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ment du Prince Philippe Guillaume, foit en vertu de celui du Prince Maurice, il s'enfuit de là néceffairement, & il eft manifefte, que le propre Fideicommis du Prince Frederic Henri, fur lequel Sa Majefté de Pruffe fe fonde, ne peut s'étendre à ces biens là, en aucune maniere, & que ni fon fils le Prince Guillaume second, ni après lui qui mourut fans faire de Teftament, fon petit fils le Roi de la Grande Bretagne, en vertu de ce Fideicommis du Pere & de l'Ayeul, qui fut, fans contredit, univerfel, n'ont nullement été affujettis ni obligez à l'égard des biens qui leur font venus, non par fentence, ou par difpofition Testamentaire du Pere & de l'Ayeul, mais en vertu de Fideicommis d'autres, aux quels Fideicommis les Pere & Grand Pere ont été aflujettis. Ce que non-feulement le droit dicte clairement, mais auffi la raifon naturelle.

Si l'on objectoit à ce fentiment, qu'à prendre la chofe felon les regles, cela eft vrai; mais que fi la volonté du Teftateur eft affez manifeftement exprimée d'une autre maniere, & que l'héritier l'a ainfi reconnu, en prenant poffeffion des biens de la fucceffion, la difpofition du Teftateur

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fe pouvoit alors étendre auffi aux biens qui étoient dûs à l'héritier, en vertu du Fideicommis d'un autre.

Afin de refoudre cette objection, il faut examiner deux chofes; Premierement, fi dans le Teftament du Prince Frederic Henri, il paroît que, contre ce que dicte le droit & la raison, & même contre la bienféance, la volonté du Prince Teftateur auroit été de rendre illufoirs, & d'anéantir les Fideicommis que fes Freres avoient faits de leurs biens & d'une maniere digne de tels Princes. Et en fecond lieu, que pofé, fans qu'on en tombe d'accord en nulle maniere, que c'eût été là la volonté du Prince Teftateur; fi en ce cas cela auroit été en fon pouvoir. Il y auroit à ce sujet deux questions à difcuter, l'une de volonté & l'autre de faculté. Si l'une ou l'autre manque, favoir la volonté ou le pouvoir, il eft certain que le faux fuyant du Roi de Pruffe s'évanouit.

Mais l'examen de cette double queftion ne regardant pas cette illuftre Affemblée, on ne l'entreprendra point ici, parce que cela feroit non-feulement inutile, mais ennuyeux. Il fuffira donc d'alleguer feulement contre la prétenduë volonté, qu'ou

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tre qu'elle ne paroît en aucune maniere dans tout le Teftament du Prince, & fpecialement dans tout fon Fideicommis, qu'il ne faut que lire principalement pour cela, il n'y cft pas dit un mot, ni fait aucune mention des Fideicommis des Princes Philippes Guillaume & Maurice; mais qu'au contraire, il paroît affez ouvertement une volonté à cela tout oppofée, comme en tems & lieu on pourra le faire voir. Auffi ne peut-on nullement préfumer que le Prince Teftateur ait eu cette prétendue volonté, & ce pour plufieurs raifons, qui feront deduites ci après plus amplement; & entre autres, parce que par un tel pacte, le Prince Teftateur feroit préfumé avoir voulu rendre illufoire, contervenir & violer d'une maniere peu féante, la Tranfaction fufdite, qui fut faite folemnellement fous la foi & honneur de Princes, & qui, comme il a été dit, porte en propres termes, que chacun des tranfigeans pourroit difpofer librement de fes biens, & qu'ils ne fe mêleroient point des biens les uns des autres, ni ne s'y attribueroient aucun droit: ce que le Prince Teftateur certainement auroit fait, s'il avoit voulu rendre vains les Fideicommis de fes Freres; laquelle contravention & vio

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lation, non d'un Accord, mais de la foi & de l'honneur d'un Prince, ne peut pas être imputée au Prince Teftateur, & l'on ne peut préfumer telle chofe de lui, fans faire un tort inexcufable à fon illuftre nom & à fa mémoire.

De même, il fuffira auffi d'alleguer, contre la prétendue faculté, que quoi qu'il foit libre à un chacun de difpofer des biens d'un héritier, & que l'héritier en prenant poffeffion de l'héritage, foit obligé, par cela même, d'accomplir la difpofition du défunct; néanmoins cela n'a pas lieu à l'in fini, ni jufques à ce point, que l'héritier puiffe être chargé par le Teftateur de remettre à un autre plus qu'il n'aura reçu luimême par le Teftament: car le droit établit expreffément le contraire, à favoir qu'un héritier ne peut point être ainfi grevé; Sed quod excedit acceptum inutiliter relinqui, ne damnum fentiat ultra quod ad eum ex hereditate pervenerit. Or, fuivant cette propofition, cela auroit excedé, fi le Prin ce Teftateur avoit pû difpofer de biens, que lui-même n'a pû poffeder ni recevoir de fes Freres qu'avec la charge de Fideïcommis, fur tout, puis qu'on n'agit pas ici contre des Créanciers, qui tâchent de

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s'éxempter de dommage, mais contre de prétendus Fideicommiffaires, qui ne di fputent que pour le profit.

On s'affure donc, pour les Pupiles qu'il paroît affez clairement, par tout ce qui a été ici allegué, que le prétendu droit de Fideicommis de Sa Majefté Pruffienne fur les biens dont il s'agit, eft deftitué de tout fondement; ou du moins, on en a affez dit pour faire voir manifeftement que les Pupiles font fondez à le contester, & qu'il mérite bien que des Juges competens en connoiffent, fans que cette Illuftre Aflemblée s'en mêle, étant convenable qu'elle laiffe les chofes en leur entier, afin que les biens dont il s'agit retournent fous la Puiffance & l'adminiftration des Seigneurs Etats Generaux, comme Executeurs Teftamentaires, & reftent dans cet état, jusques à ce qu'il foit jugé, par qui il appartient, laquelle des deux Parties a le droit le mieux fondé. C'eft auffi le très jufte but de cet Ecrit, & ce qu'efperent, en toute confiance, de cette İlluftre Affemblée, des Pupiles qui ont perdu leur Pere par un accident fi funefte, & qui les rend fi dignes de compaffion.

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