toute saison, sur les terres incultes, hermes et vacans, et sur tous les fonds non clos, après la levée de la récolte, par des communautés d'habitans, dans l'étendue de leur territoire, et par réciprocité d'un territoire à l'autre, sous le nom de Parcours, n'est qu'un droit conditionnel et facultatif, qui ne fait acquérir ni possession, ni prescription, soit contre les membres de la communauté qui négligent d'en user, soit contre le propriétaire du fonds. Le rietaire propriétaire ne peut jamais être empêché de clore son terrain, et de le soustraire, par ce moyen, à la vaine pâture. Cette règle, généralement admise sous l'empire des Coutumes, subissait quelquefois des modifications dans la pratique. La loi des 2 septembre et 6 octobre 1791, l'a rétablie dans sa plus grande force. L'art. 4, section 4, proclame le droit de clore et de déclore ses héritages, comme le résultat essentiel du droit de propriété, et abroge toutes lois et coutumes qui pouvaient le contrarier. L'art 5 déclare que le droit de parcours et le droit simple de vaine pâture ne pourront, en aucun cas, empêcher les propriétaires de clore leurs héritages, et que tout le temps qu'un héritage sera clos de la manière déterminée par l'article suivant, il ne pourra être assujetti ni à l'un ni l'autre de ces droits. La vaine pâture entre particuliers n'était pas bien clairement distinguée autrefois du vain pâturage des communautés d'habitans; elle pouvait, d'ailleurs, lorsqu'elle était réciproque, sur des fonds spécialement marqués, avoir quelques apparences de servitude fixe et permanente, et rendre douteux son caractère et ses effets. L'art. 7 de la loi précitée lui rend communes les dispositions précédentes, en ces termes : « La clôture affranchira de même du droit de vaine pâture réciproque ou non réciproque entre particuliers, si ce droit n'est pas fondé sur un titre. Toutes lois et tous usages contraires sont abolis. » Le code civil n'a rien changé à ces principes ; il a seulement rappelé, art. 648, une règle bien connue, qui fait perdre au propriétaire, quand il veut se clore, son droit au parcours et à la vaine pâture, en proportion du terrain qu'il y soustrait. Il est toujours vrai que la clôture ne peut se faire au préjudice du droit de pâture, fondé sur un titre. On traitera, au chapitre de la pres cription en matière de servitude, des modifications et des exceptions que subit le droit de propriété par l'effet des servitudes. 59. Les choses qui sont communes, et celles qui sont à l'usage du public, ne sont pas susceptibles, dans cet état, d'une possession privée; et, conséquemment, elles ne peuvent subir la prescription. Personne n'a le droit d'en jouir à l'exclusion des autres : chacun a la faculté d'en user selon sa position et ses besoins, en se conformant aux réglemens d'ordre et de police. Pour les uns, l'exercice de cette faculté est plus étendu ou plus répété; pour ceux-là, il est plus resserré ou plus rare; pour d'autres, il n'est rien. Mais celui qui use davantage, n'a pas plus de droit que celui qui use moins, ni que celui qui n'use pas du tout. La possession est collective : les actes des individus la constituent et la conservent pour l'état, les communes ou les communautés; mais ils ne font rien acquérir de personnel à aucun; ils ne fondent pour les personnes, d'après les termes mêmes de l'art. 2232, ni possession, ni prescription. Dans une contestation relative à l'exercice du droit d'irrigation concédé à perpétuité aux habitans d'une commune; la Cour de Montpellier a fait l'application de ces principes, et son arrêt a reçu l'approbation très expresse de la Cour régulatrice, le 16 mai 1826, D., tome 26, page 302. 60. Cet article frappe de la même incapacité les actes de simple tolérance, « disposition morale qui appelle les procédés obligeans. Combien de bons offices de voisinage seraient refusés, si une simple tolérance pouvait, par le laps de temps, devenir un titre de servitude ! >>> Ainsi s'exprimait M. Goupil de Préfeln, en présentant cette disposition au corps législatif. Il s'établit souvent, entre voisins, une familiarité ou une complaisance, qui fait qu'on s'accorde ou qu'on souffre sur ses fonds des facilités et des usages qui, sans en avoir le caractère, peuvent ressembler à des actes de possession. Ils ne font pas acquérir de droits, parce que, comme l'a fort bien dit M. Bigot de Préameneu, celui qui les fait n'entend agir comme praPetit-Etang, qui