foumis à la Jurifdiction des Officiaux des Archevêques & Evêques, comme les Religieux des autres Ordres ou Congrégations.

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Voici les termes du Plaidoyer de M. l'Avocat-Général. » Le » feul chef qui refte & qui peut faire difficulté, (difoit ce Magiftrat) » eft de favoir fi le crime dont on accufe le Frere Go» rillon, méritant une nouvelle instruction, fa qualité de Re"ligieux nous oblige de le renvoyer devant le Juge d'Eglife » pour le délit commun, ou bien fi ce feroit devant fes Supérieurs de l'Ordre de Malthe car on ne peut s'empêcher » de convenir que bien que leur prétention telle qu'ils nous » l'ont propofée, paroiffe exorbitante, cependant un Ördre auffi » illuftre mérite que l'on conferve avec beaucoup de foin tous » fes priviléges, qui peuvent être fupportés, & qui n'attaquent » point directement les droits du Roi & de l'ordre public.

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» Il eft certain qu'ils ont des titres finguliers fur cette ma» tiere, entr'autres un jugement célebre rendu par le Pape » Adrien IV, affifté de tous les Cardinaux, qui les exempte de » la Jurifdiction de tous les Prélats, & nommément de celle » du Patriarche de Jérufalem, qui prétendoit qu'ils lui étoient » foumis, & qu'ils lui devoient payer quelques droits pour » raifon de leurs biens. Cette exemption eft confirmée par » des exemples où nous voyons que l'on a renvoyé des Cheva" liers à leurs Supérieurs, quoique des Evêques les euffent re» vendiqués. Joannes Galli rapporte un Arrêt qui juge que » deux Chevaliers, nommés Vade & Salebron, prifonniers au » Châtelet, devoient être rendus au Grand Prieur de France, " & non pas à l'Evêque de Paris, quoiqu'ils euffent été pris » dans l'étendue de fon Evêché.

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» L'on pourroit ajouter que bien que les Chevaliers faffent

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