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Tel est, Messieurs, l'exposé sommaire et bien imparfait des travaux qui ont marqué pour la Société l'année 1885. La plupart de leurs auteurs ont cru devoir demander l'indulgence de leurs collègues : ils n'en avaient pas besoin. Je sens que je ne suis point dans le même cas: ne vous étonnez donc point si je sollicite de votre part une grande indulgence, et si je vous demande pardon de la franchise quelque peu naïve avec laquelle je me suis exprimé et vais m'exprimer encore quelques instants.

Comment n'éprouverais-je pas quelqu'embarras en votre présence? Je vois parmi vous des magistrats, des négociants experts en science économique, des docteurs en médecine, des fonctionnaires d'élite, des professeurs distingués, des hommes de lettres, dont les magnifiques travaux sur l'histoire locale ont consacré la réputation: il est malaisé alors d'apporter quelque chose qui ne soit point indigne de ceux qui me font l'honneur de m'écouter.

Je ne voudrais cependant décourager personne; si la production d'un travail, qui puisse répondre à votre attente, a ses difficultés, je n'aurai garde non plus d'oublier et de ne pas signaler les encouragements et la bienveillance que vous prodiguez à tous ceux qui vous apportent surtout le concours de leurs bonnes volontés. Vous faites très belle la part des jeunes dans la Société : ils sont toujours très bien accueillis par vous, lorsqu'ils viennent soumettre leurs essais à votre expérience et à votre jugement. Au nom de ces jeunes, permettez-moi et de vous remercier et de vous demander de faire plus encore; permettez-moi de solliciter de la part de ceux qui sont parvenus à la maturité de l'âge et du talent, quelques-uns de ces travaux qui feront le charme et les délices de nos séances, où tous, ces jeunes surtout, pourront puiser des inspirations et trouver des modèles. Il suffit, n'est-ce pas, d'exprimer ce souhait pour qu'il se réalise, et cela d'autant plus que son accomplissement est pour la Société, à laquelle nous sommes tous attachés, une condition de vitalité et de succès.

XXXVII

N'avons-nous pas bien des raisons d'aimer la Société havraise d'Études diverses? Dans l'ordre des sciences et des lettres, l'association a la même force qu'en matière industrielle et commerciale. Point n'est besoin de le démontrer vos œuvres en sont la plus éclatante des preuves. C'est ce qu'ont compris ceux qui ont fondé la Société, ceux qui l'ont encouragée de leur crédit et de leurs efforts. Honneur à eux, honneur aux Lecadre, Frissard, Oursel, Balthazard et à tant d'autres, qui vivent dans notre souvenir! Honneur aussi à celui qui présidait nos séances, en 1885, avec une distinction que nous avons eu la bonne fortune de voir se continuer; honneur à M. Siegfried, dont le dévoûment bien connu pour la chose publique s'est affirmé si utilement lorsqu'il a donné à la Société havraise d'Etudes diverses cette impulsion plus vive et plus active dont nous ressentons déjà les heureux effets et que nous ne laisserons pas se ralentir. Aussi, est-ce avec justice qu'au moment où les électeurs, en l'envoyant siéger au Parlement, l'ont éloigné de nos séances, vous lui avez donné le titre de Président d'honneur, voulant ainsi lui témoigner votre gratitude pour le passé et vous l'attacher pour l'avenir.

Le Havre, Messieurs, doit avoir son Académie florissante et prospère.

Située aux confins de la vieille Europe, en rapports constants avec ces jeunes et vigoureuses nationalités qui sont assises sur la rive opposée de l'Océan; placée, comme l'était jadis Alexandrie, au centre du mouvement maritime et commercial, la cité havraise est sans doute appelée à devenir, comme le fut pendant deux siècles la ville Egyptienne, la Reine des Mers. A vous de faire que cette reine soit ornée par l'étude des sciences et des lettres, qu'elle soit policée et savante, que son action bienfaisante rayonne autour d'elle, qu'elle soit à la tête de la civilisation et de tous les progrès. C'est, en effet, la tâche qu'il vous appartient quelque peu de remplir! L'œuvre

est vraiment belle et digne de vous ! Vous l'accomplirez; pour garants, on peut donner votre passé, vos œuvres de l'année qui vient de s'écouler, votre amour désintéressé des sciences et des lettres, les recrues d'élite faites en ces derniers temps, l'ardeur qui vous anime tous, votre dévoûment aux intérêts et à l'avenir de notre grande et belle cité.

LA LÉGISLATION

SUR LA

POLICE SANITAIRE

Aux frontières de terre et de mer et à l'intérieur,

ET LES

RÉFORMES URGENTES A Y INTRODUIRE

ÉTUDE CRITIQUE

Sur la Loi du 3 mars 1822, le Décret du 22 février 1876 et l'art. 97 de la Loi du 5 avril 1884.

PAR M. HENRI MEYER

Membre Résidant

Il ne paraît point contesté que la vie humaine ne se meuve de nos jours dans des conditions plus hygiéniques que par le passé. Si, à raison de ce fait, les épidémies ne font point à notre époque d'aussi abondantes moissons d'hommes qu'autrefois, elles n'en restent pas moins un des plus grands fléaux qui viennent nous apporter l'épouvante et la désolation.

Elles partagent avec les grandes guerres le funeste privilège de suspendre la vie commerciale des peuples en frappant d'interdit, sur toutes les frontières de terre et de mer, les provenances des pays sur lesquels elles sévissent.

Aussi les législateurs de tous les pays civilisés se sontils préoccupés de donner aux pouvoirs publics les moyens jugés nécessaires pour arrêter aux limites du territoire

l'invasion de ces calamités et pour en combattre les ravages, si elles parviennent à pénétrer dans l'intérieur ou si elles y naissent spontanément.

Notre législation est-elle à cet égard à la hauteur de la tàche qui lui incombe? Ne devrait-elle pas, au contraire, être l'objet d'une révision qui la mettrait plus en harmonie avec les données actuelles de la science et en rendrait les prescriptions plus efficaces? Dans ce cas, quelles réformes devraient y être apportées ?

Telles sont les questions dont nous venons vous soumettre l'étude.

Elles ne sont pas neuves, mais la récente épidémie que nous venons de traverser et qui, bien que relativement bénigne, n'en a pas moins eu, grâce surtout aux exagérations intéressées d'une partie de la presse étrangère, d'aussi désastreuses conséquences pour le commerce français, leur donne une actualité nouvelle.

Il me paraît inutile d'en faire ressortir l'importance. dans une ville aussi cosmopolite par les intérêts commerciaux qui s'y agitent qu'elle est française par le cœur, et dont les relations avec le monde entier sont de tous les instants par les nombreux navires qui, chaque jour, entrent dans son port, venant des points du globe les plus divers, ou en sortent pour porter de toutes parts les produits de notre sol et de notre industrie.

Pour en aborder logiquement l'examen, il nous paraît indispensable de vous exposer tout d'abord quelles ont été les phases de cette législation et quel en est l'état actuel. Ce sera l'objet de la première partie de ce rapport. Nous diviserons cette premiére partie elle-même en deux sections, suivant ce qui existe dans la législation.

Dans la première section, nous étudierons les documents législatifs qui ont pour but de nous préserver de l'importation des épidémies par les voies de mer et de terre; dans la deuxième, les dispositions qui ont pour but de combattre les épidémies importées ou nées spontanément sur notre sol.

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