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tueux roi a rappelé ses vertueux conseils. Périssent les ennemis publics qui voudraient encore semer la division entre la nation et son chef! roi, sujets, citoyens, confondons nos cœurs, nos vœux, nos efforts, et déployons aux yeux de l'univers le spectacle magnifique d'une de ses plus belles nations, libre, heureuse, triomphante sous un roi juste, chéri, révéré, qui, ne devant plus rien à la force, devra tout à ses vertus et à son amour. ›

Ces divers discours ont été interrompus à chacun des traits qui exprimaient les dispositions du peuple à l'égard de son roi, par les acclamations de toute l'assemblée.

Le roi, toujours plus ému à pu a peine proférer ces paroles, qui ont été répétées : Mon peuple peut toujours compter sar mon

amour.

La séance étant terminée, le roi s'est montré par une fenêtre à un peuple innombrable rassemblé sur la place de Grève, à toutes les fenêtres, et qui couvrait tous les toits. Les cris universels de vive le roi ont retenti de toutes parts.

Sa majesté est ressortie de l'hôtel-de-ville, et a retrouvé sur son passage les mêmes transports d'amour et de joie.

Ce récit a été souvent interrompu par les applaudissemens et les acclamations de l'assemblée.

Avant la fin de la séance, le maire de Poissy se présente à l'assemblée, et demande à être entendu. Il rend compte de plusieurs crimes commis à main armée par une troupe de brigands, dans les villes de Poissy et de Saint-Germain, et supplie l'assemblée de s'occuper de réprimer ces désordres.

pas

de

Un membre de l'assemblée observe que cet objet n'est la compétence du pouvoir législatif ; qu'il ya un pouvoir exécutif et des tribunaux judiciaires chargés de maintenir le repos et la tranquillité publics.

M. le président annonce que le temps de sa présidence sera demain expiré. Il prie les membres de se retirer demain dans leurs bureaux respectifs, pour procéder au scrutin.

La séance est levée.

SÉANCE DU SAMEDI 18 JUILLET.

A l'ouverture de la séance, les membres, sur l'invitation du président, sont allés dans leurs bureaux donner leur suffrage pour l'élection d'un nouveau président.

On revient sur le rapport, fait dans la séance d'hier, des troubles survenus dans la ville de Poissy. Une troupe séditieuse s'est emparée d'un citoyen accusé d'accaparer des grains; sa vie est menacée : le peuple veut le pendre.

Aussitôt plusieurs membres proposent que l'assemblée y envoye une députation pour le sauver.

Cette proposition est adoptée; douze membres sont nommés, et partent dans l'instant pour se rendre à Poissy et à Saint-Germain en Laye.

Tandis qu'on procéde au dépouillement du scrutin, M. Bessin, procureur au Châtelet, commandant la garde bourgeoise du district de Saint-Merry, est introduit dans l'assemblée, et lui adresse la parole en faveur des malheureux habitans du faubourg Saint-Antoine, qui, depuis cinq jours qu'ils avaient quitté leurs travaux pour la patrie, étaient sans pain.

Messieurs, s'écrie M. Bessin, vous êtes les sauveurs de la patrie, mais vous-mêmes, vous avez des sauveurs!.... Ce sont les hommes intrépides qui viennent de prendre la Bastille.

Ces premières paroles fixent l'attention de l'assemblée. Elle écoute avec intérêt le récit que fait l'orateur des actions courageuses des habitans du faubourg Saint-Antoine; il expose ensuite avec chaleur les besoins urgens qui les tourmentent, et le premier, il excite la générosité des représentans de la nation, en déposant sa bourse sur le bureau, pour soulager, à l'instant même, cette partie des vainqueurs de la Bastille.

M. l'archevêque de Paris appuie fortement les représentations de M. Bessin.

M. le président invite les membres qui composent la députation de Paris, à se réunir pour délibérer sur les moyens de pro

curer aux ouvriers du faubourg Saint-Antoine les secours dont ils ont besoin (1).

Dans le même instant, les députés du Dauphiné communiquent des lettres qui leur annoncent que le renvoi de M. Necker a causé un soulèvemeut général dans leur province; que tous les habitans ont pris les armes pour défendre leur liberté et celle de leurs représentans.

M. le chevalier de Boufflers entre dans l'assemblée, pour annoncer que le peuple vient de se saisir, à la porte même de la salle, de deux hussards soupçonnés de quelques mauvais desseins, et qu'il parle de les pendre.

Plusieurs députés se précipitent pour courir à la défense de ces malheureux accusés. Le peuple les cède volontiers aux représentans de la nation, qui les conduisent dans une des salles, et donnent des ordres pour leur sûreté.

Plusieurs membres demandent que l'assemblée s'occupe des moyens les plus prompts pour rétablir et maintenir la tranquillité publique.

M. Martineau dit

que le meilleur moyen est d'établir dans tous les lieux des milices bourgeoises.

Quelques membres pensent que les maréchaussées suffiraient pour maintenir l'ordre dans les campagnes.

