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1791.

IV. Ep. France. Brissot eut aussi une grande part aux événements des Colonies françaises en Amérique leur désorganisation était le premier et peut-être alors le seul objet des spéculations ministérielles de Pitt.

Les nouvelles les plus désastreuses étaient, arrivées de Saint-Domingue, où les nègres rassemblés en armes, avaient incendié les habitations et égorgé les blancs. Le commandant, Blanche9 nov. lande, écrivait au ministre qu'il espérait cepen

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dant arrêter les progrès de la révolte, à moins Pièces j. qu'elle ne soit excitée par des blancs philanthropes, qu'on soupçonne beaucoup avoir été envoyés d'Europe pour faire cette étonnante révolution. Brissot était un des principaux membres de la société des Amis des noirs, dont les principes, philosophiquement très-vrais, ne pouvaient cependant recevoir une application brusque, sans causer tous les malheurs qui arrivèrent. On soupçonnait aussi beaucoup le gouvernement anglais d'exciter le système de cette philanthropie, qu'il était loin de vouloir imiter.

Sur ces nouvelles, l'assemblée renvoya au pouvoir exécutif, et l'on fit passer immédiatement des forces militaires; mais le ministre ayant demandé dix millions pour les frais de cet armement, sur la motion de Brissot, et malgré le décret proposé par le comité, l'assemblée passa à l'ordre du jour, à cause d'un défaut de

formalité qui se trouvait dans le message. Les Espagnols, et même le gouverneur de la Jamaïque, avaient déja donné quelques secours d'armes et de munitions.

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Cet événement fit une courte diversion aux deux grandes questions qui agitaient l'assemblée. Une loi contre les émigrés et contre les prêtres insermentés. La première embarrassait, depuis longtemps, parce qu'il était difficile de signaler le Français émigré avec des intentions hostiles, et de le séparer du simple voyageur, ou de celui que la contrainte et la violence avaient forcé d'abandonner sa terre natale. D'ailleurs, déja commençait une politique secrète, soutenue par les relations du dehors au dedans, de la part des chefs qui, craignant d'être abandonnés, rendaient difficile la rentrée de ceux qui étaient sortis, et provoquaient, de tous leurs moyens secrets, les lois prohibitives et dont l'effet était de lier à eux sans retour ceux qui s'étaient une fois rattachés à leur fortune. On retrouvera, par la suite et souvent, cette concordance d'intérêts semblables, avec des moyens ostensibles qui semblaient diamétralement opposés. Après plusieurs séances de 9 Ov discussion, l'assemblée adopta enfin un projet de décret en quinze articles : : par le premier, « sont déclarés suspects de conjuration tous Français rassemblés au-delà des frontières. »

Pièces j

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IV. Ep. au premier janvier 1792 : « coupables de con1791. juration, punis de mort, leurs biens saisis

les revenus des princes, en séquestre ; tout fonctionnaire public ne put sortir du royaume sans un congé; tout officier quittant, sans démission, déclaré déserteur. »>

Le roi fut prié de prendre des mesures à l'égard des puissances étrangères qui permettaient les rassemblements de Français émigrés. Le décret porté à la sanction, fut refusé. Les ministres se rendirent à l'assemblée, peu de jours -après; et le ministre de la justice portant la parole, après avoir fait l'énumération des décrets sanctionnés avec la formule : le roi fera executer, prononça, sur le décret relatif aux émigrants, la formule le roi examinera, qui annonçait le refus. Un grand silence dans l'assemblée, suivit ces paroles, alors le ministre voulut commencer un mémoire explicatif des motifs du refus. « Si la sanction du roi eût été « divisible, il eût adopté plusieurs articles; mais «il a pris des mesures qui, par des moyens « moins rigoureux, rempliront.

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Le ministre fut interrompu, et après une courte discussion sur ce point de la constitution, que le refus ni l'acceptation du roi, ne devaient point être motivés ; le ministre ne fut point entendu. Brissot essaya en vain de le dénoncer. 12 nov. On publia en même temps une proclamation

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du roi et deux lettres aux princes, ses frères, IV. Ep. contenant une invitation générale et un ordre personnel de rentrer en France. Ce refus de Pièces j. sanction était un grand acte de liberté et qui cautionait la libre acceptation du roi. Sa proclamation était pressante et son injonction formelle: « Ceux-là, dit-il, seraient étrangement « trompés, qui supposeraient au roi, une autre « volonté que celle qu'il a publiquement mani« festée. . . . Le roi leur donne, en exerçant « sa prérogative sur des mesures de rigueur dirigées contre eux, une preuve de sa liberté qu'il ne leur est plus permis de méconnaître « et de contredire. » ....

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La partie de l'assemblée qui voulait la constitution était satisfaite; et même le parti, dans l'assemblée, qui voulait autre chose ou plus que la constitution, était peut-être plus satisfait du refus du roi, qu'il ne l'eût été de sa sanction; mais tout pouvait encore se réparer à cette époque. Les princes avaient un beau motif de céder au vœu de leur roi. Ceux qui s'étaient attachés à leur sort, suivaient leur . exemple, et la paix ramenée par l'exercice de la prérogative royale, y rattachait l'opinion publique; mais il est à croire que déjà des engagements étaient pris avec l'étranger, les. avances reçues, et peut-être même, les princes n'eussent-ils pas été libres dans leurs dé

1v. Ep. marches, pour rentrer dans leur patrie. La Rus1791. sie surtout paraissait prendre un vif intérêt

aux affaires de France. Catherine, accoutumée à régler les états de ses voisins, se proposait de traiter la constitution française comme elle traita bientôt après celle de Pologne.

Le décret sur les prêtres insermentés, était plus difficile encore à concilier avec les principes de liberté publique. On sentait, chaque jour, la faute commise, en donnant une constitution civile au Clergé et surtout en exigeant un serment particulier pour lui. La liberté des cultes était reconnue, et on avait été obligé d'employer la loi et la force pour protéger ce même culte insermenté, dont on voulait maintenant poursuivre les ministres. On s'obstinait à les poursuivre comme prêtres, au lieu de traiter seulement comme perturbateurs ceux qui seraient convaincus de l'être; enfin, après plusieurs ajournements, on ajournait encore.

Pendant ce délai, une question importante fut agitée; il s'agissait du remplacement des emplois d'officiers dans l'armée. La constitution en avait fixé le mode. Les deux tiers appartenaient à l'ancienneté; un tiers, à la nomination du roi. Borner ce droit, c'était altérer la constitution; mais c'était, en même temps, gêner la prérogative constitutionnelle du pouvoir exécutif. Un comité proposa une loi qui

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