Page images
PDF
EPUB

Sentiment des Jurifconfultes.

bornes de la jurifdiction Eccléfiaftique contentieuse, c'eft que les Juges d'Eglife en France, ne peuvent connoître que des actions perfonnelles & non des actions réelles ou mixtes: tout ce qui a trait aux perfonnes feulement, peut être de la compétence des Juges d'Eglife; & tout ce qui eft réel ou mixte, c'est-à-dire, partie perfonnel & partie réel, eft de la compétence des Juges féculiers.

Le point à examiner eft donc de savoir fi l'appofition des fcellés en matiere criminelle a trait à ce qui eft réel ou mixte.

Or, rien n'annonce que l'appofition des fcellés en ce cas ait trait à la réalité. Le Juge d'Eglife ordonnant qu'il fe transportera fur les lieux pour appofer les fcellés fur les effets & papiers d'un Eccléfiaftique accufé, n'entreprend pas de connoître d'une chofe réelle ou mixte,

Il faut diftinguer l'appofition des fcellés & inventaires après décès, de l'appofition de fcellé & l'inventaire en matiere criminelle,

Au premier cas, ce fercit une entreprise du Juge d'Eglife, parce qu'une fucceffion a trait à la réalité : il peut y avoir des immeu bles dont le partage ne peut être fait, que devant le Juge féculier or il eft raisonnable que les fcellés foient appofés, & l'inventaire fait par le Juge devant qui le partage judiciaire, quand il a fieu, doit être fait,

Mais au

au fecond cas, la même raison ne fe rencontre plus, l'appofition des fcellés & la confection de l'inventaire n'ont pas trait à la réalité. L'objet de ces deux formalités, c'est de découvrir s'il ne fe trouveroit pas quelques effets ou papiers fervant à la conviction ou à la décharge de l'Eccléfiaftique accufé.

Il femble donc que rien, en ce cas, ne devroit empêcher que l'Official ne pût appofer les fcellés & faire inventaire.

Cependant les Jurifconfultes François prétendent que l'Official n'a pas ce droit.

M. Jouffe, en fon Traité de la Juftice Criminelle, Tom. II, pag. 65, no. 10, dit que « lorfque la perquifition doit fe faire » dans la maifon d'un Eccléfiaftique pourfuivi en l'Officialité, » ou qu'on veut appofer le fcellé fur fes effets, il faut fe pourvoir » devant le Juge Royal, qui doit en ce cas, appofer le fcellé » fur la requifition du Promoteur, & en fa préfence »,

Cet Auteur cite Imbert en fa Pratique Civile & Criminelle,

Liv. I, Chap. XXIV, no. VI, mais c'eft mal-à-propos; Imbert ne parle que d'appofition de fcellé, & de confection d'inventaire après le décès d'un Prêtre, ce qui eft bien différent.

Il faut auffi avouer que l'ufage n'eft pás en faveur des Juges Ufage. d'Eglife. Le même Defcombes, ibid. pag. 118, nous apprend que de fon temps, c'eft-à-dire, à la fin du fiecle dernier, l'Official de Paris n'étoit pas dans l'ufage de faire l'appofition de fcellé, & il ajoute que le Promoteur doit, en ce cas, s'adreffer aux Commiffaires du Châtelet & requerir leur tranfport à cet effet.

A Paris, ce font les Commiffaires qui appofent le fcelé; & dans les Villes des Provinces, ce font les Lieutenans-Généraux des Bailliages & Sénéchauffées ou autres Juftices Royales, & les Baillis des Juftices Seigneuriales.

Il réfulte de ce qui vient d'être dit, que jufqu'à ce qu'il plaife au Clergé de réclamer fes droits à cet égard, un Official, pour ne pas s'expofer à un appel comme d'abus, doit, lorfqu'il eft néceffaire d'appofer les fcellés fur les effets & papiers d'un Eccléfiaftique accufé, s'abftenir de les aller mettre lui-même. Il doit feulement ordonner qu'ils feront appofés par qui il appartiendra, & qu'à cet effet la Partie civile ou le Promoteur fe pourvoira.