formait un marais, et qu'il disait avoir été anciennement étang, pàtural et buge. Il obtint une sentence qui le maintint en possession; mais elle fut attaquée et annulée comme rendue par un juge incompétent; et la jouissance des habitans ne fut pas interrompue. priétaire, ni celui qui les autorise n'entend dans la possession d'un terrain appelé le se dessaisir. La permission ou la tolérance, qui est leur unique fondement, les rend très précaires, très incertains, et tout-à-fait sans conséquence contre le propriétaire. Ils ont lieu sous son bon plaisir, et il demeure toujours le maître de les faire cesser quand il le trouve à propos. L. 41, ff. de acq. poss.; L. 153 eod., de reg. jur. Il n'est plus à craindre que de tels actes soient présentés sous un faux jour, pour faire acquérir des servitudes non apparentes ou discontinues, parce que le code civil n'admet que les titres pour leur acquisition; mais il n'est pas impossible qu'il se rencontre des circonstances propres à favoriser l'abus, au point que l'on veuille en argumenter, pour faire croire à l'acquisition de la propriété même. On peut être fort long-temps sans faire d'actes de possession bien marqués dans un bois de haute futaie. Si l'on en est trop éloigné pour y envoyer paître ses bestiaux, en attendant la maturité du bois pour la coupe, on n'a que quelques actes isolés d'enlèvement de bois mort à faire, Si l'on néglige ces actes, ou s'ils sont trop fugitifs pour être bien remarqués, tandis qu'on souffre qu'un ami plus près du bois, y exerce fréquemment le pacage, et qu'il y ébranche quelquefois des arbres; cet ami, après trente ans, ne pourra-t-il pas, manquant à la confiance, et trahissant l'amitié, transformer la familiarité ou la tolérance en possession, et prétendre à la propriété? Il croira peut-être avoir toutes les apparences pour lui; il s'engagera dans une preuve, mais elle sera inutile si le propriétaire a un titre fortifié des moindres actes de possession, de quelques faits de garde, de quelques visites de maître dans le bois, pour juger de ses progrès, ou du paiement de l'impôt, ou seulement, à défaut de titres, s'il a l'opinion des gens du pays sur sa propriété et sur sa tolérance, appuyée des actes que l'on vient d'indiquer, ou d'autres équivalens. 61. La Cour d'appel de Kiom a rendu, dans ces principes, le 24 février 1805, un arrêt notable. En 1790, le sieur de l'Estrade, propriétaire de la terre de Lamarade, se plaignit d'avoir été troublé par les habitans de Connac, ses voisins, En 1799, Boissières, acquéreur de Lamarade, dirige contre eux une action pétitoire devant le tribunal du Puy. Il produit des titres pour établir que le terrain litigieux était autrefois un étang, et qu'il avait toujours fait partie du domaine de Lamarade. La validité et l'application de ces titres sont également contestés par les habitans de Connac, et ils opposent en outre une jouissance paisible plus que trentenaire, au vu et su, et à l'exclusion du sieur de l'Estrade. Des experts sont chargés de voir les lieux, d'en lever le plan, et de faire l'application des titres produits. Leur rapport satisfait Boissières, qui en demande l'homologation. Les habitans le critiquent, et offrent la preuve de la jouissance qu'ils ont alléguée. Cette preuve est ordonnée et des enquêtes respectivement faites amènent, le 21 juin 1803, un jugement qui, sans s'arrêter au rapport des experts, garde et maintient les habitans de Connac dans la propriété, possession et jouissance du terrain en question. Entre autres motifs, ce jugement considère que les enquêtes faites par les habitans de Connac, et par Boissières, s'accordent à établir que ces habitaus ont toujours fait pacager leurs bestiaux dans le terrain contentieux, en ont coupé et emporté les herbages et les jones, au vu et su du sieur de l'Estrade ou de ses auteurs, de leurs fermiers, et à l'exclusion de ces derniers; que cette possession remonte à plus de trente et de quarante ans avant l'instance de 1790; qu'elle exclut tout soupçon de familiarité et de tolérance; qu'elle est à titre de propriété, et, en quelque sorte, contradictoire avec les auteurs de l'Estrade, puisque, suivant certains témoins, ils auraient voulu primitivement s'y opposer, et auraient, par fois, intimidé ceux que gardaient le bétail sur le terrain contentieux; mais que les habitans ont persévéré à y conduire leurs bestiaux, et à couper et emporter les herbages et les joncs. Sur l'appel, ce