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RAPPORT

PRÉSENTÉ PAR M. E. LETELLIER

Membre Résidant

Au nom de MM. Lefranc, Gérard, Letellier,
et du Comité des Lettres

MESSIEURS,

Parmi les artistes havrais qui ont été nos contemporains, il en est un dont nous devons honorer la mémoire, car il fut un artiste consciencieux et modeste, j'ai nommé Edmond Morin.

D'après les renseignements fournis par M. Robert de la Villehervé, renseignements corroborés d'ailleurs et complétés par une lettre de M. Dalloz à M. Woollett, du Havre, Edmond Morin est né dans cette ville en 1824, il est mort à Sceaux le 18 août 1882. Il était peintre, dessinateur, aqua-fortiste et aquarelliste distingué.

Nous avons pu admirer, dans une de nos dernières expositions de la Société des Beaux-Arts, plusieurs dessins et aquarelles d'un très grand mérite.

Pendant plus de trente années, il collabora activement au Corsaire, à l'Illustrated London News, au Musée des Familles, à l'Illustration, au Monde Illustré.

Son œuvre comprend plus de 30,000 dessins dans les publications périodiques, il a de plus illustré les œuvres

de Hugo et celles de nos poètes et romanciers du XIXe siècle; dans cette lourde tàche, il fut le rival heureux d'un autie artiste remarquable, Tony Johannot.

Par son travail et son talent incontesté, Edmond Morim avait su s'acquérir l'amitié des plus grands artistes : Meissonnier, Gérôme, de Neuville, Detaille, Henner, Victor Hugo, qui prirent l'initiative d'une pétition demandant la croix pour notre compatriote. Mais la mort vint l'enlever à l'affection et à l'estime de ses amis et de ses admirateurs, alors qu'il était sur le point de recevoir la juste récompense de ses mérites.

Voici en quels termes M. Dalloz, directeur du Monde Illustré, parle d'Edmond Morin, dans une lettre adressée à M. Hubert.

« Je regrette l'homme et le collaborateur; on ne lui a » pas rendu justice de son vivant; il dépensait trop et » l'on prenait ses louis d'or pour des pièces de cent sous. >> On se disputera un jour ses dessins. Pour nous, nous » avons la consolation d'avoir pu l'apprécier durant sa » vie, et nous lui garderons le meilleur de notre souvenir. »

Il y a quelque temps, les amis de notre concitoyen lui ont fait élever dans le cimetière de Sceaux un mausolée, dont les plans sont dus à M. Doublemard, sculpteur.

La ville natale d'Edmond Morin ne doit pas laisser ignorer le nom de cet artiste, c'est pourquoi nous prop 0sons que la Société Havraise d'Etudes Diverses, par l'entremise de son honorable président, veuille bien insister près du Conseil Municipal pour que le nom d'Edmond Morin soit inscrit sur les tables de marbre de nos Illustrations locales. Ce sera rendre justice, tardivement peut-être, à un véritable artiste trop longtemps méconnu.

Havre, le 24 Mars 1885.

Le Maire de la Ville du Havre, à Monsieur le VicePrésident de la Société Havraise d'Etudes Diverses.

Monsieur le Vice-Président,

J'ai l'honneur de vous faire connaitre que le Conseil Municipal, après avoir reçu communication de la lettre que vous avez bien voulu m'écrire le 6 de ce mois, ainsi que du rapport présenté à la Société Havraise d'Etudes Diverses par M. E. Letellier, a décidé, dans sa dernière séance, que le nom d'Edmond Morin serait inscrit sur les tables des Illustrations Havraises.

Permettez-moi de vous prier de vouloir bien remercier la Société de nous avoir fourni l'occasion d'accomplir cet acte de justice, et veuillez agréer, Monsieur le VicePrésident, l'expression de ma considération la plus distinguée.

MARION, Adjoint.

POÉSIES

I.

AU BORD DE LA MER

Je regardais. La mer poussait lame sur lame.
Le flot battait le roc où mon pied s'appuyait.
Et je sentais monter lentement dans mon âme
Une tristesse vague, un long rêve inquiet.

J'écoutai s'égréner la plainte désolée

Des vagues que couvrait la voix des vents hurleurs.
Car ton sein, triste mer qui geins inconsolée,
Ainsi que l'âme humaine est un gouffre de pleurs

Mais Dieu, sage et puissant, à la fois veille et règne Sur l'âme douloureuse et le flot agité,

Et calmant l'Océan comme l'âme qui saigne

Il recueille leur plainte en son immensité.

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