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N° VII.

Les Généraux en chef de l'armée Catholique et Royale de Bretagne, aux Français.

Les circonstances terribles qui agitent depuis long-temps notre malheureuse patrie, ne permettent plus à personne de demeurer incertain et flottant entre deux partis, d'hésiter entre la scélératesse et la vertu. Les prestiges qui pouvaient faire croire à quelques hommes trompés, qu'il était possible d'arriver au bonheur par le crime, et à la prospérité publique à travers les débris fumans du sang de leurs frères, sont dissipés. Les scélérats qui, sous une apparence de réformation, et sous le prétexte spécieux de soulager les peuples, sont parvenus à usurper les pouvoirs du gouvernement, forts aujourd'hui de la terreur que leur despotisme inspire, ont enfin levé le masque; ils n'ont plus besoin de dissimuler leurs perfides intentions.

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Le meilleur des rois lâchement assassiné; son auguste compagne et sa sœur, à qui ils n'avaient à reprocher que des vertus, trainées à l'échafaud; ses frères exilés et proscrits; sa famille entière abreuvée de douleur et d'humiliation; son fils, l'héritier du sceptre des Français, livré entre les mains d'un artisan grossier, plus méprisable par ses mœurs, qu'il n'est inepte par sa profession. Des millions de Français égorgés, toutes les villes du royaume transformées en autant de vastes prisons, qui engloutissent chaque jour des vieillards, des femmes et des enfans, qu'un air malsain et une nourriture empoisonnée, disputent au fer des bourreaux; des maris enlevés à leurs femmes ; les enfans arrachés des bras de leurs parens; les propriétés envahies; toutes les lois protectrices déchirées et foulées aux pieds; les autels détruits; les églises dépouillées et profanées; les ministres de la religion massacrés; une Saint-Barthélemi

perpétuelle qui s'exécute froidement et sans opposition; la France devenue un immense cimetière, où chacun contemple avec effroi la place qui l'attend; une morne stupeur resserrant tous les esprits et comprimant tous les cœurs : voilà le faible aperçu de l'horrible situation d'un royaume qui était eucore, il y a cinq ans, le plus puissant et le plus florissant de l'Europe. C'est donc ainsi que, sous les noms profanés de liberté, de justice et de vertu, on est parvenu à réduire un peuple généreux, mais trop crédule, sous le joug le plus révoltant, et au plus sanglant des esclavages. -Mais le moment de secouer vos fers est arrivé; Français ! osez vouloir être libres, et vous le serez. N'est-ce pas avec votre propre puissance qu'ils vous ont opprimés? Ressaisissez vos droits qu'ils ont méconnus, vos pouvoirs dont ils ont si indignement abusé; relevez vos autels, rappelez vos pasteurs, serrez-vous autour du trône sur lequel vous aurez replacé le jeune prince que la providence éternelle a destiné à régner sur vous; que vos églises, trop long-temps désertes, se remplissent; que les vœux des fidèles réunis invoquent la protection du ciel sur une si sainte entreprise; alors la vengeance divine qui a dû punir l'insouciance avec laquelle vous avez été spectateurs tranquilles des forfaits inouis, dont une longue indifférence vous rendrait les complices, s'étendra sur vos lâches ennemis; alors le Dieu qui veille sur cet empire, secondera vos desseins, et vous verrez reluire encore sur vos familles désolées, les jours de votre antique gloire et de votre première prospérité.

Les généraux et chefs de l'armée, etc., tant en leurs noms, qu'aux noms des fidèles sujets du roi, qui les ont honorés de leur confiance, déclarent:

ART. 1. Qu'ils sont armés pour le rétablissement de la religion catholique, apostolique et romaine; pour le maintien de la monarchie, pour la libération et le soulagement des peuples; pour le retour de la paix, de l'ordre et de la

tranquillité publics; qu'ils ne poseront les armes, qu'après avoir réduit les factieux, et puni les rebelles, qu'un retour sincère n'aura pas fait rentrer dans le devoir.

