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Les monitoires s'employent parmi nous, en cas de recelé & de divertiffement d'effets d'une fucceffion ou autres, & en cas de crime grave dont les coupables ne font pas connus.

nitoires,

L'objet des monitoires dans le premier cas, eft d'obliger Objet des moles injuftes raviffeurs ou détempteurs à reftituer les effets recelés & divertis ; mais dans le fecond cas l'objet des monitoires eft d'apprendre les noms des coupables par la voie de la révélation. Nous ne parlerons ici des monitoires, que relativement aux matieres criminelles.

Tout ce qui concerne les monitoires en matiere criminelle fera divifé en trois paragraphes.

Dans le premier nous examinerons les fept queftions fui

vantes.

1o. Dans quel cas le monitoire doit-il avoir lieu ? 2°. Qui peut permettre de l'obtenir ?

3°. Que doit-il contenir ?

4°. Qui doit accorder le monitoire, & qui doit en faire la publication?

5°. Quelles font les peines contre les Officiaux qui refuseroient d'accorder monitore, & les Curés qui refuferoient de le publier?

6°. Quels droits font dus aux Officiaux & aux Curés pour l'accorder & le publier?

Dans le fecond paragraphe, nous parlerons de l'oppofition à la publication des monitoires; & dans le troifieme, de la révé lation.

§ I.

Dans quel cas le monitoire doit-il avoir lieu?

Le Concile de Trente, Seff. XXV, Chap. III de reforma tione, veut que les monitoires ne foient accordés que pour causes importantes & après un mur examen. Les Conciles Provinciaux qui fe font tenus depuis en France, & l'Affemblée générale du Clergé, tenue à Melun en 1579, ont renouvellé cette difpofition.

Ce qui a déterminé les Peres du Concile de Trente & les Evêques du Royaume à reftraindre la publication des monitoires aux caufes importantes, c'eft la crainte que les peuples ne s'accoutument à méprifer les cenfures de l'Eglife, fi on

Premiere quefcas le monitoire tion. Dans quel doit-il avoir lieu? Difpofition des Conciles.

Difpofition

les employe trop fréquemment & pour des caufes légeres. Nos Rois ont cru devoir fuivre à cet égard, l'exemple des des Ordonnances Conciles. L'Art. XVIII de l'Ordonnance d'Orléans porte, «que » les Prélats, Gens d'Eglife & Officiaux ne pourront décerner » monition & ufer de cenfures Eccléfiaftiques, finon pour cri» me & pour scandale public ».

Royaux.

Cas dans lefquels les monitoirespeu

vent être décer μές,

Deuxieme quel permettre d'obte

tion. Qui peut pit monitoires?

La permiffion

L'Art. XXVI de l'Edit de 1695, concernant la Jurisdiction Eccléfiaftique, eft conforme à l'Art. XVIII de l'Ordonnance d'Orléans, il y eft feulement ajouté que les Juges Royaux n'en ordonneront la publication que lorfqu'on ne pourra avoir autrement la preuve.

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Ces difpofitions, tant des Conciles que des Ordonnances de nos Rois, font générales, & ne déterminent pas les cas particuliers où il eft permis d'employer la voie des monitoires.

La regle que l'on peut fuivre en cette matiere, c'eft que toutes les fois que d'un côté le crime eft grave, c'eft-à-dire, qu'il intéreffe l'ordre public & la difcipline Eccléfiaftique, & qu'il en résulte un fcandale public, & que de l'autre côté, on ne peut en avoir la preuve autrement que par la voie du monitoire, l'Official doit le décerner & en ordonner la publication,

Il fuit delà que l'Official peut ordonner la publication du monitoire pour raifon d'adultere, d'incefte & même de vie fcandaleufe dans un Curé,

L'Ordonnance de Blois, Article XXI, permet la publication des monitoires pour avoir révélation de faits de fimonie & de confidence,

L'on ne pense pas que pour injures verbales l'on puiffe faire publier monitoires, à moins qu'elles ne foient atroces.

Paffons à la deuxieme queftion, laquelle eft de favoir qui peut permettre d'obtenir monitoire.

