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Autrichiens, aux environs de Coblentz; et du 20 au 25, l'empereur et le roi de Prusse se rendirent dans cette ville. Le duc de Brunswick fut nommé généralissime des armées combinées, et fit une déclaration le 25 dudit mois de juillet, par laquelle il annonçait que le but principal était de faire cesser l'anarchie dans l'intérieur de la France, d'arrêter les attaques portées au trône et à l'autel, de rétablir le pouvoir légal, de rendre au roi la sû-reté et la liberté dont il était privé, et de le mettre en état d'exercer l'autorité légitime qui lui est due. Il assurait que les deux cours alliées ne se proposaient que le bonheur de la France, sans prétendre s'enrichir à ses dépens par des conquêtes, ni s'immiscer dans son gouvernement intérieur. Il menaçait la ville de Paris et tous ses habitans, sans distinction, d'une exécution militaire, et d'une subversion totale, s'ils faisaient la moindre violence, et le moindre outrage à leurs majestés le roi, la reine et la famille royale; et s'ils ne pourvoyaient immédiatement à leur sûreté, à leur conservation et à leur liberté, etc.

« Le 27 et 28 dudit mois, le roi de Prusse passa en revue les troupes qui s'étaient rendues aux environs de Coblentz. Ledit jour 28, le duc de Brunswick fit une déclaration (*) additionnelle à celle du 25, par laquelle il déclara en outre, que si, contre toute attente, par la perfidie ou la lâcheté

(*) Voyez le N° I" des Pièces justificatives de ce Journal.

de quelques habitans de Paris, le roi, la reine, ou toute autre personne de la famille royale étaient enlevés de cette ville, tous les lieux et villes quelconques qui ne se seraient pas opposés à leur passage, et n'auraient pas arrêté la marche, subiraient le même sort qui aurait été infligé à la ville de Paris, etc.; que la liberté du choix de sa majesté très chrétienne, pour le lieu de sa retraite, serait effectuée sous l'escorte que leurs majestés impériale et royale ont offerte, etc.

«

Quelques jours après, j'appris que l'armée du duc de Brunswich était en marche; que l'armée des princes commençait à défiler aux environs de Trèves, où devait être le camp que les MM. de Wittech se disposaient à s'y rendre.

Les émigrés étaient partagés en trois corps d'armée, savoir : l'armée du prince de Condé, qui était destinée à entrer en France par l'Alsace et à attaquer Strasbourg; celle des princes, appelée l'armée du centre, qui était à la suite du roi de Prusse, pour faire son entrée en France par la Lorraine, et qui devait aller à Paris directement, et celle du prince de Bourbon, fils du prince de Condé, qui devait pénétrer par les Pays-Bas et attaquer Lille en Flandre.

« Le 15 août, un aide-de-camp nous avait apporté, le matin, un ordre de partir le lendemain pour l'armée du prince de Bourbon, et nous devions retourner à Liége ou à Huy; mais le soir, il arriva un ordre des princes de nous rendre à Trè

ves, et de là au camp de Saint-Maximin; ce qui déconcerta notre capitaine.

« Nous partîmes le 18 de Trèves, vers les huit heures du matin pour Grevenmachen, ou Grevenmaker. L'armée des princes, qui y arriva en même temps que nous, avait, depuis trois semaines, campé deux fois à Saint-Maximin et Penbren, à trois ou quatre lieues de Trèves. La compagnie n'eut pas de tentes; elle coucha à la belle étoile, et fort heureusement la nuit ne fut pas mauvaise. Le 19, de Grevenmaker nous nous rendîmes au bourg de Statbredimus ou Bredemie. La pluie commença une heure après notre départ, fut abondante et rendit la marche pénible; notre compagnie n'eut pas encore de tentes ce jour-là, mais le lendemain. Ce camp tint dix jours.

Le 22, MONSIEUR nous annonça la prise de Longwy, en nous disant que les patriotes n'étaient pas si terribles, et qu'on en viendrait à bout. Ah! comme il se trompait dans son attente, qui fit éclater la joie et l'espérance sur tous les visages. Les princes visitèrent le camp deux fois, et le comte d'Artois avec ses deux fils, le lendemain de leur arrivée; on nous mit toutes les fois sous les armes devant nos tentes.

« Le 29, de Statbredimus à Roussy, par Rodemaker, petite ville fortifiée : c'est le jour de notre entrée en France. Nous nous mîmes en marche avec beaucoup de satisfaction, la joie la plus complète peinte sur tous les visages. Nous étions

tous, ou presque tous, persuadés que nous allions marcher directement sur Paris; que tous les obstacles seraient facilement levés; que les troupes de ligne n'attendaient que notre entrée, ainsi que les braves royalistes coalisés dans l'intérieur, et surtout en Bretagne, pour se joindre à nous. Le jour de notre entrée à Paris était même fixé.

« Le 30, de Roussy à Hettange, à une lieue et demie de Thionville. Le second ou le troisième jour de notre arrivée à Hettange, un détachement du bataillon breton avec d'autres détachemens des différens bataillons, fut commandé pour aller chasser les patriotes qui occupaient un château, proche nos postes avancés. Une très grande majorité des volontaires de ma compagnie, et j'étais du nombre, devait être de cette expédition. Nous fùmes assemblés devant nos tentes, et nous nous disposions à marcher, quand le contre ordre arriva.

« Le 4 septembre, vu que Thionville avait refusé de se rendre à la sommation des princes, une partie du camp (le bataillon en était ) partit pour se rendre à Mittrich, où était campée la division, commandée par M. le maréchal de Castries, et composée des troupes de ligne françaises, émigrées; j'y restai de la garde des chariots, vu que j'avais un talon tout écorché.

« Le 5, la colonne fut de Mittrich à Distroff, d'où à minuit elle approcha avec deux pièces de canon de dix-huit, que le commandant autrichien lui avait données, ainsi qu'une partie de

ses artilleurs pour attaquer Thionville, qui fut également canonné par les Autrichiens, campés du côté opposé à Distroff, et par le camp d'Hettange qui se trouvait au milieu. La canonnade, très vive de part et d autre, et surtout celle de Distroff, qui inquiéta beaucoup les patriotes, dura une heure et demie ou deux. A six heures du matin, la colonne retourna au château de Distroff, y passa la journée du 7, et le 8, revint à Mittrich, d'où, le 9, elle se rendit au camp d'Hettange.

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Deux ou trois jours après notre retour au camp, on fut sur le point d'attaquer de nouveau Thionville; mais, le soir de l'attaque, il arriva un courrier du roi de Prusse, pour défendre de rien entreprendre sur cette place. D'après cette conduite du roi de Prusse, il aurait mieux fait de refuser aux princes les deux pièces de canon de siége, qu'il n'avait accordées qu'à force de sollicitations, et qu'avec beaucoup de peine car nous n'avions que des pièces de campagne de quatre ou de six. On nous avait donné aussi un mortier ou deux qui ne purent servir, vu qu'ils ne portaient que sur les glacis.

Il y a eu dans les postes avancés quelques hommes tués et un officier de Saint-Malo. Un des généraux autrichiens, le prince de Waldeck, en visitant nos batteries, eut un bras emporté par un boulet de canon, et promit d'employer l'autre à rétablir le roi de France sur le trône. Jour et nuit

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