tenir que l'art. 2257 ne peut avoir d'application qu'entre le créancier et le débiteur direct; qu'il est absolument étranger au tiers détenteur, dont la condition est réglée par l'art. 2180, conféré avec l'article 2263; d'où ils tirent le droit de purger, par la prescription, toutes les charges réelles qui grèvent l'immeuble. cle 2257 attache certainement la suspension dela prescription à la suspension du droit. On objecte que l'art. 2257 ne dispose qu'à l'égard du débiteur direct. Cette restriction est-elle dans l'article? Obligé de reconnaître qu'elle ne s'y trouve pas, on dit: L'art. 1180, qui autorise les actes conservatoires, la présuppose!.... L'argument irait trop loin: au lieu de montrer une restriction de la règle de suspension, il attaque la règle même. Dans l'art. 1180, la faculté des actes conservatoires n'est pas bornée aux tiers détenteurs; la loi l'accorde indéfiniment, par une disposition générale; et cette faculté peut quelquefois mieux servir contre le débiteur direct que contre le tiers obligé hypothécairement. Ce n'est pas dans la vue de la prescription que l'art. 1180 autorise des actes conservatoires, c'est pour qu'on puisse empêcher la dissipation ou la destruction de la chose sur laquelle on a des droits conditionnels. Ces actes peuvent assurément avoir, au besoin, l'effet interruptif, lorsqu'ils constituent l'interpellation judiciaire; mais le besoin ne peut exister quand la prescription est légalement suspendue. Il est d'autres actes conservatoires commandés par les articles 2132, 2148: ceux-là sont nécessaires pour faire connaître l'hypothèque, et déterminer son rang. En général, ils n'interrompent pas la prescription de la créance, mais ils doivent suffire pour annoncer et assurer la suspension qui résulte de la nature de la créance. Mais ces auteurs nous laissent au moins des doutes; et, dans l'intérêt de la jurisprudence, nous devonslesexposer. Nepeuton pas objecter que si les art. 2180 et 2265, ne font pas de distinction, l'art. 2257 n'en fait pas davantage? ne doit-on pas dire que dans ces articles 2180 et 2265, la loi ne s'occupe que de l'une des diverses prescriptions particulières, qui sont renfermées dans la prescription en général, comme l'espèce dans son genre; qu'ils n'établissent que l'espèce de prescription relative aux tiers détenteurs, et que l'article 2257 statue sur la prescription en général, relativement à toutes personnes? N'est-il pas vrai que si les art. 2180, 2265, ne portent pas d'exception, dans l'espèce de prescription qu'ils établissent, ils ne la dispensent pas de celles qui sont placées ailleurs, soit comme règle particulière à quelqu'une de ses applications, soit comme règle commune à toutes les prescriptions? Les commentateurs conviennent que la disposition de ces deux articles fléchit en faveur des femmes mariées, des mineurs, des interdits, suivant les art. 2252, 2255, 2256. Pourquoi ne fléchirait-elle point aussi devant l'article 2257, en faveur des créanciers dont les droits sont en susQu'importe que la convention qui étapens? On répond que les interdits, les blit la créance en suspens n'ait pas été mineurs, les femmes, ne peuvent point faite avec l'acquéreur du fonds hypothéagir.... Oui, ils n'ont pas le libre exercice qué à sa garantie? Elle a été faite avec son de leurs droits; et cette cause a déterminé vendeur, qu'il représente à titre singupoureux la suspension de la prescription. lier. Ce tiers acquéreur était bien étranger Mais doit-on en conclure que la prescrip- à la stipulation de l'hypothèque; et cette tion n'est suspendue pour aucune autre hypothèque n'est pas moins passée à sa personne, dans aucune autre circon- charge avec la propriété du fonds. Elle a stance? L'art. 2257 existe, et il fait encore passé à sa charge telle qu'elle a été constiune exception suffisamment motivée sur tuée, dans son état conditionnel, exempte la suspension du droit des créanciers. Que de prescription, tant que d'effet de la signifie de dire que ces créanciers peuvent créance sera suspendu. La loi ne lui faire des actes conservatoires ? La loileur accorde qu'une prescription, ajournée en laisse la faculté, et ne leur en impose comme la créance que l'hypothèque met pas l'obligation. De cette faculté qui leur à sa charge. Si l'hypothèque doit garantir est laissée, le législateur n'a pas conclu une éviction, l'art. 2237 déclare, en terqu'ils dussent être soumis à la prescription mes exprès, que la prescription ne court avant que leur droit fût accompli, avant pas jusqu'à ce que l'éviction ait lieu. L'artiqu'ils