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Le Chevalier CHARETTE à M. BERNIER, Commissaire général de l'Armée catholique et royale.

J'ai appris avec une peine bien sincère la prise du général Stofflet: elle afflige tous les braves royalistes; aussi ils ne pensent qu'à venger sa mort. Permettez-moi de vous exprimer la joie que m'a causée votre nomination d'agent des armées royales auprès des puissances étrangères ; elle est d'autant plus vraie qu'elle est fondée sur vos connaissances, votre caractère et votre parfait dévouement pour la cause que nous défendrons jusqu'à la dernière goutte de notre sang. M. Duchénier vous fera part de ce que nous avons arrêté; au surplus je vous prie d'être persuadé que je consentirai toujours avec plaisir à tout ce qui pourra être agréable à la cause.

J'ai l'honneur d'être avec un sincère attachement, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur,

Le chevalier CHARETTE.

FIN DE LA CORRESPONDANCE DE CHARETTE.

INTERROGATOIRE DE CHARETTE.

Nous avons cru devoir joindre à la correspondance du général vendéen l'interrogatoire qu'il a prêté devant le capitaine rapporteur du conseil militaire du 4e bataillon de l'Hérault, par lequel il fut condamné à mort le 29 octobre 1796.

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INTERROGATOIRE prêté devant nous Pierre Perrin, rapporteur près le Conseil militaire du 4 bataillon de l'Hérault, désigné par le général Duthil, pour faire les fonctions de rapporteur dans le jugement du nommé CHARETTE, chef des Vendéens, détenu dans la maison d'arrestation du Bouffai, à Nantes, ainsi qu'il suit :

Demande. Quel est votre nom, votre âge et vos qualités ? Réponse. François Athanase Charette de la Contrie, âgé de trente-trois ans, natif de Couffé, département de la Loire - Inférieure, lieutenant de vaisseau avant la révolution, et à présent lieutenant-général nommé par S. M. le roi Louis XVIII, et, en dernier lieu, chef de l'armée royale de la Vendée.

D. Qui vous avait nommé chef de l'armée royaliste de la Vendée ?

R. Louis XVIII.

D. Par quelle voie et à quelle époque avez-vous reçu cette nomination ?

R. Qu'il ne se rappelle pas précisément de l'époque; mais qu'il croit que c'est depuis environ sept mois, et par la voie de M. Lefebvre, émigré, employé au service de l'Angleterre, et qu'au surplus on peut connaître précisément la date de

ladite nomination au moyen des papiers qui ont été pris sur lui le général Travot.

par

D. Vous étiez donc en relation directe avec Louis XVIII?

R. Que c'est par le canal du comte d'Artois qu'il reçut ladite nomination, et qu'il n'avait point de relation directe avec Louis XVIII.

D. Votre correspondance avec le comte d'Artois était-elle bien active ?

R. Non.

D. Quelle était le but de cette correspondance?

R. Que c'était pour lui faire connaître l'état de son armée. D. Cette correspondance existait-elle depuis long-temps? R. Elle existait depuis environ huit mois.

D. Avant l'époque où votre correspondance avec le comte d'Artois a commencé, à qui rendiez-vous compte de la situation de votre armée, et dans quel dessein faisiez-vous la guerre?

R. Qu'il ne rendait aucun compte à personne, et qu'il avait en vue de procurer à la France un gouvernement monarchique.

D. Ne vous étiez-vous pas soumis aux lois de la république, lors de la pacification qui eut lieu à Nantes?

R. Que par le traité qu'il avait fait avec les représentans du peuple, il s'était soumis aux lois de la république. D. Pourquoi avez-vous ensuite repris les armes contre elle ?

R. Parce que la république avait placé des postes dans l'intérieur du pays qui était sous ses ordres, et parce que les républicains avaient marché contre l'un de ses chefs de division, et enlevé un autre, ainsi que plusieurs commandans de paroisses.

D. Puisque vous étiez soumis aux lois de la république, et que vous étiez rentré sous l'obéissance de ses lois, vous, ne deviez point vous formaliser de ce que le gouvernement

républicain exerçait sa surveillance dans le pays de la Vendée ?

R. Qu'il ne s'était soumis au gouvernement républicain qu'autant qu'il n'établirait aucun poste dans l'intérieur de son armée, et qu'il lui laisserait la surveillance du pays insurgé, comme chef de la garde territoriale qui devait se former d'après le traité, et qu'il n'a rompu les engagemens que lorsque le gouvernement a eu rompu les siens envers lui.

D. N'avez-vous pas fait plusieurs prisonniers dans l'intervalle de la pacification, et ne les avez-vous pas fait ensuite fusiller?

R. Que non, pendant la pacification; mais qu'il en a fait au moment et après la déclaration de guerre.

D. Quels sont les moyens que vous aviez pris pour débaucher les troupes républicaines?

R. Qu'il n'en avait pris aucun.

D. Pourquoi, dans la proclamation que vous fites en recommençant la guerre, avez-vous taxé de mauvaise foi les représentans du peuple, que vous dites avoir traité avec yous, ainsi que le général Canclaux ?

R. Que c'est parce que les représentans du peuple, Ruelle et quelques autres, ainsi que le général Canclaux, lui avaient fait entrevoir dans la conversation, au moment de la pacification, qu'un état de paix serait plus favorable, et conduirait plus tôt à ce but de son parti, ce qui n'ayant pas lieu, il s'est cru autorisé par la suite de les accuser de l'avoir trompé.

D. Aviez-vous quelques articles secrets, traités avec les représentans du peuple?

R. Qu'il n'en avait point par écrit ; qu'il n'y avait eu que des conjectures tirées de l'état du gouvernement, alors divisé, et que ces conjectures avaient d'autant plus de vrai

semblance qu'elles étaient étayées de l'opinion d'hommes revêtus de la confiance publique.

D. Pourquoi avez-vous cherché à persuader, dans votre proclamation, que les représentans du peuple vous avaient livré des armes et des munitions de guerre ?

R. Que c'est parce que le représentant Ruelle avait fait délivrer des sabres à quelques-uns de ses officiers, et parce qu'il lui était facile de se procurer des poudres à Nantes, à raison du peu de surveillance qui y existait alors.

D. Vous êtes-vous procuré une grande quantité de munitions à l'époque de la pacification?

R. Qu'il s'est procuré à peu près quatre à cinq cents livres de poudre.

D. Quelles sont les personnes qui vous ont procuré, à Nantes, une si grande quantité de poudre?

R. Qu'il ne sait point quelles sont les personnes qui lui procuraient cette poudre; qu'il remettait de l'argent à des individus de son armée qui lui rapportaient la poudre.

D. Dans quelle intention vous pourvoyiez-vous ainsi de munitions de guerre?

R. Que c'était par prévoyance, et pour être en état de se défendre, dans le cas où il serait obligé de reprendre les

armes.

D. Quels sont les moyens que vous avez employés pour opérer, depuis la pacification, des rassemblemens nombreux dans la Vendée ?

R. Que c'est en mettant en pied son armée, et au moyen de sa proclamation.

D. N'avez-vous pas forcé, à main armée, les habitans paisibles à reprendre les armes ?

R. Que non.

D. N'avez-vous pas connaissance que quelqu'un de vos

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