L'Official ne doit pas aller appofer

les fcellés lui-mê

me.

Ce qu'il peut

ordonner.

Conduite de la Partie civile ou du

Enfuite la Partie civile ou le Promoteur requerra le Juge ou Commiffaire qui eft en poffeffion de faire les appofitions des Promoteur. fcellés, de fe tranfporter fur les lieux à l'effet de les mettre fur les effets & papiers de l'Eccléfiaftique accufé, & les fera appofer en fa préfence.

Lorfqu'il s'agira de les faire lever, la Partie civile ou le Promoteur requerra l'Official, qu'il lui plaife ordonner que les fcellés feront levés pareillement par qui il appartiendra, & qu'il fe tranfportera fur les lieux, lors de la levée, pour faire l'inventaire & defcription fommaire des effets & papiers qui pourront fe trouver.

Au bas de la Requête, l'Official mettra fon Ordonnance; & en exécution d'icelle, la Partie civile ou le Promoteur requerra de nouveau le même Juge féculier ou Commiffaire, de fe tranfporter fur les lieux, à l'effet de procéder à la levée des fcellés conformément à l'Ordonnance de l'Official, & les fera lever en fa préfence.

Idée des Rapports des Médecins & Chirurgiens.

Le bleffé peut

fe faire vifiter.

L'Official peut

conde vifite.

L'Official auffi préfent, auffi-tôt la levée des fcellés, commencera en la préfence de la Partie civile ou du Promoteur, la defcription des effets & papiers, & s'il ne peut l'achever dans une feule & même vacation, il faudra remettre les fcellés fur les effets & papiers non inventories.

Il faut obferver que l'Official doit, für la requifition de la Partie civile ou du Promoteur, ordonner à la fuite du procèsverbal de description, que les effets & papiers pouvant fervir à la décharge ou conviction de l'Accufé, feront remis au Greffe de l'Officialité, après qu'il aura cotté & paraphé les papiers.

L

le

CHAPITRE IV.

Des Rapports des Médecins & Chirurgiens.

Es rapports des Médecins & Chirurgiens en matiere criminelle, fervent à conftater l'état de la perfonne blessée, & genre de mort de la perfonne décédée, fi c'eft de mort natu

relle ou violente..

Ces rapports font peu fréquens dans l'inftruction des procès criminels pour raifon des délits communs.

Ils le font plus dans l'inftruction des procès criminels pour raifon des délits privilégiés, comme nous le dirons dans le traité particulier de l'inftruction conjointe.

Il nous fuffira de faire ici quelques obfervations fur celui qui peut faire faire les vifites dont il s'agit, fur les Médecins & Chirurgiens qui peuvent les faire, & enfin fur les formalités qui doivent précéder & fuivre les rapports qu'ils doivent dreffer.

1o. Toute perfonne bleffée peut fe faire vifiter par Médecins & Chirurgiens, c'eft la difpofition de l'Art. I du Tit. V de l'Ordonnance Criminelle.

La premiere vifite qu'a fait faire de fa perfonne celui qui a ordonner une fe- été bleffé, n'empêche pas l'Official d'en ordonner une feconde foit d'office, foit fur la requifition de la Partie civile ou du Promoteur, & même de l'Accufé, & de nommer d'office à cet effet des Médecins & Chirurgiens, Art. II du même Tit. III. La raison de cette feconde visite eft sensible. Le rapport

d'un

d'un Médecin ou Chirurgien choifi par la Partie peut être fufpect; car l'on fent que la Partie n'aura pas manqué de choifir un Médecin ou Chirurgien qui lui foit favorable. Une feconde vifite par un Médecin ou Chirurgien nommé d'office, peut donc être néceffaire & indifpenfable.