pussent l'exercer réellement. L'article 2180 ne porte pas d'exception à l'ar ticle 2257; c'est au contraire ce dernier article qui fait exception au premier. Si l'un accorde la prescription de l'hypothèque au tiers détenteur, d'une manière générale, l'autre la modifie et prononce la suspension de ce droit, sans acception de personne, dans tous les cas indistinctement où la créance hypothéquée n'est que conditionnelle ou à terme, jusqu'à l'événement de la condition ou du terme. Dans le système opposé à celui que nous présentons, M. Duranton offre un exemple qui ne va point à notre thèse, et qui appelle une autre règle. Il dit : « Primus m'a légué sa maison sous telle condition; lors de sa mort, cette maison était possédée par Secundus, qui l'avait acquise de bonne foi et par juste titre de Tertius. Je néglige d'interrompre la prescription contre Secundus, et finalement le temps nécessaire à la prescription s'écoule. Je veux me prévaloir de l'impuissance dans laquelle j'étais d'agir avant l'accomplissement de la condition dont dépendaient mes droits........» Dans cette hypothèse, sans contredit, Secundus est défendu par la prescription; il n'a point acquis de Primus, et les droits conditionnels que celuici a voulu conférer à son légataire, ne sont rien contre des tiers qui ne tiennent pas la chose de lui, et qui ne le représentent en aucune manière. C'est lui qui a disposé de leur chose; et par sa disposition conditionnelle, il n'a pu donner plus de droits contre eux, que s'il eût disposé sans condition. Son légataire le représente; et s'il avait des prétentions à la propriété, on les repousse par la prescription contre le légataire, comme on le ferait contre lui-même s'il vivait. Quand nous parlons de tiers détenteur, pour l'application de l'art. 2257 du code, nous n'entendons que la personne qui tient la chose à titre onéreux, de celle qui en avait fait auparavant l'objet d'un engagement suspendu par une condition ou par un terme. Nous envisageons le tiers détenteur dont parle l'art. 2180, et nous disons que pour lui l'article 2257 modifie la prescription, de même que pour le débiteur direct. L'idée d'une distinction entre le débiteur direct et le tiers acquéreur, pour l'application de l'art. 2257, n'a pu venir que d'une trop forte préoccupation de P'ancien usage de la demande en déclara tion d'hypothèque. Bien qu'elle ne soit plus dans notre régime hypothécaire, on la voudrait pour avertir le tiers détenteur, et comme acte conservatoire. Mais, nous l'avons remarqué, l'inscription suffit dans cette vue; elle annonce nécessairement qu'elle n'a pour cause que des droits incertains ou en suspens; et c'est assez pour apprendre au détenteur qu'on ne peut agir plus efficacement; que le défaut d'action judiciaire ne peut pas être imputé à négligence, et amener la prescription. A quoi bon une demande qui ne peut rien procurer à celui quila forme, qui ne peut pas changer la situation respective des parties, et qui n'est qu'un simple avertissement de précaution? Elle ferait double emploi, et causerait des frais frustratoires. La loi, raisonnable et sage, devait en dispenser en suspendant la prescription. Regarderons-nous comme suspensif de la prescription envers les tiers détenteurs, le délai d'un an, après la dissolution du mariage, accordé au mari et à ses héritiers, par l'art. 1565, pour la restitution de la dot pécuniaire de la femme? Par un arrêt du 10 mars 1827, qui décide sur d'autres points, selon la doctrine que nous venons d'examiner, la Cour de Grenoble a jugé encore, « que la surséance d'une année, introduite par l'art. 1565, est uniquement relative à l'action de la femme contre les héritiers du mari, et nullement à l'action de la femme contre les tiers possesseurs des biens du mari, laquelle, il est vrai, ne peut prescrire pendant le mariage, mais à l'égard de laquelle la prescription commence à courir du jour de la dissolution du mariage. >>> J. du 19o s. 1828, 2, p. 42. Nous ne voyons pas de raison pour ne point appliquer ici la règle de l'art. 2257, comme on l'applique dans toutes autres positions de créances à terme, Si l'action est suspendue contre le débiteur direct, elle ne peut être ouverte contre le tiers qui n'est obligé que par l'effet de l'hypothèque. S'il pouvait être recherché avant l'expiration du terme, le recours qu'on ne pourrait lui refuser, serait reporter l'action sur le débiteur direct, et le but de la loi serait manqué. La loi veut que ce débiteur puisse, pendant une année, exempt de poursuites et de frais judiciaires, prépréparer libro librement sa libération. Une action contre ses acquéreurs lui ferait plus de mal que l'action formée contre luimême directement. 