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nion en faveur des demandes péremptoires que je lui adresse au nom de leurs majestés l'empereur et le roi de Prusse; et qui, en cas de refus, attireront immanquablement, sur ce royaume, naguère florissant, de nouveaux et plus terribles malheurs.

Le parti que la nation française va prendre, à la suite de cette déclaration, ou étendra ou perpétuera les funestes effets d'une guerre malheureuse, en ôtant, par la suppression de la royauté, le moyen de rétablir et d'entretenir les anciens rapports entre la France et les souverains de l'Europe; on pourra ouvrir la voie à des négociations pour le rétablissement de la paix, de l'ordre et de la tranquillité, que ceux qui se qualifient du titre de dépositaires de la volonté de la nation, sont les plus intéressés à rendre aussi prompte qu'il est nécessaire à ce royaume.

Au quartier-général de Hans, le 28 septembre 1792. Signé, CHARLES-FRANÇOIS, duc

de Brunswick-Lunebourg.

N° II.

Lettres-Patentes, données par le Régent de France, pour nommer un Lieutenant-Général.

LOUIS-STANISLAS-XAVIER, fils de France, oncle du roi, et régent du royaume, à notre cher frère, Charles-Philippe de France, comte d'Artois. Salut :

Le dieu de nos pères, le dieu de S. Louis, qui a si longtemps protégé la monarchie française, ne permettra certainement pas qu'elle soit entièrement détruite par les mains d'une troupe de factieux, aussi exécrables par leur impiété et leur audace, que par l'énormité des crimes qu'ils ont commis.

Le ciel, et c'est notre plus grande espérance, nous a sûrement destinés pour être les ministres de sa justice pour venger le sang du roi, notre frère, que ces monstres ont osé répandre avec la plus étonnante férocité. C'est donc pour placer notre neveu et souverain sur le trône de son père, pour le réintégrer et le maintenir dans la possession de tous les droits et prérogatives de sa couronne, que nous vous appelons, vous, Charles-Philippe de France, comte d'Artois, à notre aide et assistance.

Le premier acte de la régence dont nous nous sommes revêtus vous prouve, suivant le desir de notre cœur, l'entière confiance que nous avons en vous.

A ces causes, et pour ces honorables fins et motifs, nous vous avons nommé et constitué, par ces présentes, lieutenant-général des troupes de France; vous investissant de tous les pouvoirs qu'un régent de France peut déléguer, et particulièrement de celui de commander en notre absence, et en notre présence, sous notre autorité, les armées du roi. Bien entendu que tous les officiers de sa majesté, militaires ou civils, ainsi que tous les Français, sujets du roi, obéiront aux ordres donnés par vous, au nom du roi ou du régent de France. Et c'est notre plaisir que vous assistiez à tous les conseils-d'état, de justice ou d'administration et autres, qu'il sera jugé nécessaire d'établir, et que vous les présidiez en notre absence. Tous lesquels pouvoirs continueront pendant toute la durée de notre régence, à moins qu'ils ne soient restreints ou annulés par notre autorité.

En vertu de ces présentes, toutes lettres-patentes, délivrées dans la forme ordinaire, et adressées aux cours de justice du royaume, quand elles seront rétablies dans leurs ressorts respectifs, y seront vérifiées, enregistrées, publiées et exécutées.

Données à Ham, en Westphalie, sous notre seing et sceau ordinaire, et contre-signées par les maréchaux de

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Broglie et de Castries, nos ministres d'état, le 28 janvier 1793, et la première année du règne de sa majesté.

Signé, LOUIS-STANISLAS-XAVIER.

Contre-signé par ordre du régent de France:

Signé, le maréchal de BROGLIE, le maréchal de CASTRIES.

No. III.

Lettre écrite par Monseigneur le Comte D'ARTOIS, à M. te Maréchal de BROGLIE.

De Ham, le 11 janvier 1794.