II. Ils font un appel général et solennel à tous les Français, et particulièrement à tous Bretons et habitans des provinces voisines, afin qu'ils aient à seréunirsous les drapeaux de la religion et du roi, à peine d'être réputés rebelles, et traités comme tels.

III. Seront aussi réputés rebelles et traités comme tels, 1. Le petit nombre de nobles qui, oubliant ce qu'ils sont, ne rougiraient pas de sacrifier à un vil întérêt, à la conservation de quelques propriétés, ou à leur sûreté personnelle, les devoirs que la religion, l'honneur et leur naissance leur imposent; 2°. Tous ceux qui, flottant entre deux partis, oseraient espérer de pouvoir garder une infâme neutralité, ou qui, par leurs propos pusillanimes, tendraient à détourner les fidèles sujets du roi de rejoindre l'armée; 3. Ceux qui, exerçant des fonctions à eux confiées par les usurpateurs, refuseraient d'en cesser l'exercice à la première sommation qui leur en serait faîte, ou les reprendraient après les avoir quittées; 4°. Ceux qui auraient la lâcheté de se refuser à celles qui leur seront confiées au nom du roi; 5°. Tous ceux des sujets du roi, en état de porter les armes, qui ne marcheront pas au premier ordre qui leur sera intimé par les officiers, chargés des commissions des généraux et chefs de l'armée catholique et royale; 6o. Ceux qui ne prêteront pas les secours de tous genres qui seront en leur pouvoir, lorsqu'ils en seront requis; 7°. Ceux qui continueront de porter les couleurs nationales, qui seront convaincus d'avoir prêté leur ministère pour replanter les arbres, signes de la rebellion, ou pour enlever les couleurs royales des lieux où elles auront été placées; 8. Toute ville, bourg ou village, dont les habitans, à l'approche de l'armée, quitteraient leurs foyers, cacheraient

leurs vivres, ou marcheraient contre elle, sans considération des principes qu'ils auraient professés, des services qu'ils auraient rendus, ou même de la violence qu'on aurait employée pour les y contraindre; 9°. Toute personne convaincue d'avoir exercé des dénonciations, des mauvais traitemens, ou des voies de fait envers les fidèles sujets du roi.

IV. La peine de la rébellion est la peine de mort et de confiscation, au profit du roi, de toutes les propriétés mobiliaires et immobiliaires.

V. Tous ceux qui desirent de secouer le joug de la tyrannie, et qui auront le courage de le manifester, trouveront, auprès de l'armée catholique et royale, sûreté, amitié et protection.

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VI. Toute personne qui, n'étant pas en état de porter les armes, en aura une ou plusieurs en sa possession, sera tenue de les remettre, ainsi que les munitions de tout genre qu'elle pourrait avoir, ès mains des officiers-commissaires, ci-dessus dénommés, lesquels délivreront des bons, de la valeur convenue à l'amiable, signés d'eux, qui seront acquittés dans le plus court délai.

VII. Lesdits commissaires sont autorisés à ouvrir des emprunts pour l'armement, équipement et subsistance des hommes qui se réuniront à eux.-Tous les fidèles sujets du roi sont invités à contribuer, suivant leurs moyens, pour remplir ces emprunts. Il leur sera pareillement délivré des bons, qui seront acquittés, incessamment avec l'intérêt, s'ils l'exigent.

VIII. Tous les receveurs et payeurs des soi-disant municipalités, districts, départemens, et autres détenteurs des deniers publics, sous quelque dénomination qu'ils soient, sont tenus de continuer leurs fonctions jusqu'à nouvel ordre. Il leur est défendu, à peine de rébellion, de

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se dessaisir des sommes qui sont entre leurs mains, et de les verser en d'autres que celles des trésoriers où commissaires de l'armée, duement autorisés, lesquels leur donneront des récépissés qui leur seront passés en compte.

Fait et arrêté au conseil, le 26 juillet 1794, Fan 2 du règne de Louis XVII.

Signé, le comté DE PUISATE, général en chef. Et quarante-trois autres généraux et officiers de l'armée.

FIN DES PIÈCES JUSTIFICATIVES.

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