517. Passons à une autre question importante que nous avons annoncée plus haut, no 389: elle consiste à savoir si les sous-acquéreurs peuvent prescrire, par dix ou vingt ans, contre le droit à la résolution pour défaut de paiement du prix de la vente première, ou seulement par le laps de trente années, comme l'acquéreur immédiat. Le code civil établit et règle très positivement le privilége du vendeur, pour le prix de la vente, contre l'acquéreur direct et contre les tiers acquéreurs en sous-ordre. Le droit de résolution n'est pas ordonné de même. L'art. 1654 dit seulement : Si l'acheteur ne paie pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente. Le silence de cet article, relativement aux tiers détenteurs, a pu faire penser que la résolution ne s'étendait pas contre eux, et qu'à leur égard tout se réduisait au privilége déterminé par les art. 2105, 2108, 2113. Une règle certaine, dans ces termes, serait bien préférable à celle qui résulte de l'explication consacrée par la Cour de cassation, du principe posé dans l'art. 2182. Ces mots de la loi : « Le vendeur ne transmet à l'acquéreur que la propriété des droits qu'il avait luimême sur la chose vendue, » ont fait décider que les tiers acquéreurs sont soumis à la résolution aussi bien que l'acquéreur direct, indépendamment du privilége pour le prix accordé au vendeur, et alors même qu'il a laissé perdre ce privilége. En suivant cette règle, on a dépouillé des adju dicataires d'immeubles vendus en justice, pour un précédent vendeur qu'ils avaient ignoré, et que sa négligence excluait du prix de leur adjudication. Suivant cette règle, un sous-acquéreur peut être dépouillé après un ordre de distribution en justice et le paiement des collocations. V. arréts cass., D., t. 28, p. 145. D., 1812, p. 62, et 1818, p. 84. - Hypoth. de M. Grenier, t. 2, n. 378, etc. Mais si le droit de résolution peut s'étendre aux tiers détenteurs sans le secours de l'inscription ni d'aucune notification, ne pourrait-il pas au moins s éteindre par la prescription de dix ou vingt ans? La Cour de Montpellier a jugé, le 29 mai 1827, « que l'action en résolution peut être exercée contre les tiers acquéreurs, aussi bien qu'elle pourrait l'être contre l'acquéreur primitif, qui n'a pas pu transmettre plus de droits qu'il n'en avait lui-même, et que la transcription, purgeant utilement les actions hypothécaires, ne purge pas l'action en résolution du contrat, qui peut être utilement exercée pendant trente ans. J. du 19e s., 1828, 2, p. 263. La Cour de Paris avait jugé auparavant, le 4 décembre 1826, « qu'une action résolutoire de cette nature peut toujours, à moins d'option pour le privilége, être exercée par le vendeur ou par ses ayantdroit, et qu'elle suit l'immeuble en quelques mains qu'il passe, indépendamment de tout privilége et toute hypothèque. On voit que l'art. 2265, relatif à la prescription par dix ou vingt ans, avec juste titre et bonne foi, ne s'applique évidemment qu'au possesseur qui acquiert, par laps de temps, la propriété vis-à-vis du véritable propriétaire, et non point à celui qui, ayant acheté du véritable propriétaire, voudrait se libérer par laps de temps du paiement de tout ou partie du prix, ou de toute autre charge ou redevance grevant son acquisition; que, dans ce dernier cas, on ne peut appliquer que l'article 2262, qui établit contre les actions, tant réelles que personnelles, la prescription de trente ans. >>> J. du 19 s., 1827, 2, p. 74. Cette décision a essuyé la critique des arrêtistes qui l'ont rapportée dans les recueils qu'on vient d'indiquer, et ce n'est pas sans quelque raison. Mais les auteurs de ces articles, confondant des choses qui nous semblent bien distinctes, font porter également leur critique sur notre première explication de l'art. 2557, et l'un d'eux la présente comme si elle établissait la même base que l'arrêt qu'il censure. Nous avons traité des droits soumis à la condition suspensive, qui ont déterminé la suspension de prescription de l'article 2257, et l'arrêt a statué sur un droit de résolution qui n'avait rien de suspensif. Aussi, dans les débats ni dans l'arrêt, l'on ne trouve pas un mot de cet article 2257. Il ne s'agissait pas de juger si la prescription avait été suspendue pour le tiers détenteur; il n'était question que de savoir laquelle des deux prescriptions de trente ans ou de dix ans ce détenteur pouvait invoquer. Au numéro précédent, nous avons