Quels font les

Médecins & Chirurgiens qui peu

2o. A l'égard des Médecins & Chirurgiens qui doivent faire ces rapports, ce font les Médecins & Chirurgiens-Jurés, créés dans toutes les Villes du Royaume par Edit du mois de Fé- vent faire les rapvrier 1692, pour faire, à l'exclufion de tous autres, ces for- ports. tes de vifite quand il ne s'en trouve pas, il faut prendre des Médecins & Chirurgiens ordinaires.

Si dans quelques Officialités du Royaume, il y avoit des Médecins & Chirurgiens pourvus par l'Evêque ou l'Official, il faudroit s'en fervir à l'exclufion même des Médecins & Chirurgiens-Jurés, créés par l'Edit de 1692.

Formalités qui

& fuivre les rape.

3°. Quant aux formalités, il faut diftinguer en premier lieu fi le Médecin ou Chirurgien a ferment en Juftice ou non: s'il doivent précéder a ferment en Juftice, il eft difpenfé de la preftation de fer- ports. ment & de l'affirmation de fon rapport.

Mais fi ce Médecin ou Chirurgien n'a point ferment en Justice, il faut encore diftinguer. S'il a fait fa vifite à la requifition de la perfonne bleffée, il eft tenu feulement d'affirmer son rapport véritable par devant l'Official. Art. I du Tit. V.

Si aucontraire il a été nonimé d'office par l'Official, il doit, avant de procéder à la vifite, prêter ferment dont fera expédié acte, & après la vifite, dreffer & figner fur le champ fon rapport.

Dans tous les cas le rapport doit être remis au greffe pour être joint au procès, fans qu'il puiffe être dreffé aucun procès-verbal.

CHAPITRE V.

Des Informations.

'INFORMATION eft l'acte ou procès-verbal qui renferme la dépofition des témoins.

[ocr errors]

On appelle Information en matiere criminelle, ce que appelle Enquête en matiere civile.

l'on

[blocks in formation]

S

L'Information

L'Information eft une piece fecrete du procès comme il fera dit plus bas, laquelle ne doit être communiquée ni à l'Accufé, ni à la Partie civile.

Elle est le fondement & la base du procès criminel, & elle est eft la bafe du pro- d'une indifpenfable néceffité, hors le cas de flagrant délit ; & encore en cas de flagrant délit, l'usage eft-il de faire une information.

cès criminel.

Exemple.

Un Official d'Avranches ayant commencé par l'interrogatoire, un procès criminel contre une Eccléfiaftique accufé de fimonie, & fur fa-confeffion, l'ayant privé de fon Bénéfice, par Arrêt rendu fur l'appel comme d'abus interjetté par cet Eccléfiaftique de la procédure & du Jugement, il fut dit qu'il avoit été mal, nullement & abufivement procédé & jugé, & l'Official fut condamné en l'amende de vingt-cinq écus & aux dépens. L'Arrêt eft rapporté par Tournet, lettre A, Chapitre XXV.

Nous diviferons en deux paragraphes ce que nous avons à dire fur l'information.

Le premier aura pour objet les témoins, & le fecond les formalités de l'information.

§ I.

1o. Qui peut être témoin.

Des Témoins.

Plufieurs queftions fe préfentent relativement aux témoins qui font entendus dans une information.

La premiere eft de favoir qui peut être témoin.

La deuxieme, qui peut & doit adminiftrer les témoins. La troifieme queftion confifte à favoir de quelle maniere l'Official peut contraindre les témoins affignés foit Eccléfiaftiques, foit laïcs, à venir dépofer devant lui, & quelles peines il peut prononcer contre ceux qui refufent de comparoître.

1o. Sur la question de favoir, qui peut être témoin, il est certain en général, que toute personne peut être reçue à dépofer; les hommes comme les femmes, ceux qui jouiffent de la vie civile, comme ceux qui font morts civilement, tels que les Religieux, & même les infâmes, hérétiques & autres infideles, fur tout s'ils font témoins néceffaires. L'Art. II du Tit. VI de l'Ordonnance Criminelle de 1670, permet même

« PreviousContinue »