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d'y penfer ou de fe fouvenir de ces derniéres paroles du Traité, on ne leur communiqua rien, & on traita de la Tranffylvanie avec la Porte comme d'un Païs Conquis.

Ce que je viens de dire fera connoître à toute perfonne qui voudra juger fans prévention le Droit inconteftable des Etats de Tranffylvanie, & l'injuftice criante qu'on leur a fait en les fubjuguant & en les dépouillant de leurs Droits & Libertez fous prétexte d'une Alliance Sainte & d'un Traité folemnel qui leur en affuroit la joüiffance. Mais quelques grandes que foient les violences qu'on leur a fait fouffrir, ces-violences ne donnent aucun Droit legitime fur eux à la Maifon d'Autriche; ils ont au contraire pour eux le Droit des Gens & celui de la Nature, dont une des Principales maximes eft; Que le Peuple eft toûjours en droit de réclamer contre une pareille oppreffion, & de rentrer dans la joüiffance de fes Anciens Droits quand il en trouve l'occafion favorable.

Cette occafion s'eft offerte aux Etats de Tranffylvanie, car le Prince Rakoczi ayant paru au fecours de fa Patrie opprimée, les Tranffylvains éprirent courage, & ne fongerent qu'à profiter de cette conjonctu

re pour se tirer de l'Esclavage. Les Etats fe de Transylvanie uferent ainfi l'an 1704. de leur pouvoir & de leur droit pour fe mettre. en Poffeffion de ce qui leur appartenoit, & d'autant que le Prince Abaffi étoit defcendu dû Thrône par une Renonciation indigne, ils y éleverent par une Election folemnelle conforme à leurs Droits & aux raisons folides qui les ont fait agir, & Proclamerent avec les folemnitez ordinaires & après les Sermens réciproques pour Prince de Tranf fylvanie, le Prince François Rakoczi Prince du Saint Empire & Duc des Etats Conféderez de Hongrie, &c. &c. &c.

Les Etats de Tranffylvanie pour s'affurer d'avantage leurs Libertez s'affocierent avec les Hongrois Conféderez, & convinrent de ne pas traiter féparement, c'eft pourquoi Sa Majefté Imperiale ordonnoit le 26. Mai 1705. au Prince de Lorraine & à fes Plenipotentiaires de travailler en fon nom à terminer les triftes effets de la Guerre avec les Confederez Hongrois & Tranffylvains leurs Chefs & leurs Principaux. Voici ce que ceux-ci joints ensemble demanderent par le fecond Article de leurs Propofitions: Que les intérêts de la Tranffylvanie foyent ajustez en ce qui regarde la libre Election de fes

Princes,fa feparation de l'obéiffance de la Maifon d'Autriche, & les autres points de fes Pretenfions & Libertez par une fatisfaction convenable en toutes chofes, tant à la fureté d'Hongrie qu'à l'Alliance des Transylvains avec ce Royaume.

Les Plenipotentiaires de Sa Majefté Imperiale y répondirent par des invectives qui contenoient :

1. Que la Tranffylvanie n'avoit jadis été qu'un Palatinat dependant de la Hongrie, qui par l'injure du tems s'étoit infenfiblement érigé en Principauté.

En fecond lieu qu'Elle avoit été délivrée du Joug des Infidéles par les Armes victorieufes de S. M. I.

En troifiéme lieu, que S. M. I. étoit convenue avec les Etats de cette Principauté, foutenant qu'ils ont approuvé & font contens de la forme de leur Gouvernement prefent, qui s'y eft peu à peu établi de leur confentement, que d'ailleurs ils ont annullé par une Contradiction folennelle & univerfelle les attentats de quelque féditeux.

En quatrième lieu, que fi l'on y appor toit quelque changement, on donneroit Atteinte au Traité de Carlowitz.

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En cinquième lieu, qu'il y avoit lieu de s'étonner que les Hongrois mêlaffent dans leurs Traitez fous le nom des Etats de Tranffylvanie, quelques féditieux qui cherchoient à fe fouftraire à la Domination de l'Empereur leur Seigneur & leur Maître, mais on offroit aux Tranffylvains Conféderez une Amniftie & Rétablissement. A peine fut-on informé de cette Reponse qu'il parut un Ouvrage Latin qui avoit pour titre, Animadverfiones Apologetica, où l'Auteur preffant avec beaucoup de force la Commiffion de l'Empereur fur cette matiêre, faifoit remarquer

Sur le Premier Article de cette Reponfe, Qu'il importoit peu que la Tranffyl vanie eut jadis été un Palatinat ou un Fief de la Couronne d' Hongrie, vû que depuis l'an 1530. jufques à nos jours, Elle avoit été reconnue pour Principauté par toute l' Europe, par l'Empereur même & par la Couronne d' Hongrie; que l'Empereur s'etoit obligé en vertu de la 12 Condition de fa Capitulation avec les Hongrois d'obferver la Conféderation faite avec la Tranffylvanie; que S. M. I. en convenant & ratifiant l'an 1686. & 1687. l'Alliance & les Traitez faits avec le Prince & les

Etats

Etats de Transylvanie, a reconnu leur Souveraineté, & l'affure en ces Termes Que ce Traité ne préjudiciera rien aux Droits du Prince, à l'Election de fon Fils, & à toutes les libertez de Tranffylvanie qui feront maintenuës.

Sur le fecond Article l'Auteur foutient, qu'il n'y a rien de plus oppofé à la Piété Chrêtienne & à la liaison des Societez humaines que de s'approprier une Principauté laquelle à la Priére de l'Empereur avoit figné un Traité d' Alliance folennelle pour agir conjointement avec Elle contre les Turcs: En effet, on ne peut pas s'imaginer qu'en faisant ce Traité les Tranflylvains ayent eu pour but de devenir la proye de la Maifon d'Autriche, puifqu'il devoit leur être fort indifférent d'avoir pour Maitre l'Empereur d'Orient ou celui d'Occident: Ils fe font donc uniquement proprofé, en contractant cette Alliance, de fe faire rendre en vertu du troifiéme Article ce qui fe trouveroit appartenir à la Prin cipauté, parmi les Conquêtes qu'on pourroit faire. Le même Auteur continue à demander fous quel couleur, fous quel prétexte, & avec quelle confcience l'Empereur prétend être maître de la Tranffylva

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