jugement a été infirmé, sans égard aux enquêtes; le rapport d'experts a été homologué, et Boissières maintenu dans le droit et la possession du terrain contesté, par ces motifs : « Attendu qu'il est établi, par le rapport des experts, par le plan visuel, et par les titres dont ces experts ont fait l'application, que le terrain contesté formait, dans l'origine, un étang qui dépendait des propriétés du seigneur de Lamarade, vendeur de Boissières ;...... « Attendu que ce terrain a été déclaré par les experts, être identiquement le même que celui qui est réclamé par Boissières, et qu'il s'étend jusqu'au tertre qui le sépare du ténement des habitans de Connac; « Attendu que le fait de vaine pâture et d'enlèvement d'herbages ou de joncs sur un terrain laissé inculte, n'est point attributif de la propriété, qui reste toujours sur la tête de celui qui laisse son héritage en jachères. » Cette décision est dans le Recueil des arrêts de la Cour de Riom de l'an 13. Après en avoir rendu compte, l'arrêtiste ajoute, en note, que la même Cour en avait porté une semblable, le 23 mai 1801, entre les habitans de Clémentelles, et les sieurs Charbonnier et Soalhat. 62. Les actes de violence ne peuvent fonder une possession capable d'opérer la prescription. Dans le droit romain, la possession qui commençait par la violence, ne pouvait jamais être utile; il fallait, comme on l'a remarqué plus haut, no 49, que les choses volées ou prises par force, retournassent au pouvoir de celui qui en avait été dépouillé, ou de ses héritiers, pour qu'on pût ensuite les prescrire. L'article 2233 du code civil condamne aussi la violence, mais il ne fait pas produire à un seul acte, à celui qui a commencé la possession, l'effet de la rendre perpétuellement vicieuse. Dans son esprit, et d'après sa lettre, il faut des actes géminés de violence, pour entretenir le vice de son origine. Dès le moment que la possession cesse d'être violente, elle devient utile. En s'écartant de la rigueur des lois romaines, le code français n'a fait que confirmer la doctrine de Balbus et de d'Argentré, adoptée par Dunod, page 29. 63. L'effet de la violence est le même, soit qu'elle s'exerce sur le propriétaire ou sur les personnes qui possèdent pour lui, L. 1re, § 22, et L. 8, ff. de vi et vi armat., soit qu'on l'exerce soi-même, ou qu'on la fasse exercer par d'autres ; car nous sommes réputés avoir fait nous-mêmes ce qui a été fait par notre ordre et en notre nom. L. 152, ff. de reg. jur.; L. 1or, $12, de vi et vi arm. Quoique l'on n'ait pas donné d'ordre, si l'on approuve ce qui a été fait, et si l'on en profite, on est censé avoir agi soi-même. L. 1re, § 14, eod. 64. Si, au lieu d'employer la violence, afin d'usurper la possession, l'on en use pour arracher au maître un acte d'abandon de la chose, la possession qui en résulte n'est pas réputée violente: elle est fondée en titre, tant que l'acte subsiste ; mais cet acte est rescindable; et, s'il est attaqué avec succès, la possession est sans effet; elle doit cesser, ou, si elle continue, elle reçoit un nouveau caractère des circonstances qui l'accompagnent. L. 5, ff. de vi et vi arm.; L. 1re, et L. 9 in fine; ff. quod metús causá. 65. Le droit romain ne considérant la violence que lorsqu'elle a commencé avec la possession, Labeon décidait que celui qui ne l'employait que pour se maintenir, ne possédait pas par violence. L. 1re, § 28, ff. de vi et vi arm. Cette décision est très admissible, quand il y a un titre qui sert de fondement à la possession: la violence alors n'a pour objet que de le faire respecter. Que si elle est un moyen répréhensible, lorsqu'elle va aux excès, elle ne saurait être un moyen de destruction du titre qu'elle a voulu défendre. De même qu'il pouvait se soutenir sans elle, il ne peut pas périr par elle. 66. La jouissance de droits certains, tels que des usages dans les forêts, soumise à des conditions d'ordre, sera-t-elle insignifiante pour la conservation de ces droits, si ces conditions n'ont pas été remplies? La question a été décidée affirmativement par la Cour de Riom, en 1827, et par la Cour de cassation, le 27 janvier 1829. J. du 19o s. 1829; p. 1re, 65. Ces arrêts ont prononcé dans une affaire où l'on voyait que l'usager avait long-temps exercé ses droits sans que le propriétaire 1 l'eût obligé à la demande en délivrance, elle est certaine , a toujours la vertu de lorsqu'une dernière coupe de 1820, constatée par un procès-verbal, le