Page images
PDF
EPUB

exposés aux dangers de la maladie, d'offices sanitaires composés d'un mudir ou directeur musulman, d'un médecin européen et d'un certain nombre de gardes de santé, l'établissement de postes et d'avant-postes de surveillance aux principaux points de communication complétèrent cette organisation, dont la dépense annuelle ne s'élève pas à moins de 800,000 francs.

» Le résultat de cette grande innovation a été de repousser le typhus pestilentiel d'abord de la Roumélie et de la Bulgarie, ensuite de l'Anatolie et de la Caramanie, puis des pachaliks, de Sivas et de Trébizonde, d'Erzeroum, de Kars, de Vanet de Diarbekir. Si quelques contrées, telles que le Kurdistan et une partie des pachaliks de Kars et d'Erzeroum, de même que la Syrie, ne présentent pas encore toute garantie pour l'exécution rigoureuse des réglements sanitaires, je dois rappeler que les provenances de la Syrie, de l'Arménie et du Kurdistan, comme celles de l'Egypte, ne sont pas admises à la libre pratique avec le reste de l'Empire, et cette précaution garantit la sécurité de l'Asie mineure et de la Turquie d'Europe.

>> Ce résultat, qui n'a point été conquis sans lutte et sans persévérance, permet, sinon de supprimer, du moins d'abaisser les barrières devant les provenances de cette partie de l'Orient. Sans doute une expérience de neuf années ne suffit pas pour prévaloir tout à coup contre les enseignements de plusieurs siècles, et personne ne pourrait encore affirmer que la peste a cessé d'être endémique en Turquie; mais les faits ont leur autorité et, quand il est démontré que les garanties augmentent journellement et que déjà, par l'effet de ces garanties, la maladie semble s'éteindre, lorsque la rapidité des communications permet de connaître presqu'à tout moment l'état du pays, n'est-il pas juste, n'est-il pas convenable de se relâcher de rigueurs inutiles. >>

Nous avons tenu à vous citer en entier ce passage, parce qu'il est encore plus vrai aujourd'hui, où le télégraphe sillonne les mers et nous tient au courant, d'heure

en heure, de tout ce qui se passe sur les points les plus éloignés du globe.

Le rapport entre ensuite dans des détails sur de semblables mesures de garantie prises en Egypte dès 1831 et complètement organisées en 1841.

On conçoit que des faits d'une aussi haute importance. aient fait entrer notre législation dans une phase nouvelle. Entr'autres innovations, l'ordonnance de 1847 abaissa les quarantaines d'observation pour les navires qui auraient à bord des médecins sanitaires et des gardes de santé commissionnés par le gouvernement, et créa en Orient des postes de médecins français institués pour surveiller le fléau et viser les patentes à délivrer aux navires à destination de France.

3. La république de 1848, pendant son court passage aux affaires, ne se montra pas moins soucieuse des intérêts de la santé publique.

Un arrêté du président du conseil des ministres, chargé du pouvoir exécutif, substitua au conseil supérieur de santé créé par la loi de 1822 un comité consultatif d'hygiène publique dont les attributions furent augmentées. Le comité supérieur de santé était institué près le ministre de l'intérieur.

Le comité d'hygiène publique le fut près le ministre du commerce et de l'agriculture.

Nous aurons à reparler, dans la seconde partie de cette étude, de cette institution ainsi que des conseils d'hygiène publique qui furent institués par un arrêté postérieur, en date des 18 décembre 1848, 5 janvier 1849, dans chaque chef-lieu de département et d'arrondissement.

Un décret des 10-30 août 1849, tenant compte des bons résultats obtenus par la création de postes de médecins français dans le Levant et d'études nouvelles sur la période d'incubation de la peste, abaissa encore de deux jours la durée de la quarantaine pour les bateaux venant de l'Orient.

Quelques dispositions de même nature intervinrent encore en 1850.

4. En 1851, un décret plus général, daté du 15 février, remplaça la plupart des dispositions surannées de l'ordonnance du 7 août 1822. Nous n'avons pas à vous en entretenir. Il a été en entier refondu, ainsi qu'un décret du 7 septembre 1863 et un autre du 23 juin 1866, dans le décret des 22 février-19 mai 1876, auquel nous avons hâte d'arriver, parce qu'il contient les dispositions réglementaires actuellement en vigueur et qu'il abroge tous ses devanciers, du moins en ce qui concerne la police sanitaire maritime, comme nous l'avons déjà dit.

V.

Ce décret contient 129 articles et de nombreux annexes. Les mettre en entier sous vos yeux serait abuser de vos instants, quoiqu'ils ne contiennent rien d'inutile.