Aux termes de l'Article I du Titre VII de l'Ordonnance criminelle de 1670, tous Juges, même Eccléfiaftiques, & ceux des Seigneurs, peuvent permettre d'obtenir monitoires encore qu'il n'y ait aucun commencement de preuve ni refus de dépofer par les témoins,

Il faut obferver que l'on eft toujours à temps de demander de faire publier permiffion de faire publier monitoires, pourvu que ce foit avant toujours fe deman, le jugement définitif.

monitoire, peut

das, pourvu que Par la troifieme question, on demande que doit contenir le s foit avant le monitoire,

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tif.

1o. Le monitoire. ne doit contenir autres faits que ceux com- jugement définipris au jugement qui aura permis de l'obtenir, à peine de nul- Troifieme quef lité, tant du monitoire, que de ce qui aura été fait en con- tion.Que doit con féquence; c'eft la difpofition de l'Article III du Titre VII de tenir le monitoil'Ordonnance criminelle.

re?

Ne doit conte

nir que les faits

Et pour pouvoir connoître fi le monitoire ne contient que compris au jugeles faits compris au jugement, par Arrêt du Parlement de Paris, ment. du 17 Décembre 1705, rendu fur les conclufions de M. Portail, Avocat-Général, il a été enjoint au Greffier de l'Officialité de Langres de garder les minutes des monitoires que l'Official accorde. Voyez le Journal des Audiences.

ne peuvent être

2o. Les perfonnes ne peuvent être nommées ni défignées Les perfonnes par les monitoires, à peine de cent livres d'amende contre défignées. la Partie, & de plus grande, s'il y échet. Article IV du même Titre.

Il fuit delà que l'Accufé ne peut être défigné ni par fa profeffion, ni par fes vêtemens, ni par le fignalement de fa taille, ou par les habitudes qu'il peut avoir.

M. Jouffe, en fon Commentaire fur cet Article, note premiere, prétend que cela a été ainsi jugé par un Arrêt dụ 24 Juillet 1714. On ne doit parler de celui contre qui le monitoire eft obtenu qu'en termes vagues, & fous des dénominations générales. La raifon de la défense de défigner les perfonnes eft fondée fur ce qu'il n'est pas permis de donner atteinte à l'honneur & à la réputation d'une perfonne qui, par l'événement, peut être trouvée innocente.

Cette regle n'eft pas fans exception; elle n'a pas lieu, lorf- Exception, qu'il eft impoffible de faire autrement que de défigner la perfonne, du moins d'une maniere implicite. L'Auteur du Recueil de Jurifprudence Canonique, verbo Monitoire, n° 7, nous apprend qu'en l'année 1734, M. Gilbert de Voifins, Avocat-Géral au Parlement de Paris, plaida « qu'il y avoit quelquefois » des défignations néceffaires pour faire connoître ce dont il » s'agit, à des perfonnes qui favent quelque chofe fur les faits » du monitoire, pour les porter à venir à révélation, & que cette » défignation eft quelquefois plus ou moins claire, felon la » matiere, les perfonnes qu'elle peut regarder, & les témoins » qu'on voudroit faire venir à révélation, & qu'en cela il ne » peut y avoir d'abus, parce que l'objet principal du moni

X

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Quatrieme quef tion. Qui doit aceorder le moni

toire, & qui doit le publier?

Les Evêques

droit d'accorder monitoire.

»toire eft de parvenir à la connoiffance & avoir des preuves » de certains faits qu'on ne peut connoître parfaitement que » par cette voie. Il est toujours défendu de nommer les per»fonnes, mais la prohibition de les défigner, n'est pas à "beaucoup près fi étendue; par exemple, un Curé eft ac» cufé de quelque familiarité avec une perfonne du fexe dans » fa paroiffe à la campagne; pour parvenir à la connoiffance » de ce fait, l'Official décerne un monitoire, dans lequel on » défigne un Prêtre Curé, cette défignation n'eft pas un abus, » parce qu'on ne peut s'expliquer autrement, pour faire en» tendre ce dont on veut parler & fixer l'objet de l'accufation. » D'ailleurs, dans ces fortes de faits, la notoriété publique » a déja prévenu l'accufation ».

Conformément à ces réflexions de M. Gilbert de Voifins, Avocat - Général, fur l'appel comme d'abus interjetté par le fieur Philbert Thomas, Curé de Brugnon, diocèfe d'Auxerre, lequel fe faifoit un moyen de ce qu'on l'avoit défigné dans un monitoire fous le nom d'un Curé d'une paroiffe de campagne dans le diocèfe d'Auxerre, par Arrêt du 18 Décembre 1734, il fut dit qu'il n'y avoit abus en ce chef.