fit condamner correctionnellement à 31 francs de dommages-intérêts. Il forma bientôt une demande en cantonnement que l'on écarta en déclarant son droit d'usage éteint par la prescription. La Cour d'appel a dit : << que l'usager ne peut posséder légalement son droit que lorsqu'il l'exerce en vertu de la délivrance préalable; que toutes les coupes que pourraient avoir faites la demanderesse et ses auteurs, sans permission, ni délivrance, ne peuvent constituer une possession légale et capable de conserver le droit d'usage; que ces coupes ne pourraient être considérées que comme une série de délits punissables de peines correctionnelles. >>> La Cour de cassation a approuvé l'argument et l'arrêt: nous ne les croyons pourtant pas exempts de critique. On nous semble avoir ajouté un caractère à ceux que le code civil exige de la possession pour qu'elle puisse servir, non seulement à la conservation, mais même à l'acquisition des choses. Nulle part la loi n'a demandé une possession légale, dans le sens de ces arrêts. La simple possession de fait, la plus illicite, la plus contraire au droit le mieux établi, la plus illégale, conséquemment dans le fond des choses, si elle est faite comme maître, peut être utile à la prescription qui fait acquérir la propriété. Elle n'a besoin, pour cet effet, que d'avoir les caractères voulus par l'art. 2229, et d'être exempte de vices marqués par les art. 2231, 2232. Considérée sous ce rapport, dans cette fin de prescription, la possession injuste, illégale au fond, est légale dans sa forme, parce qu'elle est constituée selon la vœu de la loi pour produire la prescription, qui est un résultat légal. Rappelons-nous que pour conserver, la possession n'a pas besoin de conditions aussi fortes que pour faire acquérir, et que la violence, qui rend celle-ci vicieuse, ne nuit point à l'autre. V. Sup., nos 30, 32, 65. Que si les droits qui s'exercent sur la propriété d'autrui, comme l'usufruit, les droits d'usage, les servitudes discontinues, se perdent par un défaut d'exercice, cene peut être que par un défaut absolu pendant trente années. La jouissance, de quelque manière qu'elle se soit produite, si , conserver le droit, parce que la prescription est fondée sur l'abandon présumé du droit, et que cette présomption ne saurait exister quand le droit est en exercice. Il est vrai que dans les droits d'usage, la manière d'agir est soumise à des règles d'ordre ou d'aménagement; mais il n'est écrit dans le code, ni dans aucune loi que l'exercice du droit d'usage, qui n'est pas selon ces règles, sera réputé non avenu ou inutile contre la prescription. L'usufruitier est soumis à des conditions aussi, à des règles de bonne administration d'ordre, et de conservation; et l'on n'a point encore imaginé de prétendre que l'usufruitier qui ne jouissait par selon ces règles, était censé ne pas jouir, et exposé à perdre son usufruit par la prescription. L'abus ou l'extension du droit ne peut, par voie d'induction, être considéré comme l'absence de son exercice. L'abus de l'usufruitier, d'après l'art. 618 , peut faire prononcer la déchéance de l'usufruit. L'abus de droit d'usage est passible de peines correctionnelles. On concevrait qu'en assimilant l'usage à l'usufruit, il fût possible, à la rigueur, d'appliquer la déchéance à l'abus du droit d'usage. Mais comment admettre que l'exercice d'un droit d'usage, d'après un consentement tacite, ou suivant une simple tolérance, contre la défense même du propriétaire, puisse, dans les principes de la prescription, être regardé comme l'absence absolue de l'exercice du droit qui fait présumer son abandon. La loi, sans doute, aurait pu établir ici la prescription comme peine, mais elle ne devait pas le faire convenablement; elle ne l'a pas fait; et l'on ne peut point ajouter aux dispositions de la loi. Par un arrêt du 7 février 1828, que la Cour de cassation a maintenu le 25 août 1830, la Cour de Riom n'a plus été aussi exigeante; elle a reconnu que des droits de chauffage concédés à une commune, s'étaient conservés sans le secours d'aucun procès-verbal de délivrance, par d'autres actes tels que délibérations de la commune pour la garde du bois, nominations de garde, procès-verbaux de délits dressés à la requête de la commune. Cette décision est dans les vrais principes de la matière. J. du 19e s. 1831, 1, p. 61. 