D'autres veulent qu'on emploie le secours des troupes, et qu'on les répartisse dans les villes et les campagnes.

M. de Volney et d'autres membres s'opposent fortement à cette dernière proposition.

Rappeler les troupes dans ce moment, dit M. de Volney, c'est rappeler les alarmes; il faut employer ses propres forces, et intéresser les peuples à leur propre conservation.

La séance est levée et renvoyée à lundi matin.]

(1) Une souscription volontraire fut ouverte dans le jour même parmi les membres de la députation, et produisit 45,000 livres. M. de Juigné archevêque, donna, pour sa part, 20,000 livres.

PROVINCES.

Rennes. La nouvelle du renvoi de M. Necker excita à Rennes le même mouvement qu'à Paris : on l'apprit le 15. Le 16, la jeunesse pilla les magasins d'armes. M. Langeron, commandant de la ville, fit prendre les armes aux troupes. Elles se composaient de trois régimens d'infanterie, Artois, Ile de France et Lorraine, avec leurs canons, et des dragons d'Orléans; mais elles refusèrent de charger, et se mêlèrent à la population. Un jeune homme, nommé Sevushe, fut promu au commandement de la force armée. Une assemblée populaire prit le gouvernement de la ville; et l'on s'occupa sur-le-champ de rechercher les magasins de blé. On continua cependant à reconnaître M. Thiars comme commandant de la province. (Nouvelles de Bretagne, brochure du 24 juillet.-Relation de ce qui s'est passé à Rennes lors du renvoi de M. Necker.)

A Saint-Malo. La jeunesse s'assembla et s'organisa pour marcher au secours de l'assemblée nationale; et les troupes refusant d'agir, les insurgés se trouvèrent maîtres de la ville.

A Grenoble. Le 15 juillet, les citoyens de tous les ordres s'assemblèrent dans l'église Saint-Louis; et, après avoir protesté contre le renvoi des ministres et les intentions de la cour, ils déclarèrent que le paiement des impôts serait suspendu du jour où la moindre atteinte serait portée à la liberté de l'assemblée nationale. Ils ordonnèrent que cet arrêté serait adressé à l'assemblée, au duc d'Orléans, au gouverneur, et à toutes les villes et bourgs de la province. Nous avons cet arrêté sous les yeux. Les premiers signataires sont Savoye, chanoine de la cathédrale; Hélie, curé de Saint-Hugues; Reval, consul; Botur, syndic général du commerce; Allemand-Dulauron, procureur du Roi, etc.

A Lyon. Le commencement du mois avait été signalé par un engagement de la population avec les troupes. Le peuple affamé, et irrité parce que dans une fête, qui avait eu lieu les 2 et 3, à l'occasion de la réunion des trois ordres, la bourgeoisie avait élevé un mai devant l'hôtel du commandant de la ville, avec cette devise, Cives, dilecto civi, le peuple renversa ce mai

pendant la nuit, désarma les troupes éparses dans le corps-de. garde, et alla attaquer la barrière Saint-Clair et le bureau des Fermes. On fit marcher des dragons sur le rassemblement principal; les troupes firent feu, le peuple résista. Il y eut de part et d autre des morts et des blessés. Enfin les dragons se retirèrent sur la Croix-Rousse, et la nuit ramena le calme.

A la nouvelle du renvoi des ministres, les trois ordres s'assemblèrent, protestèrent contre la conduite du gouvernement, et rédigèrent une adresse à l'assemblée.

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-La plupart des villes obéirent seulement au mouvement. Partout, même dans les campagnes, on s'arma, on se forma en milice bourgeoise, on établit des corps de garde. Partout on essaya de faire quelque chose dans l'intérêt commun; mais partout aussi la préoccupation de la famine se mêla à ce soulèvement, et lui imprima un caractère particulier. Le premier soulèvement fut uniquement patriotique; le second fut intéressé : il fut dirigé contre les accapareurs.

[A Caen, à la première nouvelle de la révolution, tous les citoyens arborèrent la cocarde; on prit la citadelle, on s'empara des armes, on força la tour Levi, prison d'un de ces odieux tribunaux connus sous le nom de commission, où des juges stipendiés par la ferme, renfermaient des malheureux qu'ils envoyaient aux galères ou au gibet pour avoir vendu, à un prix modique, ce sel que l'avare ignorance du gouvernement contraignait d'acheter pour ainsi dire au poids de l'or. Mais la fureur du peuple menaça bientôt les papiers, les maisons et les employés des agens du fisc. Dans cette extrémité, les officiers municipaux ordonnèrent une diminution sur le prix du pain, formèrent une garde bourgeoise, et tout rentra dans l'ordre.

Peu de jours après, quelques soldats du régiment d'Artois, en garnison à Rennes, se rendirent à Caen. Ils étaient décorés d'une médaille, récompense honorable de leur dévoûment à la cause commune. Quelques soldats du régiment de Bourbon insultèrent ces patriotes qui étaient sans armes ; et, après un combat inégal, mais sanglant, leur arrachèrent leurs médailles. Les

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