rappelé notre première pensée sur l'art. 2257, et exposé les raisons qui peuvent faire douter de l'exactitude de la doctrine contraire. Ici nous examinons l'interprétation donnée par les Cours de Paris et de Montpellier aux articles 1654, 2182 et 2265. Si plus haut nous avons été fortement portés à conclure que les tiers détenteurs, avertis par une inscription, ne doivent pas prescrire contre la créance en suspens, nous penchons aussi fortement à croire que ces détenteurs ont le secours de la prescription de dix ou vingt ans contre les droits de résolution qu'on leur a laissé ignorer. Pour refuser au tiers détenteurla prescription de dix ans contre le droit de résolution du premier vendeur, on se fonde sur la maxime: Nemo plus juris in alium transferre potest quàm ipse habet. On ne peut, sans doute, conférer à d'autres des droits qu'on n'a pas soi-même ; et c'est ce qui a fait décider que les tiers acquéreurs sont soumis à la résolution aussi bien que l'acquéreur direct, puisqu'il n'a pu leur transférer que la propriété résoluble qui lui avait été cédée. Mais la maxime consacrée par l'art. 2182 ne s'applique point à la prescription. Celui qui ne peut conférer la propriété peut donner un titre pour fonder la possession et produire la prescription. Le simple possesseur de fait qui ne pourrait prescrire que par trente ans, et le détenteur précaire, qui ne pourrait prescrire par aucun temps, sont pourtant capables de conférer à toutes personnes un titre valable pour la prescription décennale. L'art. 2265 est conçu en termes généraux qui accordent à toutes personnes, comme dédommagement, la faculté d'acquérir, par la prescription de dix ou vingt ans, les choses qu'elles ont cru par erreur, mais de bonne foi, acquérir du véritable propriétaire et par un juste titre. V. suprà, nos 10, 158, 465 et 491. Mais on a dit que l'art. 2265 n'a trait qu'au titre donné par celui qui n'avait pas de droits, et qu'il ne doit pas protéger la disposition faite par le véritable propriétaire. Devant la Cour de Paris, l'avocat du tiers acquéreur crut voir une plaisanterie dans cette objection. L'arrêt l'a prise au sérieux. L'art. 2265, entendu sainement, a trait à la disposition faite au préjudice des droits d'un tiers, par la personne qui n'avait que des droits restreints ou résolubles, comme par la personne qui n'en avait d'aucune sorte. Comment refuser la prescription décennale au sous-acquéreur de bonne foi, muni d'un juste titre, contre la demande en résolution du premier vendeur? Cette demande tend à lui enlever la propriété; et l'objet de la loi, dans l'art. 2265, est de lui garantir cette propriété, après dix ou vingt ans de possession. Dira-t-on que l'action du vendeur n'est pas absolument réelle ; que d'anciens auteurs la déclaraient mixte; qu'elle n'attaque la chose qu'à cause du prix, et qu'en payant le prix, le détenteur peut conserver la chose? L'objection serait insignifiante. Purement personnelle ou purement réelle, l'action dépendrait également de la prescription décennale. Comme mixte, participant du personnel et du réel, l'action ne pourrait avoir plus de force contre la prescription que si elle tenait tout de l'un ou de l'autre de ces droits. On jugeait bien autrefois, dans certains pays du royaume, que l'action personnelle jointe à l'action hypothécaire, prorogeait à quarante ans la prescription, soit de dix ans, soit de trente ans; mais une règle aussi bizarre, rejetée en beaucoup d'autres lieux, n'a pas été adoptée par le code civil. V. suprà, n. 507. Suivant l'article 2180, combiné avec l'art. 2265, l'action hypothécaire se prescrit, à l'égard du tiers détenteur, par le laps de dix ans, à compter du jour où il a fait transcrire son contrat d'acquisition. D'après la disposition seule de l'art. 2265, letiers détenteur prescrit la propriété sans le secours de la transcription, par dix années de possession. Les arrêts qui ont appliqué la résolution contre les sous-acquéreurs, se sont accordés à dire que ce droit est différent de l'hypothèque, qui ne porte que sur la chose, et qui est soumis à des conditions rigoureuses, tandis qu'il est dans la chose, et qu'étant réel, in re, il est indépendant de toute transcription, et dispensé de toute inscription. Ainsi ces arrêts, loin de prouver contre la prescription décennale de l'art. 2265, témoignent pour elle, en signalant une recherche de propriété contre le tiers détenteur qu'elle protège. C'est bien assez que l'action résolutoire subsiste contre le sous-acquéreur, indépendamment de l'hypothèque durant dix années, sans aucun