67. Quand la possession n'a pas un titre pour base, la violence paraît être un bien mauvais moyen pour la soutenir. La possession doit être paisible, suivant l'art. 2229; et d'après la première partie de l'art. 2253, les actes de violence la rendent inutile. Il y a corrélation entre ces deux dispositions. La possession paisible n'est pas violente; et la possession violente n'est pas paisible. Quand la violence agit, elle vicie la possession, soit qu'elle lui donne naissance, soit qu'elle intervienne pour la soutenir. Le Code ne s'attache pas à son origine, il la juge par ses actes. Ce ne sont pas quelques faits isolés de violence qui peuvent vicier une longue possession. On l'a dit; ce sont des actes géminés. On les apprécie par leur nombre, leur liaison et leur gravité, par la qualité, la position, l'unité ou la diversité des personnes qui les provoquent, l'accord ou l'opposition de leurs intérêts. On ne dira pas qu'une possession est fondée sur la violence, parce que, dans le cours de trente années, le possesseura, de loin en loin, repoussé par la force le trouble apporté à sa jouissance, quoique, à chaque fois, il ait eu à combattre le même opposant. On ne le dirait pas, quand l'attaque et la défense auraient été souvent répétées, si l'attaque est venue de différentes personnes divisées de causes et d'intérêts. Mais la possession paraîtra sûrement viciée par la violence, quand les mêmes individus ou leurs représentans, pouvant prouver par titres une ancienne propriété, cherchent à reprendre, par des voies de fait multipliées, la possession qu'ils ont perdue par négligence, et que toujours ils sont repoussés par une force supérieure. Pour la violence, comme pour la publicité, l'on ne peut pas donner, à l'avance, des règles fixes d'appréciation. L'on se consumerait en vains efforts pour prévoir l'infinité et la complication des situations possibles. Ce n'est qu'après les événemens, et dans chaque affaire, que la justice pèse dans sa balance les faits qu'elle est parvenue à connaître. Une seule vue peut être proposée en règle générale, c'est que l'on doit calculer, autant que possible, l'influence des actes de violence sur l'ensemble ou sur des parties considérables de la possession. Ils peuvent la dominer entièrement, sans être continus, s'ils ont été assez répétés. Au commencement, ils rendent cette partie vicieuse, sans difficulté; au milieu, et encore moins à la fin, ils n'ont pas la même conséquence; mais ils acquièrent de la gravité, s'il y a une cause du silence que ceux qui les provoquent ont gardé auparavant. Au milieu, quand ils n'ont ni précédens, ni suites, ces actes peuvent être fort insignifians. 68. La mauvaise foi dans la possession est le vice qui a été le plus signalé; mais comme il ne l'affecte pas dans toutes ses applications, qu'il n'est relatif qu'à la prescription de l'article 2265, qui fait acquérir la propriété, par dix ans entre présens, et vingt ans entre absens, l'on ne s'en occupera qu'à l'examen de cette espèce de prescription. 69. La possession se transmet légitimement d'une personne à une autre par succession, donation, legs, vente et échange. Par ces voies, l'on reçoit avec les choses la possession de ceux qui les détenaient, et, en la continuant, on peut achever la prescription. C'est la décision des lois du Digeste 11 et 14 $1 et 15, 1, de divers. temp. præsc. 25, § 20, pro empt. 76, § 1er, de cont. empt. -13, § 1, et 11, de acq. vel amitt. poss. - et 11, C. de præsc. long. temp. L'art. 2235 du code civil l'a confirmée en ces termes: « Pour compléter la prescription, on peut joindre à sa possession celle de son auteur, de quelque manière qu'on lui ait succédé, soit à titre universel ou particulier, soit à titre lucratif ou onéreux. » L'héritier, et tout successeur à titre universel, succède nécessairement à la possession de son auteur. L'acquéreur, le donataire et le légataire, à titre particulier, peuvent invoquer ou négliger la possession de celui qui leur a transmis la chose. En se rendant propre sa possession, ils la prennent, comme l'héritier, avec ses défauts, ainsi qu'avec ses qualités: elle n'a pour le successeur, ni plus ni moins de valeur qu'elle n'en avait pour l'auteur. L. 20, ff. de acq. rerum dom.; L. 13, §1, de acq. vel amitt. poss. Les lois 15, § 2, ff. de acquir. et amitt. poss.; 19, ff. de usucap.; 6, §1er, ff. de divers. temp.præscrip., ont justement décidé que le vendeur qui, par l'effet d'une clause résolutoire, d'un pacte de rachat, d'une action redhibitoire, reprend la chose |