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PUBLIC LIBRART A B 335351

BLE

Du mois de Mars

I-79 0.

TILDEN FOUNDAT.s

ASTOR, LEPOX D

1003

T

ERS.

Suite de la Veillée.

Lettre de l'Abbé Rayna!. ́ 15

Variétés,

32

40

Charade, Enig. & Logog. 14 Théatre de la Nation.

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A Paris, de l'Imprimerie de MOUTARDA rue des Mathurins, Hôtel de Cluni.

DE FRANCE.

PIÈCES FUGITIVES EN VERS ET EN. PROSE.

MA PROFESSION DE FOI EN CUISINE, Epitre à ma Coufine ( 1 ). ̧

ENFIN, mon aimable Coufine,

J'ai rencontré cette Ifabeau,
Cette Virtuofe en cuisine ;

Son talent fans doute eft fort beau

Pour dédommager de fa mine,

Que je n'ai pas vue auffi fine

Que dans votre indulgent tableau.

On m'affure que l'Ifabelle

Entend fort bien le fricandeau,

Et le civet, & la rouelle ;

(1) Nous avons cru que ce badinage, cette folie, fi l'on veut, ne paroîtroit pas hors de propos dans les circonstances préfentes, qui femblent amener le befoin de dérider un peu les Mules Fraugoifes

A

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Qu'elle fait faire à l'a'oyau
Une fauce toute nouvelle :
On dit fur-tout que fon talent
Eclate principalement

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Dans les poulets en fiicaflée....
Ce point arrête ma pensée.
Hélas! facile à prévenir,
Sans en demander davantage
A mon fort je viens de l'unir
Pour vingt & quatre écus de gage.
Ainfi je vais couler mon temps
A l'abri de ma Cuifinière.
La blanquette & la buyandière
Me diftrairont quelques inftans.
Je fais qu'un préjugé barbare
A toujours fiétri ces deux plats;
Mon choix aux hommes délicats
Paroîtra bourgeois & bizarre ;
Mais moi', qui n'en rougirai pas,
Dans mon très-modefte ménage
Libre, paifible & bien foigné,
Je vais vivre & manger en fage
De deux plats, & pas davantage,
Mais où rien ne foit épargné.
Fi de cette chair importune
Qui femble nourrir par- ·les yeux !
Faifons comme nos bons aïeux,

Qui du pot & de fa fortune

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Vivoient bien, & s'en portoient mieux;

Chaffons à jamais de nos tables
Ces plats favamment déteftables,
Enfans du luxe & de l'orgueil,
Qui fort agréables à l'œil,
A l'eftema: infupportables,
Nous acheminent au cercueil
Par des coliques honorables.
J'aime mieux un tendie gigot
Qui fans pompe & fans écalage,
Se montre avec un entourage
De laitue ou de haricot."

Gigot, recevez mon ́hommage :
Souvent j'ai dédaigné pour vous,
Chez la Baronne ou la Marquife,
La poularde la plus exquise,
Et même la perdrix aux choux.
J'ai vu dévorer fans envies,
Er des pâtés de Périgueux
Et des coulis ingénieux

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Quand un Cuifinier trop barbare,
Par un artifice bizarre,

Ne vous cachoit pas à mes yeux

Je le déclare fans rystère :

Je ne fais rien dire à demi ;

!

Oui, jufqu'au bout de ma carrière,

Gigot, vous ferez mon ami.

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Mais foyons juftes; Dieu me garde
De vouloir jarais outrager

Des chofes bonnes à manger !
Je rends juftice à la poularde,
Et je refpecte un bon canard :
Un levreau bien piqué de lard
Eft une chofe auffi fort bonne ;
Car il ne faut fâcher perfonne;
Et jamais le fiel n'affaisonne
Mes écrits fimples & fans fard.
Mais en tout j'aime la Nature ;
Je blâme fans rémiffions
Ces dangereufes mixtions,
Ces fauces à prétentions,
Et ces viandes qu'on défigure
Par de folles inventions.

Je prévois bien que mes maximes
Seront de véritables crimes
Aux yeux des favans marmitons ;
Qu'ils vont crier au facrilege....
Le Cuisinier François, ô Ciel !
N'eft-il pas un livre immortel ?
Le Roi féant en fon Confeil
A pourtant mis fon privilége
A ce livre fi criminel...

Je le fais; mais j'ai le courage,

Dûr tout Paris crier haro,

De n'en pas moins blâmer l'ouvrage :
Vitam impendere verò,

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