Il importe cependant, pour que vous soyez au courant de ce qui se pratique actuellement, que nous vous en fassions connaître l'économie générale et les principales. dispositions. C'est ce que nous allons essayer de faire par une rapide analyse.

Nous devons remarquer, tout d'abord, qu'il est rendu sur l'avis, non plus du ministre de l'intérieur comme l'ordonnance de 1822, mais sur celui du ministre de l'agriculture et du commerce, dans les attributions duquel a passé la police sanitaire depuis 1831.

Il est divisé en 10 titres.

1. Le premier traite des maladies qui font l'objet principal de la police sanitaire maritime.

Il les divise en deux classes, celles qui déterminent des mesures sanitaires permanentes contre les provenances des pays où elles règnent; celles qui ne doivent être l'objet que de précautions exceptionnelles contre une provenance contaminée.

Le choléra, la fièvre jaune et la peste sont les seules maladies de la première classe.

La deuxième classe se compose des autres maladies

graves, transmissibles et importables, telles que le typhus et la variole.

[ocr errors]

2. Le titre II traite de la reconnaissance et de l'arraisonnement des navires.

Tout navire arrivant dans un port doit ètre reconnu par l'autorité sanitaire.

Pour les bateaux qui font la petite pèche sur la côte, les bâtiments de douane, les bateaux pilotes, les navires garde-côtes et, en général, les bateaux qui s'écartent peu du rivage, une simple imspection suffit.

Pour ceux qui viennent de plus loin, cette inspection. consiste dans un interrogatoire, dont la formule est don née, et garde le nom de reconnaissance proprement dite.

Pour ceux qui ne sont point notoirement exempts de suspicion, elle prend le nom d'arraisonnement et peut comporter un certain nombre d'investigations déterminées.

L'arraisonnement peut même amener une inspection

médicale..

Toutes ces formalités s'exécutent par des agents montés sur ces petits canots, portant à l'arrière un pavillon jaune, comme ceux que nous voyons chaque jour courir de l'anse des pilotes au devant des bateaux qui viennent des pays éloignés et accoster avant tous autres.

Il faut être revenu de ces contrées lointaines où la nature cache sous les splendeurs d'une merveilleuse végé· tation de si puissants germes morbides pour comprendre avec quelle émotion on les voit s'approcher du bord.

Pourra-t-on bientôt se jeter dans les bras d'un parent, d'un ami ou de quelqu'un qui vous tient encore plus au cœur, ou sera-t-on prisonnier pendant encore de longues heures, des jours peut-être?

Telle est la question qu'ils portent dans les plis de leur pavillon, dont la couleur, quoique seyant si bien à la par— tie la plus piquante de la plus belle moitié du genre hu― main, n'en est pas moins l'emblème de certaines déceptions.

3.

Le titre III traite de la patente de santé.

La patente de santé, dont le modèle est formulé, est la charte qui doit contenir toutes les indications de nature à faire apprécier l'état sanitaire du pays de provenance et du bateau lui-même. Elle est délivrée, en France, gratuiment par l'autorité sanitaire, à l'étranger, par nos consuls, ou à défaut de consul, par l'autorité locale.

Elle doit être visée à chaque escale, ne pas dater de plus de 48 heures avant le départ.

En temps ordinaire, elle n'est exigée que de navires. venant de pays situés hors de l'Europe, autres que l'Algérie, ou des côtes orientales de la Turquie d'Europe et du littoral de la Mer Noire.

S'il survient une épidémie quelque part en Europe, elle devient obligatoire pour les navires venant des points contaminés.

Cette obligation est immédiatement notifiée par le gouvernement français au gouvernement de ces pays. L'absence de patente, quand elle est obligatoire, constitue un délit dans les termes de l'art 14 de la loi de 1822. Il appartient aux autorités sanitaires du port d'arrivée d'apprécier le caractère de la patente de santé. Elle est nette quand cette autorité a apprécié qu'elle ne constate aucun symptôme de maladie contagieuse dans le pays de provenance, brute quand elle apprécie qu'une maladie de cette nature y est signalée.

Il n'y a plus de patente suspecte. Ce régime n'existe plus même pour les provenances des pays de choléra. Nous l'avons déjà vue abolie pour les pays de peste et de fièvre jaune.

4.

Le titre IV traite des mesures sanitaires au point de départ.

Le titre V des mesures sanitaires pendant la traversée. Le titre VI des mesures sanitaires à l'arrivée.

Au point de départ, lorsqu'une maladie pestilentielle, peste, fièvre jaune ou choléra, vient à éclater dans un port ou dans ses environs, le devoir de l'autorité sani

« PreviousContinue »