acte de la part du vendeur qui annonce ses droits au possesseur. Si l'attention du législateur s'était mieux fixée sur cette matière, il aurait affranchi les sous-acquéreurs de la résolution, ou bien il ne l'aurait placée qu'à la suite de l'hypothèque, en la soumettant aux mêmes conditions. Il est vrai ment fâcheux que la résolution puisse être réclamée par un ancien vendeur négligent, qui ne paraît qu'après la distribution du prix de la revente et le paiement des créanciers colloqués; mais puisqu'elle n'est pas une simple hypothèque, pour prescrire contre la résolution par le laps de dix ou vingt ans, il faut que la bonne foi se joigne au titre; il faut qu'en achetant, le tiers détenteur ait pu croire qu'il acquérait la propriété franche de charges envers un précédent vendeur. La bonne foi étant présumée de droit, il ne sera pas réputé en mauvaise foi, parce qu'il aura connu un premier contrat de vente qui ne portait pas la quittance du prix, si l'on voit d'ailleurs qu'il n'a payé le prix de sa propre acquisition à son vendeur direct, que parce qu'il lui a paru que celui-ci était quitte envers le précédent vendeur. Un arrêt de la Cour de Paris, rendu le 20 janvier 1826, avant celui qu'on vient d'examiner, est encore plus sévère; il a prononcé la résolution d'une vente, après différentes mutations successives, contre un troisième et un quatrième acquéreur, sans égard à leur possession paisible pendant vingt-six années, et à diverses circonstances, qui semblaient justifier la bonne foi. La première vente avait été faite par licitation aux enchères publiques. Suivant l'usage, le procès-verbal d'adjudication ne constatait pas le paiement du prix; mais il était en papier-monnaie de 1796, et les sous-acquéreurs ont pu le croire acquitté ; car tous les contrats de revente ont été suivis de lettres de ratification ou de transcription, sans opposition ni inscription de la part des premiers vendeurs. Les sous-acquéreurs ont bien cru la première adjudication acquittée; car tous les prix de revente ont été soldés et toutes inscriptions rayées. Cependant les vendeurs de 1796 ont prétendu, en 1822, qu'ils n'avaient pas été payés, et leur adjudicataire insolvable n'a rien contesté; il n'a même pas comparu sur la demande en résolution. Le tribunal de première instance l'a repoussée, comme prescrite; mais la Cour royale a jugé « que l'exception de prescription opposée, et fondée sur la possession de bonne foi, ne peut être admise, parce qu'ils ont connu, par les contrats d'acquisition, que leur auteur n'avait pas payé le prix de la vente, et que, dès lors, n'ayant possédé que sous la condition de ce paiement, ils sont restés soumis pendant trente ans aux effets de l'action résolutoire. » J. du 19e s. 1827, 2, p. 73. Dans cette affaire, où la bonne foi des sous-acquéreurs, présumée de droit, semblait démontrée par leurs procédés, une seule circonstance les a fait constituer en mauvaise foi. Leurs contrats ont rappelé le procès-verbal d'adjudication de 1796; et parce que ce procès-verbal ne constatait pas de paiement, l'arrêt déclara qu'ils avaient connu le défaut de paiement. Mais la quittance du prix total d'une vente ne se trouve pas toujours dans l'acte même de la vente. Les notaires sont dans l'usage, à Paris, d'indiquer, autant qu'il se peut, les mutations antérieures à celles dont ils font le contrat; mais ils ne visent pas les quittances détachées des actes de vente et qui souvent peuvent disparaître sans laisser de trace. Dans la plus grande partie du royaume, dans les campagnes surtout, les notaires ne rappellent pas plus les actes de vente antérieurs que les quittances. M. Grenier s'élève contre l'usage qui s'établit, d'exiger du vendeur d'un immeuble, avant de le payer, les quittances du prix de ventes antérieures du même immeuble. Il observe que cet usage présente des dangers; qu'il est pernicieux surtout aux habitans des campagnes, peu soigneux de la conservation des titres ; qu'une foule de quittances ne sont que sous seing privé, et qu'elles se montrent ou se suppriment au gré des intérêts divers. L'auteur demande jusqu'où l'on s'enfoncera dans le passé, pour chercher des ventes et des quittances; il montre qu'il n'y aurait pas de raison pour s'arrêter à trente ans en arrière de la dernière vente; que, par les suspensions et les interruptions, cent ans, et plus encore, pourraient ne pas fournir trente ans utiles à la prescription. La loi ne commande pas cette inquisition, et elle ne fait dépendre la présomption de bonne foi, pour le dernier acquéreur, que de la jus |