Mon cœur est si vivement et si profondément affecté, mon cher maréchal, par l'état affreux où sont réduits mes dignes compagnons de fidélité et de malheur, et j'éprouve tant de retard pour obtenir les secours que le régent n'a pas cessé un instant de solliciter, que je n'hésite pas à remettre entre vos mains la dernière ressource que je tiens de la générosité de l'impératrice de Russie. Je n'ai pas besoin de vous recommander l'emploi que vous devez faire des fonds que vous vous procurerez par la vente des médailles et des diamans; non seulement je m'en rapporte à votre sagesse, mais vous savez que les plus malheureux et les plus souffrans sont, en ce moment pénible, les plus chers à mon cœur. - Je vous ai déjà parlé, mon cher maréchal, de l'extrême embarras où je me trouvais personnellement, mais je ne me compterai jamais pour rien, lorsqu'il s'agira de satisfaire les plus pressans besoins de mon cœur. En conséquence, je charge M. Duverne de vous remettre 300 louis pour subvenir aux premiers frais, et pour vous donner le temps de vendre au meilleur compte possible, les médailles et les diamans. J'ai la certitude que j'honore les dons de l'impératrice, en les employant à

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un usage aussi sacré ; mais je vous assure, mon cher maréchal, que mon intention formelle est que ce faible secours ne soit compté pour rien, ni pour les fonds qui sont déduits à la caisse de Dusseldorff, ni pour les justes demandes que vous aviez formées, au moment où nous espérions que l'emprunt de Hollande aurait du succès. Enfin, si je ne parvenais pas encore à obtenir les secours que je sollicite avec le plus d'ardeur que jamais ; et si je me trouvais alors dénué de tous les moyens personnels pour me porter où le service du roi l'exigerait, je conserverais une ressource précieuse dans le cœur des gentilshommes français : avec un tel appui, le chemin de l'honneur sera toujours ouvert pour moi. Ne tardez pas un instant, mon cher maréchal pour employer cette faible ressource; je serai trop récompensé si elle peut soulager une partie des excellens Français, auxquels toute mon existence est consacrée.

Recevez, mon cher maréchal, l'assurance de tous mes sentimens de confiance, d'estime et d'amitié.

Signé, CHARLes-Philippe.

P. S. Mes enfans possédaient une épée qui était un don de mon malheureux frère; ils vous l'envoient, mon cher maréchal, pour l'employer au même usage. Ils vous prient de leur donner en échange une des vôtres, pour les conduire plus sûrement dans la route de l'honneur, que vous avez si fidèlement et si glorieusement suivie.

N° IV.

Réponse de M. le Maréchal DE BROGLIE à la lettre de Monseigneur le Comte D'ARTOIS.

MONSEIGNEUR,

Dusseldorff, 18 janvier 1794.

Les émigrés français, rassemblés dans le cantonnement de Dusseldorff, ont voulu que je leur servisse d'interprète

auprès de votre altesse royale, pour lui rendre les sentimens dont ils ont été affectés, lorsque je leur ai donné connaissance de la lettre que vous m'avez, monseigneur, fait l'honneur de m'écrire, le 11 de ce mois, dans laquelle la sensibilité et la noblesse de votre âme, se peignent d'une manière si touchante.

Cette lettre a porté, dans tous les cœurs, l'attendrissement de l'admiration et de l'amour; et l'intérêt que vous daignez prendre à la situation fâcheuse de tous les bons et fidèles serviteurs, en adoucissant leurs malheurs, ne leur - Leur premier en fait sentir que plus vivement les vôtres. et unique mouvement, en apprenant l'usage que vous voulez qui soit fait du présent que vous avez reçu de l'impératrice de Russie; a été de demander qu'il leur fût permis d'envoyer quelques-uns de leurs membres, le reporter à votre altesse royale, et la conjurer, avec la plus vive instance, de conserver un gage si précieux de l'amitié de cette Je n'ai pu auguste souveraine. calmer ce sentiment si juste et si digne de répondre à celui de votre altesse, qu'en faisant connaître à ces généreux gentilshommes, que ce serait lui déplaire que de ne pas accepter les secours qu'elle daignait leur offrir, en les assurant que cette superbe collection ne serait point aliénée, et rentrerait en vos mains en des temps plus heureux.

Nous espérons, monseigneur, qu'ils ne sont pas éloignés; mais, quoi qu'il arrive, puisque nous trouvons en vous les sentimens que le grand Henri marqua toujours pour sa noblesse, votre altesse royale éprouvera, de sa part, la même fidélité et le même dévouement; et si elle ne peut plus vous offrir les ressources de ses biens et de sa fortune, elle prodiguera son sang et sa vie, et mettra son bonheur et sa gloire à périr, s'il le faut, sous vos yeux et avec vous. Mais la justice de la cause que vous défendez avec tant de fermeté et de constance, doit faire concevoir l'heureuse es

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