La quatrieme question eft de favoir qui doit accorder le monitoire & qui doit le publier.

En premier lieu, à l'égard du point de favoir qui doit accorder le monitoire, avant l'Ordonnance criminelle de 1670, les Archevêques, Evêques, plufieurs Abbés réguliers, plufieurs Chapitres, & même bien des Archidiacres accordoient les monitoires; la conceffion des monitoires appartenoit à la Jurifdiction volontaire. Mais l'Ordonnance criminelle de 1670 a changé cet ufage; elle a attribué la conceffion des monitoires aux Officiaux nommément.

On peut à la vérité opposer à l'Ordonnance de 1670, l'Edit maintenus dans le de 1695, qui lui eft poftérieur, dont l'Article XXVI eft ainfi conçu, « les Archevêques & Evêques & leurs Officiaux ne » peuvent décerner des monitoires que pour des crimes graves. & fcandales publics ».

Diftinction des

cas dépendans de

Mais pour concilier ces deux loix, il faut diftinguer les cas la Jurifdiction vo- qui dépendent de la Jurifdiction volontaire, de ceux qui délontaire, de ceux pendent de la Jurifdiction contentieufe; dans les premiers, c'eft dépendans de la l'Evêque à décerner le monitoire ; & dans les feconds, c'est à

Jurifdiction con

tentieufe.

l'Official.

Mais notre objet n'eft pas d'examiner la queftion par rapport aux Archevêques & Evêques, mais feulement par rapport aux Officiaux.

tion.

Cela pofé, il faut diftinguer fi c'eft l'Official diocéfain qui Autre diftinceft faifi de la plainte, ou fi c'est un autre Juge Eccléfiaftique inférieur, comme l'Official d'un Chapitre ou d'un Archidiacre, ou enfin fi c'est un Juge féculier.

L'Official ordi

ner le monitoire

1o. Si l'Official diocéfain eft faifi de la plainte, il eft fans difficulté que c'est lui qui accorde le monitoire, & qui ordonne naire doit déceren conféquence qu'il fera expédié & délivré par le Greffier à la Partie civile ou au Promoteur.

Un Official inférieur le peut

2o. Si c'est un Juge Eccléfiaftique inférieur, tel l'Official que d'un Chapitre ou d'un Archidiacre, qui eft faifi de la plainte, auffi. nous pensons qu'il peut pareillement accorder monitoire. Nous trouvons, dans le Journal des Audiences, un Arrêt du Parlement de Paris, du 10 Décembre 1680, qui a jugé en faveur du Chapitre de Peronne, diocèfe de Noyon, que l'Official de ce Chapitre pourra décerner des monitoires dans les caufes Eccléfiaftiques pendantes par-devant lui.

Mais la publi cation n'en peur

Mais en ce cas il faut obferver que le monitoire ne doit être publié que par les Curés ou Vicaires des Paroiffes dépendan-être faire que dans tes de la Jurifdiction de l'Official inférieur; car il n'auroit pas l'étendue de la Judroit d'enjoindre aux Curés des Paroiffes fur lefquels fa Jurif- rifdiction de l'Ofdiction ne s'étendroit pas, de procéder à cette publication, ni aux habitans de ces Paroiffes de venir à révélation fous peine d'excommunication.

3. Si c'eft le Juge féculier qui fe trouve faifi de la plainte, il eft d'ufage, en pareil cas, que la Partie, foit civile, foit publique, à qui ce Juge a permis d'obtenir monitoire, s'adreffe à l'Official diocéfain.

En fecond lieu, quant à la publication du monitoire, elle doit être faite (aux termes de l'Art. V du Titre VII) par les Curés & leurs Vicaires, à la premiere requifition, & en cas de refus de la part de ceux-ci, par un autre Prêtre nommé d'office par le Juge faifi de la plainte, (même Art. V). Cependant Duperray, en fes notes & obfervations fur l'Édit de 1695, Art. XXVI, nous apprend qu'il a fait juger, par Arrêt de la Tournelle, du 25 Mai 1686, qu'en cas de refus d'un Curé de publier le monitoire, ce n'étoit pas au Juge

ficial inférieur.

Quand le Juge laïc permet la publication d'un monitoire, c'eft l'ufage de s'adreffer à l'Official Dio.

céfain.

De la publica

tion des monitoi

res.

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